N° 453

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 9 juillet 2008

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur l' éducation prioritaire dans les académies de Créteil et de Versailles ,

Par M. Gérard LONGUET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin , vice-présidents ; M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Mme Marie-France Beaufils, M. Roger Besse, Mme Nicole Bricq, MM. Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Christian Gaudin, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.

avant-propos

Mise en place en 1981, la politique d'éducation prioritaire a été constamment réaffirmée par les gouvernements successifs et étendue. Relancée en 2006, elle représente aujourd'hui un coût d'environ un milliard d'euros par an et concerne près de 20 % des collégiens .

En dépit de l'importance de l'effort financier réalisé, les mesures prises en matière d'éducation prioritaire ne font pas l'objet d'une évaluation et d'un suivi satisfaisants. Cette situation a amené votre rapporteur spécial à se rendre dans deux établissements - le collège Paul Eluard à Garges-lès-Gonesse et le collège Gérard Philippe à Aulnay-sous-Bois - des académies de Versailles et de Créteil qui accueillent 25,3 % des élèves situés en éducation prioritaire en métropole.

Ces deux déplacements ont mis en évidence les changements rendus possibles par les moyens supplémentaires ainsi dégagés . Leur optimisation dépend de la qualité et de l'engagement des équipes pédagogiques et du chef d'établissement. Ce contrôle « sur pièces et sur place » a également souligné le rôle primordial des collectivités territoriales en la matière.

De façon plus générale, il a révélé la nécessité de mener une réflexion sur l'articulation des politiques publiques relatives à l'éducation et à la ville.

I. L'ORGANISATION DE L'ÉDUCATION PRIORITAIRE DEPUIS 2006

Mise en place quelque peu dans l'urgence en 1981, la politique de l'éducation prioritaire a depuis été constamment réaffirmée par l'ensemble des gouvernements.

Cette création s'inscrit dans le contexte des politiques menées au début des années 1980 en vue de réduire les inégalités et de promouvoir l'égalité des chances. Il s'agissait, dans le cadre de l'éducation nationale, de substituer au principe républicain d'égalité formelle la notion d'équité afin de mieux répondre aux inégalités constatées : plus les écarts sont grands entre une zone de non-réussite et une zone banale, plus les efforts d'adaptation du service public pour réduire la situation d'inégalité doivent être importants.

Le ministre de l'éducation nationale d'alors, Alain Savary, explicite ainsi ce choix : « La politique des zones prioritaires est née, d'une part, de la conviction que notre système éducatif doit répondre aux besoins de formation de tous les enfants d'âge scolaire et, d'autre part, du constat des inégalités devant l'école dues à la grande diversité des milieux sociaux et culturels. Le souci de la formation des élèves en difficulté scolaire m'a conduit à définir une politique de priorité pour les zones défavorisées. La démocratisation du système éducatif et la lutte contre les inégalités sociales doivent se concrétiser par davantage de moyens et surtout par une plus grande attention pour ceux qui en ont le plus besoin » 1 ( * ) .

Embryonnaire au début des années 1980, elle s'est peu à peu étoffée au fil des relances politiques et des retours du terrain. La carte de l'éducation prioritaire n'a cessé de s'étendre : aujourd'hui, environ 20 % des collégiens sont scolarisés dans le cadre de l'éducation prioritaire, contre moins de 10 % en 1982.

A. FÉVRIER 2006 : LA TROISIÈME RELANCE DE L'ÉDUCATION PRIORITAIRE

La réforme de mars 2006, lancée par M. Gilles de Robien, alors ministre de l'éducation nationale, a été mise en place en partie pour répondre aux violences urbaines d'octobre 2005 . Elle s'est largement appuyée sur le rapport des inspections générales relatif à la contribution de l'éducation prioritaire à l'égalité des chances des élèves 2 ( * ) .

1. Une nouvelle architecture

a) Une ré-organisation de la carte de l'éducation prioritaire : la création des réseaux ambition réussite (RAR) et des réseaux de réussite scolaire (RRS)

Suite au rapport ci-dessus cité, le ministère distingue dorénavant trois niveaux d'éducation prioritaire :

- Education prioritaire 1 (EP1), ou réseaux ambition réussite (RAR) : les établissements de ces 253 réseaux concentrent les plus grandes difficultés et disposent à ce titre de moyens supplémentaires. La carte de l'EP1 fait l'objet d'un pilotage national . Elle s'appuie sur les critères suivants :

- plus de deux tiers de catégories socioprofessionnelles défavorisées ;

- des résultats de vingt points inférieurs à la moyenne aux évaluations à l'entrée en sixième ;

- des retards scolaires supérieurs à deux ans à l'entrée au collège ;

- le nombre de parents bénéficiaires du revenu minimum d'insertion ;

- le nombre d'enfants ayant des parents non francophones.

18 collèges ne se trouvant pas en éducation prioritaire ont pu faire leur entrée dans ce dispositif.

Il convient de noter que le label « Ambition réussite » peut également, depuis la rentrée 2007, être accordé à certains lycées .

- Education prioritaire 2 (EP2) ou réseaux de réussite scolaire (RRS) : ces établissements caractérisés par une plus grande mixité sociale , continuent à recevoir les mêmes aides qu'auparavant. La liste des établissements en EP2 est arrêtée au niveau académique .

- Education prioritaire 3 (EP3) ou réseaux de réussite scolaire : ce niveau concerne les établissements qui sont appelés à sortir progressivement du dispositif dans un délai de trois ans à partir de la décision si les conditions sont remplies. Les moyens sont adaptés en fonction du nombre d'élèves restant en difficulté. A ce jour, d'après les informations communiquées par le ministère de l'éducation nationale aucun établissement n'est inscrit en EP3. Le classement d'établissements en EP3 est délicat : il pourrait, en raison de la diminution progressive des moyens qu'il induit, être vécu comme une « sanction » au moment même où ces établissements commenceraient à réaliser des progrès.

b) Un pilotage renouvelé par le renforcement de la contractualisation et des partenariats

La réforme de mars 2006 de l'éducation prioritaire prévoit en outre la constitution pour chaque réseau d'un comité exécutif , organe de pilotage du réseau. Le comité exécutif est constitué du principal du collège unité de référence du réseau, du principal adjoint, de tous les directeurs des écoles maternelles et primaires rattachées et éventuellement de l'inspecteur de l'éducation nationale de la circonscription.

Le comité exécutif « prépare, harmonise et régule les mesures destinées à faire vivre le réseau et rend compte de son activité aux conseils d'administration de l'établissement, aux conseils d'école et aux autorités académiques ».

Le coordonnateur de zone d'éducation prioritaire (ZEP) devient le secrétaire de ce comité exécutif, notamment chargé de préparer les décisions et de les mettre en oeuvre. Un contrat ambition réussite pour les réseaux ambition-réussite et un contrat d'objectifs scolaires pour les réseaux de réussite scolaire se substituent aux précédents contrats de réussite. Ces contrats, conclus pour une durée de quatre ans , s'articulent avec les projets des établissements.

Un projet de réseau fixe les orientations et les objectifs pédagogiques de même que les modalités pour les atteindre. Des conventions de partenariat peuvent être signées avec une institution culturelle, un complexe sportif de haut niveau, un laboratoire d'université, un organisme de recherche ou une personnalité reconnue.

Les contrats ambition réussite et les contrats d'objectifs scolaires s'appuient ainsi désormais davantage que par le passé sur une logique d'objectifs et de moyens, ce qui devrait améliorer le pilotage des établissements bénéficiant des dispositifs d'éducation prioritaires.

2. Les moyens budgétaires de la relance traduits dans les lois de finances pour 2007 et 2008

Les lois de finances initiales pour 2007 et 2008 ont traduit les moyens supplémentaires attribués à l'éducation prioritaire dans le cadre de la relance engagée en 2006. Ces moyens supplémentaires concernent les réseaux ambition réussite.

Ils représentent 86,1 millions d'euros pour l'année scolaire
2006-2007 :

- 52,7 millions d'euros au titre du recrutement de 1.000 enseignants « expérimentés » afin de mieux structurer les équipes pédagogiques, développer l'accompagnement des jeunes enseignants et mettre en place les programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE) ;

- 33,4 millions d'euros au titre du recrutement de 3.000 assistants pédagogiques pour le soutien scolaire .

Ces moyens ont été reconduits lors de la loi de finances pour 2008, celle-ci prévoyant en outre, dans le cadre de la mise en oeuvre de l'accompagnement éducatif dans l'éducation prioritaire, le recrutement de 1.000 assistants pédagogiques au 1 er janvier 2008 pour un coût de 23 millions d'euros.

* 1 Discours du 13 juillet 1983 de M. Alain Savary, alors ministre de l'éducation nationale.

* 2 Rapport n° 2006-076 de l'Inspection générale de l'éducation nationale et de l'inspection générale de l'administration et de la recherche, octobre 2006.

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