2. La formation, clé du développement du bénévolat122 ( * )
Lors de la présentation, le 8 juillet 2004, des grands axes de sa politique associative, devant le Conseil économique et social, M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, rappelait que « les crédits de l'ex-FNDVA (fonds national pour le développement de la vie associative) sont traditionnellement mobilisés de façon importante pour le développement de la formation des bénévoles » et annonçait qu'il avait « demandé aux établissements formateurs du ministère de la jeunesse des sports et de la vie associative de participer activement à cette offre de formation en concertation avec les DDVA (délégations départementales à la vie associative) pour un dispositif opérationnel en 2005 », reconnaissant par là même les lacunes de l'offre disponible.
a) Former les bénévoles : un puissant facteur incitatif à l'engagement et un impératif pour les dirigeants associatifs
Le constat est unanime : pour rendre le « travail » des bénévoles plus attrayant, pour renforcer leurs motivations, le recours à une formation est indispensable.
Dans un contexte de professionnalisation des tâches, conséquence de la complexification du cadre comptable et juridique auquel les associations sont confrontées, la formation des dirigeants associatifs est même devenue un impératif.
Mme Bénédicte Halba en convient dans son ouvrage paru à la documentation française : « s'il y a une « crise des bénévoles », sans doute est-elle d'abord celle des « bénévoles au long cours » (présidents, secrétaires, trésoriers...) qui assistent à la montée croissante des charges administratives et des responsabilités afférentes, générant un sentiment d'impuissance et des frustrations. »
L'acquisition de compétences offerte aux bénévoles souffre d'un présupposé négatif selon lequel la « professionnalisation » du bénévolat engendrerait des répercussions négatives sur l'emploi, le bénévole prenant la place d'un salarié à compétence égale.
Il convient de rappeler que la logique économique est loin d'être absente des préoccupations du secteur associatif : loin derrière l'Etat, les associations emploient en effet presque autant de salariés que l'artisanat. Au 31 décembre 1995, plus de 120 000 associations employaient près de 1,2 million de personnes, soit un équivalent de 960 000 emplois à temps plein.
A l'instar du rapporteur du groupe de travail sur la valorisation des ressources humaines dans les associations lors des Assises nationales de la vie associative, votre rapporteur considère que l'opposition bénévole-salarié est un outil conceptuel dépassé, puisque le bénévolat crée de l'activité qui permet le développement de l'emploi, lequel soutient l'engagement bénévole dans l'association.
La formation, facteur d'attraction pour les candidats à l'engagement, apparaît également comme une nécessité pour les élus associatifs, si on veut leur donner les moyens d'assumer les responsabilités grandissantes auxquelles ils doivent faire face.
M. Dominique Le Mèner, député, auteur de la proposition de loi sur le statut de l'élu associatif, propose l'institution d'un crédit à la formation, financé par les associations, à hauteur de 2 % de leur budget de fonctionnement, offert aux élus qui souhaitent suivre une formation dans un des organismes agréés par l'Etat.
Même si cette proposition est séduisante, le plafond de dépenses fixé paraît irréaliste à votre rapporteur : la fixation d'un plafond obligatoire à 0,5 % des dépenses de fonctionnement lui semble préférable et il formulera des propositions en ce sens.
En tout état de cause, l'inscription de dépenses obligatoires consacrées à la formation dans le budget associatif ne doit pas servir de prétexte à l'affaiblissement du soutien des pouvoirs publics. Or, la budgétisation du Fonds dont les crédits doivent servir à financer les actions de formation des bénévoles associatifs augure aujourd'hui très mal du maintien de l'enveloppe existante.
b) Le désengagement des pouvoirs publics
Conformément à l'instruction annuelle du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative 123 ( * ) relative aux subventions attribuées pour l'année 2005 au titre de la formation des bénévoles, le Fonds national pour le développement de la vie associative (FNDVA), créé en 1985, avait pour mission principale d'accorder aux associations des subventions destinées à titre principal 124 ( * ) au financement d'actions de formation tournées vers la conduite du projet associatif au bénéfice des responsables d'activités, ou adhérents.
Dans son rapport sur sa proposition de loi relative à la création d'un chèque emploi associatif 125 ( * ) , M. Jean-Pierre Decool, député, relevait déjà les insuffisances de ce Fonds reflétant « quelques-uns des travers de l'aide aux associations ».
Parmi ces travers il relevait l'absence de garantie sur l'évolution de son montant et sur sa pérennité, « menacée par la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances ».
Il notait aussi les effets néfastes de la faible déconcentration de la gestion du Fonds, qui « semble de ce fait davantage profiter aux grandes associations, généralement parisiennes ».
La clôture du Fonds, opérée par la loi de finances pour 2004 126 ( * ) , a eu pour corollaire l'inscription des crédits au sein du titre III du budget du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative, et l'institution d'un Conseil du développement de la vie associative (CDVA) 127 ( * ) , chargé de proposer au ministre les priorités dans l'attribution des fonds.
Cette budgétisation a induit, comme le prédisait M. Jean-Pierre Decool, une baisse du montant de l'enveloppe des crédits, dont le taux de consommation a, par ailleurs, toujours été hasardeux.
Rappelons en outre les conditions extrêmement restrictives posées par les instructions ministérielles afin de pouvoir bénéficier de ces fonds : la personne dont le projet de formation est retenu doit, notamment, être impérativement adhérente à l'association, ce qui exclut du bénéfice des fonds la grande majorité des bénévoles.
Votre rapporteur estime que cette situation n'est pas acceptable, à l'heure où le Gouvernement affiche la volonté de soutenir le monde associatif et lance des appels toujours plus nombreux aux bonnes volontés, par le biais, notamment, de grandes campagnes nationales, à l'instar de l'opération « Envie d'agir » 128 ( * ) , initiée par le ministère de la jeunesse et des sports en 2003.
Les expériences étrangères montrent qu'une véritable politique de soutien à la formation des bénévoles est possible.
A titre d'exemple, le Programme VolNet 129 ( * ) , mis en place au Canada en 1999 et doté de 15 millions de dollars, se donnait pour ambition de « brancher » le secteur canadien du bénévolat à Internet, en offrant des services de raccordement, du matériel informatique, des formations à Internet et un soutien technique aux organismes bénévoles du pays.
Le programme, qui s'est étalé sur quatre ans, a permis de raccorder au réseau 11 152 organismes bénévoles à travers le Canada, de former 17 353 personnes à Internet et de financer en partie l'achat de 8 725 ordinateurs à un fournisseur national.
Il serait temps de s'inspirer d'une telle opération pour donner, en France, un nouveau souffle à la formation des bénévoles.
Le renforcement du soutien financier serait d'autant plus opportun que l'offre de formation en direction du secteur associatif s'améliore.
M. Jean-François Lamour l'annonçait lors de la présentation, le 8 juillet 2004, des grandes lignes de sa politique associative au Conseil économique et social : « J'ai demandé aux établissements formateurs du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative de participer activement à l'offre de formation en concertation avec les DDVA pour un dispositif opérationnel en 2005 ».
C'est ainsi qu'aujourd'hui, les établissements publics placés sous la tutelle du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative, mettent leurs locaux et leur matériel à disposition des directions départementales de la vie associative le samedi et le dimanche pour accueillir les formations.
Il faut aujourd'hui relayer ces efforts, notamment :
- en proposant aux élus associatifs des modules de formation prise en charge par la structure d'accueil ;
- en mettant en place un tronc commun de formation, inexistant à l'heure actuelle.
* 122 Titre issu du rapport « bénévolat et salariat » de Mme Bénédicte Halba, à la Documentation française, précité.
* 123 Instruction du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative du 5 janvier 2005, annexée au présent rapport.
* 124 A titre complémentaire, le FNDVA accorde des subventions destinées à la réalisation d'études ou d'expérimentation de nature à contribuer à une meilleure connaissance de la vie associative et à son développement.
* 125 Rapport n° 236 (12leg) fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur la proposition de loi de M. Jean-Pierre Decool relative à la création d'un chèque emploi associatif.
* 126 Article 39 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 portant loi de finances pour 2004.
* 127 Composé de 11 représentants de différents ministères, de 8 représentants des associations nommés sur proposition de la conférence permanente des coordinations associatives et de 3 personnes qualifiées nommées sur proposition du Conseil national de la vie associative.
* 128 Visant les jeunes de onze à vingt-huit ans, cette campagne avait pour objectif de soutenir et accompagner les jeunes qui décident de mettre leur temps et leur énergie au service d'une cause d'intérêt général.
* 129 Ce programme s'inscrivait dans le cadre de l'initiative du gouvernement fédéral, « Un Canada branché ».