II. UNE GRANDE ABONDANCE DE MOYENS

A. LA DGF INTERCOMMUNALE : DE L'INCITATION À LA SANCTUARISATION

La DGF des groupements de communes est distribuée par l'Etat selon plusieurs critères : la population, le potentiel fiscal et le coefficient d'intégration fiscale ( CIF). Le potentiel fiscal est une mesure de la capacité fiscale théorique qui intervient dans le calcul de la part « péréquation » de la DGF. Plus le potentiel fiscal est élevé par rapport à la moyenne de sa catégorie d'appartenance, plus la dotation de l'EPCI est faible. En effet, pour trouver le potentiel fiscal, on applique aux bases d'imposition réelles de l'EPCI les taux moyens nationaux des quatre taxes directes de sa catégorie et de sa strate de population et l'on mesure ainsi sa richesse fiscale potentielle relative.

Quant au coefficient d'intégration fiscale, il est la mesure économique de l'intégration fiscale, c'est-à-dire du poids de la fiscalité intercommunale par rapport à la fiscalité totale communale et intercommunale. Plus un EPCI est fiscalement intégré (et donc plus il exerce de compétences), plus son CIF est important. Plus le CIF est important, plus la DGF de l'EPCI est importante.

Ainsi le montant de DGF obtenu est d'autant plus important que la structure intercommunale fait partie d'une catégorie exerçant de nombreuses compétences et qu'elle présente une forte intégration fiscale, c'est-à-dire que la part des recettes fiscales est plus élevée dans le total des impôts levés « communes + groupement ».

Entre 1993 et 2006, la DGF intercommunale a été multipliée par 4 ; elle a augmenté de 25 % en 2000, de 29 % en 2001, de 20 % en 2002, de 11 % en 2003, de 6 % en 2004, de 5 % en 2005 et 2006. On assiste maintenant à une stabilisation. Des grands traits de cette évolution, qui s'explique à la fois par la multiplication des EPCI à fiscalité propre après 1999 et par la générosité des incitations financières voulues par le législateur, on peut tirer l'enseignement suivant : l'intercommunalité à fiscalité propre a connu un développement accéléré après 1999 et ce développement s'est fait avec une abondance de moyens sans précédent. Aujourd'hui, l'Etat espère stabiliser et peut-être même geler la DGF intercommunale au double motif que la carte intercommunale est presque achevée et qu'une gestion plus rigoureuse de la dépense publique générale lui est imposée.

Force est de reconnaître que la dotation d'intercommunalité a été le levier majeur de son développement et que le succès de l'intercommunalité a eu un coût très important dans l'absolu. Certes, il convient aussi d'admettre que l'augmentation du nombre d'EPCI, l'extension des périmètres, le passage à la TPU, la bonification de DGF ont contribué à l'explosion de ce coût. On sait que dans ce contexte, l'architecture de la DGF a été très malmenée dans un premier temps et particulièrement la DSU et la DSR qui sont alimentées par le solde de la DGF après prélèvement des sommes nécessaires pour le financement des EPCI. A ce propos, on remarque que le succès des communautés d'agglomération a contraint l'Etat à prévoir des financements supplémentaires par abondement en provenance du budget de l'Etat et par prélèvement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle. Cependant, depuis 2003, le tassement du nombre de nouvelles créations d'EPCI s'est traduit pas une réduction importante de la progression du coût de la dotation d'intercommunalité.

La très forte progression enregistrée en 1999 et 2002 a cédé la place à une phase de progression plus limitée, même si l'extension de l'intercommunalité aux quelques zones des territoires qui restaient jusqu'à présent à l'écart du mouvement intercommunal continue d'assurer une progression sensible au niveau national.

Il existe cependant une grave incertitude sur l'évolution de la DGF intercommunale tant que ne sera pas tranchée la question spécifique de l'intercommunalité en Ile-de-France. En effet, si l'intercommunalité à fiscalité propre devait brutalement se développer en Ile-de-France (et sans aller jusqu'à imaginer que Paris forme une communauté urbaine avec des communes limitrophes), la DGF intercommunale exploserait à nouveau. Or, la progression de l'intercommunalité en Ile-de-France est rapide et, de l'avis de votre rapporteur, peu justifiée car la définition de périmètres pertinents en petite couronne est impossible et a donné lieu, pour l'instant, à des alliances politiques tactiques pour percevoir de la DGF. Votre rapporteur tient à rappeler que l'intercommunalité ne lui semble pas une solution appropriée à la petite couronne, compte tenu de la densité du foncier bâti, de la taille des communes qui sont presque toutes viables et du fait de la préexistence de grands et anciens syndicats en charge des principaux services publics (eau, assainissement, ordures ménagères) qui sont l'apanage ordinaire et la raison d'être de l'intercommunalité. L'idée d'une communauté urbaine de Paris n'est pas plus convaincante.

De l'évolution de la DGF intercommunale, votre rapporteur tire que le législateur comme le gouvernement ont souhaité sanctuariser cette dotation ce qui a entraîné une abondance de moyens pour les EPCI à fiscalité propre et plus précisément les CA et les CU ; cette abondance explique, entre autres choses, le grand nombre de CA (164 au lieu des 140 aires déterminées par la DATAR).

On rappellera, pour finir, que l'évolution de la dotation moyenne par habitant des communautés de communes doit se situer dorénavant au sein d'une fourchette entre 130 et 160 % de la dotation des communautés d'agglomération, laquelle doit progresser au moins comme l'inflation (1,8 %).

Il s'agit d'un rééquilibrage au profit de l'intercommunalité rurale.

Pour 2006, le Comité des finances locales (CFL) a fixé à + 2,5 % par rapport à 2005 l'augmentation de la dotation par habitant des communautés d'agglomération et des syndicats d'agglomération nouvelle, et 160 % de ce taux, soit + 4 % pour les communautés de communes à fiscalité additionnelle et les communautés de communes à taxe professionnelle unique (TPU).

Il s'ensuit que les dotations par habitant des différentes catégories d'EPCI sont ainsi fixées :

- DGF des communautés de communes à fiscalité additionnelle : 17,97 €/hab

- DGF des communautés de communes à TPU simple : 21,95 €/hab

- DGF des communautés de communes à TPU et à DGF bonifiée : 30,53 €/hab

- DGF des syndicats d'agglomération nouvelle : 45,75 €/hab

- DGF des communautés d'agglomération : 42,38 €/hab.

La dotation d'intercommunalité des communautés urbaines est, pour sa part, indexée sur la dotation forfaitaire (+ 1,69 %). Elle s'établit à 525,3 M€, soit 83,6 €/hab.

A la lecture de ces moyennes par habitant, votre rapporteur tient à souligner que le privilège dont jouissent encore aujourd'hui les communautés urbaines a été plusieurs fois critiqué lors des auditions. Ce bonus ne trouve pas de justification aux yeux de la majorité des acteurs locaux.

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