III- UNE DANGEROSITÉ TARDIVEMENT PRISE EN COMPTE
La dangerosité de l'amiante est connue depuis le début du XXème siècle, mais les mesures de prévention ont tardé à se mettre en place. L'interdiction de tout usage de l'amiante à compter du 1 e ` janvier 1997, a permis de stopper le flux d'amiante, substance très largement utilisée pour ses propriétés multiples dans plus de 3000 produits, mais n'a pas fait disparaître le risque. Il se manifeste encore aujourd'hui, en particulier lors d'intervention dans des bâtiments dont la construction a fait appel à des matériaux contenant de l'amiante. Les risques sont élevés dans de petites entreprises artisanales mais ne sont pas nuls dans les grandes. La situation en matière de prévention s'est améliorée mais elle n'est cependant pas encore optimale. Le décret n°96-98 du 7 février 1996 prévoit ainsi des règles spécifiques pour les activités de retrait d'amiante et toutes activités d'entretien et de maintenance sur des matériaux contenant de l'amiante. Ces dispositions devraient être renforcées sur certains aspects en 2005 dans le cadre de la transposition d'une directive européenne de 2003.
En 2004 a été organisée une campagne de contrôle ciblée sur les chantiers de désamiantage et l'attention des services déconcentrés devrait être de nouveau appelée dans le cadre de la directive nationale d'orientation sur la nécessité de poursuivre les efforts de contrôle en la matière en 2005. D'après le ministère du travail (MICAPCORP), en 2002, l'inspection du travail a, en matière d'amiante, prononcé 6611 observations, dressé 70 procès verbaux et intimé 30 arrêts de travaux. Les tribunaux, selon la même source ont prononcé 7 condamnations, dont 1 pour récidive ; 2 étaient des condamnations d'emprisonnement et 2 d'affichage ou publication.
A. LA RESPONSABILITÉ DE L'ETAT
Le Conseil d'Etat dans quatre arrêts du 3 mars 2004 reconnaît la responsabilité de l'Etat du fait de sa carence fautive à prendre les mesures de prévention des risques liés à l'exposition des travailleurs aux poussières d'amiante.
Le Conseil d'Etat affirme tout d'abord que, si l'employeur est tenu de protéger la santé des travailleurs placés sous son autorité, il incombe aux autorités publiques chargées de la prévention des risques professionnels de se tenir informées des dangers que peuvent courir les travailleurs dans le cadre de leur activité professionnelle et d'arrêter, en l'état des connaissances scientifiques, les mesures les plus appropriées pour limiter et si possible éliminer ces dangers.
Partant de ce principe, le Conseil d'Etat relève que la cour administrative d'appel n'a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis en jugeant que, alors que le caractère nocif des poussières d'amiante était connu de longue date et que leur caractère cancérigène avait été mis en évidence dès le milieu des années cinquante, les autorités publiques n'avaient entrepris, avant 1977, aucune recherche afin d'évaluer les risques pesant sur les travailleurs exposés à ces poussières d'amiante, ni pris de mesures aptes à éliminer ou à limiter les dangers.
Cette décision doit être mise en regard des décisions de février 2002 de la Cour de cassation pour apprécier la responsabilité des différents acteurs.