II. LE POIDS DES ALÉAS SUR L'ÉVOLUTION DU COMMERCE EXTÉRIEUR
Les résultats du commerce extérieur français sont d'autant plus décevants qu'ils ont été obtenus dans une période de forte croissance du commerce mondial (+ 6,7 % par an en moyenne entre 1999 et 2008).
GRAPHIQUE N° 5
Source : World Economic Outlook, octobre 2007
Les performances de la France en matière d'exportations (croissance en volume) ont été inférieures à la moyenne de l'ensemble des pays de la zone euro à partir de 2003 (graphique n° 6), mais elles ont souffert, jusqu'en 2006, d'un décalage conjoncturel, notamment avec l'Allemagne (graphique n° 7).
GRAPHIQUE N° 6
Source : World Economic Outlook, octobre 2007
GRAPHIQUE N° 7
Source : World Economic Outlook, octobre 2007
En ce qui concerne plus particulièrement notre voisin d'outre-Rhin qui est, en même temps, notre premier partenaire commercial, la forte reprise de ses importations, depuis 2003, puis l'accélération sensible de sa croissance, en 2006 (+ 2,9 %) n'ont eu qu'un effet limité sur les résultats de nos échanges.
Certes, le rythme de l'augmentation en volume de nos exportations s'est sensiblement accéléré (passant de + 3,2 % en 2005 à + 6,2 %), mais il est resté inférieur, en 2006, à celui de nos importations (+ 8,5 %), et le déficit de la France a continué de se creuser.
La faiblesse du dollar par rapport à l'euro, l'atonie de la demande intérieure allemande, de 2002 à 2006, et les chocs pétroliers fournissent des explications convaincantes à nos difficultés même si certains font valoir que l'exemple de l'Allemagne montre qu'il est possible de concilier un excédent commercial important (5,3 % du PIB), un euro fort et une accélération du rythme de l'activité économique .
Cette dernière vision semble mésestimer la singularité de la situation économique de l'Allemagne, engagée dans une politique de désinflation compétitive qu'il serait dangereux de généraliser en Europe et dont l'insertion dans la mondialisation présente des caractéristiques structurelles qui lui sont propres.
Il reste qu'en plus des conditions conjoncturelles, la bonne santé de nos échanges extérieurs semble suspendue à des mesures structurelles .
En particulier, face à la mondialisation, la capacité d'innovation d'un pays comme la France doit progresser pour jouxter la « frontière technologique ».
A. LES RISQUES MACROÉCONOMIQUES PESANT SUR LE SCÉNARIO CONVENTIONNEL
Un certain nombre d'aléas peuvent affecter le scénario de moyen terme. L'évolution du solde extérieur de la France dépend en effet d'un certain nombre de facteurs :
• En premier lieu,
l'évolution du prix
des matières premières et, notamment, du pétrole, est
déterminante
(voir chapitre I du présent
rapport)
. En 2005, la détérioration du solde des
transactions courantes est provenue, pour moitié, de l'alourdissement de
la facture énergétique qui a alors représenté
près de 2,5 % du PIB. En 2006, cette facture
énergétique a empêché que la balance des
transactions courantes ne se redresse (
supra
). Certes,
l'appréciation de l'euro a pour effet de limiter l'effet négatif
sur l'activité de la hausse du prix du brent (-0,6 point en 2006,
puis -0,4 point en 2007 et -0,2 point en 2008 d'après l'OFCE).
Mais, il s'agit là de considérations à relativement
brève échéance et, de plus, il n'est pas
nécessairement indiqué de combattre le mal par le mal.
• En deuxième lieu, la
compétitivité française pourrait être
également affectée par des
fluctuations du taux de change
euro/dollar
. D'après les prévisions de l'OFCE, ce taux
de change s'apprécierait jusqu'au deuxième semestre 2008 (le
seuil de 1,5 dollar pour un euro serait atteint) pour s'établir en
moyenne à 1,44 dollar sur l'ensemble de l'année 2008.
A l'horizon 2012, le dollar demeurerait vulnérable, du fait de l'ampleur des déficits extérieurs américains, malgré une légère amélioration, perceptible en 2007. Or, si le dollar se dépréciait fortement, la compétitivité-prix française vis-à-vis de l'extérieur de la zone euro serait affectée. Le coût des approvisionnements hors zone euro, et notamment la facture pétrolière, diminuerait cependant. Quoi qu'il en soit, la question de l'émergence d'une véritable politique de change dans la zone euro se pose avec de plus en plus d'acuité ( cf. chapitre IX ).
• En troisième lieu, la croissance et la
compétitivité-coût relatives de la France pourraient
être affectées par la
poursuite de politiques de
désinflation compétitive
à l'intérieur de
la zone euro. En effet, on peut craindre que la stratégie de
compétitivité poursuivie par l'Allemagne, grâce à la
modération salariale et la diminution des cotisations sociales, ne soit
imitée par d'autres pays
64
(
*
)
. La France elle-même s'interroge sur
l'opportunité d'une « TVA sociale ». Ces politiques,
pour rentables qu'elles puissent être à court terme pour les pays
qui les engagent (et qui en acceptent l'éventuel coût social),
sont de nature foncièrement non coopératives car elles
pèsent sur le commerce extérieur des pays qui ne les pratiquent
pas et compromettent les anticipations de croissance de l'ensemble de la zone
économique concernée. Elles pèsent ainsi sur la croissance
à moyen terme.
* 64 L'Espagne, par exemple, dont le déficit extérieur atteint près de 10 % du PIB, mais qui bénéficie d'un excédent budgétaire, pourrait ainsi diminuer la fiscalité à la charge des entreprises pour améliorer sa compétitivité.