D. LA PÊCHE FRANÇAISE À L'HEURE DES CHOIX

1. Le diagnostic du rapport Poséidon : un secteur en difficulté

Le rapport Poséidon de décembre 2006 a analysé la situation du secteur de la pêche en France 25 ( * ) . Il l'a décrite comme « rattrapée par des enjeux nouveaux », « à l'heure des choix » , « la seule approche sectorielle, qui suppose une politique de soutien aux structures, aux armateurs et aux équipages [étant] insuffisante ».

a) L'analyse du cadre international et européen

Il estimait que les études internationales convergeaient pour constater :

- le plafonnement des prises malgré un effort de pêche croissant,

- surtout l'insuffisante application des réglementations régionales destinées à ramener les pratiques à des quotas optimaux, desservant le pêcheur raisonnable et encourageant une pêche illégale qui, pour certains stocks, est plus importante que la pêche autorisée,

- la part croissante de l'aquaculture dans la satisfaction des besoins, provoquant des problèmes collatéraux comme la pression sur les espèces minotières 26 ( * ) , les pollutions locales et la contamination des espèces sauvages.

Le rapport relevait également le risque croissant de contamination des produits de la mer par les polluants terrestres entraînant des dangers lors de leur consommation.

Au niveau européen, la modernisation constante des capacités de pêche depuis 30 ans avait, selon le rapport, progressivement entraîné la surexploitation d'une grande partie des principaux stocks halieutiques disponibles dans les eaux communautaires. « La politique commune des pêches n'a pas réussi jusqu'ici à endiguer cette tendance lourde ».

De ce fait, le rapport constatait : « Une grande partie du secteur est ainsi actuellement en rupture de rentabilité économique, situation aggravée par l'augmentation constante du coût des carburants . La viabilité même, à court et moyen termes, des entreprises de pêche est donc menacée » .

Face à cette situation, il relevait que la Commission européenne « impose à juste titre des contraintes toujours plus importantes et de plus en plus de limitations de pêche » provoquant des conflits avec les professionnels et entre professionnels du fait de la pénurie. Le rapport en concluait qu'une « véritable politique européenne des pêches » devait être volontariste et sera nécessairement difficile à assumer par les États .

Le rapport Poséidon notait le cas particulièrement topique de la négociation des TAC et quotas en fin d'année qui donne de l'Europe « une image déplorable » et qui conduit la Commission à accepter des compromis « précaires et parfois inapplicables ».

Depuis plusieurs années la Commission cherche d'ailleurs à s'assurer de la bonne application par les États de la réglementation des pêches, tant le respect des règles communes est le point de départ incontournable de toute politique des pêches , grâce à la création d'une Agence communautaire de contrôle des pêches (ACCP) et la multiplication des missions d'inspections communautaires.

Le rapport concluait :

« L'aléa des décisions annuelles centrées sur la gestion des stocks pénalise aujourd'hui l'ensemble des acteurs de la filière . L'idéal serait donc que les modèles scientifiques puissent déboucher sur des préconisations pluriannuelles intégrant les perspectives économiques.

« Sans cela, les décisions sur la pêche restent le fruit de la rencontre conflictuelle des préconisations scientifiques, des inquiétudes économiques et des enjeux politiques conjoncturels dans un négociation européenne annuelle âpre. C'est le passage à la gestion durable qui rendra la rentabilité possible et induira un climat européen rasséréné. La question centrale est la trajectoire, non tendancielle, pour arriver à des conditions plus profitables (reconstitution du potentiel des stocks halieutiques, adéquation des forces de pêche) .

« A cet égard, [...] les nécessités économiques de changement de la pêche [sont] : équilibrer la flotte de pêche par rapport aux ressources exploitées, la faire évoluer techniquement vers l'utilisation d'engins plus sélectifs, vers plus de sécurité, et améliorer l'encadrement de l'accès aux pêcheries ».

* 25 P. 52 et suivantes, rapport du groupe Poséidon,Une ambition maritime pour la France,Centre d'analyse stratégique et Secrétariat général à la mer, Paris, La documentation française, n°5-2006, 160 p.

* 26 Espèces ciblées de la pêche industrielle afin notamment de fabriquer des farines et des huiles de poisson.

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