IV. VERS UN CERCLE VERTUEUX
A. UNE CORRÉLATION ÉTROITE ENTRE L'EXAMEN DES CRÉDITS ET LES ACTIVITÉS DE CONTRÔLE : DEUX EXEMPLES
La première discussion budgétaire au « format LOLF » a permis de mettre en lumière le lien étroit et « structurel » entre contrôle budgétaire et examen de la loi de finances.
D'une part, l'activité de contrôle en amont de la loi de finances s'est révélée riche de potentialités pour l'examen des crédits des missions . Ainsi, la discussion des crédits de la mission « Justice » s'est-elle largement appuyée sur le rapport d'information n° 478 (2004-2005) de notre collègue Roland du Luart, rapporteur spécial des crédits de la mission « Justice », « La LOLF dans la justice : indépendance de l'autorité judiciaire et culture de gestion ».
D'autre part, la discussion budgétaire a également conduit au déclenchement de certains contrôles menés en 2006 . Ainsi, les interrogations survenues lors de la discussion des crédits de la « Sécurité civile » ont-elles abouti à un contrôle conduit par notre collègue Claude Haut, rapporteur spécial des crédits de la mission « Sécurité civile », portant sur le renouvellement et la maintenance de la flotte de sécurité civile. De même, le débat sur la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » a-t-il débouché sur un contrôle budgétaire mené par notre collègue Henri de Raincourt, rapporteur spécial des crédits de cette mission, portant sur les dépenses de fonctionnement des préfectures.
Les exemples des contrôles budgétaires sur la flotte de sécurité civile et les dépenses de fonctionnement des préfectures sont analysés ci-après.
1. Le contrôle budgétaire sur le renouvellement et la maintenance de la flotte aérienne de sécurité civile
Dans un courrier en date du 25 janvier 2006 adressé à M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, notre collègue Claude Haut, rapporteur spécial des crédits de la mission « Sécurité civile », a annoncé qu'il avait décidé de conduire un contrôle budgétaire sur le renouvellement et la maintenance de la flotte aérienne de sécurité civile. En effet, depuis 2005, la flotte de sécurité civile a été dramatiquement affectée par la disparition tragique, en service, de quatre pilotes. Le contrôle du rapporteur spécial s'inscrit en fait dans la continuité des travaux menés lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, comme le rappelle le compte rendu intégral des débats en séance publique le 6 décembre 2005 :
« J'évoquerai dans un premier temps le programme « Interventions des services opérationnels ».
« Ce programme inclut les moyens destinés à développer et à optimiser les services opérationnels nationaux destinés à protéger la population en cas de catastrophe, et ce en complément des moyens départementaux de secours. Vous savez que ceux-ci représentent de lourdes charges financières pour nos collectivités.
« Les dépenses d'investissement du programme sont en revanche réduites de 15,9 millions d'euros - soit une baisse de 26,2 % -, en raison de l'achèvement du programme d'acquisition de deux avions bombardiers d'eau gros-porteurs polyvalents Dash. Les moyens dégagés par la fin de ce marché ont été en partie recyclés pour le remplacement d'un Canadair accidenté en 2004, pour la pérennisation de la location d'un hélicoptère bombardier et pour l'acquisition d'un module d'intervention NRBC, nucléaire, radiologique, biologique et chimique.
« La flotte aérienne de la sécurité civile est actuellement constituée de 65 aéronefs, dont 41 hélicoptères. Le renouvellement de la flotte d'hélicoptères est maintenant terminé. S'agissant de la flotte d'avions, qui intervient principalement dans la lutte contre les feux de forêts, l'année 2005 aura été marquée par trois accidents mettant hors d'usage l'un de nos dix Canadair et deux de nos dix bombardiers d'eau Tracker. Le remplacement de ces appareils accidentés au cours de l'été 2005 n'est pas prévu dans le présent budget .
« Le principe de leur remplacement cette année serait « admis » par le ministère des finances, bien que tous les moyens y afférents ne figurent pas dans les crédits proposés pour la mission « Sécurité civile » en 2006. Il est vrai que le ministère a engagé une réflexion sur une « optimisation » de la politique d'équipement en aéronefs de la sécurité civile. Celle-ci a débouché, comme nous l'a indiqué M. le ministre d'État lors de son audition par la commission des finances, sur l'achat d'un bombardier d'eau Dash, en lieu et place du remplacement de deux Tracker. Je ne sais pas si c'est la meilleure solution opérationnelle.
« L'immobilisation, à la suite de ces accidents, de la totalité des Canadair pendant plus d'une semaine au mois d'août dernier, au coeur de la haute saison, témoigne incontestablement des difficultés que rencontre notre flotte. Aussi, j'engagerai sur cette question un contrôle budgétaire durant l'année 2006 » 38 ( * ) .
Ce contrôle, dont les conclusions devraient faire l'objet d'un rapport d'information en juillet 2006, s'est traduit par un déplacement en avril de notre collègue Claude Haut, rapporteur spécial des crédits de la mission « Sécurité civile » au groupement d'hélicoptères de la sécurité civile à Nîmes, ainsi qu'à Marignane, sur la base d'aviation de la sécurité civile, qui abrite notamment les Canadair.
Le rapporteur spécial s'est attaché à répondre à quatre questions :
- la maintenance de la flotte aérienne est-elle assurée dans de bonnes conditions ? Le rapporteur spécial a ainsi pu visiter les centres de maintenance et s'entretenir avec les spécialistes, qui ont été rassurants sur ce point ;
- la stratégie d'achat du ministère de l'intérieur, notamment le choix de remplacer deux avions de type « Trackers » par un « Dash 8 », est-elle justifiée ? Il est en effet apparu sur place certaines divergences entre les pilotes d'avion et le ministère sur les capacités de cet avion qui, de fait, feront l'objet d'une évaluation durant l'été 2006 ;
- la flotte de sécurité civile , qui a connu de lourdes pertes ces deux dernières années, sera-t-elle opérationnelle pour la « saison des feux 2006 » ? Sur ce point, il est apparu qu'un Canadair avait été remplacé, ce qui ramène la flotte à 11 aéronefs, le rapporteur spécial ayant fait part de son souhait de l'acquisition d'un douzième appareil en 2007 ;
- enfin, quelle est la visibilité budgétaire et opérationnelle sur le long terme , sachant que les investissements dans ce secteur doivent faire l'objet de prévision très en amont, et que la quasi totalité de la flotte de Canadair et de Trackers devra cesser son activité en 2020 ?
* 38 J.O. Débats Sénat 6 décembre 2005 p. 8.909.