III. DÉSIGNER LES BONNES CIBLES POUR LA RÉALISATION DES ÉCONOMIES
Deux principes doivent guider la politique d'économies du gouvernement, désormais baptisée « revue générale des politiques publiques », ou « revue générale des programmes » :
- orienter la recherche d'économies là où les dépenses sont les plus importantes ;
- identifier les causes de l'augmentation de la dépense dans le passé pour la maîtriser à l'avenir.
Deux traits caractérisent aujourd'hui l'économie générale de la dépense publique . Elle est, d'une part, composée d'abord par la dépense de sécurité sociale. Elle est, d'autre part, essentiellement composée par des dépenses d'intervention, des prestations et des transferts.
Sur 957 milliards d'euros de dépenses publiques en 2006, 428 milliards d'euros étaient consacrés à la sécurité sociale, contre 335 milliards d'euros au titre des dépenses de l'Etat . C'est dire qu'une revue générale des finances publiques efficace sur un plan budgétaire devra concentrer la majorité des efforts sur la rationalisation de la dépense des administrations de sécurité sociale .
Répartition des 957 milliards d'euros de
dépenses publiques
entre administrations en 2006
(en milliards d'euros)
Source : ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique
En outre, la dépense publique est à 53 % consacrée aux interventions, prestations sociales et transferts , certes financés pour l'essentiel par la sécurité sociale, mais gérés aussi, pour une partie substantielle, par l'Etat. La masse salariale des administrations publiques représente 50 % des dépenses d'intervention.
Répartition des 957 milliards d'euros de
dépenses publiques
par catégorie de dépense en
2006
(en milliards d'euros)
Source : ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique
Entre 1978 et 2006, la dépense publique a progressé dans notre pays de 9 points de PIB , passant de 44,4 % du PIB en 1978 à 53,3 % du PIB en 2006. Sur ces 9 points de PIB supplémentaires, 5,5 points sont attribués à la sécurité sociale. La dépense des collectivités territoriales apparaît sur longue période également dynamique (+ 3,3 points de PIB), mais l'augmentation peut être expliquée à hauteur de 1,3 point d'augmentation par les transferts de compétences issues des différentes lois de décentralisation.
Si l'Etat affiche une stabilité de sa dépense par rapport à PIB, un périmètre « constant » obligerait à prendre en compte la progression de ses opérateurs (les organismes divers d'administration centrale), pour 0,2 point de PIB, et la décentralisation, pour 1,3 point de PIB.
Répartition des 9 points de dépenses
publiques supplémentaires
par administration publique
(en points de PIB)
Source : ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique
Par catégorie de dépenses, la progression des 9 points de dépenses publiques supplémentaires est due pour l'essentiel à l'augmentation des prestations et des transferts (+ 6,5 points de PIB). La charge de la dette a engendré 1,5 point de PIB de dépenses supplémentaires. En revanche, la masse salariale n'a progressé que de 0,6 point de PIB depuis 1978, traduisant un arbitrage des administrations publiques en faveur de la création massive d'emplois publics, au détriment de leur rémunération.
Répartition des 9 points de dépenses
publiques supplémentaires
par catégorie de
dépense
(en points de PIB)
Source : ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique
A. LES DÉPENSES DE SÉCURITÉ SOCIALE : UNE PRIORITÉ POUR LA REVUE GÉNÉRALE DES PROGRAMMES
1. Les enjeux des réformes à venir
a) La structure des dépenses de sécurité sociale et leur dynamique de long terme
L'analyse des réformes à mener nécessite d'avoir une vision claire des sommes en cause et de la dynamique des dépenses de sécurité sociale.
Le graphique qui suit décompose la structure actuelle de ces dépenses. On voit apparaître quatre grands blocs : dépenses de soins de ville (66,6 milliards d'euros), dépenses hospitalières (63,6 milliards d'euros), prestations « vieillesse » (77,8 milliards d'euros) et prestations « famille » (40,8 milliards d'euros).
( en milliards d'euros)
La structure des dépenses de sécurité sociale en 2006
ONDAM
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (juillet 2007). Les données relatives aux prestations « vieillesse », « famille » et « maladie et AT-MP hors ONDAM » concernent uniquement le régime général. Cette dernière catégorie inclut les versements au fonds de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante et au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Les données relatives à l'ONDAM sont celles de l'ensemble des régimes obligatoires de base.
Le tableau qui suit précise la structure des dépenses de soins, pour le seul régime général, en 2006.
La structure des dépenses de soins de ville du régime général en 2006
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances, d'après le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (juillet 2007)
Cette approche statique doit cependant être complétée par une analyse de la dynamique de ces dépenses, qui diffèrent suivant les secteurs considérés.
S'agissant des dépenses d'assurance maladie, le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie 33 ( * ) , en se calant sur un l'horizon 2025 (et en retenant une hypothèse de croissance du PIB de 2,25 % par an sur la période 2006-2025), juge que l'évolution spontanée de la dépenses de soins de ville par tête pourrait varier entre la croissance du PIB et la croissance du PIB plus un point. Il souligne toutefois que cette prévision de tendance est entourée de très fortes incertitudes. Il indique, par ailleurs, qu'une progression en volume de 2 % par an des dépenses des établissements de santé semblerait plausible.
Ces données ne rendent toutefois que très partiellement compte de la dynamique des dépenses, dans la mesure où deux facteurs les pousseraient fortement à la hausse :
- d'une part, l'évolution démographique et le vieillissement de la population , qui induiraient une croissance de 25 % de la consommation de soins et de biens médicaux ;
- d'autre part, la croissance du nombre de personnes dépendantes , le Centre d'analyse stratégique 34 ( * ) évaluant à 13/15 milliards d'euros le supplément de dépenses publiques nécessaires pour faire face à ce besoin. De son côté, la Cour des comptes évaluait le supplément de dépenses annuelles à l'horizon 2020 (par rapport à 2003) à « 3 à 4,7 milliards d'euros pour l'assurance maladie, 2,8 à 3,8 milliards d'euros pour l'APA et 1,6 à 2,7 milliards d'euros à la charge des résidents en établissement. L'effet cumulé de la démographie et de la réponse aux besoins d'amélioration de l'offre pourrait conduire à un accroissement encore plus important, pouvant aller jusqu'au doublement de l'effort actuel » 35 ( * ) .
A modalités de prises en charge inchangées, le poids des prestations vieillesse devrait également connaître une forte croissance, en raison de l'augmentation du nombre de retraités et de l'allongement de la durée de la vie. Le dernier rapport du Conseil d'orientation des retraites 36 ( * ) évalue à une fourchette allant de 16.296 à 16.818 le nombre de retraités en 2020, contre 13.000 environ en 2005 (soit une augmentation d'environ un quart). Le besoin de financement des régimes de retraite, avant affectation éventuelle de nouvelles recettes ou mesures de redressement, est ainsi évalué à 0,7/0,8 point de PIB en 2020.
* 33 Rapport du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, juillet 2007.
* 34 « Personnes âgées dépendantes : bâtir le scénario du libre choix », second rapport de la mission « Prospective des équipements et services pour les personnes âgées dépendantes » conduites par Stéphane Le Bouler, juin 2006.
* 35 Cour des comptes, « Les personnes âgées dépendantes », rapport public particulier, novembre 2005.
* 36 « Retraites : questions et orientations pour 2008 », quatrième rapport, janvier 2007.