LE FINANCEMENT DE LA PROTECTION SOCIALE : LA FIN DU MODÈLE BISMARCKIEN ?
I. LA PROTECTION SOCIALE ALLEMANDE : UNE ARCHITECTURE EN CRISE
A. LES DÉPENSES À CARACTÈRE SOCIAL : PRÈS DU TIERS DU PRODUIT INTÉRIEUR BRUT
Selon le dernier « Rapport social » (Sozialbericht) , remis le 10 août 2005 au Bundestag par le Gouvernement fédéral, le budget social de la Nation approchait, en 2003, un montant global d'environ 700 milliards d'euros , soit 32,2 % du produit intérieur brut allemand. Cette proportion constituait le pourcentage le plus élevé jamais atteint depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Cet ordre de grandeur est comparable à celui constaté en France . Les dernières données fournies par Eurostat pour 2003 1 ( * ) révèlent en effet des taux très proches de part de dépenses à caractère social dans le produit intérieur brut : 30,2 % en Allemagne (sur la base d'un total légèrement inférieur en montant à celui affiché dans le rapport social du Gouvernement allemand) et 30,9 % en France. Les dépenses par habitant sont pratiquement identiques et s'élèvent à près de 8.000 euros par an dans les deux pays.
A la date de la réunification, en 1991, le poids des dépenses sociales n'était encore que de 27,8 % du produit intérieur brut. En treize ans, l'Allemagne a donc subi une évolution au terme de laquelle les dépenses à caractère social sont passées du quart environ du PIB à près du tiers .
A l'intérieur de l'enveloppe globale de 700 milliards, la part prise par les mécanismes d' assurance sociale (qui comprennent les dépenses en faveur de l'emploi) est d'environ les deux tiers, avec près de 500 milliards d'euros de dépenses en 2003. Le reste se répartit entre les prestations du régime spécifique des fonctionnaires (essentiellement en ce qui concerne les retraites), le régime des employeurs, les dépenses de solidarité financées par l'impôt et les prestations indirectes, telles les exonérations et abattements d'impôts.
La proportion des assurances sociales et des dépenses en faveur de l'emploi ainsi que celle des prestations indirectes dans les dépenses à caractère social ont progressé de 1991 à 2003, passant, pour la première de ces deux parts, de 62,4 % du total à 65,8 %.
Une fraction prédominante des dépenses à caractère social est concentrée sur deux postes :
- la vieillesse : 267,8 milliards d'euros de dépenses, soit 12,4 % du PIB en 2003. Sur ce total, le régime d'assurance vieillesse relevant du régime général de sécurité sociale représente 238,2 milliards d'euros , soit 11 % du PIB ;
- la santé : 235 milliards d'euros de dépenses, soit 10,9 % du PIB en 2003. Sur ce total, les dépenses des caisses relevant du régime légal d' assurance maladie atteignent 143,3 milliards d'euros , soit 6,6 % du PIB .
Les autres postes pèsent d'un poids plus faible : l'indemnisation du chômage et les dépenses pour l'emploi représentent autour de 70 milliards d'euros en 2003 (3,2 % du PIB) ; les prestations liées à la famille et à l'enfance s'élèvent à environ 100 milliards d'euros (4,7 % du PIB).
* 1 « European social statistics - Social protection - Expenditure and receipts - Data 1995-2003 » - Eurostat (Février 2006).