3. Des conditions de stockage hétérogènes
Le « stock national santé » est, aujourd'hui, réparti sur près de 72 sites aux statuts juridiques nombreux.
Comme l'a indiqué le ministère de la santé à votre rapporteur spécial, le périmètre géographique privilégié des plans de réponse aux différentes menaces sanitaire est la zone de défense. Si le critère de proximité par rapport à ce périmètre a prévalu pour le positionnement des stocks stratégiques de produits de santé, dans nombre de cas, les volumes en cause ainsi que les contraintes de délai de mise à disposition, n'ont cependant pu le permettre. C'est pourquoi, certains produits acquis antérieurement à la création de l'EPRUS et, ensuite, par son intermédiaire, ont été stockés dans des établissements dont le statut et les liens contractuels avec l'EPRUS varient fortement.
Ainsi, les représentants de l'EPRUS ont-t-ils indiqué à votre rapporteur spécial que :
- les produits dont le volume excédait les capacités locales de stockage (masques) ou dont l'urgence de mise en place le permettait (antiviraux, vaccins) ont été stockés dans des établissements pharmaceutiques de fabrication ou de distribution ;
- un certain nombre de produits, en particulier les antidotes, ont, quant à eux, été répartis dans des établissements de santé désignés comme « sites référents », qui, à la demande du ministère de la santé, ont, eux-mêmes, procédé à une sous-répartition dans d'autres établissements de santé, dits « sites secondaires » ;
- quant au stockage des masques FFP2, il a été fait appel à tous les acteurs précités, ainsi qu'à des organismes de sécurité civile relevant du ministère de l'intérieur (les établissements de soutien opérationnel et logistique (ESOL)) ;
- enfin, le service de santé des armées (SSA) du ministère de la défense stocke également une partie du « stock national santé » (vaccins, Tamiflu et masques).
Les différents sites de stockage du « stock national santé »
Prestataires |
Nombre de sites |
Nature des produits |
Prestataires privés |
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PHARMALOG |
2 sites |
Antibiotiques, antiviraux, seringues, collecteurs d'aiguilles |
AEXXDIS |
7 sites |
Antibiotiques, masques FFP2, masques chirurgicaux |
ROCHE |
1 site |
Antiviraux |
FAMAR |
1 site |
Antiviraux |
GEODIS |
1 site |
Antiviraux |
NOVARTIS |
1 site |
Vaccins |
MORY |
2 sites |
Masques FFP2 |
SANOFI |
1 site |
Vaccins |
Etablissements publics liés par accords ou conventions |
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Service de santé des armées du ministère de la défense |
3 établissements de ravitaillement sanitaires Pharmacie centrale des armées |
Vaccins, antiviraux, matériel d'injection |
Ministère de l'Intérieur |
1 établissement soutien opérationnel et logistique (ESOL) |
Matériel d'injection |
Etablissements de santé |
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Zone de défense - Est |
Référents : CHU Nancy, CHU Strasbourg Sites répartition secondaire : hôpitaux Dijon, Reims, Besançon |
Sites référents : antibiotiques, antiviraux, antidotes et masques FFP2 Sites secondaires : antidotes, masques FFP2 et, pour certains, antiviraux |
Zone de défense - Ile-de-France |
Référent : AP-HP Sites répartition secondaire : hôpitaux Necker, Kremlin Bicêtre, Henri Mondor |
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Zone de défense - Nord |
Référent : CHRU Lille Sites répartition secondaire : hôpitaux Amiens, Arras, Dunkerque, Valenciennes, Roubaix |
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Zone de défense - Ouest |
Référents : CHRU Rouen, CHRU Rennes |
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Zone de défense - Sud |
Référents : AP-HM Sites répartition secondaire : hôpitaux Montpellier, Nice, Perpignan, Bastia, Ajaccio |
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Zone de défense - Sud-Est |
Référents : Hospices civils de Lyon Sites répartition secondaire : hôpitaux Clermont-Ferrand, Grenoble, Saint-Etienne |
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Zone de défense - Sud-Ouest |
Référent : CHU Bordeaux Sites répartition secondaire : hôpitaux Toulouse, Limoges, Poitiers |
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Zone de défense - Réunion |
Référent : Hôpital Guyon, Saint Denis Sites répartition secondaire : hôpitaux Saint Martin et Saint Benoit |
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Zone de défense - Antilles |
Référent : CHU Fort de France Sites répartition secondaire : CHU Pointe à Pitre |
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Zone de défense - Guyane |
Référent : centre hospitalier de Cayenne Répartition secondaire : répartiteur pharmaceutique |
Source : commission des finances, à partir des données du ministère de la santé et des sports
Votre rapporteur spécial s'est rendu sur trois types de sites de stockage : un prestataire privé, Pharmalog à Val-de-Reuil, la Pharmacie centrale des armées à Orléans qui dépend du ministère de la défense, et l'Agence générale des équipements et produits de santé (AGEPS), service général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP).
Ces déplacements ont permis à votre rapporteur spécial de constater plusieurs sources de difficultés :
- le suivi, tout d'abord, complexe des stocks induit par la dispersion des sites de stockage : les systèmes d'information, variables d'un établissement à l'autre, ne sont en effet pas reliés à l'application informatique de l'EPRUS. Par ailleurs, certains produits ou équipements de santé, pourtant complémentaires - seringues vides et doses de vaccins par exemple - ne sont pas systématiquement stockés sur les mêmes sites, ce qui peut rendre complexe la coordination des acheminements des produits en cas d'urgence sanitaire ;
- les conditions, ensuite, très hétérogènes de conservation des produits : si le service de santé des armées (SSA) ou le groupe Pharmalog, spécialisé dans le stockage de produits pharmaceutiques, semblent correspondre aux niveaux d'exigence requis, votre rapporteur spécial a, en revanche, été surpris par les conditions de stockage du site de Nanterre de l'AP-HP (identification peu satisfaisante du stock relevant de l'EPRUS, difficultés dans le contrôle des variations de température, saisie manuelle des entrées et sorties des produits relevant du « stock national santé »). Sophie Albert, directrice du site, a d'ailleurs indiqué à votre rapporteur spécial qu'une rénovation du site était aujourd'hui envisagée ;
- enfin, la communication entre l'EPRUS et certains de ses prestataires de stockage ne semble pas encore pleinement satisfaisante , même si l'apparition du risque pandémique paraît avoir intensifié les échanges entre ces différents acteurs. Ainsi, a-t-il été, par exemple, indiqué à votre rapporteur spécial que l'AGEPS, qui dépend de l'AP-HP, avait décidé de passer certaines commandes de produits dès l'apparition des premiers cas de grippe A/H1N1, ne sachant pas que l'EPRUS allait approvisionner le site quelques jours plus tard. De même, a-t-il été pris la décision de procéder à la livraison de traitements antiviraux après l'hospitalisation d'élèves d'une école primaire du XV e arrondissement de Paris, sans en informer a priori l'EPRUS. Si votre rapporteur spécial comprend que l'urgence à agir ait motivé cette décision, il s'interroge néanmoins sur un éventuel risque de confusion dans la chaîne de décision si ce type de décisions se multipliait pendant le « pic » pandémique.
Ces exemples témoignent, en tout état de cause, des progrès à réaliser dans l'association des acteurs locaux dans la mise en oeuvre des plans d'urgence . Une clarification des responsabilités, ainsi que des moyens d'intervention propres à chacun des acteurs, au sein d'un cahier des charges précis - qui existe déjà pour certains prestataires - apparaît nécessaire le plus rapidement possible.
Eu égard à ces difficultés, ainsi qu'au coût élevé du recours à des prestataires extérieurs - 13 millions d'euros en 2009 -, les représentants de l'EPRUS ont indiqué à votre rapporteur spécial qu'un contrôle de qualité des sites de stockage est actuellement mené et qu'un schéma directeur de stockage est en cours d'élaboration , comme le préconise, d'ailleurs, l'article 3.5 de la convention-cadre précitée fixant les relations entre l'Etat et l'EPRUS.
Le principe d'une centralisation accrue des stocks de l'EPRUS sur deux ou trois sites semble aujourd'hui acquis. Un projet de construction d'un ensemble de trois hangars de stockage d'une surface de 10.000 m 2 au profit de l'EPRUS , sur le site de l'établissement de ravitaillement sanitaire des Armées de Vitry-le-François, a ainsi été présenté au conseil d'administration de l'établissement le 30 juin 2009. Selon l'EPRUS, cette opération d'un montant évalué à 29,9 millions d'euros s'avérerait rentable dès la fin de l'amortissement de l'investissement, permettant ainsi une économie annuelle, après amortissement, comprise entre 4 et 5 millions d'euros 68 ( * ) .
Sous réserve d'un examen approfondi, votre rapporteur spécial accueille favorablement cette décision qui devrait permettre de réduire les coûts de stockage actuels, pallier certaines difficultés rencontrées aujourd'hui par l'EPRUS en termes de qualité des conditions de stockage, ainsi que de faciliter les études menées, en collaboration avec l'AFSSAPS et l'APAVE, sur l'extension des durées de péremption de certains produits.
* 68 Note de présentation en vue du conseil d'administration de l'EPRUS le 30 juin 2009 transmise par l'EPRUS.