C. UNE SÉANCE PUBLIQUE ENCADRÉE SOUVENT PLUS STRICTEMENT QU'EN FRANCE
Le temps consacré à la séance publique a été limité dans plusieurs pays. A la Chambre des Communes, les horaires de séance publique ont été encadrés et le nombre de séances de nuit ramené à deux par semaine. Le pragmatisme britannique permet que ces horaires puissent être dépassés à condition cependant que les différents groupes aient donné leur accord. En pratique, ces dépassements n'interviennent que rarement.
En Espagne, le Congrès des députés siège trois semaines par mois, trois jours par semaine. Le Sénat se réunit deux semaines par mois, deux jours par semaine. Les séances de nuit se prolongent rarement au-delà de minuit au Congrès et de 22 heures au Sénat. En 2004-2005, le congrès des députés n'aura siégé que 75 jours et le Sénat, 40 jours.
Le Bundestag ne siège quant à lui que deux semaines par mois, en principe trois jours (le mercredi pour une heure de questions ; le jeudi ; le vendredi matin). Le jeudi, la séance de nuit ne dépasse pas 22 heures.
Faut-il rappeler qu'en 2004-2005, en France, le Sénat et l'Assemblée nationale ont siégé chacun 109 jours (session extraordinaire comprise) 5 ( * ) ?
Vos rapporteurs ont été frappés par le souci commun à tous les parlements visités de rationaliser et de maîtriser les travaux en séance publique. Cette volonté procède d'abord d'un effort d' organisation et de planification des travaux législatifs. Ainsi, au Royaume-Uni, le calendrier des semaines de séance publique à la Chambre des Communes est publié une année à l'avance . En outre, depuis 2000, chaque projet de loi fait l'objet d'une programmation destinée à déterminer à l'avance la durée de la discussion à chaque stade de la procédure à l'issue de la phase de discussion générale en séance publique. En Finlande, l'ordre du jour -qui relève du seul parlement- fixe le calendrier parlementaire sur une période de plusieurs mois.
La maîtrise des travaux en séance publique repose sur plusieurs méthodes. Outre le recours aux techniques de législation déléguée en commission -pratiquées, comme vos rapporteurs l'ont déjà souligné, dans de nombreux parlements-, certains pays disposent de procédures d'examen simplifié en séance publique. A la Diète polonaise, la majorité simple des députés peut décider d'examiner un projet de loi immédiatement après sa distribution et sans passage préalable en commission. L'Espagne connaît un dispositif analogue : l'examen direct en séance plénière sans rapport de la commission, réservé toutefois aux textes particulièrement brefs et simples ou sur lesquels aucun amendement n'a été déposé.
Ensuite, certains pays ont encadré le droit d'amendement . Ainsi, en Espagne, les amendements individuels doivent, en fait, être revêtus de la signature des porte-paroles des groupes politiques. A la Diète polonaise, le droit d'amender est réservé à l'auteur du texte, ou un groupe de quinze députés au moins, au président ou au vice-président d'un groupe politique et au gouvernement.
En troisième lieu, dans certaines assemblées, les temps de parole sont rigoureusement limités 6 ( * ) . Tel est le cas au Sénat polonais : à l'exception du rapporteur de la commission et du « rapporteur de la minorité », les autres parlementaires ne peuvent intervenir que deux fois au cours d'un même débat -pour une durée limitée à dix minutes pour la première intervention et à cinq minutes pour la seconde.
A la Chambre des députés italienne, ces limitations interviennent à deux stades : au cours de la discussion générale, ne peut intervenir -outre le rapporteur de la commission et le gouvernement- qu'un orateur par groupe tandis que lors de la discussion des articles, n'est admise qu'une explication de vote par groupe. Aucun des parlements visités par vos rapporteurs ne va toutefois aussi loin que l'Espagne s'agissant des modalités d'examen des amendements : en effet, au Sénat comme au Congrès, les amendements d'un même groupe font habituellement l'objet d'un vote unique et, au Congrès, chaque groupe dispose en principe de dix minutes pour présenter l'ensemble de ses amendements.
Même en Finlande, où le temps de parole est en principe illimité, les groupes parlementaires se sont accordés pour réduire les durées d'intervention des députés afin de rendre les débats plus vivants (un député ne peut intervenir plus de deux minutes depuis sa place, au-delà, il doit monter à la tribune pour une intervention qui ne peut dépasser, en tout état de cause, dix minutes).
Par ailleurs, vos rapporteurs ont observé que sur les six parlements visités, trois accordaient une attention particulière à l' obligation de présence de leurs membres lors des séances. Des listes de présence sont établies au Bundestag, à l'Eduskunta finlandaise et à la Diète polonaise. En Finlande, ces feuilles de présence sont publiques -et leur publication par la presse avant les élections joue un rôle dissuasif. En Pologne, l'obligation de présence est renforcée par le fait que le vote est strictement personnel. Il convient de souligner qu'à l'exception de la Pologne, tous les autres pays étudiés autorisent le cumul des mandats .
Vos rapporteurs ont pu également constater qu'une réflexion s'était engagée au sein de plusieurs parlements pour renforcer l' intérêt de la séance publique . Ainsi, en Espagne, le Congrès des députés cherche de nouveaux moyens pour assurer l'examen de tous les amendements en commission afin de réserver la séance publique aux débats politiques.
La Chambre des Communes dispose, quant à elle, avec sa commission de modernisation , d'un organe permanent de réflexion auquel cette assemblée doit plusieurs de ses récentes réformes (en particulier l'encadrement des horaires de séance publique).
* 5 Seul parmi les parlements visités, la chambre des députés et le Sénat italiens siègent un plus grand nombre de jours (respectivement 162 et 118 jours).
* 6 En France, au Sénat, sur chaque article, tout sénateur peut prendre la parole une fois pour cinq minutes et intervenir pour une explication de vote de cinq minutes non seulement sur l'article mais aussi sur chacun des amendements.