DEUXIÈME PARTIE - ANTICIPER LES EFFETS DU VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION ET CONSTRUIRE LE CINQUIÈME RISQUE
I. TROIS DÉFIS MAJEURS À RELEVER...
L'organisation et la mise en place du cinquième risque doivent être pensées au regard de trois défis à relever :
- le défi démographique , celui du vieillissement de la population, qui peut paraître le plus évident ;
- la nécessité d' améliorer les dispositifs actuels de prise en charge de la dépendance des personnes âgées , en particulier sur le plan qualitatif ;
- enfin, l'ardente obligation d'insuffler plus de lisibilité dans le schéma institutionnel de prise en charge et de fluidifier les relations, pour le moins complexes, entre les nombreux acteurs de cette politique publique.
A. PRENDRE EN COMPTE LES EFFETS STRUCTURELS DE LA DÉFORMATION DE LA PYRAMIDE DES ÂGES
Comme le montrent les travaux récents de la Cour des comptes, du centre d'analyse stratégique et de la mission confiée à Hélène Gisserot, anticiper l'évolution de la dépendance et de son coût pour la collectivité au cours des prochaines décennies demeure un exercice difficile. Cette démarche suppose de prendre en compte le poids des facteurs démographiques, mais aussi des pathologies médicales.
Au total, la perspective d'une augmentation des besoins apparaît comme une certitude à moyen et long termes. Mais certaines des hypothèses sur lesquelles reposent les travaux prospectifs disponibles sont relativement incertaines. La mesure de l'ampleur du phénomène suscite donc toujours un débat parmi les experts.
1. Le lien réel mais difficile à quantifier entre le vieillissement de la population et la montée du nombre des personnes en situation de perte d'autonomie
Les grandes tendances de l'évolution démographique de notre pays font l'objet d'un consensus général : le processus de vieillissement de la population, à l'oeuvre depuis la fin des années soixante, ne peut en effet que se traduire par une déformation durable de la structure de la pyramide des âges. Les personnes de plus de soixante-cinq ans devraient ainsi représenter 25 % de la population française en 2030 et même 29 % en 2050, contre 16 % aujourd'hui. En outre, ce sont les classes d'âge les plus élevées parmi les seniors qui devraient connaître la plus forte augmentation, comme le montre le graphique de la page suivante.
Source : Insee première n° 1092 - juillet 2006.
Le doublement, d'ici 2050, de la proportion des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans au sein de la population française ne manquera pas d'avoir une incidence majeure sur la problématique du dossier de la dépendance. En effet, même si la perte d'autonomie peut survenir à tout moment, la probabilité d'entrer en état de dépendance s'élève fortement avec l'âge, en particulier entre quatre-vingts ans et quatre-vingt-dix ans. La croissance du nombre de personnes âgées dépendantes ne devrait toutefois pas être strictement proportionnelle , dans la mesure où l'espérance de vie en bonne santé s'accroît aussi. S'il existe un lien réel entre le vieillissement de la population et la prévalence de la dépendance, il est, en pratique, difficile à quantifier.
Le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a, à titre indicatif, évoqué devant la mission 101 ( * ) une croissance du nombre de personnes dépendantes d'environ 1 % à 1,5 % par an jusqu'en 2040.
Cette augmentation ne devrait pas être linéaire , en raison de la succession de classes nombreuses, nées dans les années vingt, et de classes creuses, nées entre le milieu des années trente et le début des années quarante, avant que n'intervienne le « baby-boom » de l'après-guerre. On devrait ainsi observer deux fortes accélérations , l'une - qui est en fait en cours - entre 2007 et 2016, et l'autre entre 2030 et 2040 102 ( * ) . Les effets du premier de ces deux « pics » seront particulièrement perceptibles d'ici à 2012, avec entre 160 000 et 300 000 bénéficiaires supplémentaires de l'Apa. Cette tendance, qui n'avait sans doute pas été suffisamment anticipée lors des travaux préparatoires du plan Solidarité-Grand Age, devrait se traduire par un surcoût de 500 millions d'euros à cette échéance.
* 101 Audition du 16 janvier 2008.
* 102 « Perspectives financières de la dépendance des personnes âgées à l'horizon 2025 : Prévisions et marges de choix » - Hélène Gisserot - op. précité - page 26.