2. Les gains de la coordination confirmés dans les faits
De très nombreux travaux empiriques ne valident pas l'idée d'une inefficacité des politiques budgétaires de relance qui fonde la thèse de l'inutilité de la coordination des politiques budgétaires.
Au contraire, ils mettent en évidence ce que la considération des principaux traits économiques qu'offre la réalité de la zone euro laissent présager : l'existence d'importantes externalités non seulement des politiques budgétaires, mais aussi, plus largement des politiques économiques de soutien de la demande au sein de cette zone et, partant, l'utilité de la coordination des politiques économiques.
a) L'efficacité des politiques de demande est démontrée
Les données empiriques montrent que les approches théoriques condamnant les épisodes de relance de la demande et, inversement, préconisant des politiques de contraction budgétaire ont peu d'écho auprès des gouvernements .
Ainsi, par exemple, le nombre d'épisodes de contraction budgétaire relevés par les différentes études disponibles est faible, comparé aux possibilités d'occurrence.
Surtout, la proportion des épisodes de contraction budgétaire qui furent expansionnistes est modeste et, plus encore, lorsqu'on s'intéresse à des cas où les conditions monétaires sont restées inchangées .
Pour l'UE-14, Giudice et al . (2003) trouvent que sur 49 épisodes de consolidation, 24 ont été expansionnistes . Le nombre de « cas purs » où la contraction budgétaire s'est accompagnée d'une accélération de l'activité sans qu'une baisse des taux d'intérêt réels entre l'année précédant l'ajustement et celle le suivant ne soit intervenue est encore plus faible. 11 « cas purs » sont dénombrés.
Encore faut-il souligner qu'à l'examen, dans ces dernières hypothèses, des variables exogènes ont favorisé l'expansion des pays concernés.
En réalité, l'efficacité des politiques de pilotage de l'activité économique, quand celui-ci s'impose 8 ( * ) est abondamment démontrée , même quand on s'inscrit dans le contexte contemporain de mondialisation.
Celui-ci peut bien réduire l'effet des politiques conjoncturelles, il ne les annihile pas, et les rend plus nécessaires.
Les valeurs du multiplicateur dans les modèles qui sont construits sur des enchaînements qui n'intègrent pas les limitations théoriques néoclassiques sont positives , comme le montrent les exemples suivants empruntés aux modèles Mosaïque et Mimosa.
HAUSSE PERMANENTE DE 1 POINT DE PIB DE LA CONSOMMATION PUBLIQUE DANS LES SERVICES
(Ecart en % au compte central)
Source : OFCE
Une augmentation permanente de 1 point de PIB du niveau de la consommation publique dans les services augmente la production d'un montant supérieur au choc des dépenses. Elle exerce un effet positif sur la consommation et l'investissement que la dégradation du commerce extérieur limite sans l'effacer.
Le tableau ci-après confirme l'efficacité des relances budgétaires même s'il rend compte d'une, légère, érosion de cette efficacité.
EFFET À 5ANS D'UN CHOC DE 1 POINT DE PIB DES DÉPENSES PUBLIQUES RÉALISÉ EN...
Source : Calculs OFCE, Mosaïque
Le multiplicateur des dépenses publiques passe de 1,49 (à une augmentation des dépenses publiques de 1 point de PIB correspond une augmentation de la production de 1,49 point de PIB) à 1,35 entre 1987 et 1995.
Incidemment, on peut remarquer que le tableau ci-dessus montre aussi que, du fait de son impact sur la production, la relance budgétaire est largement autofinancée. A une augmentation des dépenses publiques de 1 point de PIB correspond ex post une dégradation du déficit public limitée à 0,34 point de PIB du fait des « retours » de l'augmentation de la production sur les comptes publics.
* 8 Contrairement aux théories classiques ou à celles empruntées à l'Ecole de Chicago (du « Public Choice ») qui condamnent, systématiquement, les politiques de relance, les théories qui en défendent l'utilité ne prétendent pas que celle-ci est par principe vérifiée. Elles sont fondées sur une « casuistique » économique qui ne doit pas être caricaturée.