2. La décision n° 2006-544 DC du 14 décembre 2006 du Conseil constitutionnel
Le 14 décembre 2006, le Conseil constitutionnel, à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, a précisé son interprétation de la recevabilité des amendements parlementaires au regard de l'article 40 de la Constitution (décision n° 2006-544 DC).
Le Conseil constitutionnel a ainsi estimé que deux des douze dispositions considérées comme « cavaliers sociaux » auraient dû, de surcroît, être déclarées irrecevables dès leur dépôt pour cause d'aggravation d'une charge publique . Les deux articles en question étaient en effet issus d'amendements présentés par nos collègues sénateurs.
Rappelant sa jurisprudence en la matière, notamment les décisions n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005 sur la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale et n° 2005-526 DC 1 ( * ) du 13 octobre 2005 sur la Résolution modifiant le Règlement de l'Assemblée nationale, il a estimé que la règle du « préalable parlementaire », c'est-à-dire la condition d'une invocation de la question de l'irrecevabilité financière devant la première assemblée saisie, était « subordonnée, pour chaque assemblée, à la mise en oeuvre d'un contrôle de recevabilité effectif et systématique au moment du dépôt de tels amendements ». Il a alors souligné qu'« une telle procédure n' [avait] pas encore été instaurée au Sénat ».
En outre, selon Les Cahiers édités par le Conseil constitutionnel, cette « inflexion » ou ce « durcissement » de la jurisprudence se limitait volontairement aux deux « cavaliers sociaux » mentionnés mais aurait pu aboutir à la censure d'« une bonne vingtaine d'articles ».
Le Conseil constitutionnel a donc appelé à un contrôle de recevabilité effectif et systématique au moment du dépôt de l'amendement.
3. La nécessité d'un changement de pratique pour ne pas fragiliser l'initiative sénatoriale
La décision du Conseil constitutionnel du 14 décembre 2006 ne pouvait rester sans réponse du Sénat et de sa commission des finances, en ce qu'elle faisait peser un risque supplémentaire d'inconstitutionnalité sur certaines dispositions adoptées par la Haute assemblée.
En effet, jusqu'à cette décision, le Conseil constitutionnel n'appréciait pas d'office la recevabilité financière des amendements en vertu de la règle du « préalable parlementaire », qui suppose que la question de la recevabilité ait été soulevée en première lecture devant la première assemblée saisie.
Toutefois, le sens de cette décision, qui avait valeur « d ' avertissement » de la part du Conseil constitutionnel , était clair : tant que le Sénat ne mettrait pas en oeuvre un contrôle de recevabilité effectif et systématique au moment du dépôt, la règle du « préalable parlementaire » ne s'appliquerait plus aux amendements adoptés et le Conseil constitutionnel pourrait les invalider, même si l'article 40 n'avait pas été invoqué au cours des débats.
* 1 « ... qu'ainsi pourra être vérifié, dans le cadre des procédures d'examen de la recevabilité financière qui doivent s'exercer au moment du dépôt d'un amendement, la conformité de celui-ci à la Constitution ».