Rapport d'information n° 453 (2005-2006) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 5 juillet 2006
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AVANT-PROPOS
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I. PRÉSENTATION DE L'AFII ET DU BUREAU DE
TOKYO
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II. UN « ELECTRON LIBRE » DANS
L'ADMINISTRATION
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III. UNE COMMUNICATION COÛTEUSE ET À
L'EFFICACITÉ INCERTAINE
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A. LA COMMUNICATION DÉLÉGUÉE
AU BUREAU DE TOKYO N'APPELLE PAS DE COMMENTAIRE PARTICULIER
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B. LA COMMUNICATION GÉRÉE AU NIVEAU
CENTRAL SEMBLE PLUS CRITIQUABLE
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1. Une campagne très
centralisée
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2. Des cibles à la pertinence parfois
douteuse
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3. Une campagne particulièrement
onéreuse
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4. La campagne « Image de la
France » est-elle vraiment incitative ?
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5. Des résultats contrastés ayant
entraîné des ajustements
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6. Une prolongation de la campagne, sur une base
moins « publicitaire », est envisagée
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1. Une campagne très
centralisée
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A. LA COMMUNICATION DÉLÉGUÉE
AU BUREAU DE TOKYO N'APPELLE PAS DE COMMENTAIRE PARTICULIER
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IV. UNE VALEUR AJOUTÉE DIFFICILE À
MESURER
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A. L'EFFICACITÉ DES INTERVENTIONS DE L'AFII
RESTE À DÉMONTRER
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B. FAUT-IL UN ORGANISME SPÉCIFIQUE
CHARGÉ DE PROMOUVOIR LES INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS EN
FRANCE ?
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A. L'EFFICACITÉ DES INTERVENTIONS DE L'AFII
RESTE À DÉMONTRER
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I. PRÉSENTATION DE L'AFII ET DU BUREAU DE
TOKYO
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CONCLUSION
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EXAMEN EN COMMISSION
N° 453
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 30 juin 2006 Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 juillet 2006 |
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur l' Agence française pour les investissements internationaux (AFII) ,
Par M. Philippe MARINI,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Jacques Baudot, Mme Marie-France Beaufils, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM. Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Roger Karoutchi, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.
Investissements. |
AVANT-PROPOS
Le 20 avril 2006, à l'occasion du déplacement d'une délégation du bureau de votre commission des finances en Corée du Sud et au Japon, votre rapporteur général a effectué, en application de l'article 57 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), un contrôle sur pièces et sur place du bureau de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) à Tokyo.
Il s'agissait de se rendre compte des méthodes et des conditions de travail de l'Agence, de la cohérence avec la LOLF des objectifs assignés au chef de bureau et à ses collaborateurs et, si possible, d'obtenir des éclaircissements sur les retombées de la campagne de communication « Image de la France » .
Ce contrôle a pris la forme d'une visite au bureau, d'un entretien avec le chef de bureau, M. Jacques Maleval et d'une discussion avec les prospecteurs présents. Votre rapporteur général s'est également fait communiquer divers documents susceptibles d'améliorer la compréhension des activités de l'Agence.
Ce contrôle a été suivi de l'obtention d'un complément d'information en provenance du siège de l'AFII à Paris, le 5 juin 2006.
Au total, si le bureau de Tokyo ne semble pas appeler de commentaire majeur, le mode de fonctionnement global de l'AFII continue à soulever d'importantes questions :
- la double tutelle prévue par la loi ne semble pas optimale ;
- l'efficacité de la coûteuse campagne de communication menée par l'AFII est incertaine ;
- plus fondamentalement, on peut se demander s'il était opportun de créer un organisme spécifiquement chargé de favoriser les investissements étrangers en France, et si l'AFII a suscité la réalisation en France d'investissements significatifs.
I. PRÉSENTATION DE L'AFII ET DU BUREAU DE TOKYO
A. L'AGENCE FRANÇAISE POUR LES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX
L'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) a été créée par l'article 144 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (NRE). Il s'agit d'un établissement public à caractère industriel et commercial, placé sous la double tutelle du ministre chargé de l'économie, des finances et de l'industrie et du ministre chargé de l'aménagement du territoire.
1. Le regroupement des organismes jusqu'alors chargés de promouvoir les investissements étrangers en France
a) Le dispositif antérieur
Le précédent dispositif de promotion des investissements étrangers en France a été mis en place en 1992. Cette mission était, comme aujourd'hui, assurée par deux ministères :
- le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, par l'intermédiaire de la délégation aux investissements internationaux (DII), constituée d'une équipe légère d'une dizaine de personnes et dirigée par un « ambassadeur itinérant, délégué aux investissements internationaux en France », et des missions économiques à l'étranger de la direction des relations économiques extérieures (DREE) 1 ( * ) ;
- le ministère de l'aménagement du territoire, par l'intermédiaire du réseau des bureaux de la DATAR à l'étranger, dénommés Invest in France Agencies .
Avant la création de l'AFII, les « ambassadeurs délégués » ont été :
- M. Jean-Daniel Tordjman, nommé le 30 janvier 1992 ;
- M. Didier Lombard, nommé le 17 février 1999.
Ces « ambassadeurs délégués » étant considérés comme des ambassadeurs à part entière, ils ont été nommés par décret du président de la République délibéré en Conseil des ministres, conformément à l'article 13 de la Constitution.
b) Le nouveau dispositif
L'article 144 précité de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (NRE) a réuni l'ensemble de ces structures au sein des ambassades, à l'exception des missions économiques.
Les biens meubles appartenant à l'Etat et mis à disposition de la DATAR et de la DII, nécessaires à l'accomplissement des missions confiées à l'AFII, ont été transférés à celle-ci.
L'article 144 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (NRE) « Il est créé, sous le nom d'Agence française pour les investissements internationaux, un établissement public national à caractère industriel et commercial, placé sous la tutelle du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre chargé de l'aménagement du territoire. « L'agence a pour mission la promotion, la prospection et l'accueil des investissements internationaux en France. Elle assure cette mission en partenariat avec les collectivités territoriales. Elle associe à son action les acteurs économiques. « L'agence est administrée par un conseil d'administration composé : « - de représentants de l'Etat ; « - de représentants des collectivités territoriales ; « - de personnalités qualifiées ; « - de représentants du personnel désignés dans les conditions prévues au chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public. « Pour accomplir ses missions, l'agence comprend notamment des services centraux et des bureaux à l'étranger. Ces bureaux sont des services de l'Etat. Les personnels de l'agence peuvent être des agents de droit public. « Les ressources de l'agence sont constituées par des dotations de l'Etat, des redevances pour service rendu, le produit des ventes et des locations ainsi que par des emprunts, dons et legs et recettes diverses. « Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article . » |
Conformément au décret n° 2001-1091 du 21 novembre 2001 relatif à son mode d'organisation et de fonctionnement, l'AFII est notamment chargée :
- de la promotion du territoire national auprès des investisseurs et des relais d'opinion ;
- de la prospection des investisseurs et des projets internationalement mobiles ;
- d'un rôle de coordination entre entreprises, collectivités territoriales, agences de développement, administrations de l'Etat et prestataires de services, pour faciliter l'accueil des investissements internationaux et assurer la cohérence des propositions des territoires ;
- d'une mission de veille et d'étude sur les investissements internationaux et les facteurs de leur localisation.
L'AFII devait agir en particulier avec les représentants de l'Etat dans les régions et les départements, et également avec les associations régionales de la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT), héritière de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) 2 ( * ) .
Le décret n° 2001-1091 du 21 novembre 2001 précité prévoit que le président de l'AFII est « l'ambassadeur délégué aux investissements internationaux », comme auparavant le délégué aux investissements internationaux. Par voie de conséquence, il est nommé par décret du président de la République. M. Didier Lombard, ambassadeur délégué depuis février 1999, et maintenu dans ces fonctions après la création de l'AFII, a été remplacé par Mme Clara Gaymard par décret du président de la République du 30 janvier 2003.
c) Des modalités de création témoignant d'une certaine légèreté à l'égard du Parlement
La création de l'AFII s'est faite d'une manière « subreptice » en 2001.
Certes, le 27 octobre 1999, auditionné par votre commission des finances au sujet des perspectives d'évolution du dispositif public d'attraction des investissements étrangers en France, M. Jean-Louis Guigou, délégué à l'aménagement du territoire et à l'action régionale, avait déclaré que le gouvernement allait procéder au « mariage » entre les représentations de la DATAR à l'étranger et la DII.
Cependant, le gouvernement a choisi de créer l'AFII par un amendement, tardivement déposé au Sénat, dans le cadre du projet de loi relative aux nouvelles régulations économiques (NRE), devenu la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001, dont votre rapporteur général était le rapporteur.
Considérant que cet amendement « arriv[ait] trop tard pour que [votre commission des finances puisse] réellement disposer de tous les éléments nécessaires », votre rapporteur général s'en était remis à la sagesse du Sénat.
Dans son rapport spécial relatif aux crédits de l'aménagement du territoire pour 2002, notre collègue Roger Besse, estimant que cet amendement avait été déposé « un peu à la sauvette », indique qu'il « déplore cette méthode qui a interdit à la commission des finances d'examiner dans le détail le projet du gouvernement et d'envisager les aménagements qui auraient pu se révéler nécessaires ».
2. L'organisation et les moyens
a) L'organisation et le réseau de l'AFII
Le personnel de l'agence est constitué d'agents contractuels de droit privé, d'agents contractuels de droit public, d'agents contractuels de droit local, ainsi que de fonctionnaires civils et militaires détachés ou mis à disposition.
L'agence réunit des services centraux (60 personnes) et un réseau de bureaux à l'étranger (80 personnes).
D'après le site Internet de l'AFII, l'agence dispose d'un réseau de 20 bureaux à l'étranger : 10 bureaux en Europe, 3 bureaux aux Etats-Unis et 7 en Asie. A ces bureaux s'ajoutent 9 correspondants au sein de missions économiques : 3 correspondants en Europe, 3 correspondants au Canada et 3 correspondants en Asie.
Le nombre de pays concernés est plus modeste, du fait de l'existence de plus d'un bureau ou d'un correspondant par pays en moyenne : l'AFII a des bureaux ou des correspondants dans seulement 20 pays.
L'AFII n'est pas présente dans chacun des 20 premiers pays investisseurs en France . Tout d'abord, le montant élevé des investissements de certains pays s'explique par des montages financiers (en particulier dans le cas du Luxembourg). Ensuite, s'il n'y a pas de représentation de l'AFII au Danemark, en Finlande et en Norvège, qui réalisent pourtant des investissements au moins comparables à ceux du Portugal, de l'Autriche ou de l'Australie, c'est parce que le bureau de Stockholm est compétent pour ces trois pays.
L'AFII est représentée dans certains pays qui ne réalisent presque pas d'investissements en France : si Singapour a investi en moyenne 43,6 millions d'euros par an de 1999 à 2003 3 ( * ) , soit un peu moins que l'Australie, les montants sont presque nuls dans le cas de la Corée du Sud, de la Chine, ou de l'Inde. Ces dernières représentations ont en réalité un coût modeste : il s'agit de simples correspondants au sein des missions économiques. L'AFII indique disposer d'un bureau en Corée du Sud, mais lors de son contrôle sur pièces et sur place au bureau de l'AFII à Tokyo votre rapporteur général a pu constater qu'il s'agissait en réalité d'une extension virtuelle du bureau de Tokyo, la représentation de l'AFII y étant assurée par le chef de la mission économique en Corée du Sud.
A la vérité, le partage des structures entre missions économiques et délégations de l'AFII paraît tout à fait arbitraire, les vocations des unes et des autres demeurant très voisines. On peut d'ailleurs se demander pourquoi, dans certains pays, l'AFII n'indique pas de correspondant, alors que le réseau des missions économiques le permettrait.
Investissements moyens réalisés en France
et représentations de l'AFII à l'étranger,
parmi les
20 premiers investisseurs en France (1996-2003)
(investissements en millions d'euros)
Moyenne 1996-2003 |
Présence d'une représentation de l'AFII |
|
Royaume-Uni |
8.416,5 |
oui |
Pays-Bas |
5.935,8 |
oui |
Allemagne |
5.518,8 |
oui |
Belgique |
5.196,3 |
oui |
Etats-Unis |
4.024,8 |
oui |
Luxembourg |
2.441,0 |
non |
Espagne |
1.239,3 |
oui |
Suisse |
1.166,4 |
oui |
Suède |
781,8 |
oui |
Canada |
759,1 |
oui (correspondant) |
Italie |
423,4 |
oui |
Japon |
389,9 |
oui |
Danemark |
327,8 |
non |
Irlande |
256,8 |
oui (correspondant) |
Norvège |
155,6 |
non |
Finlande |
152,6 |
non |
Autriche |
106,3 |
oui (correspondant) |
Portugal |
95,3 |
oui (correspondant) |
Jersey |
60,1 |
non |
Australie |
57,6 |
oui (correspondant) |
Autres représentations : Corée, Taïwan, Chine (bureaux), Inde, Singapour (correspondants).
Sources : Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (UNCTAD), d'après les données de la Banque de France ; site Internet de l'AFII
Les représentations de l'AFII à l'étranger
Les disques vides correspondent à des bureaux de l'AFII, les disques pleins correspondent à de simples correspondants des missions économiques.
Source : Site Internet de l'AFII
b) Un budget de 26,4 millions d'euros en 2006
Dans la loi de finances initiale pour 2006, les crédits de l'AFII s'élèvent à 26,4 millions d'euros ainsi répartis :
- 18,9 millions d'euros (+ 22,7 %, en raison de l'augmentation, de 10 à 13,5 millions d'euros, du budget de la campagne « Image de la France », décidée en 2004) au sein du programme 134 « Développement des entreprises » de la mission « Développement et régulation économiques ». A ce sujet, il convient de rappeler que le projet de loi de finances pour 2006 prévoyait, à l'origine, une augmentation de 5 millions d'euros (de 10 à 15 millions d'euros) du budget de cette campagne de communication. Toutefois, lors de la discussion des crédits de la mission « Développement et régulation économiques », le Sénat avait adopté un amendement déposé par notre collègue Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, revenant sur cette hausse afin d'augmenter à due concurrence les crédits du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC). La commission mixte paritaire (CMP) avait ensuite décidé de réallouer 3,5 millions d'euros à l'AFII pour assurer le financement de la campagne « Image de la France » ;
- 7,5 millions d'euros au sein du programme 112 « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires ».
Le financement de l'AFII par le budget de l'Etat
(en millions d'euros)
Source : « bleu » pour 2006 de la mission « Politique des territoires »
B. UN EXEMPLE DE BUREAU LOCAL DE L'AFII : CELUI DE TOKYO
Le bureau de l'AFII à Tokyo, compétent pour le Japon et la Corée du Sud, est l'un des bureaux les plus importants, avec celui aux Etats-Unis et celui en Allemagne.
Le contrôle sur pièces et sur place effectué par votre rapporteur général montre que le bureau ne gère pas de façon dispendieuse l'argent des contribuables .
En effet :
? les locaux eux-mêmes ne sont pas luxueux et sont situés dans un quartier de Tokyo aux loyers raisonnables par rapport au marché local ;
? le budget de fonctionnement pour le Japon alloué au bureau au titre de l'année 2006 est d'environ 90 millions de yens, soit, au cours à fin mai 2006, près de 632.000 euros, ce qui, dans un pays aussi important et au coût de la vie aussi élevé que le Japon, paraît correct ;
? les moyens humains du bureau ne semblent pas non plus excessifs. En effet, au titre de ses activités japonaises, le bureau emploie 13 personnes, qui se composent :
- de 5 agents expatriés de droit français (le directeur, son adjoint et 3 prospecteurs) ;
- de 8 agents de droit local, dont le régime est analogue à celui du CDI (un responsable administratif et financier, une prospectrice, une personne présentée à votre rapporteur général comme un « lobbyiste » qui travaillait auparavant dans une grande entreprise japonaise, un responsable de la communication, deux assistantes à Tokyo, une assistante à Osaka et une assistante à Nagoya).
Par ailleurs, le personnel est apparu dans l'ensemble compétent et motivé - ce qui n'en conduit pas moins à s'interroger sur l'efficacité, et même sur la raison d'être, de l'AFII.
II. UN « ELECTRON LIBRE » DANS L'ADMINISTRATION
A. LA TUTELLE DE L'AGENCE : UNE DILUTION DES RESPONSABILITÉS
Comme cela est indiqué ci-avant, la loi prévoit que l'AFII est placée sous la double tutelle du ministre chargé de l'économie, des finances et de l'industrie et du ministre chargé de l'aménagement du territoire.
Certes, l'AFII a conclu le 30 janvier 2006 une « convention d'objectifs et de moyens » avec ses deux ministères de tutelle.
On peut pourtant se demander si cette double tutelle ne constitue pas en réalité une absence de tutelle , conduisant à faire du directeur de l'AFII un « ministre du commerce extérieur bis » échappant au contrôle du Parlement.
1. Le statut contestable du président de l'AFII
Tout d'abord, le décret n° 2001-1091 précité prévoit que le président de l'AFII est « l'ambassadeur délégué aux investissements internationaux ». Comme cela a déjà été relevé, avant la création de l'AFII, le délégué aux investissements internationaux avait, lui aussi, le titre d'ambassadeur.
Le président de l'AFII fait donc partie des 13 « ambassadeurs thématiques » de la France 4 ( * ) . Il y aurait certainement lieu de s'interroger sur la vraie utilité de certaines de ces fonctions...
En conséquence, le président de l'AFII est nommé par décret du président de la République, c'est-à-dire par décret pris en Conseil des ministres, conformément à l'article 13 de la Constitution, qui dispose que « (...) les ambassadeurs (...) sont nommés en Conseil des Ministres ».
On peut cependant se demander dans quelle mesure le président de l'AFII - de même, probablement, que certains des autres « ambassadeurs thématiques » de la France -, dont la seule fonction est d'inciter les chefs d'entreprise étrangers à investir en France, peut, sans abus de langage, être considéré comme un ambassadeur. Bien que la Constitution ne définisse pas cette notion, on peut supposer qu'un ambassadeur est une personne chargée de représenter la France auprès d'Etats étrangers ou d'organisations internationales.
Le fait que le président de l'AFII ait le statut d'ambassadeur, et soit donc nommé par le président de la République, présente le grave inconvénient de l'émanciper, de fait, de sa « double tutelle » prévue par la loi. Dans la mesure où l'AFII est un établissement public, financé par des crédits publics, son président, les ministres de tutelle, et les responsables des programmes assurant son financement, sont tenus de rendre des comptes devant le Parlement. Ce n'est pas facile lorsque le président de l'organisme bénéficie d'un statut aussi particulier.
2. Une composition inadaptée du conseil d'administration
Ensuite, le conseil d'administration de l'AFII ne permet pas aux deux ministères en principe chargés de la tutelle de disposer d'un nombre suffisant de représentants, comme l'indique le graphique ci-après.
Les 18 membres du conseil d'administration de l'AFII
Source : décret n° 2001-1091 du 21 novembre 2001 relatif à l'organisation et au fonctionnement de l'Agence française pour les investissements internationaux
Ainsi, sur 18 membres, seulement 7 sont des représentants de l'Etat. Parmi ces derniers, le ministre chargé de l'économie et le ministre chargé de l'aménagement du territoire, censés assurer la tutelle, disposent chacun de seulement 2 représentants. Et la place du ministre délégué au commerce extérieur, dont la présence est usuelle au sein des gouvernements et dont les compétences sont voisines de celles de l'Agence, n'est même pas prévue par ce décret.
Il faut relever, parmi les membres du conseil d'administration, la présence de quatre représentants des collectivités territoriales. En pratique, il s'agit exclusivement de représentants des régions 5 ( * ) .
3. Un financement par deux programmes de deux missions différentes
Par ailleurs, comme on l'a indiqué ci-avant, l'AFII est financée par deux programmes de deux missions différentes 6 ( * ) , ce qui est source de confusion.
Certes, l'AFII est rattachée, à titre d'opérateur principal, au programme 112 « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires » et à, titre d'opérateur secondaire, au programme 134 « Développement des entreprises » de la mission « Développement et régulation économiques ». Dès lors, les indicateurs de performance concernant l'AFII figurent exclusivement au programme 112. Il n'y a donc pas d'incohérence entre les deux programmes.
Cependant, la coexistence de deux responsables de programme - le vice-président du Conseil général des mines (CGM) et le délégué à l'aménagement du territoire et à l'action régionale - ne contribue pas à la clarification des compétences et à l'implication de la tutelle.
B. LE BESOIN D'UN RESSERREMENT DES LIENS AVEC L'ETAT
Dans ces conditions, le rétablissement d'une véritable tutelle semble passer par :
- la suppression de la nomination du président de l'AFII par décret du président de la République, en remettant en cause un statut d'ambassadeur qui est détourné de son sens et représente un facteur de confusion ;
- le renforcement des représentants des deux ministères de la tutelle au sein du conseil d'administration, en y assurant en outre, la présence du ministère délégué au commerce extérieur ;
- le regroupement de la totalité des crédits de l'AFII sur un programme unique. Ce dernier devrait vraisemblablement être le programme 134 « Développement des entreprises », pour deux raisons.
Tout d'abord, à l'heure actuelle, les moyens dont dispose l'agence proviennent principalement du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, qui contribue à hauteur de 18,9 millions d'euros en 2006, contre 7,5 millions d'euros pour le ministère de l'aménagement du territoire.
Ensuite, les deux ministères ont des cultures fondamentalement différentes. D'un côté, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie obéit avant tout à une logique d'efficacité économique, sa tendance naturelle étant de chercher à favoriser des investissements importants aux endroits où cela est le plus efficace économiquement. De l'autre, la DATAR tend à privilégier des projets moins viables et de plus petite taille, dans une logique d'aménagement du territoire.
Certes, si la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (dite « Pasqua-Hoeffel ») poursuivait une pure logique d'équité 7 ( * ) , la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire (dite « Voynet ») prend davantage en compte l'efficacité économique 8 ( * ) . Cependant, si l'on considère que les investissements étrangers en France ont pour objet essentiel d'augmenter la croissance structurelle de l'économie française, et de créer un nombre élevé d'emplois, une tutelle du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie semble préférable. De plus, la présence à Bercy d'un ministre délégué au commerce extérieur, qui ne saurait être dessaisi des activités de l'Agence, renforce l'opportunité de ce rattachement. Il en va de même pour l'étroite imbrication des fonctions de l'AFII et des missions économiques placées au sein de nos représentations diplomatiques. Enfin, les structures associatives qui relaient dans les régions la délégation à l'aménagement du territoire n'ont pas toujours fait la preuve de leur efficacité...
III. UNE COMMUNICATION COÛTEUSE ET À L'EFFICACITÉ INCERTAINE
La campagne de communication « Image de la France », gérée par l'AFII, a été l'objet de débats dans notre Assemblée.
Cette campagne, lancée en 2004 et prévue pour une durée de 3 ans, vise à « positionner la France comme destination privilégiée des investissements étrangers et à faire reconnaître les atouts d'une France qui change », d'après le site Internet du Premier ministre. Comme indiqué supra , après qu'elle a été dotée de 10 millions d'euros de crédits en 2005, le projet de loi de finances pour 2006 prévoyait de lui affecter 15 millions d'euros de crédits . Un amendement adopté par le Sénat à l'initiative de notre collègue Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques pour la mission « Développement et régulation économiques », avait transféré la hausse de 5 millions d'euros prévue vers le FISAC ; finalement , après la CMP, la loi de finances pour 2006 a doté cette campagne de crédits d'un montant de 13,5 millions d'euros .
Cette somme et le débat, parfois vif, suscité par la campagne « Image de la France », ont conduit votre rapporteur général à s'intéresser à elle ainsi qu'à sa déclinaison dans un pays comme le Japon. Son contrôle sur pièces et sur place du bureau de Tokyo ne lui a permis d'obtenir des éléments que sur la partie de la campagne déléguée à ce bureau, qui ne représente qu'une part minoritaire des crédits en jeu, y compris pour le Japon. C'est pourquoi il a été nécessaire d'obtenir un complément d'information du siège de l'AFII à Paris, le 5 juin 2006.
A. LA COMMUNICATION DÉLÉGUÉE AU BUREAU DE TOKYO N'APPELLE PAS DE COMMENTAIRE PARTICULIER
Le budget délégué au bureau représente, comme on l'a indiqué ci-avant, une part minoritaire de la campagne « Image de la France » et même, semble-t-il, de plus en plus minoritaire. En effet, alors que le budget global de la campagne passait de 10 à 13,5 millions d'euros entre 2005 et 2006, le budget délégué au bureau de Tokyo passait dans le même temps de 400.000 euros à 266.400 euros.
Les principaux éléments de ce budget délégué sont assez classiques et n'appellent pas de commentaires majeurs :
? 50.300 euros de relations publiques ;
? 12.700 euros de publicités sur des cibles très précises (comme la revue de la CCI France-Japon ou « Nikkei publicité en ligne ») ;
? 124.000 euros pour l'événementiel (dont 80.000 euros pour la cérémonie du « prix de l'investissement », ce qui paraît quand même beaucoup) ;
? 64.600 euros pour les publications ;
? 14.800 euros de « marketing direct » (courriers de démarchage, cartes de voeux...).
B. LA COMMUNICATION GÉRÉE AU NIVEAU CENTRAL SEMBLE PLUS CRITIQUABLE
La part la plus importante du budget de la campagne « Image de la France » est donc gérée (et affectée d'un point de vue budgétaire) par le siège parisien de l'Agence .
1. Une campagne très centralisée
La campagne « Image de la France » est pilotée par le siège parisien de l'AFII, avec l'agence de publicité britannique Ogilvy. Celle-ci, par le biais de sa filiale, l'agence médias MindShare, a en outre géré les achats d'espaces publicitaires. Seul le Japon, marché très spécifique, a été traité par une agence locale.
La définition des messages est résolument centralisée, par souci de cohérence selon l'AFII. Pour résumer, le concept central consiste à « faire dire par des étrangers du bien de la France » en tant que terre d'investissement . Cela passe, dans les publicités, par des témoignages de PDG de grands groupes ayant investi dans notre pays. Cela passe aussi par des articles de journalistes étrangers ou des études de « laboratoires d'idées » anglo-saxons suscités par l'AFII. Enfin, il s'agit d'obtenir des organisateurs de forums tels que celui de Davos, la tenue de tables rondes ou d'événements qui permettront de mettre en avant les atouts de la France.
2. Des cibles à la pertinence parfois douteuse
La campagne est très ciblée :
- elle se limite à 5 pays (Etats-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Japon, Chine) ;
- elle ne vise que les dirigeants d'entreprises susceptibles d'investir à l'étranger.
Le choix de ces pays est contestable 9 ( * ) .
Certes, le choix des Etats-Unis et du Japon, les deux premiers investisseurs non européens en France, plutôt que de pays européens réalisant en France des investissements d'un montant supérieur (comme la Belgique ou les Pays-Bas), semble pertinent. En effet, on peut supposer que si la plupart des investissements européens effectués en France ne pouvaient avoir lieu qu'en France, les pays européens sont en revanche en concurrence pour des entreprises non européennes désireuses de s'implanter en Europe.
En revanche, on peut s'interroger sur la pertinence de réaliser une campagne à destination du Royaume-Uni et de l'Allemagne , qui sont respectivement le premier et le troisième investisseurs en France. En particulier, comme cela est indiqué ci-après, la campagne en Allemagne ne semble pas avoir été utile, ce dont l'AFII a d'ailleurs tiré les conséquences en l'arrêtant à la fin du premier semestre de l'année 2005.
De même, le choix de la Chine suscite des interrogations, dans la mesure où la Chine ne réalise quasiment pas d'investissements en France (moins de 10 millions d'euros par an en moyenne). Cela vient du fait que, en raison d'un niveau de développement encore modeste, ce pays investit très peu à l'étranger (environ 2 milliards de dollars par an, soit moins que les seuls investissements italiens réalisés en France). Dans ces conditions, n'est-il pas prématuré de réaliser une campagne de communication à destination de la Chine ? De plus, n'est-il pas naïf de croire que des décisions stratégiques d'implantation, dans le système économique chinois, dépendent d'une campagne médiatique ?
3. Une campagne particulièrement onéreuse
La campagne « Image de la France » a pris de l'ampleur, d'un point de vue budgétaire, au fil des années. En 2006, ses crédits de 13,5 millions d'euros, pourtant réduits par le Parlement, représentent même 51 % de l'ensemble des crédits de l'AFII, ce qui peut laisser à penser que l'attractivité de la France serait, dans l'esprit de ses responsables, davantage une affaire d'image que de fond.
L'objectif affiché de la campagne est de cibler les décideurs économiques de haut niveau, à travers une présence médiatique sélective et une campagne de relations publiques et de relations presse.
Votre rapporteur général s'est fait communiquer les principaux postes de dépenses de la campagne.
a) La campagne publicitaire
Pour l'année 2006, il est prévu des dépenses d'achats d'espace de 4,3 millions d'euros (3,9 millions d'euros dans la presse écrite et 0,4 million d'euros sur internet) suivant la répartition géographique suivante :
- Pour la presse
? « monde », c'est-à-dire journaux et magazines anglo-saxons ayant une large diffusion internationale ( Wall Street Journal , The Economist , Harvard Business Review , International Herald Tribune ) : 1,1 million d'euros ;
? Etats-Unis ( New-York Times , Business Week , Fortune , Forbes , Barron's ) : 1,1 million d'euros ;
? Japon ( Nikkei , Nikkei Business , Shukan Diamond , Courrier ) : 0,8 million d'euros ;
? « Europe » ( Financial Times ) : 0,4 million d'euros ;
? Royaume-Uni ( The Sunday Times , The Daily Telegraph , The Times ) : 0,5 million d'euros.
A la lecture de cette liste, on s'interrogera d'abord sur l'argument de la direction de l'AFII selon lequel tous ces medias seraient spécifiquement dirigés vers le public des chefs d'entreprise susceptibles de prendre des décisions d'investissement en France. Manifestement, nombre de ces titres ont un lectorat beaucoup plus généraliste, voire « grand public »...
- Pour internet
? Etats-Unis (wsj.com, forbes.com) : 0,2 million d'euros ;
? Japon (nikkei.net) : 0,1 million d'euros ;
? « Europe » (ft.com) : 0,1 million d'euros.
A ces frais d'achats d'espace, il convient d'ajouter des frais techniques pour la campagne sur internet (soit environ 15.000 euros), mais surtout les honoraires de l'agence de publicité choisie.
Comme le détaille l'encadré infra , ces frais d'intermédiation, si l'on additionne les multiples types d'honoraires de conception, de « conseil en frais d'intermédiation », de « relations presse » et les commissions d'achats d'espaces, devraient s'élever à 2,3 millions d'euros .
La rémunération de l'agence Ogilvy pour la campagne « Image de la France » Ogilvy, l'agence de communication retenue par l'AFII pour la campagne « Image de la France », perçoit contractuellement de l'AFII plusieurs types de revenus : - des commissions sur l'achat d'espaces publicitaires, par le biais de sa filiale spécialisée MindShare, qui représentent 11 % du prix des espaces achetés. On relèvera que ce type de rémunération n'est pas de nature à inciter le prestataire de service à se montrer performant dans la négociation des tarifs des espaces, ce qui fait pourtant partie de ses missions. Pour 2006, les achats d'espaces prévus s'élevant à 4,4 millions d'euros, ce poste devrait atteindre environ 500.000 euros ; - des honoraires de « conseil en communication, suivi événementiel et relations presse », conclus sur une base forfaitaire annuelle par pays. Ces honoraires s'élèvent à 400.000 euros pour les Etats-Unis et le Japon, à 170.000 euros pour le Royaume-Uni et à 168.000 euros pour l'Allemagne, soit un total d'un peu plus de 1,1 million d'euros ; ce dispositif n'est en rien lié au degré de satisfaction atteint sur tel ou tel territoire : il ne responsabilise pas le prestataire ; - des honoraires de « coordination de la campagne », visant à assurer, de Paris, la cohérence du message délivré dans l'ensemble des pays ciblés. Ces honoraires sont également conclus sur une base forfaitaire, de 300.000 euros par an ; - des honoraires de « suivi hors média », qui correspondent principalement à la conception « d'outils » (plaquettes...) pour les événements auxquels s'associe l'AFII, pour un montant forfaitaire de 360.000 euros. |
b) Les « événements » et les relations publiques
Le principal autre poste de la campagne « Image de la France » concerne son action de « lobbying » entrepris sous des formes diverses, et qui représente un budget global d'un peu plus de 2,9 millions d'euros.
Le budget de la campagne prévoit ainsi 1,7 million d'euros pour les « événements et relations publiques », afin d'assurer la participation de l'AFII à des manifestations comme le forum de Davos ou d'autres tribunes du même type, au cours desquels elle essaie de susciter des ateliers permettant de mettre en valeur l'attractivité de la France. Il convient d'ajouter à cette somme 671.000 euros pour les « outils » utilisés à ces occasions.
Quant aux « relations presse » et au lobbying, consistant à essayer de susciter des articles favorables à notre pays en tant que terre d'accueil d'investissement signés par des journalistes étrangers ou par des « laboratoires d'idées » influents sur les entrepreneurs étrangers, un total de 548.000 euros leur est consacré. Ce montant apparaît à la fois modeste, au vu de l'importance des enjeux, et sans doute excessif par rapport à la nature des dépenses susceptibles d'être ainsi financées : achète-t-on des écrits de journalistes réputés indépendants ou se borne-t-on à faire paraître des quasi « publi-reportages » ?
L'étendue de ces coûts peut certes se comparer à celui d'une campagne de publicité d'une multinationale dans plusieurs pays. Elle oblige néanmoins à s'intéresser de près aux résultats concrets de la campagne « Image de la France ». Or, votre rapporteur général a quelques raisons de ne pas être convaincu de son efficacité en termes d'investissements réalisés in fine sur le territoire français .
4. La campagne « Image de la France » est-elle vraiment incitative ?
Afin de compléter son appréciation de l'efficacité potentielle de la campagne « Image de la France », votre rapporteur général a consulté le site Internet consacré à cette campagne ( http://www.thenewfrance.com/ ).
Le visiteur est accueilli par le slogan : « Welcome to the New France - where the smart money goes ». Le site peut être consulté en anglais, en allemand, en chinois et en japonais. Après une introduction tenant du clip vidéo, le visiteur a la possibilité de télécharger un économiseur d'écran « The New France », et arrive sur un message de la présidente de l'AFII, qui apparaît en photo. Il peut alors cliquer sur trois onglets : « ils ont choisi la France », « investir en France », et « vous aider à réussir ».
La rubrique « investir en France » permet notamment d'accéder à des informations pratiques relativement précises sur l'environnement juridique et fiscal des entreprises étrangères investissant en France. La rubrique « vous aider à réussir » renvoie, quant à elle, au site de l'AFII.
Cependant, le « coeur » de la campagne repose sur des arguments beaucoup moins rationnels, comme cela est normal pour une campagne de publicité, mais présente peut-être une utilité limitée dès lors qu'il s'agit de convaincre des chefs d'entreprise d'investir en France, et non d'inciter des consommateurs à acheter un nouveau produit à la mode. On voit bien que le contenu de la campagne contredit son ciblage tel que le proclame la direction de l'agence.
La rubrique « ils ont choisi la France » réunit des témoignages d'entreprises étrangères ayant investi en France. Ainsi, M. Kunio Egashira, président de la société japonaise Ajinomoto, déclare : « les Français sont célèbres pour leur créativité. Ceci, combiné avec l'approche japonaise des affaires, a permis des réalisations remarquables ».
Exemple de témoignage de la campagne « Image de la France »
Source : http://www.thenewfrance.com/
La rubrique « investir en France » présente, en outre, diverses données - les « chiffres-clés relatifs à la France » - qui sont impossibles à vérifier, faute d'indication de la source, et peuvent susciter des confusions avec des notions voisines. Ainsi, à titre d'exemple :
- le « second pouvoir d'achat en Europe » ne correspond pas au PIB par habitant (inférieur en 2002, parmi les pays de l'Union européenne, à celui de l'Irlande, du Danemark, des Pays-Bas, de l'Autriche, du Royaume-Uni, de la Belgique et de la Suède) 10 ( * ) ;
- le fait que la France est « n° 2 en Europe en pourcentage des travailleurs détenant des diplômes scientifiques et techniques » dissimule qu'en France en 2002 le nombre moyen d'années d'études de la main-d'oeuvre était de 10,9, pour une moyenne de 11,8 dans l'OCDE 11 ( * ) .
Au total, on peut se demander quel chef d'entreprise pourrait être incité à investir en France au vu de cette campagne. Une réaction vraisemblable serait la méfiance, face à une AFII qui semble vouloir l'attirer à tout prix, au besoin par des données apparemment destinées à susciter une confusion dans son esprit.
5. Des résultats contrastés ayant entraîné des ajustements
a) Des résultats en demi-teinte
Il convient tout d'abord de rappeler que la campagne court, de façon structurelle, le risque de se télescoper avec la couverture par la presse internationale d'une actualité française peu engageante en termes d'attractivité. Ainsi, au Japon au moins, la fin de la campagne de l'automne 2005 a été presque immédiatement suivie par le déclenchement de la vague de violences urbaines. Votre rapporteur général ne peut que constater que la contradiction entre ces images est de nature à affaiblir singulièrement la portée du message.
La campagne « Image de la France » fait l'objet de post-tests menés sur une base annuelle dans chacun des pays cibles par TNS Sofres.
Les principaux enseignements de la dernière étude disponible, c'est-à-dire celle réalisée à la mi-2005, sont assez contrastés. On peut les résumer ainsi :
- le souvenir spontané de la campagne s'élève de 3 % à 7 % selon les pays et les scores de reconnaissance à 12 % ou 13 % , ce qui serait, certes, dans la norme de ce type de campagne, mais ce qui montre clairement les limites de l'efficacité des vecteurs choisis ;
- en termes d'agrément, la campagne a plu dans les pays anglo-saxons et y aurait amélioré l'image de la France auprès des décideurs visés. Cela semble particulièrement sensible aux Etats-Unis, où les chiffres pré-campagne étaient très mauvais ;
- en revanche, au Japon, les résultats sont peu exploitables , la culture et la politesse locales interdisant aussi bien les critiques ouvertes que l'expression d'opinions trop personnelles (sur de possibles projets d'investissements par exemple) ;
- enfin, en Allemagne, les post-tests montrent que la campagne n'a servi à rien , l'image de la France en termes d'attractivité y étant très bonne à la base et les messages n'étant pas très adaptés à l'image que les Allemands se font de notre pays. Il convient de relever que, commissions d'agence incluses, le coût de la campagne médiatique allemande a représenté 398.627 euros en 2004 (sur la période d'octobre à décembre) et 254.409 euros en 2005 (sur la période de janvier à mars).
La Chine n'a pas été sondée car, pour ne pas interférer avec l'année culturelle de la France en Chine (qui insistait pour une grande part sur les « clichés traditionnels »), la campagne ne va commencer que dans le courant de l'année 2006 dans ce pays.
b) Les corrections apportées
Au vu de ces résultats, diverses corrections ont été apportées à la campagne :
- aux Etats-Unis, elle a été renforcée , et ne fait plus apparaître que les témoignages de grands patrons américains (comme M. Steve Ballmer, de Microsoft) ;
- au Japon, elle a été modifiée dans le même sens, en se concentrant exclusivement sur des patrons japonais (notamment ceux de Sony et de Toyota) ;
- en revanche, elle a été abandonnée en Allemagne .
Ces corrections montrent à la fois les limites de l'exercice avec une centralisation, sans doute trop forte, de la campagne et l'insuffisance des études en amont.
Dans le même esprit, la campagne de publicité sur internet de l'automne dernier a été décalée de trois semaines en raison de la vague de violences urbaines. A ce sujet, comme sur celui des manifestations anti-CPE, les dirigeants de l'Agence insistent sur le fait que leur cible n'est pas le grand public (effectivement « matraqué » d'images catastrophistes) mais des dirigeants économiques, selon eux bien mieux informés et cédant moins facilement à la caricature.
6. Une prolongation de la campagne, sur une base moins « publicitaire », est envisagée
Si la campagne « Image de la France » a été lancée en 2004 pour une durée de 3 ans, l'AFII souhaiterait à présent la pérenniser , faisant valoir que :
- un message comme celui de l'attractivité de la France doit nécessairement être porté sur le long terme pour atteindre son but ;
- les concurrents de la France ne relâchent pas leur effort.
En revanche, la structure de la campagne devrait changer. Si la publicité dans les médias est qualifiée par l'agence « d'incontournable pour incarner la politique suivie face à l'ensemble des cibles », la stratégie d'investissement est, selon l'AFII, à réorienter en privilégiant les pays anglo-saxons d'un point de vue géographique, et le recours à internet du point de vue du support . Ce média serait le plus à même de fournir un contenu riche et argumenté.
Dans cette logique, l'AFII souhaiterait également améliorer son site internet, qui, selon elle, n'est pas à la hauteur de ceux de pays tels que le Royaume-Uni.
Enfin, l'AFII compte poursuivre sa politique événementielle, ainsi que ses actions de relations presse et de lobbying .
En conséquence, les crédits qui devraient être demandés à ce titre dans le cadre du prochain projet de loi de finances devraient s'élever à 10 millions d'euros (après 15 millions d'euros, réduits à 13,5 millions d'euros par le Parlement, en 2006). Votre rapporteur général estime, compte tenu des observations ci-dessus et des conditions d'élaboration du budget 2007, que le niveau les crédits de cette campagne devrait être compris entre 5 et 7,5 millions d'euros .
IV. UNE VALEUR AJOUTÉE DIFFICILE À MESURER
Au-delà des simples aspects de tutelle et de gestion de la communication, votre rapporteur général a fait porter sa réflexion sur une question plus large : celle de la « valeur ajoutée » de l'AFII .
Cela revient à s'interroger sur deux points :
- quelle est la performance de l'AFII en termes de création d'emplois sur le territoire national ?
- est-il optimal que les missions de l'AFII soient remplies par une agence dédiée, alors qu'il existe d'autres structures qui pourraient peut-être s'en acquitter ?
A. L'EFFICACITÉ DES INTERVENTIONS DE L'AFII RESTE À DÉMONTRER
1. Un objectif principal ne permettant pas de mesurer les investissements réellement suscités par l'action de l'AFII
a) L'objectif de maximisation du « taux de couverture » de l'AFII
La convention d'objectifs et de moyens pour la période 2006-2008, signée le 30 janvier 2006 par l'AFII et ses tutelles dans le cadre de la LOLF, mentionne divers indicateurs, mesurant d'ailleurs bien plus l'attractivité de la France que l'efficacité de l'agence.
Toutefois, l'un d'entre eux ressort particulièrement : le « taux de couverture », défini comme le « nombre d'emplois prévus associés aux projets aboutis, traités par l'AFII et les agences régionales de développement économiques (ARD), rapporté au nombre total d'emplois associés aux décisions d'investissements étrangers en France ».
En effet, deux éléments permettent de faire de ce ratio le principal indicateur de performance de l'AFII jusqu'à cette année :
- d'une part, il s'agit du seul élément transmis au Parlement dans le cadre des projets de lois de finances. Il figure au sein de l'objectif n° 2 « Favoriser les projets d'implantation et de développement d'entreprises internationalement mobiles » de l'action n° 1 « Attractivité et développement économique » du programme 112 « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires », l'AFII étant rattachée à titre d'opérateur principal dudit programme ;
- d'autre part, il s'agit du principal objectif des bureaux de l'AFII situés à l'étranger. Cela ressort tant de l'entretien de votre rapporteur général avec M. Jacques Maleval, directeur du bureau de l'AFII à Tokyo, que des lettres de cadrage, fixant ses objectifs et ses moyens, qui lui ont été remises par la direction de l'AFII, ou encore de l'audition de M. Jacques Maleval devant le conseil de direction de l'agence en mars 2006.
A titre d'illustration, le graphique ci-après indique les résultats observés pour les années récentes, et les prévisions pour 2005 et 2006 figurant dans le PAP de la mission « Politique des territoires » relatif à l'année 2006.
La part des emplois traités par l'AFII dans les emplois liés aux investissements étrangers en France (1)
(en %)
(1) « Nombre d'emplois prévus associés aux projets aboutis, traités par l'AFII et les agences régionales de développement économiques (ARD), rapporté au nombre total d'emplois associés aux décisions d'investissements étrangers en France ».
Source : projet annuel de performances de la mission « Politique des territoires » relatif à l'année 2006
Le même PAP retient, dans les développements présentant l'AFII, une formulation légèrement différente de cet objectif, défini comme un « objectif de création d'emplois d'origine étrangère fixé pour 2006 à 34.400 emplois pour 653 projets ».
b) Un indicateur de performance inadéquat
Une approche en termes de « couverture » des investissements étrangers ne donne, en fait, aucune indication sur l'efficacité et l'efficience de l'AFII.
En effet, au seul vu de cet indicateur, il est impossible de savoir si l'action de l'AFII a permis la création de nombreux emplois en France, ou si elle s'est contentée d'accompagner des opérations qui auraient eu lieu de toute façon .
Les investissements étrangers en France obéissent essentiellement aux mêmes déterminants que les investissements internationaux réalisés dans le monde, avec lesquels ils sont fortement corrélés, comme l'indique le graphique ci-après.
Les investissements étrangers directs en France
(en milliards d'euros)
Source : Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (UNCTAD), d'après les données de la Banque de France dans le cas de la France
Dans ces conditions, l'AFII ne peut sans doute jouer qu'un rôle marginal. Par ailleurs, à volume d'activité donné de l'AFII, le taux de couverture des investissements étrangers en France par des actions de l'AFII augmente mécaniquement quand les investissements étrangers en France diminuent. Les investissements étrangers en France ayant connu un « pic » en 2001, l'AFII n'a aucune difficulté à afficher un taux de couverture élevé, largement dépourvu de signification .
Le contrôle sur pièces et sur place effectué par votre rapporteur général au bureau de l'AFII à Tokyo semble confirmer que l'AFII ne suscite les investissements que dans un nombre marginal d'opérations traitées. En effet, afin de se faire une idée de l'efficacité de l'AFII, votre rapporteur général a demandé à chacun des prospecteurs quelle était l'opération dont il était « le plus fier ». Les opérations évoquées étaient toutes de petite taille, ce qui paraît indiquer que l'AFII ne suscite que des investissements relativement modestes.
Ce phénomène semble inévitable. En effet, les grands groupes internationaux n'ont pas besoin des bureaux de l'AFII pour investir en France. Comme le souligne l'Insee, « en France, la taille moyenne d'une société est de 5 salariés. Celle des filiales de groupes étrangers est de 105 salariés (...). Un écart de cette ampleur n'est pas une exception française : il se retrouve dans tous les pays industrialisés et tient principalement au fait que la présence à l'étranger est, par nature, le fait de grands groupes internationaux » 12 ( * ) .
Ainsi, l'indicateur retenu a des effets pervers : il incite les bureaux de l'AFII à disperser leur action sur un grand nombre de projets, dont la quasi-totalité se serait concrétisée de toute façon.
2. Le récent changement de cap de la direction de l'AFII
La direction de l'AFII semble reconnaître le manque de pertinence de son principal indicateur de performance.
a) Une utilisation du principal indicateur à des fins de communication
Certes, l'AFII utilise ledit indicateur à des fins de communication.
Ainsi, le PAP du programme « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires » indique que l'« objectif de création d'emplois d'origine étrangère fixé pour 2006 à 34.400 emplois pour 653 projets (...) permet de définir un ratio emploi / subvention de 812 euros par emploi créé ».
Ce montant de 812 euros par emploi créé ne correspond à aucune réalité, dans la mesure où les emplois dont l'AFII a effectivement suscité la création en France ne sont, en aucune façon, discernables de ceux que l'Agence n'a fait qu'accompagner.
Le ratio crédits/emplois du bureau de Tokyo D'une manière analogue, le bureau de Tokyo revendique, pour l'année 2005, une intervention dans 23 projets ayant créé ou préservé 1.306 emplois en France . Les chiffres globaux du Japon s'étant élevés, en 2005, selon M. Jacques Maleval, à 30 projets pour 1.506 emplois en France, le bureau revendique un taux de pénétration de son marché de 86 % pour un objectif de 70 %, lui-même nettement au-dessus de la moyenne de l'AFII (qui se situe vers 50 %). Si l'on prenait ces chiffres au pied de la lettre, en rapportant le budget du bureau à celui des emplois « créés ou sauvegardés » sur le sol national, on obtiendrait le ratio impressionnant d'un emploi pour environ 484 euros dépensés. Cependant, il convient d'atténuer ce résultat : ? d'une part, toutes les dépenses de l'AFII au Japon ne sont pas imputées au bureau ; ? d'autre part et surtout, il n'est pas interdit de penser qu'un nombre significatif d'emplois auraient été créés ou sauvegardés même sans l'intervention de l'AFII. |
b) Depuis 2006, une volonté d'inciter les directeurs des bureaux de l'Agence à susciter effectivement des créations d'emplois
La lettre de cadrage du bureau de Tokyo pour l'année 2006 , en date du 30 janvier 2006 et que s'est procurée votre rapporteur général, semble marquer un certain infléchissement . Ladite lettre explique que, dans le cadre de la convention d'objectifs et de moyens précitée, les objectifs de l'AFII évoluent.
En conséquence, explique ladite lettre, une « nouvelle approche innove dans deux directions » et l'Agence devra « s'y adapter très vite ».
? Tout d'abord, l'objectif de l'AFII « devient clairement » ( sic ) celui « d'accroître le résultat de la France par rapport à ses concurrents » . Le directeur des réseaux de l'Agence explique, dans ce courrier qu'il s'agira désormais « non plus seulement d'augmenter grâce à des moyens accrus, le taux de couverture par l'AFII et son réseau des projets aboutissant en France mais aussi, grâce à la valeur ajoutée [des directeurs de bureaux] d'attirer davantage de projets nouveaux mobiles », bref de ne plus seulement « doper le numérateur de la fraction » qu'est la part de marché de l'AFII (selon les termes de la lettre de cadrage) mais aussi son dénominateur.
? Ensuite, la lettre de cadrage demande aux directeurs de bureaux régionaux de mettre en place un décompte plus spécifique des projets qui auront pu aboutir en France grâce à l'action de l'AFII. Il est par ailleurs indiqué que des objectifs chiffrés devraient être fixés à ce sujet dès 2007.
Quelques dossiers pour lesquels l'AFII estime avoir eu une forte valeur ajoutée Interrogée par votre rapporteur général au sujet des décisions d'investissement pour lesquelles elle jugeait que l'agence avait eu une influence déterminante, la direction de l'AFII lui a transmis une liste, non exhaustive comme elle a tenu à le signaler, de 13 dossiers. En excluant deux dossiers représentant 3.700 emplois mais pour lesquels la distinction entre les emplois créés ou maintenus grâce à l'action de l'AFII et les autres n'apparaît pas clairement, la moyenne des emplois créés ou maintenus par ces projets, de taille très diverse, s'élève à environ 140 emplois. A titre d'exemple, voici la description par l'AFII de son rôle pour deux de ces projets. Extension du site de Saint-Amand-les-Eaux d'un laboratoire pharmaceutique La direction française du laboratoire a sollicité l'AFII début 2006 pour qu'elle l'aide à construire un argumentaire pour un projet d'extension du site de St-Amand-les-Eaux dans le Nord de la France. Le groupe avait établi cette présence industrielle en reprenant une entreprise au début des années 2000. Le projet était en concurrence avec la Hongrie, Singapour et éventuellement l'Irlande. L'objectif est de construire l'usine de production du groupe un nouveau vaccin contre le cancer du col de l'utérus. L'impact de l'AFII a été déterminant pour 2 aspects : La mobilisation des acteurs locaux avec la mise en place d'une équipe projet dédiée avec un pilotage national (AFII) et local (SP de Valenciennes) L'argumentation nationale pour le site France Le projet va générer 730 emplois et correspond à un investissement de 450 millions d'euros. Création à Lille et Dunkerque d'une plateforme logistique européenne de distribution de produits alimentaires argentins Ce projet soutenu par la Banque Interaméricaine de Développement et le gouvernement argentin s'inscrit dans un programme de mise en place de 5 plateformes alimentaires en Europe (1 en 2006 et 4 autres en 2007 et 2008). Le projet privilégiait initialement une implantation aux Pays Bas (Rotterdam) voire en Belgique (Anvers). Actions AFII et partenaires régionaux (Nord Pas de Calais, et Normandie en particulier): informations juridiques, fiscales, comparatifs des coûts d'approche entre les différents ports nord européens, présentation de partenaires logistiques et d'acheteurs, offres en locaux. Ce projet modeste en termes d'emplois créés (une dizaine d'emplois directs), permet de positionner la France comme porte d'entrée du marché européen pour les produits alimentaires en provenance des pays émergents alors que Rotterdam est généralement la seule option envisagée. |
B. FAUT-IL UN ORGANISME SPÉCIFIQUE CHARGÉ DE PROMOUVOIR LES INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS EN FRANCE ?
1. La position de l'AFII par rapport aux missions économiques
Tout d'abord, il existait déjà, avant la création de l'AFII, un réseau tout à fait capable de promouvoir les investissements étrangers en France : celui des missions économiques de la DREE (fusionnée dans la DGTPE) à l'étranger.
On peut se demander si ce réseau, aujourd'hui intégré aux ambassades, n'est pas aussi qualifié pour assurer cette mission que celui des bureaux de l'AFII. En effet, on l'a vu, dans plusieurs Etats - Canada, Irlande, Portugal, Autriche, Inde, Singapour, Australie -, l'AFII n'a pas de bureau, mais seulement un correspondant au sein de la mission économique, sans que cela semble poser de problème particulier.
Un protocole d'accord a été signé à ce sujet en janvier 2002 entre l'AFII et la DREE, intégrée depuis à la DGTPE. Ce protocole d'accord prévoit que le réseau de la DGTPE, c'est-à-dire les missions économiques, assure des missions pour l'AFII. Par ailleurs, comme indiqué supra , un contrat d'objectifs et de moyens a été signé le 30 janvier 2006. Les modalités de participation de l'AFII aux coûts du réseau de la DGTPE assurant des missions pour son compte, ainsi qu'aux moyens permettant d'assurer ces missions, sont fixées par une lettre de cadrage annuelle.
Le fait que dans certains Etats les correspondants de l'AFII assurent, semble-t-il sans difficulté particulière, les fonctions remplies ailleurs par les bureaux de l'AFII, peut conduire à s'interroger sur la raison d'être des bureaux de l'AFII. Certes, le décret n° 2001-1091précité du 21 novembre 2001 prévoit que « l'action des bureaux à l'étranger relève de la mission de coordination et d'animation assurée en application de l'article 3 du décret du 1 er juin 1979 (...) par l'ambassadeur, chef de la mission diplomatique, dans les pays où ces bureaux sont implantés ». Cependant, en pratique les bureaux de l'AFII ne sont pas dirigés par l'ambassadeur, mais par le siège de l'AFII. A cela s'ajoute le fait que les bureaux de l'AFII sont parfois géographiquement coupés des ambassades, comme au Japon. Par ailleurs, faire assurer les fonctions des bureaux de l'AFII par les missions économiques permettrait vraisemblablement certaines économies d'échelle : par exemple, est-il efficace que les personnes chargées de trouver des partenaires étrangers pour les entreprises françaises ne soient pas les mêmes que celles chargées de trouver des partenaires français pour des entreprises étrangères ? Enfin, si l'on souhaite recourir au prestige de la fonction d'ambassadeur pour attirer des investissements étrangers, ne serait-il pas plus efficace, plutôt que d'adjoindre un « ambassadeur délégué aux investissements internationaux » à des bureaux relativement « quelconques », de charger directement les « vrais » ambassadeurs de remplir localement les fonctions de l'AFII ?
2. Un rapprochement avec Ubifrance pourrait être envisagé
Ubifrance, l'Agence française pour le développement international des entreprises, est un EPIC placé sous la tutelle du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre délégué au commerce extérieur. Créé par la loi n° 2003-721 du 1 er août 2003 pour l'initiative économique, il est chargé de « favoriser le développement international des entreprises françaises en réalisant ou coordonnant toutes actions d'information, de formation, de promotion, de coopération technique, industrielle et commerciale et de volontariat international ». Il est, en pratique, issu de la fusion du Centre français du commerce extérieur (CFCE) et de l'association Ubifrance (ex. - Comité français des manifestations économiques à l'étranger, ou CFME-ACTIM).
Cette loi, complétée par le décret n° 2004-103 organisant Ubifrance, précise que « l'agence est représentée à l'étranger par le réseau international du ministère chargé de l'économie et des finances, qui met en oeuvre les moyens nécessaires à l'accomplissement de ses missions ». Ainsi, Ubifrance et les missions économiques constituent un réseau d'appui, actif en France et à l'étranger, pour aider les entreprises françaises à se développer à l'international, que ce développement passe par l'exportation ou par l'investissement.
L'AFII apparaît comme une pièce détachée de ce puzzle. Certes, cette agence partage déjà son siège avec Ubifrance. Mais les synergies pourraient sans doute aller beaucoup plus loin . En effet, ces deux structures ont les mêmes interlocuteurs et les mêmes partenaires sur le territoire français, qu'il s'agisse des directions régionales du commerce extérieur (DRCE), des chambres de commerce et d'industrie (CCI), des agences de développement ou des collectivités territoriales. En outre , l'AFII et Ubifrance ont de nombreuses missions communes : analyse de l'offre française et du tissu économique, et promotion de la France à l'étranger.
L'hypothèse d'un rapprochement plus poussé entre l'AFII et Ubifrance, voire d'une fusion de ces deux établissements publics, mérite donc d'être considérée de près . Votre rapporteur général estime que l'annonce du prochain départ de l'actuelle présidente de l'AFII rend le moment présent propice à ce type de changement d'organisation.
CONCLUSION
Au bout du compte, si le personnel du bureau tokyoïte de l'AFII semble s'acquitter honorablement de sa tâche et gérer convenablement l'argent public dont il dispose, l'agence elle-même, dans sa configuration actuelle, suscite certaines perplexités.
Créée en 2001 au moyen d'un amendement déposé in extremis par le gouvernement sans que votre commission des finances ait eu le temps de l'examiner, elle apparaît comme une « électron libre » dans l'administration . Le nécessaire resserrement des liens de l'AFII avec l'Etat semble devoir passer par la suppression du statut d'ambassadeur reconnu à son président , par l'augmentation du nombre relatif de représentants des deux ministères de tutelle au sein de son conseil d'administration , dans lequel le ministre chargé du commerce extérieur devrait également être représenté, et par la réunion de ses crédits au sein d'un programme unique .
La campagne « Image de la France », très coûteuse (13,5 millions d'euros au titre de l'année 2006), est d'une efficacité incertaine , en particulier son volet publicitaire . En conséquence, votre rapporteur général estime que les crédits alloués à la poursuite de cette campagne devraient être compris entre 5 et 7,5 millions d'euros.
Enfin, et surtout, on peut s'interroger sur la « valeur ajoutée » de l'AFII, dans sa configuration actuelle tout au moins. D'une part, il ne semble actuellement pas possible de mesurer les investissements réellement dus à l'action de l'agence , au vu des sérieuses limites de son principal indicateur de performance. D'autre part, le réseau que constituent les missions économiques à l'étranger et Ubifrance semble, dans une large mesure, capable de remplir les mêmes fonctions , tout en bénéficiant de l'intégration des missions au sein des ambassades.
La piste d'un renforcement des liens entre l'AFII et ce réseau, qui pourrait aller jusqu'à la nomination d'une « tête commune » de l'AFII et d'Ubifrance (sous réserve des ajustements statutaires qui pourraient s'avérer nécessaires) , voire jusqu'à la fusion de ces deux agences, pourrait donc être mise en oeuvre.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 5 juillet 2006, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a tout d'abord entendu une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur l' Agence française pour les investissements internationaux (AFII).
M. Jean Arthuis, président , a rappelé que cette communication était le fruit d'un contrôle sur pièces et sur place du bureau de l'AFII à Tokyo, que la délégation du bureau de la commission, en déplacement dans cette ville, avait chargé M. Philippe Marini, rapporteur général, de réaliser en application de l'article 57 de la loi organique relative aux lois de finances.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Philippe Marini, rapporteur général , a tout d'abord précisé que l'idée de ce contrôle provenait de remarques de chefs d'entreprises français installés au Japon, qui s'étaient étonnés de la dissonance entre la campagne de communication « Image de la France », gérée par l'AFII, qui se traduit notamment par des publicités dans la presse, et le traitement de la France dans les médias japonais, par exemple à l'occasion des manifestations contre le « contrat premier embauche ». Il a, en outre, estimé que le départ annoncé de l'actuelle présidente de l'agence pouvait fournir une opportunité de réforme de l'agence, si cela devait s'avérer nécessaire.
Puis M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que la création de l'AFII en 2001 s'était faite par le biais d'un amendement du gouvernement lors de la première lecture au Sénat du projet de loi sur les nouvelles régulations économiques (devenu la « loi NRE »), dont il était le rapporteur. Il a ajouté que, considérant que cet amendement « arrivait trop tard pour que la commission des finances puisse disposer de tous les éléments nécessaires », il s'en était alors remis à la sagesse du Sénat. Il a, par ailleurs, rappelé que, dans son rapport spécial relatif aux crédits de l'aménagement du territoire pour 2002, M. Roger Besse, estimant que cet amendement avait été déposé « un peu à la sauvette », avait également « déploré cette méthode qui avait interdit à la commission des finances d'examiner dans le détail le projet du gouvernement et d'envisager les aménagements qui auraient pu se révéler nécessaires ».
M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite rappelé que l'AFII était, concrètement, issue de la fusion des agences à l'étranger de l'ancienne Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) et de la Délégation aux investissements internationaux (DII). Il a précisé que les services centraux de l'AFII réunissaient 60 personnes et son réseau à l'étranger 80 personnes, réparties sur 20 bureaux (10 en Europe, 3 aux Etats-Unis et 7 en Asie), auxquelles s'ajoutaient 9 correspondants de missions économiques (3 en Europe, 3 au Canada et 3 en Asie). Il a souligné qu'au total, l'AFII était représentée dans 19 pays, sans que les critères de choix aient toujours paru très clairs.
Il a ensuite relevé qu'au sein du budget de l'AFII, la campagne « Image de la France » représentait 13,5 millions d'euros, soit 51% des crédits de l'AFII pour 2006, les crédits de la campagne étant inclus dans la subvention imputée sur la mission « Développement et régulation économiques ».
Puis M. Philippe Marini, rapporteur général, a fait part des constats qu'il avait pu effectuer. Il a ainsi indiqué que le bureau de Tokyo, dont les locaux étaient situés dans un quartier aux loyers modérés, ne semblait pas gérer de façon dispendieuse l'argent des contribuables. Il a déclaré que les 13 postes du bureau de Tokyo se répartissaient ainsi : 5 agents expatriés de droit français (le directeur, son adjoint et 3 prospecteurs) ; 8 agents de droit local, dont le régime était analogue au CDI français (un responsable administratif et financier, une prospectrice, un « lobbyiste » venant d'une grande entreprise japonaise, un responsable de la communication, 2 assistantes à Tokyo, une assistante à Osaka et une assistante à Nagoya).
Il a estimé que le budget global, soit 632.000 euros, n'était pas choquant pour un pays aussi important et au coût de la vie aussi élevé que le Japon, relevant au passage que la moyenne des investissements annuels japonais en France de 1996 à 2003 s'était élevée à 463 millions d'euros, ce qui en faisait le 14 e investisseur dans notre pays sur cette période.
M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est ensuite intéressé à la direction de l'AFII. Il a souligné que le président de cet établissement public était l'ambassadeur délégué aux investissements internationaux, nommé à ce titre par décret du président de la République en Conseil des ministres (article 13 de la Constitution), ce qui réduisait sans doute l'influence des tutelles de l'agence. Il a jugé que ce statut pouvait se traduire par une ambiguïté pour les personnels de l'AFII basés à l'étranger, ceux-ci devant répondre à la fois à l'ambassadeur territorial du pays dans lequel ils se trouvent, et à l'ambassadeur extra-territorial qui préside l'agence.
Puis M. Philippe Marini, rapporteur général, a évoqué le conseil d'administration de l'AFII. Il a indiqué que ledit conseil comptait 18 membres, dont seulement 7 représentaient l'Etat, les 2 tutelles que sont le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie d'une part, et le ministre chargé de l'aménagement du territoire d'autre part, n'en ayant que 2 chacun. Il a par ailleurs souligné, pour le regretter, que le ministre chargé du commerce extérieur n'était pas représenté au sein de ce conseil. Il a précisé également que, aux représentants de l'Etat, s'ajoutaient 4 représentants des collectivités territoriales, 4 personnalités qualifiées, 2 représentants élus du personnel et le président de l'AFII.
Il a estimé que, pour rétablir une véritable tutelle, il semblait nécessaire de remettre en cause le statut d'ambassadeur du président de l'AFII, de renforcer la proportion des représentants des 2 ministères les plus concernés au conseil d'administration, au sein duquel le ministre chargé du commerce extérieur devrait aussi être représenté. Il a jugé qu'il convenait également de regrouper l'ensemble des crédits de l'AFII sur un programme unique, le programme « Développement des entreprises », situé au sein de la mission « Développement et régulation économiques », dans l'orbite de Bercy, lui paraissant le plus approprié car la première mission de l'AFII relève de l'efficacité économique de la France.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite orienté son propos sur la campagne de communication « Image de la France », gérée par l'AFII. Il a rappelé que ladite campagne, lancée en 2004, devait durer 3 ans, c'est-à-dire s'achever en 2007, remarquant que l'AFII semblait à présent penser qu'une action de ce type devait s'inscrire dans le long terme. Il a souligné que, à l'automne 2005, lors du débat sur les crédits de la mission « Développement et régulation économiques », figurait dans le projet de loi de finances pour 2006 un amendement de M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, adopté par le Sénat, qui avait ramené les crédits alloués à la campagne de 15 à 10 millions d'euros, soit le même montant que pour l'année 2005. Il a rappelé que la commission mixte paritaire avait ensuite fixé ces crédits à 13,5 millions d'euros.
Puis, s'intéressant au volet publicitaire de la campagne « Image de la France », il a indiqué que les achats d'espaces publicitaires concernaient, pour 2006, des médias qualifiés par l'AFII de « mondiaux » pour 1,1 million d'euros ; des médias américains pour 1,1 million d'euros ; des médias japonais pour 0,8 million d'euros ; un journal dit « européen » pour 0,4 million d'euros et enfin des médias britanniques pour 0,5 million d'euros. Il a expliqué que cette campagne était également diffusée sur 3 sites internet à vocation économique.
Il a indiqué que l'agence de publicité détentrice du marché de la campagne et sa filiale d'achat d'espaces percevaient 11 % du prix des espaces achetés au titre des commissions d'achat d'espaces, soit 0,5 million d'euros, auquel il convenait d'ajouter un montant total forfaitaire de 1,8 million d'euros au titre d'honoraires en « conseil en communication, suivi événementiel, coordination de campagne ou encore suivi hors médias ».
M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite abordé le volet « événements et relations publics » de la campagne « Image de la France », dont il a estimé le coût à plus de 2,9 millions d'euros. Il a expliqué qu'il s'agissait, d'une part, de « faire parler » de la France dans des forums tels que celui de Davos, et d'autre part, de susciter des articles favorables de journalistes étrangers ou encore de « laboratoires d'idées ». Il a relevé qu'à ces chiffres s'ajoutaient des « frais divers », notamment le personnel temporaire (0,5 million d'euros), les post-tests (0,2 million d'euros), ou encore la réalisation d'outils pour les salons (0,7 million d'euros).
M. Philippe Marini, rapporteur général , a précisé que la campagne « Image de la France » visait 5 pays : les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l'Allemagne, le Japon et la Chine, relevant que ce dernier pays restait, du fait de son développement, un investisseur modeste, doutant de surcroît que les investisseurs chinois puissent être influencés dans leurs décisions par une telle campagne de publicité.
Il a observé qu'alors que l'AFII affirme ne viser que les dirigeants les plus importants des groupes susceptibles d'investir en France, la campagne s'appuyait sur des médias souvent à large diffusion. Il s'en est étonné, estimant que cela ne pouvait qu'augmenter le coût de la campagne sans cibler précisément le public visé.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a ensuite évoqué le message diffusé par l'agence, l'estimant exagérément optimiste, ce qui pourrait parfois susciter la méfiance des individus informés que sont généralement les investisseurs potentiels.
Puis, au sujet des résultats de la campagne « Image de la France », il a relevé que, d'après les « post-tests » réalisés à la demande de l'AFII, le souvenir spontané de la campagne s'élevait de 3 à 7 % selon les pays, et les scores de reconnaissance, quand on montrait de nouveau les images aux intéressés, à 12 ou 13 %. Il a précisé que ces résultats étaient vraisemblablement dans la moyenne des campagnes de promotion, mais qu'ils montraient les limites de l'intérêt de l'utilisation des vecteurs de communication choisis. Il a souligné, d'autre part, que les mêmes « post-tests » ayant démontré l'inutilité de la campagne publicitaire allemande, celle-ci avait été abandonnée.
Il a déclaré qu'à l'avenir, l'AFII souhaitait privilégier les publicités sur internet et la partie « relations publiques et relations presse » de la campagne et que le budget envisagé pour 2007 était ainsi de 10 millions d'euros.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a ensuite abordé le sujet de la place de l'AFII au sein de l'organisation française de soutien au développement économique extérieur. Remarquant que, dans plusieurs pays, l'AFII n'avait pas de bureau, mais seulement un correspondant au sein de la mission économique, il a plaidé pour une intégration plus forte de l'agence au sein desdites missions. Dans le même esprit, il s'est demandé, en outre, s'il n'était pas opportun d'envisager un rapprochement de l'AFII et d'Ubifrance, l'Agence française pour le développement international des entreprises.
S'intéressant enfin à la performance globale de l'AFII, M. Philippe Marini, rapporteur général , a critiqué le principal indicateur de l'agence, c'est-à-dire son « taux de couverture », mesuré, dans chaque pays par la fraction suivante :
- au numérateur, le nombre d'emplois créés ou sauvés par les investissements des entreprises du pays concerné, pour lesquels l'AFII est intervenue à un moment quelconque du dossier et qu'elle « labellise » en conséquence ;
- au dénominateur, le nombre d'emplois créés ou sauvés par les investissements totaux des entreprises de ce pays en France.
Il a estimé qu'un tel ratio était largement artificiel, l'AFII pouvant ne pas avoir un rôle moteur dans un projet qu'elle s'attribue. Il a toutefois indiqué que l'AFII semblait en avoir pris conscience, se référant à la « lettre de cadrage » envoyée par la direction de l'agence aux directeurs de bureaux, fixant leurs objectifs et leurs moyens pour l'année 2006. Constatant qu'il ne disposait donc pas, pour l'heure, d'indicateur représentatif de la « valeur ajoutée » de l'agence, il a simplement souligné que, lorsqu'il avait interrogé les prospecteurs du bureau de Tokyo sur les réalisations dont ils étaient « le plus fiers » et pour lesquelles leur rôle avait été décisif, ceux-ci lui ont tous cité des projets de taille très modeste.
M. Philippe Marini, rapporteur général , après avoir renouvelé ses critiques concernant la campagne de communication « Image de la France », a déclaré en conclusion qu'il convenait de définir clairement les responsabilités de chacun, aussi bien en termes de définition des missions que de gouvernance de l'AFII.
Un large débat s'est ensuite instauré.
En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président , M. Philippe Marini, rapporteur général , a précisé que la commission de déontologie aurait à se prononcer sur le changement de poste de l'actuelle présidente de l'AFII. M. Jean Arthuis, président , a estimé qu'il aurait été préférable que cette commission se prononce avant l'annonce de ce changement.
M. Aymeri de Montesquiou a tout d'abord affirmé que les questions concernant le rôle et l'organisation de l'AFII devaient pouvoir se poser à tout moment, c'est-à-dire même s'il n'y avait pas de perspective de changement à la tête de cet établissement public. Il a ensuite déclaré que l'agence avait des objectifs et disposait de moyens, mais ne semblait pas avoir de stratégie, relevant qu'il paraissait difficile de distinguer, parmi les investissements résultant des dossiers dans lesquels l'AFII était intervenue, ceux réellement dus à l'action de l'agence. Il s'est, en outre, interrogé sur le type d'investissements engendrés par cette action. Enfin, s'appuyant sur des exemples étrangers, il s'est demandé si une entreprise privée, intéressée aux résultats, ne pourrait être plus efficace pour la promotion des investissements en France.
Après une intervention de M. Maurice Blin sur le mode de gouvernance de l'AFII, Mme Nicole Bricq a constaté que, malgré ses critiques à l'égard du fonctionnement de l'agence, M. Philippe Marini, rapporteur général, n'en proposait pas la disparition, s'interrogeant, pour sa part, quant au bien-fondé de son existence même. Par ailleurs, elle a souhaité savoir si l'AFII fonctionnait en liaison avec les agences régionales de développement.
M. Denis Badré a estimé nécessaire que l'éventuelle nomination d'un successeur à l'actuelle présidente de l'agence n'intervienne pas avant une réflexion de fond sur le rôle de cet établissement public. Il s'est inquiété des possibles manques d'efficience résultant de doublons entre ses activités et celles des missions économiques. Au sujet du budget de l'AFII et de la campagne « Image de la France », il a jugé qu'il convenait d'aller « au bout de la logique de la LOLF », selon laquelle un budget doit correspondre à une mission et être proportionné à l'atteinte des objectifs fixés.
Après une demande de précision de M. Yann Gaillard , M. Philippe Marini, rapporteur général , a répondu aux commissaires qui s'étaient exprimés.
Il a tout d'abord expliqué que le but de sa communication était de susciter un débat, et qu'il tiendrait compte des interventions de chacun pour finaliser les conclusions de son rapport d'information, rejoint sur ce point par M. Jean Arthuis, président .
M. Philippe Marini, rapporteur général , a ensuite souligné que, comme l'avait remarqué M. Denis Badré, il y avait une redondance entre l'AFII et les missions économiques, qui accomplissent, dans une large mesure, les mêmes fonctions. Il a en outre ajouté qu'Ubifrance, qui peut s'assimiler à un « service d'information et de conseil greffé sur les missions économiques », agissant sous la tutelle du ministre chargé du commerce extérieur, s'inscrivait également dans ce cadre. Il en a conclu que, dès lors, une des propositions de son rapport d'information pourrait consister à rapprocher l'AFII et Ubifrance, dont la tête commune n'aurait pas vocation à conserver le titre d'ambassadeur délégué aux investissements internationaux.
Puis, répondant à Mme Nicole Bricq, il a déclaré que les interlocuteurs de l'AFII au niveau territorial étaient les conseils régionaux. Plus précisément, il a indiqué que l'agence saisissait les structures de développement dépendant des conseils régionaux des dossiers qu'elle avait détectés, celles-ci ayant la charge de les répartir à l'échelon local.
En réponse à M. Aymeri de Montesquiou, M. Philippe Marini, rapporteur général , a, en premier lieu, expliqué que si la réflexion sur les structures ne saurait se réduire à une affaire de personne, le départ annoncé de l'actuelle présidente de l'AFII pouvait constituer une opportunité afin d'envisager une réforme de fond.
Il a ensuite déclaré que les statistiques utilisées par l'agence, notamment dans le calcul de son « taux de couverture », ne comportaient pas de distinction sectorielle.
Enfin, au sujet du dispositif français des missions économiques, il a souligné que les chefs et les personnels de ces missions avaient beaucoup évolué et étaient, dans leur grande majorité, des personnes motivées et efficaces, qui avaient su adapter leur outil de travail à leur environnement, même s'ils se sentaient parfois « un peu isolés ». Il a jugé souhaitable une reformulation des objectifs de ces missions : il conviendrait ainsi d'accroître les prestations de services facturées aux entreprises à des tarifs en rapport avec les prix pratiqués sur chacun de leur marché.
M. Aymeri de Montesquiou a estimé que ce débat constituait une occasion opportune de réfléchir à l'organisation du dispositif national en matière de commerce extérieur. Tout en reconnaissant la valeur des personnels des missions économiques, il a exprimé ses doutes quant à leur répartition géographique. Il s'est également demandé si ces missions correspondaient bien à la réalité de l'économie contemporaine, soulignant que les petites entreprises disposaient de nombreux moyens d'information, notamment grâce à internet, et que les grandes entreprises avaient leurs propres réseaux. Appuyant sa réflexion par l'exemple de l'Allemagne, il a déclaré qu'il convenait peut-être de réfléchir à une organisation entièrement nouvelle d'appui au commerce extérieur, les indicateurs de performance de la LOLF pouvant fournir d'utiles informations afin de déterminer le cadre optimal.
M. Denis Badré a souligné que les missions économiques, l'AFII et Ubifrance constituaient le premier contact avec la France pour de nombreuses entreprises étrangères et que, dès lors, notre organisation se devait d'être exemplaire et ne pas offrir l'image d'un pays suradministré.
M. Jean Arthuis, président , tout en reconnaissant la nécessité de ce type de réflexion, a tenu à recentrer le débat sur l'AFII, objet du contrôle de M. Philippe Marini, rapporteur général.
La commission a alors autorisé la publication du rapport d'information de M. Philippe Marini, rapporteur général , celui-ci indiquant qu'il tiendrait compte du débat de la commission afin de préciser sa conclusion, notamment en ce qui concerne l'hypothèse d'un rapprochement entre l'AFII et Ubifrance.
* 1 Depuis intégrée à la direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE).
* 2 Le décret n° 2001-1091 du 21 novembre 2001 précité prévoit que l'AFII « accomplit sa mission en coopération avec des organismes chargés de la promotion économique des territoires qui assurent à l'échelon régional ou interrégional le rôle de correspondant de l'agence ».
* 3 La Conférence des Nations-Unies sur le commerce et le développement (UNCTAD) ne donne pas le montant pour les années 1996 à 1998.
* 4 Il s'agit, outre de l'ambassadeur délégué aux investissements internationaux, des ambassadeurs suivants : ambassadeur délégué à la coopération régionale dans la zone de l'Océan indien ; ambassadeur délégué à la coopération régionale dans la zone Antilles-Guyane ; ambassadeur en mission chargé du codéveloppement ; ambassadeur itinérant délégué à l'environnement ; ambassadrice chargée de la lutte contre le VIH-SIDA et les maladies transmissibles ; ambassadeur délégué pour le sommet mondial de la société de l'information ; ambassadeur itinérant en charge de la dimension internationale de la Shoah, des spoliations et du devoir de mémoire ; ambassadeur chargé du processus euroméditerranéen initié à Barcelone ; ambassadeur chargé de questions économiques internationales ; ambassadeur pour les droits de l'Homme ; ambassadeur chargé de la lutte contre la criminalité organisée ; ambassadeur en mission, Haut Représentant pour la sécurité et la prévention des conflits.
* 5 Les représentants des collectivités territoriales sont actuellement MM. François Patriat, président du conseil régional de Bourgogne ; Jean-Paul Huchon, président du conseil régional d'Ile-de-France ; Jean-Paul Denanot, président du conseil régional du Limousin ; Martin Malvy, président du conseil régional de Midi-Pyrénées.
* 6 Le programme 134 « Développement des entreprises » de la mission « Développement et régulation économiques », à hauteur de 18,9 millions d'euros en 2006 ; et le programme 112 « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires », à hauteur de 7,5 millions d'euros en 2006.
* 7 La loi n° 95-115 fixait deux objectifs : « assurer, à chaque citoyen, l'égalité des chances sur l'ensemble du territoire et (...) créer les conditions de leur égal accès au savoir » et permettre « la mise en valeur et le développement équilibré du territoire de la République ».
* 8 Si le développement local au sein de pays et le soutien des territoires en difficulté figurent parmi les choix destinés à favoriser l'équité, les deux autres stratégies retenues - renforcement de pôles de développement à vocation européenne et internationale et organisation d'agglomérations - apparaissent plus marquées par la recherche de l'efficacité.
* 9 Source utilisée ci-après : Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (UNCTAD), d'après les données de la Banque de France dans le cas de la France. La période prise en compte est celle allant de 1996 à 2003.
* 10 Source : OCDE, « Purchasing Power Parities », 11 janvier 2005.
* 11 Source : OCDE, « Regards sur l'éducation 2004 », 2004.
* 12 Jean-William Angel et Virginie Régnier, « Les groupes étrangers en France », « Insee Première », n° 1069, mars 2006.