CHAPITRE I : LE MOYEN TERME AU DÉFI DE LA CRISE ÉCONOMIQUE
Les prévisions à court terme sont, plus que jamais, marquées par une forte incertitude due à l'ampleur des effets sur l'économie réelle de la crise financière en cours depuis l'été 2007. En conséquence, les prévisions des principaux instituts de conjoncture, ainsi que les estimations présentées par le gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009, sont déjà dépassées.
A court terme, l'impact réel de la crise financière dépendra, en premier lieu, de ses effets sur le crédit et de l'ampleur des effets de richesse négatifs subis par les ménages et par les entreprises. Il dépendra également de la crédibilité de l'action des banques centrales et de la capacité des Etats à rétablir la confiance dans le système financier et à limiter l'ampleur du « credit crunch », ce qui suppose de restaurer rapidement des conditions normales de financement de l'économie mais aussi de contrecarrer les enchaînements dépressifs à l'oeuvre dans l'économie réelle.
Pour la fin 2008 et pour 2009, les conjoncturistes tablent, non sans nuances, sur un ralentissement de l'activité aux Etats-Unis et en Europe, tandis que la croissance des plus grands pays émergents résisterait mieux. Pour la France, ils s'attendaient encore, en septembre 2008, à une croissance de 1 % en 2008 et de 0,8 % en 2009.
Toutefois, les prévisions infra-annuelles de l'INSEE 2 ( * ) tablaient sur une récession au cours des trois derniers trimestres de l'année 2008 , si bien que l'acquis de croissance pourrait être négatif en fin d'année.
Dans ce contexte, la prévision de croissance du gouvernement associée au projet de loi de finances pour 2009 (1 % à 1,5 %), déjà plus optimiste que la moyenne, se révélait plus volontariste qu'elle ne pouvait le paraître. Le gouvernement a, au moment du bouclage du présent rapport (le 6 novembre 2008), annoncé une révision de cette prévision. Il juge désormais plus vraisemblable que la croissance française soit située entre 0,2 % et 0,5 % en 2009.
Ces nouvelles estimations du gouvernement s'inscrivent dans un contexte où les prévisions les plus récentes ont accru le pessimisme :
- le Fonds monétaire international 3 ( * ) prévoit une croissance à - 0,5 % en France en 2009, après 0,8 % en 2008 ;
- la Commission européenne 4 ( * ) anticipe une croissance nulle en France en 2009, après 0,9 % en 2008.
Elles sont assez proches du « scénario de crise » que votre délégation a demandé à l'OFCE de simuler pour mesurer les effets d'un dynamisme économique moins favorable que celui escompté par le gouvernement à court et moyen termes.
I. ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL : RALENTISSEMENT OU RÉCESSION ?
L'environnement international s'est considérablement assombri au cours des six derniers mois, du fait de la crise en cours.
D'ailleurs, tous les enchaînements négatifs de cette crise ne sont pas encore pris en compte dans les prévisions disponibles .
A. RETOUR SUR LA CRISE FINANCIÈRE
La crise s'est manifestée par de multiples défaillances d'institutions financières, avant de toucher les marchés boursiers. Elle a déclenché la mise en oeuvre tardive de mesures d'urgence.
1. Le déroulement de la crise
L'incertitude sur l'ampleur des pertes liées à la crise du crédit hypothécaire américain a créé un climat de défiance qui s'est traduit par des difficultés de financement pour les banques. Celles-ci ont eu raison de plusieurs établissements : chute de la banque britannique Northern Rock, puis de Bear Sterns, faillite de Lehman Brothers.
Institutions financières : une déroute sans précédent depuis 1929 - Septembre 2007 : faillite puis nationalisation (en février 2008) de la banque britannique Northern Rock ; - Mars 2008 : sauvetage par la Fed, puis rachat par JP. Morgan Chase, de la banque américaine Bear Sterns ; - Septembre 2008 : faillite des banques Lehman Brothers et Washington Mutual, rachat de Merrill Lynch par Bank of America et de Wachovia par Wells Fargo, sauvetage par l'Etat américain de l'assureur AIG (American International Group) et des organismes de refinancement hypothécaire Fannie Mae et Freddie Mac ; en Europe, Dexia est sauvée grâce à l'intervention des pouvoirs publics français et belges, Fortis est reprise par BNP-Paribas et les pouvoirs publics nationaux interviennent en faveur de plusieurs institutions notamment en Allemagne (Hypo Real Estate) et en Angleterre (RBS, HBOS, Lloyds TSB). |
La crise bancaire s'est doublée d'une crise des marchés boursiers , particulièrement aiguë au cours du mois d'octobre 2008. En raison de la dégradation des perspectives macroéconomique, ce krach boursier s'est poursuivi, en dépit de la mise en oeuvre de mesures de sauvetage du système bancaire .
* 2 Point de conjoncture : « La croissance cale en zone euro » (INSEE, 3 octobre 2008).
* 3 Prévision en date du 6 novembre 2008 (mise à jour des Perspectives de l'économie mondiale d'octobre 2008).
* 4 Prévision en date du 3 novembre 2008.