Rapport d'information n° 393 (2003-2004) de MM. Gérard CÉSAR , Jean-Paul ÉMIN , Gérard CORNU , Henri REVOL , Max MAREST , Bernard JOLY , Jean-Pierre BEL , Daniel REINER et Mme Odette TERRADE , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 30 juin 2004

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N° 393

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SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 30 juin 2004

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) à la suite d'une mission d'information effectuée en Roumanie et Bulgarie du 18 au 25 avril 2004 ,

Par MM. Gérard CÉSAR, Jean-Paul ÉMIN, Gérard CORNU, Henri REVOL, Max MAREST, Bernard JOLY, Jean-Pierre BEL, Daniel REINER et Mme Odette TERRADE,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine, président ; MM. Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Bernard Piras, Mme Odette Terrade, M. Francis Grignon, vice-présidents ; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Gérard Cornu, Jean-Marc Pastor, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard Claudel, Marcel-Pierre Cléach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Détraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Bernard Dussaut, André Ferrand, Hilaire Flandre, François Fortassin, Alain Fouché, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kergueris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, René Monory, Jacques Moulinier, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Henri de Richemont, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Yannick Texier, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial.

Europe.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent rapport a pour ambition de vous rendre compte des principales réflexions et analyses établies par les membres de la mission d'information sur la Roumanie et la Bulgarie, à la suite du déplacement qu'ils ont effectué dans ces deux pays du 18 au 25 avril dernier. Il reprend en les développant les premières observations présentées à la commission des Affaires économiques peu de temps après le retour de la mission.

Le choix de ce déplacement était principalement motivé par l'examen de la situation de la Roumanie et de la Bulgarie au regard de leur processus d'adhésion à l'Union européenne, qui devrait aboutir en janvier 2007. Il s'agissait également, pour les membres de la mission, de prendre la mesure des relations bilatérales entretenues par la France avec ces deux pays.

Pour ce faire, et au delà des auditions très éclairantes tenues avec des responsables politiques de chacun des pays et en particulier, en Bulgarie, l'audience du Président de la République, la délégation a souhaité se déplacer, afin de rencontrer des chefs d'entreprises ou d'exploitations et de prendre la mesure des réalités économiques et sociales. Au préalable, nous avions procédé à quelques auditions préparatoires très utiles pour préciser le contexte du déplacement.

A cet égard, la délégation tient à remercier très chaleureusement l'ensemble des interlocuteurs, qui sont intervenus avec professionnalisme et efficacité dans l'organisation de ce déplacement. Il s'agit, outre nos deux ambassadeurs dont la connaissance et la pertinence des points de vue exprimés sur chacun des pays nous ont beaucoup éclairés, de l'ensemble des services des deux ambassades et en particulier les missions économiques et les services culturels. En ce qui concerne la Roumanie, le rôle de la chambre de commerce franco-roumaine fut déterminant pour l'organisation des visites d'entreprises.

Réunie le 30 juin 2004, la commission des Affaires économiques a examiné ce rapport et l'a adopté à l'unanimité.

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CHAPITRE I :
UN PROCESSUS D'ADHÉSION EN BONNE VOIE

De très importantes avancées politico-économiques ont été réalisées en vue de l'adhésion, même si des progrès majeurs restent encore à accomplir.

- I. UNE TRANSITION POLITICO-ÉCONOMIQUE EN VOIE D'ACHÈVEMENT

A. UNE STABILISATION POLITIQUE PROGRESSIVE

1. Au niveau international

a) Une situation géographique particulière faisant de ces pays des « pivots » entre l'Occident et l'Orient

Situées à l'Est de la péninsule balkanique et à l'Ouest de la Mer Noire, séparées naturellement par le fleuve Danube, la Roumanie (22 millions d'habitants) et la Bulgarie (8 millions d'habitants) possèdent, outre une frontière commune, des frontières avec de nombreux pays : ex-Yougoslavie, Hongrie, Ukraine et Moldavie pour la première ; ex-Yougoslavie, Grèce et Turquie pour la seconde.

Cette situation géographique très particulière fait de ces pays de véritables « plaques tournantes » entre Europe centrale, Europe occidentale, Europe orientale, Balkans, Moyen-Orient et Asie mineure, régions dont ils conservent d'ailleurs les influences mêlées.

b) Un objectif prioritaire d'adhésion à l'OTAN pour assurer la sécurité extérieure

Afin d'assurer leur sécurité, Roumanie et Bulgarie ont fait de l'adhésion à l'OTAN une priorité dès l'effondrement du bloc communiste. Econduits des premiers élargissements de l'Organisation atlantique, ils se sont finalement vus invités à la rejoindre lors du sommet de Prague (21-22 novembre 2002), leur adhésion ayant pris acte respectivement les 3 mars et 2 avril derniers.

Si cette attitude nettement pro-atlantiste et le rapprochement américain qui l'a accompagnée ont pu susciter quelques réactions de la part de l'Union européenne, ils ne s'attachent principalement qu'au domaine de la sécurité. Pour ce qui est du développement économique, c'est en effet à l'Union européenne que la préférence a été nettement donnée. « La paix par l'OTAN et la prospérité par l'Union européenne » est ainsi la devise de ces deux pays en matière de politique étrangère.

On notera par ailleurs que la Roumanie a succédé à la Bulgarie au sein du Conseil de sécurité de l'ONU au 1 er janvier 2004.

c) Une volonté de jouer un rôle stabilisateur dans la région

A un niveau plus régional, ces deux pays s'efforcent d'entretenir de bonnes relations avec les Etats voisins et de jouer un rôle « pivot ». C'est ainsi que la Roumanie favorise depuis peu l'intégration des différentes composantes régionales dans des structures de coopération économique ou militaire. Quant à la Bulgarie, son président, M. Gueorgui Parvanov, a très clairement indiqué à la délégation que son pays souhaitait jouer un rôle « stabilisateur » dans les Balkans en y « générant de la sécurité ».

Si ce désir de jouer un rôle actif dans la région ne fait donc pas de doute, il n'en reste pas moins qu'un tel volontarisme se heurtera sans doute aux aspirations similaires de pays voisins tels que la Grèce ou la Turquie -avec lesquelles la Roumanie et la Bulgarie sont d'ailleurs associées au sein de deux « trilatérales »- ou tel encore que la Serbie.

2. Au niveau européen

a) Un européisme sans ambiguïté ayant permis d'enclencher le processus d'adhésion

Les sentiments pro-européens de la Roumanie et de la Bulgarie ne font aucun doute. Les différents responsables politiques, administratifs et économiques rencontrés par la délégation ont tous souligné de façon explicite leurs attentes à cet égard. Ils ont également fait référence à des sondages indiquant régulièrement que leurs populations plébiscitent l'adhésion à plus de 80 %. Ce n'est d'ailleurs sans doute pas un hasard si aucun de ces pays ne possède de parti d'extrême-droite anti-européen.

Malgré ce consensus sur la nécessité d'une adhésion aussi rapide que possible à l'Union européenne, celle-ci n'est pas encore réalisée à l'heure où viennent d'y rentrer dix nouveaux pays. Non retenues au Conseil européen de Luxembourg de 1998 dans les deux premières vagues de pays invités à ouvrir des négociations, du fait des retards accumulés dans le processus de transition, la Roumanie et la Bulgarie craignaient d'être à nouveau reléguées dans une sorte de « troisième groupe » faisant office d'antichambre.

Des assurances ayant été données quant au respect des conditions exigées par la Commission européenne, le Conseil européen d'Helsinki de décembre 1999 a finalement décidé l'ouverture de négociations, qui ont débuté pour les deux pays en février 2000. Le Conseil européen de Copenhague (12-13 décembre 2002) s'est ensuite donné pour objectif d'accueillir ces ceux pays dans l'Union européenne en 2007, tandis que le Conseil européen de Thessalonique (19-20 juin 2003) a déclaré soutenir leurs efforts en vue d'une conclusion des négociations en 2004, date dont on a pu se demander par la suite si elle ne devrait pas être reportée d'une année.

Les incertitudes sont en effet encore importantes, tant en ce qui concerne la clôture des négociations que la date d'adhésion. Ainsi, le Conseil européen de Bruxelles (12 décembre 2003) a souligné que la Roumanie et la Bulgarie « devraient poursuivre résolument leurs travaux préparatoires et réaliser des progrès supplémentaires sur le terrain de manière à ce que les négociations d'adhésion puissent être menées à bien en 2004, selon les mérites de chaque pays, et que le traité d'adhésion puisse être signé dès que possible en 2005 ».

Le dernier Conseil européen en date, qui s'est tenu à la mi-juin à Bruxelles, a toutefois confirmé que la Roumanie et la Bulgarie faisaient partie du « même processus d'élargissement inclusif et irréversible » que les dix nouveaux Etats membres, se félicitant des progrès réalisés par ces deux pays dans les négociations d'adhésion et réitérant leur objectif d'adhésion en 2007 « s'ils sont prêts ».

b) Des efforts importants consentis en vue d'une intégration rapide de l'acquis communautaire

D'importants efforts ont été consentis en matière législative et règlementaire dans la transposition de l'« acquis communautaire », qui constitue l'une des trois grandes catégories de critères (les deux autres étant les situations politique et économique du pays) dont le respect est pris en compte par les institutions européennes pour évaluer l'état de préparation à l'adhésion.

Ainsi, en Roumanie, un ministère a été créé spécialement en janvier 2001 pour assurer la cohérence du droit national par rapport au droit communautaire. La délégation a rencontré deux de ses secrétaires d'Etat, qui lui ont indiqué effectuer, pour chaque projet ou proposition de loi, ce contrôle de conformité, et proposer le cas échéant les modifications nécessaires dans le droit national, y compris la révision du texte constitutionnel en 2003. Ils ont également insisté sur le fait que 7.500 actes normatifs en ce sens ont été pris depuis l'indépendance du pays en 1991.

Les derniers rapports annuels de la Commission européenne sur l'état d'avancement de la Roumanie et de la Bulgarie en vue de l'adhésion, datant tout deux du 5 novembre 2003, ont confirmé l'efficacité du travail fourni en la matière. Ils ont ainsi estimé que les deux pays avaient accompli des progrès constants dans la plupart des domaines de l'acquis et étaient en bonne voie pour transposer la législation requise avant la date d'adhésion prévue s'ils maintenaient le rythme de leurs avancées .

c) Des négociations d'adhésion en cours de finalisation à des rythmes divers

Le problème se pose toutefois dans des termes différents pour la Roumanie et la Bulgarie, la seconde étant nettement en avance dans son processus de transition par rapport à la première. Ce décalage se traduit clairement au niveau des avancées de la négociation, puisque sur trente chapitres 1 ( * ) , six restent ouverts pour la première, alors que la seconde les a tous provisoirement fermés.

La Roumanie espère clôturer les négociations avant la fin de l'année, les deux pays se donnant pour objectif de signer un traité d'adhésion l'année prochaine, de le ratifier en 2005-2006 et d'être en mesure d'adhérer au 1 er janvier 2007. Tous les responsables, tant politiques qu'administratifs, rencontrés par la délégation se sont dits confiants dans le respect de ce calendrier.

La Roumanie souhaite fermer au moins deux chapitres (libre circulation des services et énergie) durant la présidence irlandaise de l'Union européenne au premier semestre de cette année ou au plus tard en juillet. Elle espère également être « techniquement prête » à clôturer le chapitre relatif à la politique régionale avant la fin de ladite présidence. Resteraient donc trois chapitres qualifiés de « très difficiles » (concurrence, environnement, et justice et affaires intérieures) à travailler sous la présidence néerlandaise. De la rapidité avec laquelle ils seront négociés dépendra sans doute en partie le respect de l'objectif d'adhésion fixé pour 2007. De façon très encourageante, un rapport d'étape publié par les autorités communautaires au mois de juin met en évidence les progrès réalisés par la Roumanie sur chacun de ces chapitres, particulièrement en ce qui concerne la réforme administrative et judiciaire, la lutte contre la corruption et l'économie.

Quant à la Bulgarie, elle a fermé les quatre derniers chapitres de négociation avec l'Union européenne (concurrence, agriculture, politique régionale, et dispositions financières et budgétaires) à l'issue de la conférence ministérielle du 15 juin 2004 à Luxembourg et se trouve donc en bonne voie pour adhérer en 2007. Elle a toutefois du accepter une clause de sauvegarde renforcée qui permettrait à l'Union européenne de retarder son adhésion d'un an si elle rencontrait des problèmes graves à remplir ses obligations comme pays membre, clause à laquelle la Roumanie devra également consentir. En outre, la clôture des différents chapitres de négociation avec la Bulgarie devra être validée officiellement par le prochain rapport annuel de la Commission européenne, qui sera publié à l'automne.

3. Au niveau national

La stabilisation politique de la Roumanie et de la Bulgarie au plan interne découle de l'instauration d'un véritable Etat de droit garantissant la démocratie et l'alternance. Il s'agit d'ailleurs là d'une des trois catégories de critères d'adhésion dont le respect est contrôlé par les autorités communautaires : le Conseil européen de Copenhague exige une stabilité des institutions garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme, le respect et la protection des minorités. Or, les deux derniers rapports de la Commission européenne soulignent explicitement que les deux pays continuent de remplir ces critères politiques.

a) Des régimes politiques institutionnellement viables

La Roumanie, tout d'abord, a adopté par référendum en 1991 une nouvelle constitution reprenant de nombreuses dispositions de la constitution française. Comme l'a expliqué à la mission le président du Sénat, M. Nicolae Vacaroiu, elle pose les bases d'un régime semi-présidentiel cherchant à éviter une trop grande instabilité ministérielle et à placer les deux chambres sur un strict pied d'égalité. Cet équilibre des pouvoirs entre le Parlement, le Gouvernement et la Présidence s'est avéré satisfaisant à l'usage, bien que source de certaines lenteurs.

La Bulgarie, quant à elle, a également adopté en 1991 une nouvelle constitution instituant un régime parlementaire assez marqué, associant un Président de la République ayant des pouvoirs limités, un Gouvernement responsable devant le Parlement et une chambre -unique- qui nomme le Premier ministre et les ministres. Combinant prévalence du Législatif sur l'Exécutif et élections législatives au scrutin proportionnel, ce régime a été à l'origine d'une assez grande instabilité ministérielle, qui a donné toutefois au pays l'occasion de tester les vertus de l'alternance.

b) Une situation politique désormais stabilisée

La Roumanie semble être entrée dans une période d'accalmie durable, après avoir connu plusieurs alternances parfois violentes depuis l'indépendance. Le Gouvernement actuel est issu des élections de la fin de l'année 2000, gagnées par le Parti social démocrate (PSD) -ex parti communiste- présidé par M. Adrian Nastase, aujourd'hui Premier ministre, le Président de la République étant M. Ion Iliescu. Il dispose d'une majorité relative au Parlement où seules cinq formations sont désormais représentées : le PSD, le Parti Romania Mare (PRM), le Parti démocrate (PD), le Parti national libéral (PNL) et l'Union démocratique des Magyars de Roumanie (UDMR).

La scène politique est actuellement dominée par la perspective des échéances électorales de cette année : outre les élections locales du début du moins de juin, se dérouleront fin novembre et jusqu'à la mi-décembre les élections législatives et présidentielles.

En Bulgarie, le Gouvernement de coalition de centre-droit formé en 2001 réunit le Mouvement national Siméon II (parti du Premier ministre) et le Mouvement pour les droits et libertés (MDL). Les deux élections de 2001 ont donc créé une situation politique particulière, voyant cohabiter un ex-tsar devenu Premier ministre (Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha) et un Président de la République ex-communiste (Gueorgui Parvanov).

Les autres partis politiques représentés au Parlement sont l'Union des forces démocratiques (UFD), parti de droite ayant remporté les élections en 1997, ainsi que l'opposition, constituée du Parti socialiste bulgare (PSB) et du nouveau Parti communiste bulgare (PCG).

c) Des progrès vers la constitution d'un véritable Etat de droit

Si d'importantes avancées demeurent nécessaires, les derniers rapports d'étape de la Commission soulignent que la Roumanie et la Bulgarie continuent de respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales et qu'elles ont accompli des progrès appréciables dans de nombreux domaines.

La Roumanie s'est ainsi attachée à réformer son système de protection de l'enfance, à améliorer les droits des minorités nationales ou encore à mieux appliquer sa législation anti-discrimination. En Bulgarie, le cadre juridique en matière de droit d'asile, de protection de l'enfance et d'intégration des minorités s'est considérablement amélioré.

B. UNE SITUATION ÉCONOMIQUE ENCOURAGEANTE

1. Des indicateurs macroéconomiques positifs

La période de transition qui a fait suite à l'effondrement du bloc communiste a été particulièrement difficile pour ces deux pays, qui ne bénéficiaient plus des avantages commerciaux offert par le COMECON. Ayant beaucoup tardé à se réformer sur le plan des structures économiques, ils ont accumulé jusqu'à récemment un important retard de croissance par rapport à leurs voisins d'Europe centrale. Ainsi, la Roumanie enregistrait en 1999 une croissance négative de 4 %, un taux d'inflation de plus de 50 %, ou encore un taux de chômage de 12 %. Quant à la Bulgarie, elle connaissait une crise sans précédent la laissant au bord de la banqueroute en 1996-1997.

Toutefois, depuis une période que l'on peut faire remonter à l'année 2000, ils semblent entrés dans une phase vertueuse de rattrapage dont rendent nettement compte leurs indicateurs macroéconomiques. En Roumanie , la croissance du PIB, redevenue positive depuis 2000, varie depuis l'année suivante entre 4 et 5 %, tandis que le taux d'inflation est retombé à moins de 15 % et celui du chômage à environ 8 %. En Bulgarie , le taux de croissance varie depuis 2000 entre environ 5 et 6 %, tandis que le taux d'inflation est constamment resté sous les 10 % , le taux de chômage présentant pour sa part une certaine rigidité à la baisse en se stabilisant aux environs de 15 % .

Notons également que le déficit des administrations publiques de ces deux pays, inférieur à 3 % du PIB, est aujourd'hui sous contrôle, au prix il est vrai de très importants efforts. Quant à la dette extérieure, elle s'est stabilisée à un peu plus de 20 % du PIB en Roumanie et a été réduite de moitié en Bulgarie, où elle reste il est vrai encore très élevée, à un peu moins de 50 % du PIB.

2. La mise en place de structures propres à des économies de marché

Si la transition a donc été douloureuse pour la Roumanie et la Bulgarie, qui ont toutes deux tarder à se réformer, ces deux pays semblent aujourd'hui constituer -ou sur le point de constituer- de véritables économies de marché ouvertes à la concurrence tant interne qu'externe, dernier des trois critères dont le respect est exigé par les institutions communautaires pour qu'un pays soit considéré comme susceptible d'adhérer à l'Union européenne.

Sur ce point également, la Bulgarie semble devancer sa voisine roumaine puisqu'elle s'est vue reconnaître explicitement le statut d'économie fonctionnelle de marché dès 2002, là où le dernier rapport de la Commission publié en novembre 2003 dit simplement de la Roumanie qu'elle « peut être considérée comme une économie de marché viable dès lors que les progrès satisfaisants qui ont été accomplis sont poursuivis avec fermeté ».

En Bulgarie, le programme de privatisation a été entamé dès 1992 avec la mise en place d'une agence spécialisée, chargée de préparer les opérations de cession d'actifs en respectant les priorités économiques du Gouvernement, à savoir attirer les investisseurs étrangers, soutenir la croissance et favoriser l'emploi. Les objectifs semblent aujourd'hui en grande partie atteints puisqu'en août 2003, plus de 82 % des actifs de l'Etat avaient été privatisés, générant 30 % des investissements étrangers sur la période, et ayant contribué à financer le déficit de la balance courante et à soutenir la croissance du PIB.

En Roumanie, pays célèbre par les structures de production surdimensionnées (« diplodocus ») dont l'avait doté Nicolae Ceaucescu, la première vague de privatisations a eu lieu après l'adoption en 1991 d'une loi en ce sens. Mais si la Commission reconnaît que « la privatisation et la restructuration des entreprises publiques se sont accélérées », notamment dans le secteur bancaire où elles sont en passe d'être achevées, l'absence d'approche globale des réformes, un certain manque de volontarisme ainsi que les interventions encore massives de l'Etat dans l'économie empêchent les entreprises privées de se développer, notamment dans les secteurs de l'énergie, des industries extractives et des transports, où des progrès importants restent à effectuer.

3. Des avantages comparatifs notables attirant les investisseurs

Comme pour les autres pays européens nouvellement adhérents, la Roumanie et la Bulgarie attirent en masse les investisseurs étrangers, occidentaux notamment, d'abord en raison de la compétitivité du coût de la main d'oeuvre. Les salaires y sont en effet en moyenne dix fois inférieurs à ceux de la France, et jusqu'à quinze fois -voire plus- dans les secteurs agricole et textile . Presque tous les entrepreneurs français rencontrés par la mission ont d'ailleurs cité cet élément comme déterminant dans leur projet de localiser leur site de production dans l'un de ces deux pays.

Mais le faible coût de la main-d'oeuvre ne suffirait pas à attirer en masse les investisseurs si celle-ci s'avérait de médiocre qualité en termes de productivité. Or, la Roumanie et la Bulgarie se caractérisent par un très bon niveau de formation des travailleurs, ces deux pays ayant toujours entretenu une tradition faisant de l'enseignement, théorique comme pratique, une priorité nationale. Irrigué par des nombreuses écoles et facultés - spécialisées pour beaucoup dans les domaines scientifiques et techniques - en relation directe avec le secteur industriel, la Roumanie et la Bulgarie sont en mesure de proposer aux entrepreneurs une main d'oeuvre très qualifiée, possédant une forte capacité d'adaptation et source d'une importante productivité.

Cet élément a d'ailleurs été régulièrement cité par la communauté française dans ces deux pays comme primordial dans le choix de ses implantations, aux côtés de l'avantage tiré du faible coût de la main d'oeuvre. La délégation a ainsi pu constater qu'Alcatel avait décidé de délocaliser son centre de maintenance mondiale, requérant des ingénieurs et techniciens hautement qualifiés, à Timisoara. Cet atout n'est cependant pas sans poser de problème puisque les travailleurs les plus qualifiés, attirés par des salaires bien plus élevés, ont tendance à émigrer à l'étranger, alimentant une « fuite des cerveaux » qui pourrait devenir une préoccupation majeure pour ces pays.

La situation géographique de la Roumanie et de la Bulgarie constitue un autre avantage appréciable en termes économiques . Situés à l'interface entre l'Europe, la Russie, l'Asie et le Nord de l'Afrique, ils bénéficient d'un climat semi-continental ne faisant pas obstacle au développement d'activités industrielles et commerciales, de paysages variés se prêtant au tourisme, de nombreuses montagnes largement pourvues de forêts ou encore de vastes plaines aux terres fertiles. Accessibles par n'importe quel moyen de locomotion, y compris par bateau vu leur proximité d'avec la Mer Noire, ils présentent en outre l'intérêt, souligné à plusieurs reprises par les entrepreneurs français rencontrés, de se situer à quatre ou cinq jours de camion des Etats d'Europe occidentale les plus éloignés.

- II. DES PROGRÈS MAJEURS RESTANT TOUTEFOIS A RÉALISER

A. AU NIVEAU POLITIQUE ET SOCIAL

1. Une indispensable réforme de l'administration

Les difficultés qu'éprouvent les pouvoirs publics roumains et bulgares à se réformer et à faire preuve de transparence dans leurs relations avec le secteur économique constituent sans aucun doute le plus gros « point noir » limitant à l'heure actuelle le développement de ces pays et décourageant les investisseurs étrangers. Les derniers rapports de la Commission européenne font d'ailleurs très clairement état des carences en ce domaine. Celui consacré à la Roumanie souligne ainsi que « la corruption demeure un phénomène répandu en Roumanie et touche tous les aspects de la société », stigmatisant plus globalement une « bureaucratie excessive », un « manque de transparence » et la nécessité d'« accroître l'indépendance du pouvoir judiciaire ».

Plus récemment encore, le Parlement européen a adopté, le 11 mars dernier, une résolution dont le projet initial, finalement amodié, prévoyait une suspension pure et simple des négociations d'adhésion tant que la Roumanie ne concrétiserait pas ses engagements en matière d'indépendance de la justice et de lutte contre la corruption. Ainsi, pas moins de 1 500 personnes ont été accusées de corruption en 2003, parmi lesquelles des magistrats, des policiers, des gardes, des officiers de douanes et des fonctionnaires.

La situation n'est guère plus brillante en Bulgarie, où la Commission note dans son rapport d'étape que la corruption « demeure un problème » tant elle est intégrée par la population. Ainsi, selon un sondage d'opinion réalisé par l'institut GfK en Europe centrale et orientale, 96 % des bulgares considèrent qu'ils vivent dans un pays corrompu. On y apprend également que les trois-cinquièmes des roumains environ reconnaissent avoir versé des « pots-de-vin ».

Si l'ensemble des personnes rencontrées par la mission -dont certains responsables politiques et administratifs- a reconnu la réalité de ce phénomène, qualifié par certains de « relationnel avancé », des nuances ont cependant été apportées à ce tableau un peu sombre. Les petites et moyennes entreprises seraient bien plus touchées que les grosses sociétés, qui disposeraient de suffisamment de « poids » pour pouvoir y échapper. Le recours au « pot-de-vin », intégré comme une donnée parmi d'autres par de nombreuses entreprises, compenserait la faiblesse des salaires et servirait de régulateur social. Cependant, d'importantes actions ont été mises en oeuvre par les pouvoirs publics afin de réduire ce phénomène. Enfin, le souci de nombreux entrepreneurs dans leurs rapports à l'Etat et à la justice serait davantage, comme l'ont d'ailleurs clairement exprimé à la délégation certains de ses interlocuteurs, lié à l'instabilité chronique du cadre législatif et règlementaire dans lequel ils évoluent.

2. Une nécessaire mobilisation en matière de contrôle aux frontières, d'immigration et de coopération judiciaire

L'adhésion potentielle de la Roumanie et de la Bulgarie en 2007 aura pour effet immédiat de « déplacer » un peu plus à l'Est les frontières extérieures de l'Union européenne. C'est par l'intermédiaire de ces pays que l'Union européenne sera désormais frontalière de l'Ukraine, de la Moldavie, de la Serbie-Monténégro, de la Turquie et de la Mer Noire. Ce glissement géographique de la nouvelle Europe pose inévitablement la question de la capacité de la Roumanie et de la Bulgarie à assumer la gestion de ces nouvelles frontières, sachant que ces deux pays représentent des territoires de transit, voire d'origine pour de nombreux trafics (immigration illégale, prostitution, armes, drogue, trafic d'organes humains ...). Or, cette capacité doit être pleine et entière au risque de voir ces trafics se propager à l'ensemble de l'Union européenne par le jeu de la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux.

Tous ces éléments relèvent du chapitre 24 des négociations d'adhésion, intitulé « coopération en matière de justice et d'affaires intérieures », qui recouvre d'ailleurs un domaine plus large encore que le simple contrôle aux frontières puisqu'il concerne la protection des données, la politique des visas, les migrations, l'asile, la coopération en matière policière et de lutte contre le crime organisé, la lutte contre le terrorisme, la lutte contre la fraude et la corruption, la lutte contre les stupéfiants, le blanchiment des capitaux, la coopération douanière, et la coopération judiciaire en matière pénale et civile.

S'agissant de la Bulgarie, la Commission a pu considérer qu'elle avait effectué des progrès « satisfaisants » sur tous ces points, soulignant notamment qu'elle semblait « bien maîtriser le processus de mise en oeuvre en deux étapes de l'acquis Schengen et s'y conformer ». Le Président de la République a insisté auprès de la délégation sur le fait que son pays assumerait la responsabilité pesant sur lui du fait de la gestion des nouvelles frontières de l'Union européenne. Ce volontarisme a permis à la Commission de clôturer provisoirement le chapitre correspondant.

La situation est plus préoccupante vis-à-vis de la Roumanie, pour laquelle la fermeture de ce chapitre n'est pas sans poser d'importants problèmes. La Commission relève notamment que « la capacité de mise en oeuvre reste faible dans presque tous les cas, notamment pour la gestion des frontières, la politique des visas, la lutte contre la corruption, le blanchiment des capitaux, la protection de l'euro contre la contrefaçon, la lutte contre diverses formes de criminalité ». Tout en reconnaissant que d'importants progrès juridiques ont été effectués dans les domaine de la coopération policière et de la lutte contre la criminalité organisée, elle pointe ainsi de graves insuffisances en matière de personnel, de formation, de matériel technique, de partage de données ...

La solution de ces problèmes, fondamentaux dans une Union européenne à 27, passera sans doute par une coopération technique renforcée entre les deux pays candidats et l'Union, mais aussi par la mise en place d'un corps européen de contrôle aux frontières extérieures, composé de fonctionnaires spécialisés issus des divers pays de l'Union et chargé d'y mettre en oeuvre un contrôle renforcé.

3. Des problèmes sanitaires et sociaux endémiques

La délégation a pu constater, tout au long de son séjour, combien le niveau et les conditions de vie des populations roumaine et bulgare étaient encore très faibles : salaires précaires, logements insalubres, voies et moyens de transport archaïques, mendicité, coupures d'électricité fréquentes ... Il faut en effet garder à l'esprit que le PIB par habitant à parité de pouvoir d'achat n'atteint en Roumanie et Bulgarie qu'un quart de la moyenne communautaire. En Bulgarie, selon un sondage effectué par l'agence Mediana, 76 % des personnes interrogées ont déclaré vivre pauvrement, 53 % avoir vu leur situation se dégrader et 40 % craindre qu'elle ne continue d'empirer.

Roumanie et Bulgarie risquent de payer leur adhésion au prix d'une forte « casse sociale », qui affectera en priorité l'ensemble des secteurs économiques dont le développement était auparavant hypertrophié et dont la compétitivité internationale est aujourd'hui extrêmement faible (agriculture et industrie lourde, essentiellement). La probabilité est donc forte de voir se créer une « génération de sacrifiés », constituée de travailleurs de secteurs sinistrés trop âgés pour espérer se reconvertir dans des domaines d'activité plus porteurs . Interrogé sur ce point par la délégation, le Président du Sénat roumain, M. Nicolae Vacaroiu, a reconnu que la gestion sociale de cette population était très délicate et que les mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer son « reclassement » n'avaient pas entièrement donné satisfaction.

Les niveaux de salaires, même exprimés en parité de pouvoir d'achat, restent très bas, dans le secteur privé comme dans l'administration. De ce fait, il est courant de voir des enseignants, des médecins ou des fonctionnaires ministériels compléter leur journée de travail en donnant quelques cours à des particuliers. Le travail au noir est d'ailleurs également un moyen de faire face au chômage qui, s'il est en partie résorbé en Roumanie, stagne autour de 15 % de la population active en Bulgarie.

En outre, les systèmes sociaux roumain et bulgare présentent une offre de soins largement insuffisante par rapport aux besoins de la population : faible nombre de médecins, dont les tarifs sont élevés par rapport au pouvoir d'achat moyen , hôpitaux peu nombreux et sous-équipés , système de sécurité sociale très peu développé ... Les derniers rapports d'étape de la Commission sur la Roumanie indiquent ainsi que l'état de santé général de la population y reste nettement inférieur au niveau moyen de l'Union européenne et que les soins de santé primaires y sont encore négligés . En Roumanie, par exemple, l'espérance de vie moyenne est inférieure de dix ans à l'espérance de vie moyenne dans l'Union européenne et les dépenses de santé inférieures à 40 euros par personne et par an (contre plus de 500 euros en Slovénie).

La situation des personnes âgées est par ailleurs très préoccupante dans la mesure où les pensions de retraite sont extrêmement faibles alors même que les prix des services et des biens de consommation de première nécessité ont fortement augmenté . Il a ainsi été rapporté à la délégation que de nombreux retraités des deux pays vivaient de façon misérable et devaient fréquemment arbitrer entre « manger ou se chauffer », notamment dans les régions rurales les plus éloignées des villes. Ce problème risque fort de s'accroître dans les années à venir du fait du vieillissement progressif de la population.

4. Une population vieillissant et diminuant

La variable démographique constitue une source d'inquiétude pour la Roumanie comme pour la Bulgarie, la population ayant une tendance structurelle à régresser et à voir son âge moyen augmenter. En 2003, la Roumanie perdait ainsi 1,8 °/°° de ses 21,7 millions d'habitants et connaissait, avec 1,35 enfants par femmes, le taux de natalité le plus faible de son histoire. Possédant le taux de fécondité le plus faible de tous les pays européens - et l'un des plus bas au monde - , la Bulgarie enregistre un taux d'accroissement naturel négatif depuis 1990, cette décennie l'ayant vu perdre presque un million d'habitants, soit près d'1/8ème de sa population totale.

Plusieurs analyses peuvent être avancées pour expliquer la diminution de la population de ces pays. En premier lieu, elle s'inscrit dans une tendance lourde propre à l'ensemble des pays européens, renforcée par une importante croissance des avortements et de la mortalité infantile. En second lieu, ces pays ne connaissent qu'une très faible immigration, en raison tant de leur relatif manque d'attrait économique et social, que des fortes restrictions qui y ont été posées en vue de l'adhésion. Enfin, ils sont durablement affectés par une forte émigration, qui est le fait tant de minorités (turque vers le pays d'origine, rom vers le reste de l'Europe) que de nationaux hautement qualifiés recherchant à l'étranger des conditions de travail, de rémunération et de vie plus élevées.

La population roumaine reste relativement jeune, du fait de la politique nataliste menée traditionnellement par le pouvoir communiste : la part de la population ayant plus de 65 ans y est en effet inférieure à 15 %. Au contraire, la population bulgare ne cesse de vieillir, du fait tant d'un faible taux de fécondité que d'un taux de mortalité extrêmement élevé.

Ces tendances démographiques ont naturellement un impact sur le développement socio-économique de ces pays. Elles freinent en effet leur dynamisme économique, en réduisant la consommation intérieure et en bridant le niveau moyen de productivité. Par ailleurs, elles déséquilibrent les systèmes sociaux, les actifs en diminution ne parvenant pas à financer les pensions d'une population de retraités ne cessant de croître. Roumanie et Bulgarie ont d'ailleurs réfléchi dernièrement à la possibilité de privatiser leur système d'assurance vieillesse.

5. Une gestion délicate de certaines minorités

En Roumanie comme en Bulgarie, la coexistence entre une population nationale orthodoxe et d'importantes minorités de nationalités et confessions diverses n'est pas sans poser de problèmes. Composée à 89 % de roumains, la Roumanie comprend également 8 % de hongrois, et entre 5 et 10 % de tziganes. Sa voisine, composée à 86 % de bulgares, comprend également environ 11 % de turcs et 8 % de tziganes. Parallèlement, la confession orthodoxe, extrêmement majoritaire dans les deux pays, cohabite avec les confessions catholique, protestante et musulmane (10 % en Bulgarie).

Les minorités hongroises et turques ne posent pas de réels problèmes d'intégration, chacune bénéficiant dans le pays où elle est la plus importante d'une représentation politique. En Roumanie, les intérêts des Hongrois sont défendus par l'Union démocratique des magyars de Hongrie (UDMR), parti des Magyars de Hongrie, qui soutient au Parlement -sans participation- le parti du Gouvernement, c'est à dire le Parti social démocrate de M. Adrian Nastase. En Bulgarie, la minorité turque ne pose plus de grandes difficultés depuis l'émergence du Mouvement des droits et des libertés (MLD). Représentant les Turcs de Bulgarie, ce parti soutient la coalition au pouvoir et joue d'ailleurs un rôle important depuis que plusieurs membres du parti majoritaire ont quitté ce dernier l'année passée.

Le principal problème concerne en réalité l'intégration de la minorité tzigane. Appartenant au peuple des Roms, à l'origine nomade, et se faisant appeler différemment selon le pays dans lequel ils sont implantés (Gitans en Espagne, Manouches en France et en Allemagne, Bohémiens en République tchèque ...), les Tziganes forment un peuple d'une douzaine de millions de personnes, essentiellement installés en Roumanie (2 millions) et en Bulgarie (600.000). La France en accueille aujourd'hui 350.000.

Or, et sans qu'il soit toujours facile pour des étrangers de se former un point de vue objectif sur un tel sujet, la population tzigane pose dans ces pays plusieurs problèmes. Suivant de façon traditionnelle un mode de vie nomade, se regroupant en communautés en marge du reste de la société, peu ou pas qualifiés, les Tziganes se voient adresser divers reproches par le reste de la population : insalubrité, mendicité, vol, trafics en tout genre, absence de volonté d'intégration... De leur côté, les pouvoirs publics sont accusés par les associations et organisations non gouvernementales de discrimination à leur égard. Suite à une mission effectuée en Roumanie l'année passée, la Ligue des droits de l'Homme et Médecins du Monde ont ainsi reproché à l'Etat de s'être rendu coupable de « discriminations graves » concernant l'accès au travail, le logement, les soins médicaux, la scolarisation et même la sécurité. Enfin, l'émigration des tziganes vers les pays d'Europe occidentale y pose d'importants problèmes d'accueil et d'intégration, problèmes qui risquent de se trouver accrus dès lors que l'adhésion prévue de la Roumanie et de la Bulgarie en 2007 entraînera l'ouverture des frontières et la libre circulation des personnes.

Dans son dernier rapport relatif à la Roumanie, la Commission européenne souligne que « la discrimination à l'égard de la population rom reste très répandue », que « les inégalités sociales auxquelles (elle) est confrontée (...) restent importantes » et que « les conditions de vie restent mauvaises et l'accès aux services sociaux (...) limité ». Relevant que le Gouvernement a poursuivi la stratégie en faveur des Roms, mise en place en 2001, elle a également observé que les résultats étaient inégaux et que les progrès avaient été limités du fait de l'absence d'une politique claire et de fonds suffisants. Le constat réalisé dans le rapport de la Commission relatif à la Bulgarie n'est guère différent, la Commission relevant que leur situation n'avait que peu évolué depuis le rapport précédent, les diverses mesures politiques et administratives tardant à se concrétiser.

Au final, il apparaît que la situation des Tziganes de Roumanie et de Bulgarie reste difficile. Or, aussi longtemps que ce sera le cas, ces populations continueront d'émigrer vers des pays d'Europe de l'Ouest, au détriment, tant des pays d'accueil qui n'ont pas les moyens de les accueillir dans de bonnes conditions, que des populations tziganes elles-mêmes dont les conditions de vie restent tout aussi insatisfaisantes. C'est donc bien aux pays d'hébergement actuels -Roumanie et Bulgarie, en l'occurrence-, en partenariat avec l'Union européenne toute entière, qu'il appartient de réaliser un effort suffisamment important pour régler « en amont » la question de ces minorités, en poursuivant une réelle politique d'intégration .

B. AU NIVEAU ÉCONOMIQUE

1. Une agriculture archaïque dont la modernisation sera coûteuse

Autrefois prééminente, l'agriculture occupe encore une part substantielle de l'économie roumaine et bulgare : elle y représente en effet respectivement 15 et 21 % du PIB, occupant environ 40 et 25 % de la population active. La Roumanie, qui constituait le « grenier à blé » de l'Europe durant l'entre-deux guerre, demeure le troisième producteur agricole européen, derrière la France et la Pologne. Quant à la Bulgarie, elle est, avec la Hongrie, le seul pays d'Europe centrale et orientale à être exportateur net de produits agricoles.

Malgré cette importance en valeur absolue du secteur primaire, l'agriculture constitue aujourd'hui certainement le « talon d'Achille » de ces pays. Confisquées par l'Etat sous le régime communiste, les terres agricoles ont en effet été redistribuées progressivement à leurs propriétaires d'origine depuis l'indépendance, morcelant l'espace rural en de minuscules parcelles dont l'exploitation n'est pas viable économiquement. On estime ainsi qu'en Bulgarie, plus de trois millions d'exploitations disposent d'une superficie inférieure à deux hectares, et que 30 % du total des terres cultivables est actuellement en jachère.

La deuxième limite concernant l'agriculture de ces pays tient à l'archaïsme des matériels et des pratiques. La délégation a été frappée de voir travailler dans les campagnes, sur chaque petit lopin de terre, un ou deux paysans n'ayant pour équipement qu'un cheval de trait et une charrue à soc, ou bien encore des hommes et des femmes récoltant à la main le fruit de leur production. La vétusté et l'inadaptation des matériels agricoles ont naturellement pour effet de réduire la productivité de l'agriculture à des taux extrêmement faibles, en tout cas insusceptibles de supporter la concurrence des grands pays agricoles. L'appauvrissement des paysans qui en résulte les pousse bien souvent à s'exiler vers des villes où ils ne trouvent pas de travail plus rémunérateur mais des conditions de vie plus difficiles encore.

L'inadaptation des structures administratives et des filières professionnelles constitue une autre difficulté à laquelle se trouve confrontée l'agriculture de ces pays. Ainsi, les politiques d'aide nationales reposent encore sur des dispositifs incompatibles avec la politique agricole commune (PAC) ; la transposition de l'acquis communautaire ne s'est pas accompagnée du renforcement des effectifs et ressources nécessaires, rendant improbable sa mise en oeuvre réelle ; la mise en place d'organisations communes de marché gérées par des organisations interprofessionnelles est encore loin d'être achevée ...

Enfin, Roumanie et Bulgarie doivent poursuivre ardemment leurs efforts pour mettre leurs bâtiments d'exploitation aux normes européennes, et surtout appliquer leur législation en matière vétérinaire et phytosanitaire, afin de respecter les exigences en matière de sécurité alimentaire et de protection des consommateurs. Les structures d'élevage, d'abattage et de transformation agroalimentaire, encore très en retard, comme a pu le constater la délégation en visitant une exploitation laitière bulgare, devront faire l'objet d'une attention soutenue pour être en phase avec le haut degré d'exigence communautaire. L'enjeu est d'importance puisqu'en vertu de principe de libre-circulation des biens, les produits agricoles et agroalimentaires en provenance de ces pays seront progressivement commercialisés massivement dans les pays membres de l'Union européenne.

La remise à niveau du secteur agricole, qui risque d'être coûteuse socialement, passera par la mise en oeuvre de certaines réformes . Le remembrement des terres et la réalisation de cadastres constituent à cet égard une véritable priorité nationale. Si les deux pays s'y sont attelés depuis plusieurs années et si la Commission européenne a souligné les progrès effectués en la matière, elle relève également que des efforts importants restent à accomplir en ce domaine pour développer un marché efficient. Forte de son expérience en la matière, la France pourrait apporter un concours précieux à ces pays.

Par ailleurs, la Roumanie et la Bulgarie gagneraient à se spécialiser dans des productions de nature moins extensives, où elles bénéficient d'avantages comparatifs. C'est par exemple le cas de la viticulture, pour laquelle il existe dans ces pays une réelle tradition. La délégation a eu l'occasion de visiter, en Roumanie et en Bulgarie, deux exploitations produisant et commercialisant des vins blancs et rouges. Elle a pu constater le fort potentiel existant en la matière, tout en notant que certains progrès resteraient à accomplir pour une parfaite maîtrise des techniques de vinification.

Ces deux pays pourraient également accompagner la mise en place de filières « qualité », notamment « bio ». La Roumanie et la Bulgarie possèdent en effet des terres naturellement fertiles qui n'ont quasiment pas fait l'objet de traitements par des produits phytosanitaires, leur coût relativement élevé les rendant inaccessibles à la très grande majorité des exploitants. Les pouvoirs publics semblent bien avoir bien saisi l'intérêt d'un tel type de production, puisque des organismes d'accréditation des produits « bio » ont été mis en place.

D'un point de vue politique enfin, il importe que la France accompagne ces deux pays dans leur processus de modernisation agricole. Après leur adhésion, Roumanie et Bulgarie auront en effet voix au conseil de l'agriculture. Il s'agit donc que ce secteur devienne, non pas un point de rupture entre la France et ces pays, mais plutôt un sujet de ralliement dans la perspective de la prochaine réforme de la PAC.

2. Un secteur de l'énergie fort problématique

Le secteur de l'énergie constitue un problème essentiel pour la Roumanie et la Bulgarie, quel que soit le type d'énergie envisagé (électricité, pétrole, gaz, énergies d'origine renouvelable) .

La régularité et la fiabilité de l'approvisionnement et de la distribution d'énergie ne sont pas encore totalement assurées . Les stocks de pétrole sont encore en partie insuffisants. Comme il a été rapporté à la délégation, l'alimentation électrique fait fréquemment l'objet de coupures, dont certaines peuvent survenir en plein hiver, durer plusieurs heures et s'étendre à un nombre important de consommateurs. La mauvaise qualité du réseau de transport d'énergie et l'insuffisance de la maintenance expliquent ces carences.

Le faible niveau de rendement énergétique constitue une autre source de désagrément pour les consommateurs. Ce phénomène handicape davantage les professionnels que les particuliers. Plusieurs des entrepreneurs rencontrés par la mission se sont plaints en effet de cette faiblesse, estimée par l'un d'entre eux au tiers de celle de la France. Si une stratégie existe à ce sujet en Roumanie, elle ne fait l'objet d'aucune priorité à court terme ni d'aucun moyen de financement.

Tous ces problèmes concernant la fourniture d'énergie n'empêchent pas son prix d'être très élevé, si on le rapporte au niveau de vie moyen. En conséquence, les entreprises voient leur compétitivité amoindrie et les particuliers peinent à honorer leurs factures. Nombreux sont d'ailleurs les ménages à se priver de lumière ou d'eau chaude pour « passer la fin du mois ».

Si des progrès ont été réalisés dans l'ouverture à la concurrence du marché intérieur de l'énergie (électricité et gaz), le processus de libéralisation est loin d'avoir été mené à son terme. Selon le secrétaire d'Etat roumain en charge des questions liées à l'énergie, les marchés de l'électricité et du gaz seraient ouverts à hauteur de 40 %, l'objectif étant la libéralisation entière à l'horizon 2007. Malgré cette privatisation partielle, la Commission européenne a pu relever que le secteur n'obéit toujours pas aux règles de la concurrence, les mesures prises en ce sens étant entravées par la coordination centralisée instaurée par l'instance de régulation, par la mauvaise gestion des investissements et par un environnement juridique instable. La situation est plus critique encore en Bulgarie, où l'ouverture des marchés n'avait toujours pas été entamée lors du dernier rapport d'étape de la Commission.

La sécurité des installations, nucléaires notamment, pose également problème, surtout en Bulgarie, où l'énergie provient à 40 % de ce mode de production. Le débat y porte sur l'avenir des six réacteurs de la centrale de Kozloduy, située à environ 200 km au Nord-Est de Sofia, illustrant trois générations technologiques successives, dont deux de conception soviétique. Devant les risques qu'ils représentaient en raison de leur vétusté, et suite à la très forte pression en ce sens de l'Union européenne qui menaçait, à défaut, de ne pas clore le chapitre « énergie », la Bulgarie a accepté de fermer les deux plus anciens réacteurs (1 et 2) fin 2002 et s'est engagée à arrêter les deux suivants (3 et 4) en 2006, provoquant d'importants remous sociaux.

La diversification du bouquet énergétique et le développement des énergies renouvelables semblent constituer pour ces pays une voie incontournable. Si les pouvoirs publics en ont bien conscience, il n'en reste pas moins que les efforts réalisés en ce domaine ont été à l'heure actuelle très limités, l'ampleur des investissements à effectuer étant il est vrai désincitative. L'ambassadeur de Bulgarie en France, M. Marin Raykov, a d'ailleurs indiqué à la délégation que la construction d'une nouvelle centrale nucléaire était actuellement en projet.

3. Une industrie peinant à se restructurer

S'il représente encore respectivement 37 et 29 % de la production nationale roumaine et bulgare, le secteur secondaire a vu son importance considérablement diminuer depuis le début des années 90, les économies de ces pays se tertiarisant de plus en plus.

En Roumanie, le régime communiste donnait traditionnellement la priorité à l'industrie lourde (pétrochimie, chimie, mécanique, sidérurgie ...). Or, cette industrie est aujourd'hui en situation de net déclin, 60 % des sites de production ayant été fermés entre 1990 et 1993. La métallurgie continue toutefois de figurer au premier rang de l'ensemble des productions industrielles, devant les constructions mécaniques et le gros outillage, la chimie, les industries extractives, les industries textiles et l'agroalimentaire.

Plusieurs difficultés se posent actuellement à l'industrie roumaine. L'industrie lourde occupe encore une place excessivement importante par rapport aux industries de haute technologie, qui seules sont à même aujourd'hui de créer de la valeur ajoutée et des emplois. Une spécialisation du pays sur des créneaux plus « porteurs » économiquement sera à terme indispensable. Si des secteurs tels que l'électronique ou l'agroalimentaire sont en train de se développer, c'est en grande partie grâce aux investissements étrangers, qui accroissent inévitablement la dépendance du pays vis-à-vis de l'extérieur. Enfin, l'hypertrophie des industries lourdes pose de nombreux problèmes en termes de respect des exigences environnementales européennes, mais également internationales, la Roumanie étant partie au protocole de Kyoto. Si un plan d'action a bien été adopté en la matière, la Commission relevait dans son dernier rapport que sa mise en oeuvre n'en était qu'« à ses premiers balbutiements ».

La Bulgarie a également été touchée de plein fouet par un processus brutal de désindustrialisation depuis 1990, aggravé par la grave crise économique traversée par le pays en 1996-1997 . Les principaux secteurs de l'industrie bulgare demeurent toutefois le textile, la pétrochimie, les industries chimiques et, à un moindre degré, l'ingénierie mécanique et électrique et la métallurgie. Les secteurs à plus haute valeur technologique, tels que l'électronique, l'informatique, les industries chimiques, agroalimentaires et pharmaceutiques, ont perdu de leur importance. Toutefois, le secteur industriel, en passe d'être entièrement privatisé, restructuré et mis aux normes, a enregistré un net regain d'activité depuis 1998.

4. Des transports à renforcer et à moderniser

Comme la délégation a pu le constater de façon très pratique, les infrastructures de transport roumains et bulgares ne sont absolument pas adaptées aux nécessités d'un pays développé. Outre le manque d'investissements publics, la géographie de ces pays -extrêmement montagneuse- explique également pour une bonne part ces carences.

La faible proportion de voies autoroutières, la très mauvaise qualité du réseau secondaire et la densité du trafic, plus que l'importance du réseau, rendent tout transport par ces moyens pour le moins « chaotique ». En Roumanie cependant, des travaux sont en cours pour la modernisation des routes nationales ouvertes au trafic international, d'une longueur totale d'environ 2.150 km. A terme, l'interconnexion avec les réseaux transeuropéens de transport nécessitera d'importants investissements : en Bulgarie, 1.200 km de routes devront être modernisées d'ici 2007, pour un coût estimé à environ 240 millions d'euros.

Lent du fait de son électrification encore partielle et très peu confortable, le réseau ferré est cependant relativement bien développé. La circulation des trains à grande vitesse nécessitera toutefois l'adaptation des voies de chemin de fer, tout comme sera indispensable la mise en oeuvre de l'acquis communautaire sur l'interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen conventionnel.

Le transport maritime bénéficie quant à lui de la proximité de la Mer Noire, par laquelle se fait une majorité des échanges commerciaux extérieurs de la Roumanie. En outre, la construction du canal Danube-Mer Noire et la mise en service du canal Danube-Mer Noire-Rhin ont permis la création d'une voie fluviale d'une grande importance, empruntée par de nombreux bateaux à gros tonnage.

Offrant un nombre de vols et de destinations relativement restreints, le réseau de transport aérien souffre également d'un manque de régularité : vols intérieurs très limités le dimanche, pas d'exploitation de certaines liaisons durant l'hiver, contraintes météorologiques fréquentes ... La relative faiblesse du trafic aérien pose par ailleurs des problèmes de rendements aux opérateurs. Les deux compagnies nationales -Tarom et Bulgaria Air- traversent de ce fait une situation financière difficile. Enfin, l'intégration de l'acquis communautaire relatif à la sécurité aérienne doit se poursuivre.

Parallèlement aux problèmes d'infrastructures, Roumanie et Bulgarie sont confrontées à des difficultés touchant les matériels de transport. Le parc de voitures est encore extrêmement vétuste et polluant, même si l'implantation de constructeurs automobiles commercialisant des véhicules adaptés aux marchés émergents et l'engouement de la population pour la voiture individuelle devraient contribuer à le renouveler assez rapidement. La délégation a ainsi visité en Roumanie le site de fabrication de Renault, implanté à Pitesti sous la marque Dacia, qui assemble un véhicule dont le premier modèle est vendu à 5.000 euros.

L'archaïsme des équipements de transport touche également les trains, dont les deux tiers ne sont pas électrifiés, et les avions, majoritairement de technologie soviétique. Mais c'est surtout le parc des navires qui suscite les plus fortes craintes. Le pavillon roumain continue de figurer sur la liste noire établie en vertu du mémorandum d'entente de Paris, qui plus est dans la catégorie « risques très élevés », tandis que le taux d'immobilisation des navires battant un tel pavillon reste très excessif : il était ainsi en 2002 de presque 22 %, quand la moyenne pour les navires battant pavillon d'un des pays de l'Union européenne était de 3,5 %. Le problème est moindre en Bulgarie où d'importants efforts ont été réalisés, permettant de faire chuter le taux d'immobilisation à moins de 10 %.

5. D'importantes carences en matière environnementale

Le respect de l'environnement constitue un véritable défi pour la Roumanie et la Bulgarie, dans la perspective notamment de leur adhésion à l'Union européenne . La délégation a pu constater le soin très relatif accordé à l'environnement dans ces pays. Au-delà de l'aspect purement esthétique et relevant en grande partie des comportements individuels, aspect qui n'est toutefois pas à négliger en matière touristique, la Roumanie et la Bulgarie souffrent de niveaux importants de pollution d'origine industrielle.

En Roumanie, la pollution de l'air est liée, cela a été évoqué, au développement rapide d'un parc automobile encore vétuste, mais aussi au stockage à l'air libre de déchets dans des centres dépourvus d'incinérateurs. A Bucarest, la température du centre ville est jusqu'à six fois supérieure l'été à celle de la périphérie. Les forêts sont victimes de la pollution de l'air et des pluies acides résultant de l'activité économique. L'érosion et la dégradation des sols proviennent du laxisme dans le dépôt, la collecte et le traitement des déchets ménagers et industriels, même toxiques. La pollution de l'eau touche particulièrement les villes du bord de la Mer Noire où se jette le Danube, qui charrie des tonnes de produits chimiques et de métaux lourds. Une ville comme Bucarest ne possède pas de station d'épuration des eaux qui, une fois collectées, retournent usées dans la nature.

Dans ses derniers rapports d'étape, la Commission européenne relève que ces deux pays, dans le domaine de l'environnement comme dans beaucoup d'autres d'ailleurs, mettent fortement l'accent sur la transposition législative et le respect formel des obligations découlant de l'acquis, mais ne s'attachent pas assez à élaborer une réflexion stratégique adaptée et à dégager les capacités administratives requises afin de mettre en oeuvre les mesures adoptées. Les négociations relatives à ce chapitre se poursuivent donc pour ce qui est de la Roumanie, tandis qu'elles sont provisoirement clôturées concernant la Bulgarie, qui a obtenu des régimes transitoires pour certains types d'émission.

CHAPITRE II :
LE NÉCESSAIRE RENFORCEMENT DE LA PRÉSENCE FRANÇAISE

Ayant plus d'avantages que d'inconvénients à voir ces pays rejoindre l'Union européenne, la France doit soutenir leur adhésion et y développer sa présence.

- I. LA FRANCE A PLUS À GAGNER QU'À PERDRE DANS UNE UNION EUROPÉENNE À 27

A. DES RISQUES À INTÉGRER : LES DÉLOCALISATIONS

La mission a été très impressionnée par les phénomènes de délocalisation de pays tiers -et notamment depuis la France- à destination de la Roumanie et de la Bulgarie. Du fait de leurs avantages comparatifs, ces deux pays sont en passe de devenir des nouveaux lieux privilégiés pour les entreprises d'Europe occidentale souhaitant réduire au maximum leurs coûts de production, tout en conservant une certaine proximité géographique avec leurs centres de décision stratégique.

Ce phénomène peut être vu sous deux prismes différents : d'un côté, il correspond à la recherche -légitime- par ces pays d'investissements étrangers pour « alimenter » l'activité économique. De l'autre, ils provoquent des délocalisations protéiformes dont un pays comme la France risque particulièrement de souffrir à l'avenir.

1. Des pays cherchant légitimement à attirer les investissements étrangers

Du point de vue des dirigeants politiques, les délocalisations d'entreprises étrangères à destination de leur territoire représentent une opportunité, dans la mesure où elles permettent d'accueillir capitaux et investissements indispensables à la dynamisation de leur économie.

Aussi les gouvernements ont-ils mis en place des politiques cherchant à attirer les investisseurs étrangers, politiques dont les effets ont été variables selon le pays envisagé .

a) Un cadre politique, économique et social naturellement attractif

Dès le début des années 90, après la chute du régime communiste, de nombreux pays étrangers -surtout européens- ont investi en Roumanie et en Bulgarie. Ils y ont trouvé, en effet :

- un positionnement géostratégique incomparable, au carrefour de la Russie, du Moyen-Orient et des trois Europes (centrale, orientale et occidentale) ;

- une situation politique relativement stable qui, au cours de l'histoire, fait figure d'exception dans la région des Balkans ;

- la confirmation du processus d'intégration européenne, qui valorise fortement les atouts naturels et humains de ces pays et contribue, d'une manière générale, à promouvoir un cadre de plus grande stabilité juridique, économique et financière, réduisant ainsi sensiblement le risque-pays ;

- une proximité culturelle et historique assez forte ;

- une parité monétaire fixe, en ce qui concerne la Bulgarie, avec l'indexation du lev bulgare sur l'euro ;

- une main-d'oeuvre particulièrement qualifiée -notamment en informatique et en langues étrangères- et productive ;

- une modération salariale exceptionnelle puisqu'avec un salaire brut moyen de 170 euros en juin 2003, la Roumanie offre des coûts salariaux parmi les plus bas d'Europe. Ils sont quatre fois inférieurs à ceux de la Pologne et de la Hongrie, et une dizaine de fois moindres par rapport à ceux de la France.

- un marché intérieur de trente millions de consommateurs pour les deux pays, dont le niveau de vie, et donc le pouvoir d'achat, sera amené à augmenter rapidement ;

- un marché régional s'étendant aux pays avoisinants, qu'il s'agisse des Etats Balkans, des ex-Etats soviétiques ou du Moyen-Orient ;

- un accès relativement facile et rapide en matière de transports (trois à cinq jours-camion au départ de l'Europe de l'Ouest).

b) Un volontarisme marqué pour attirer les « investissements directs étrangers »

A de tels éléments structurels se sont ajoutées des politiques volontaristes visant, de la part des gouvernements de ces pays, à attirer sur leur territoire les investisseurs étrangers.

Ainsi, en Bulgarie, une législation destinée à attirer les investissements directs étrangers (IDE) découle d'une véritable stratégie d'accompagnement sur le long terme. La loi du 24 octobre 1997 relative aux IDE instaure le principe de non-discrimination, les entreprises étrangères bénéficiant de la règle du traitement national. Le principe de primauté des conventions internationales sur le droit interne est précisé. L'Agence pour les investissements étrangers (AIE), créée en 1995, propose des « projets d'investissement prioritaires » propres à bénéficier, sur décision du pouvoir exécutif, d'un régime spécial. Le risque de changement de législation est écarté par un gel de la législation en vigueur à la date du début du projet d'investissement. Une procédure d'arbitrage peut être mise en oeuvre en cas de litige entre cocontractants des deux pays.

Les principaux dirigeants politiques bulgares ont insisté devant la délégation sur l'importance pour leur pays de continuer à mettre en place les conditions permettant un accroissement des flux d'investissement en provenance de pays tiers. L'actualité législative l'a remarquablement illustré puisque le Parlement bulgare était, durant notre séjour, sur le point d'adopter une nouvelle loi visant à favoriser l'investissement, en renforçant notamment le rôle de l'AIE.

En matière de fiscalité, Roumanie et Bulgarie cherchent également à attirer les investisseurs. Si le taux d'imposition roumain sur les bénéfices des sociétés est de 25 % - ce qui est tout de même nettement inférieur au taux français - , les profits tirés de l'exportation sont soumis à un taux d'imposition de 6 %, à la condition que ces profits en devises soient déposés sur le compte d'une banque roumaine. En Bulgarie, le Gouvernement a décidé de baisser régulièrement le taux d'imposition des sociétés, qui est ainsi passé de 28 % en 2001 à 19,5 % cette année.

Des mesures particulières ont été prises, par ailleurs, pour favoriser le développement des PME. En Roumanie, elles sont exonérées de taxes sur les bénéfices réinvestis et voient leurs impôts diminuer au fur et à mesure qu'elles créent des emplois. De plus, l'Agence gouvernementale pour les PME, qui a remplacé le ministère des PME, encourage leur essor via huit agences régionales. En Bulgarie, une agence du même type sert d'intermédiaire entre les PME, le gouvernement, les associations non gouvernementales, les associations d'entrepreneurs, les banques et l'Union européenne, pour proposer conseils et aides financières.

c) Des motivations diverses de la part des pouvoirs publics

Le consensus quant à l'accueil des investisseurs étrangers tient à la volonté de restructurer aussi rapidement que possible l'économie de ces pays. Le processus de privatisation entamé au début des années 90 rend en effet nécessaire d'importants transferts de capitaux qui ne peuvent, le plus souvent, que provenir de pays tiers.

Derrière cette volonté d'attirer les capitaux se profile la recherche de transferts de technologies . Les matériels et procédés utilisés dans de nombreux secteurs de l'industrie nécessitent en effet aujourd'hui de très importants investissements que des sociétés possédées par des nationaux peinent à réaliser. Les transferts de capitaux, mais aussi les accords de partenariat avec des entreprises étrangères, permettent aux sociétés roumaines et bulgares d'utiliser des technologies qu'elles ne pourraient à défaut acquérir.

La recherche d'IDE est également motivée par la volonté de maintenir ou de créer de nouveaux emplois sur le territoire national . Le rachat et la restructuration d'une entreprise roumaine ou bulgare par un grand groupe étranger ou par une société multinationale constituent en effet souvent une alternative appréciable à sa disparition.

Parfois se mêlent à ces priorités des considérations relatives à l'aménagement du territoire. Les avantages fiscaux consentis aux entreprises sont alors réservés à celles qui acceptent de s'implanter dans des provinces défavorisées, où elles sont susceptibles de redynamiser l'économie locale.

Enfin, les pouvoirs publics peuvent avoir à l'esprit des considérations davantage liées aux grands équilibres macro-économiques. L'apport d'IDE vient en effet compenser utilement les déficits de la balance des transactions courantes, d'autant que les investissements nationaux sont insuffisants pour assumer les coûts que représentent la transition démocratique et l'intégration à l'Union européenne.

d) Des résultats de degrés divergents en Roumanie et Bulgarie

Si les récentes évolutions atténuent ce constat, la Roumanie n'en demeure pas moins en retard par rapport aux autres pays d'Europe centrale et orientale ayant adhéré ou souhaitant adhérer à l'Union européenne. Cela tient très largement au fait que le programme de privatisation y a été engagé plus lentement qu'ailleurs et que la valeur des entreprises cédées sur le marché est souvent moins élevée que dans les pays voisins.

De 1991 à la mi-juin 2003, le stock total était inférieur à 10 milliards de dollars, selon les chiffres de l'Agence roumaine pour les investissements étrangers, ce qui est faible. Il est vrai que certains secteurs capitalistiquement lourds (énergie, transports ...) ont été encore assez peu concernés par les privatisations, qui ont connu des retards dans leur calendrier de mise en oeuvre.

En termes de répartition géographique, 3/5èmes des IDE proviennent de l'Union européenne, les trois plus importants pays investisseurs étant les Pays-Bas, l'Allemagne et les Etats-Unis. En termes de répartition sectorielle, les IDE se sont concentrés à 56 % sur l'industrie, à 15 % sur les services et à 8 % sur les transports. En termes de nombre d'implantations, l'Italie est de loin le premier investisseur (plus de 12 000 sociétés), devant l'Allemagne (10.000 environ).

En Bulgarie au contraire, les IDE ont décuplé en dix ans et ont connu en 2003 des hausses record (+60 %, soit un flux de 1,4 milliard de dollars). Les trois premiers investisseurs ont été l'Allemagne, l'Italie et la Belgique. Selon l'AIE, 16.000 emplois ont été créés depuis trois ans par les vingt premiers investisseurs étrangers dans le pays.

2. Des pays devenus la destination d'un nombre croissant de délocalisations françaises aux formes diverses

La délégation a visité un nombre important d'entreprises dirigées par des français s'étant implantés en Roumanie ou en Bulgarie, dans de nombreux secteurs d'activité (agriculture, textile, industrie automobile, services informatiques ...).

Elle a pu constater la diversité, tant des motivations animant ces entrepreneurs que des formes prises par ces processus, dont le développement pourrait se révéler très préjudiciable pour un pays comme le notre.

a) La forme négative : la délocalisation opportuniste

Certains des chefs d'entreprise rencontrés par la délégation avaient pour motivation exclusive -et ils ne s'en cachaient d'ailleurs pas- en s'installant dans ces pays, d'y profiter d'une main d'oeuvre qualifiée et surtout peu coûteuse, ainsi que de réglementations sanitaires, sociales et environnementales bien plus « souples » qu'en France.

Le dirigeant d'une entreprise fabriquant en Roumanie des produits pour le jardin en bois a parfaitement illustré ce type de délocalisation. Soulignant qu'il ne cherchait pas à conquérir un marché intérieur dont la demande était insuffisamment développée, il a reconnu qu'il profitait en Roumanie de très faibles coûts salariaux et d'une réglementation du travail beaucoup moins exigeante que dans un pays comme la France.

Il a précisé avoir choisi la Roumanie plutôt qu'un autre pays d'Europe centrale nouvellement adhérent du fait justement de son éloignement de l'Union européenne, expliquant que cette situation lui permettrait de profiter plus longtemps de normes moins strictes.

Prenant l'exemple d'un escalier en bois aujourd'hui fabriqué par une PME française pour le compte d'un grand revendeur français d'équipements et matériaux en bois pour la maison, il a indiqué qu'il s'était donné comme objectif pour la prochaine saison commerciale d'en fabriquer de qualité équivalente pour un tarif substantiellement inférieur, afin de ravir le marché à l'entreprise française. Le fait -parfaitement intégré- que celle-ci risquait de se trouver dans une situation difficile en raison de la perte d'un client attitré ne remettait pas en cause sa stratégie de production.

Ce type de délocalisation a particulièrement heurté les membres de la mission, dans la mesure où elle constitue une façon de contourner les réglementations protectrices de notre pays, et surtout où elle s'accompagne de la destruction d'emplois en France.

La délégation a pu constater le même phénomène en Bulgarie, lors de la visite d'une usine de confection textile dirigée par un français. Son responsable a en effet expliqué qu'il effectuait une prestation de service à distance pour des industriels français en réalisant, à des coûts salariaux extrêmement faibles, l'assemblage des pièces et accessoires qu'ils lui fournissaient. Or, cette entreprise, auparavant implantée en France, y a fermé son site de production pour s'installer en Bulgarie, substituant ainsi des emplois bulgares à des emplois français.

Ce phénomène est d'autant plus inquiétant qu'il fait progressivement l'objet d'une « montée en gamme » : alors que les délocalisations de ce type ne concernaient à l'origine que des activités de main-d'oeuvre réalisées dans des « usines tournevis », elles tendent de plus en plus, ainsi que l'ont confirmé à la délégation plusieurs des dirigeants d'entreprises rencontrés, aux activités immatérielles. Il a été ainsi constaté que les activités de service, en informatique notamment, font en effet de plus en plus l'objet de délocalisations à l'occasion de la visite de deux sociétés de service informatique situées, l'une en Roumanie, l'autre en Bulgarie.

L'utilisation des moyens modernes de communication et d'échange d'informations, par nature très poussée dans l'informatique, permet à ce type d'entreprises de travailler dans ces pays pour le monde entier. En l'espèce, les entreprises visitées, confrontées à la concurrence de sociétés similaires basées en Inde et dans les pays du Maghreb, avaient pour clients aussi bien des américains que des russes ou des australiens. Le dirigeant de l'une d'entre elles a estimé ne voir aucun frein technique à l'externalisation des services, qu'il a comparé à un « déplacement d'électrons de n'importe où vers n'importe où ».

Les conséquences de ces délocalisations sont directement lisibles sur l'évolution du montant et de la structure de notre solde commercial par rapport à ces pays. Ainsi, la Mission économique française à Sofia observait dans une note d'avril 2004 que l'excédent bilatéral en notre faveur tendait à diminuer du fait de l'accroissement de nos importations informatiques et de biens de consommation, en raison des délocalisations.

b) La forme du « moindre mal » : délocaliser ou périr

Pour certains des entrepreneurs rencontrés, la délocalisation partielle de leur entreprise en Roumanie ou en Bulgarie relève de la nécessité car elle constitue la seule alternative à une cessation d'activité.

Ce cas de figure se retrouve en France dans des secteurs particulièrement touchés par les restructurations ces dernières décennies (fabrication de chaussures, petit matériel électronique ...). Le manque de compétitivité de l'industrie nationale dans ces domaines par rapport au reste du monde condamne en effet à plus ou moins long terme les entreprises françaises implantées sur notre territoire. La délocalisation partielle constitue alors une solution intermédiaire entre la délocalisation pure et simple (transférer dans des pays à bas coût de main-d'oeuvre l'ensemble des activités de la société) et la fermeture de l'usine . Il n'en reste pas moins vrai qu'elle se traduit concrètement par la substitution d'employés de nationalité étrangère à des salariés français, même si les postes stratégiques de l'entreprise demeurent situés en France.

Subie davantage que choisie, la délocalisation est en effet, dans ce cas, généralement partielle et restreinte au minimum. Ainsi, la direction de l'entreprise et les activités liées à l'ingénierie, la conception des produits, les études marketing, la modélisation informatique, la communication ... sont conservées autant que possible sur le territoire français, seule la réalisation matérielle des produits étant transférée dans un pays tiers. Ensuite, soit les produits sont envoyés en France où ils font l'objet d'un assemblage ou d'une finition demandant des compétences techniques très pointues, avant d'être conditionnés, emballés puis commercialisés sur le marché intérieur ou international, soit ils font directement l'objet d'une commercialisation à partir du territoire de fabrication.

Peuvent être assimilés à ce type de délocalisation les cas dans lesquels une entreprise française est obligée de transférer, sous peine de faillite, ses sites de production en Roumanie ou en Bulgarie, non parce que sa compétitivité est insuffisante, mais parce qu'elle fournit sur le long terme de gros clients qui ont déjà transférés leurs propres sites et exigent de leur fournisseur qu'il en fasse de même sous peine de mettre fin à leur contrat de fourniture. La délégation a rencontré plusieurs chefs d'entreprise français leur ayant expliqué se trouver dans une telle relation de dépendance et avoir de ce fait été contraints de délocaliser.

Cela a été le cas, par exemple, pour une entreprise française fabriquant des pièces en plastique équipant des téléphones fixes et mobiles, conduite à transférer son site de production en Roumanie pour y suivre l'un des leaders européens de l'électronique grand public, son principal client. Cela a également été le cas pour une entreprise française fabriquant des châssis automobiles, qui s'est implantée en Roumanie pour fournir Dacia, la filiale nationale de Renault. Ce cas était, il est vrai, un peu particulier dans la mesure où l'entreprise fournisseur était détenue indirectement par l'entreprise cliente.

Le schéma assez simple de ce deuxième type de délocalisation, où sont transférées dans des pays tels que la Roumanie et la Bulgarie les activités de pure main-d'oeuvre, tandis que les activités de conception, représentant la plus grande part de valeur ajoutée, restent sur le territoire français, tend toutefois à s'éroder en pratique. Aux dires de plusieurs des dirigeants d'entreprises rencontrés par la délégation, les activités de recherche et développement, si elles restent le plus souvent implantés en France, tendent de plus en plus à être également délocalisées. Le haut niveau de qualification du personnel, notamment des ingénieurs informaticiens, dans des pays tels que la Roumanie et la Bulgarie, mais aussi la Chine ou l'Inde, explique ce phénomène.

c) La forme positive : une stratégie de conquête de nouveaux marchés

Cette dernière forme de délocalisation -mais l'on devrait plutôt parler de « délocalisation offensive », ou bien de « localisation »- a heureusement été souvent rencontrée par la délégation au cours de ses visites. Elle consiste, pour une entreprise, à implanter de nouveaux sites de production -ou à racheter des sites déjà existants- sur des territoires étrangers sans pour autant fermer ceux situés sur le territoire national, dans le but de conquérir de nouveaux marchés et de nouveaux consommateurs .

Cette stratégie de « croissance externe » ne se traduit donc pas par la destruction d'emplois en France et permet la création de nouveaux emplois à l'étranger. Les revenus tirés de ces productions délocalisées servent pour partie à rémunérer le personnel du site implanté à l'étranger et à y financer les diverses charges de fonctionnement et d'investissement, et viennent pour le reste abonder les comptes du groupe et lui permettre de réaliser de nouveaux investissements de production dans d'autres pays.

Ce type de délocalisation est plus généralement le fait de grandes ou de très grandes entreprises, souvent multinationales, qui bénéficient d'une surface financière suffisante pour construire de nouveaux sites dans le monde entier. La délégation a ainsi pu visiter des filiales d'Alcatel, de Renault, de Valeo, de Michelin ou encore de Schneider Electric qui se sont implantées dans cette optique en Roumanie ou en Bulgarie. Comptant plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de salariés, ces filiales s'inscrivent dans une stratégie d'expansion internationale de leur groupe prenant appui sur tous les continents.

Les nouveaux marchés visés par ces entreprises ne sont le plus souvent pas uniquement les marchés internes à la Roumanie et à la Bulgarie, qui ne comportent pas un nombre suffisant de consommateurs solvables pour être financièrement intéressants. Les sites installés en Roumanie et en Bulgarie servent fréquemment de « bases arrières » à une stratégie d'exportation couvrant une aire géographique beaucoup plus large, allant de l'Europe centrale et orientale aux Balkans, à la Russie et au Moyen-Orient.

Les produits fabriqués par ces grands groupes sur les territoires roumain et bulgare sont souvent « adaptés » à la demande locale, c'est à dire restreints à des modèles standards ou d'entrée de gamme afin d'être attractifs en termes de prix pour des consommateurs n'ayant pas -encore- atteint le niveau de vie des habitants d'Europe occidentale. Ainsi, la dernière automobile produite et commercialisée en Roumanie par Dacia, filiale du groupe Renault, est vendue au prix d'appel de 5.000 euros. Dans le même esprit, les pneumatiques fabriqués par Michelin en Roumanie pour les marchés locaux sont de « catégorie 3 », catégorie satisfaisant à tous les critères de sécurité requis pour les modèles de qualité supérieure mais dépourvue de certaines caractéristiques ou options non strictement indispensables.

Ces délocalisations offensives constituent en principe un jeu « gagnant-gagnant » pour les pays de base et d'accueil . Elles permettent en effet au premier de laisser ses entreprises s'internationaliser en trouvant des relais de croissance dans des pays dont les volumes de production et de consommation sont en forte hausse car bénéficiant d'un processus de rattrapage économique, mais aussi d'augmenter l'assiette des revenus imposables. Elles permettent aux seconds de satisfaire une importante demande de travail qui va en outre bénéficier de conditions de travail et de rémunération supérieures à la moyenne nationale, mais aussi de bénéficier de transferts de capitaux et de technologies indispensables au décollage d'une économie en phase de reconstruction.

Au final, toutes les délocalisations ne se ressemblent pas et ne présentent pas les mêmes dangers pour notre pays, certaines offrant même
- comme cela vient d'être évoqué- des perspectives positives. Il n'en reste pas moins que la mission a été fortement impressionnée par l'ampleur d'un phénomène qui est inévitablement amené à se développer .

Si les délocalisations à destination de la Roumanie et de la Bulgarie ont au moins le mérite de pourvoir à des emplois dans des pays européens, elles risquent cependant d'être peu à peu remplacées par des délocalisations vers des destinations plus à l'Est, au fur et à mesure que les conditions de travail et de rémunérations de ces deux pays s'équilibreront avec celles des autres pays de l'Union européenne.

Il s'agit donc là d'une priorité en matière de politique économique pour notre pays, qui ne pourra faire l'économie d'une réflexion plus approfondie sur la physionomie de ce phénomène et les réponses à élaborer. La délégation ne saurait trop, à cet égard, renvoyer vers le rapport d'information élaboré sur la « délocalisation des industries de main-d'oeuvre » récemment adopté par notre commission des Affaires économiques 2 ( * ) .

B. DES GAINS À ESPÉRER

Si le danger lié aux délocalisations en Roumanie et Bulgarie existe objectivement, ces deux pays n'en sont pas moins dotés de formidables potentialités pour un pays comme le notre.

Pays francophones, mais également francophiles, ils voient d'un très bon oeil la présence française et constituent de ce fait des espaces à investir pour nos compatriotes.

1. Un environnement général très favorable à notre pays

La proximité historique, culturelle et, surtout, linguistique, constitue sans doute l'élément le plus favorable à toute présence française dans ces pays, où la France bénéficie d'un capital de sympathie extrêmement important . Si cet élément était connu pour la Roumanie -et il s'est d'ailleurs trouvé confirmé en tous points-, il a en revanche étonné la mission en Bulgarie, où notre pays et ses habitants font l'objet d'une grande admiration et d'un accueil particulièrement chaleureux.

Sur le plan de la langue, c'est bien sûr en Roumanie que le sentiment de proximité reste le plus fort, la langue française s'y étant diffusée dès le XVIIIème siècle, lorsque les fils des grandes familles roumaines venaient faire leurs études à Paris. Le pays compte aujourd'hui 25 % de locuteurs français et 2,2 millions d'apprenants, soit 50 % des effectifs scolarisés (contre 33 % pour l'anglais). Nombre des chefs d'entreprise français auxquels la délégation a rendu visite ont indiqué que l'usage très répandu du français avait constitué un critère de choix majeur dans la sélection de leur pays d'installation, certains ajoutant même que le fait pour un dirigeant d'entreprise de parler français constituait un « plus » dans ses relations avec la clientèle.

Résolument francophone et d'ailleurs candidate à l'organisation du XIème sommet de la francophonie en 2006, la Roumanie a récemment signé avec la France une déclaration commune affirmant la volonté des deux pays de relancer la coopération en matière culturelle, preuve s'il en était besoin de sa francophilie. Par ailleurs, la France a participé depuis une demi-douzaine d'années à plusieurs dizaines de projets de jumelages franco-roumains.

Sur le plan culturel, les liens entre la France et la Roumanie sont pluriséculaires. De ce fait, le réseau de coopération et d'action est large, puisqu'il comprend trois Centres culturels français (Timisoara, Cluj Napoca, Iasi), un Institut français (Bucarest) et cinq Alliances françaises (Brasov, Contanta, Craiova, Pitesti, Ploiesti). Les discussions que la délégation a pu avoir avec le responsable du centre culturel de Timisoara lui ont permis de constater le succès rencontré par ces structures de coopération culturelle.

Si l'usage du français est beaucoup moins développé en Bulgarie, le pays est néanmoins membre à part entière, à sa demande, du mouvement francophone depuis le sommet de l'Ile Maurice en 1993. D'autre part, le réseau d'enseignement en langue française est particulièrement développé : près de 10 000 élèves sont en effet accueillis dans 59 lycées bilingues -sans oublier le lycée français « Victor Hugo » de Sofia- et il existe 8 filières universitaires francophones relayées par un vaste programme de bourses d'études.

Au point de vue culturel, le dispositif de coopération, fortement réactivé depuis une dizaine d'années, repose sur l'Institut français de Sofia et le réseau des huit Alliances françaises de province. La délégation a d'ailleurs eu l'occasion de constater de visu le dynamisme de ce réseau, dont elle a rencontré le responsable pour la ville de Plovdiv. Par ailleurs, la France a participé depuis 1998 à treize jumelages institutionnels avec la Bulgarie, ce qui la place en ce domaine au second rang des Etats membres derrière l'Allemagne.

De façon plus générale, les Français venant s'installer en Roumanie ou en Bulgarie peuvent être assurés d'y trouver -cela a été dit à plusieurs reprises par de nombreux membres de la communauté française dans ces deux pays- un cadre et des conditions de vie très agréables, tant au point de vue de l'environnement naturel que des relations sociales, des perspectives professionnelles, du pouvoir d'achat, des loisirs ou encore de la vie culturelle.

2. Un cadre institutionnel et financier propice aux investisseurs français

Au-delà des nombreux obstacles -précédemment évoqués- auquel se trouve confronté tout investisseur dans un pays émergent, la Roumanie et la Bulgarie présentent, pour les dirigeants français de grandes entreprises comme de PME, de réelles opportunités : taille du marché, qualité et faible coût d'une main d'oeuvre souvent polyglotte, sérénité du climat politique et social, importance des débouchés, accroissement à venir du pouvoir d'achat suite à l'adhésion prochaine à l'Union européenne ...

Il est également à souligner que ces pays offrent aux investisseurs français, plus particulièrement aux créateurs de PME ou aux dirigeants relativement peu expérimentés, une certaine souplesse, voire une relative « indulgence » à l'égard de leurs erreurs éventuelles. Comme l'a évoqué l'un des chefs d'entreprises rencontrés, il reste encore possible, dans ces pays, de « faire des erreurs » qui seraient, en France, irréversibles.

D'autre part, les investisseurs français doivent savoir que leur installation dans ces pays se trouvera grandement facilitée par un réseau de partenaires, tant publics que privés, apportant leur soutien à des implantations de ce type. A ce titre -et la délégation a pu constater l'excellence de leur travail-, les missions économiques dépendant de nos deux ambassades sont à même de renseigner les nouveaux arrivants sur de nombreux points touchant aussi bien au cadre politico-économique de chaque pays qu'à sa législation en matière sociale ou fiscale. Les nombreux documents produits par chaque mission font d'ailleurs l'objet d'une mise en ligne régulière et réactualisée, et sont donc très facilement accessibles à tous les investisseurs potentiels souhaitant réaliser une étude de marché depuis la France. Tout aussi utiles et indispensables pour les entrepreneurs sont par ailleurs les informations délivrées par les ambassades roumaine et bulgare en France, à travers notamment leur site Internet.

On évoquera également, s'agissant de la Roumanie, l'existence de plusieurs cabinets français installés de longue date dans le pays, d'une banque commerciale majeure ainsi que de la Chambre de commerce et d'industrie française dans ce pays, sans oublier les centres culturels en régions, qui constituent d'utiles sources de renseignements et d'avis préalables à toute implantation. On observera qu'il est aussi préconisé aux investisseurs de privilégier des implantations dans des régions où sont déjà installées des firmes françaises : outre l'expérience qu'elles peuvent leur transmettre à titre gracieux, elles sont susceptibles de constituer des partenaires privilégiés pour passer des accords d'approvisionnement ou d'expédition permettant de réduire les coûts.

Enfin, sur le plan des financements, existent de nombreux dispositifs émanant de bailleurs de fonds non seulement locaux et internationaux, mais aussi français. Leur utilité n'est pas que théorique puisque les dirigeants d'entreprises rencontrés par la délégation ont indiqué n'avoir pas rencontré de problèmes particuliers pour financer le développement de leur projet.

Ainsi, certains projets peuvent être financés par des fonds provenant du programme PHARE de l'Union européenne, de la BERD ou de la SFI (Société financière internationale), filiale de la Banque mondiale. Les banques commerciales nationales accordent également des crédits aux entreprises, soit en recourant aux mêmes sources que les bailleurs internationaux, soit indépendamment. En France, la procédure du Fasep-garantie permet aux entreprises souhaitant financer l'implantation d'une filiale dans ces pays d'obtenir une garantie facilitant l'obtention d'emprunts, les dossiers étant instruits dans ce cas par les directions régionales de la Coface et de la BDPME (Banque de développement des petites et moyennes entreprises).

- II. LA FRANCE DOIT DONC SOUTENIR LEUR ADHÉSION ET Y DÉVELOPPER SA PRÉSENCE

Outre des considérations de solidarité politique, la France a tout intérêt, pour les raisons précédemment évoquées, à soutenir l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l'Union européenne. Cet appui à une adhésion simultanée doit donc être clairement réitéré au cours des mois nous séparant de l'échéance de 2007.

Cependant, afin que la France, mais aussi la Roumanie et la Bulgarie, puissent tirer profit de cette adhésion, il convient que notre pays y renforce notoirement sa présence et y favorise davantage encore l'installation de nos compatriotes .

A. UN SOUTIEN EXPLICITE À UNE DOUBLE ADHÉSION SIMULTANÉE

1. Notre pays s'est déjà largement engagé en ce sens

Le soutien français à l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l'Union européenne n'a rien d'une position nouvelle ou prise sur le tard.

Les liens politiques entre la France et la Roumanie sont anciens. Ils prennent racine dans le rôle joué par Napoléon III en faveur de la création du jeune Etat roumain au XIXème siècle, puis dans l'aide apportée par la France à l'édification et au développement de ce nouvel Etat. La fraternité d'armes née durant la Première Guerre mondiale s'est maintenue sous le régime communiste, à travers notamment une visite du Président de Gaulle en 1968. La chute du bloc communiste a ouvert plus largement la voie aux « retrouvailles » des deux peuples.

Plus récemment, et bien qu'ayant pu paraître un moment tendues en raison de la divergence d'appréciation entre Paris et Bucarest sur la question du conflit irakien et de la position à adopter vis-à-vis des Etats-Unis, le dialogue politique fourni entre la France et la Roumanie témoigne de la bonne qualité des relations entre les deux pays. Les visites ministérielles ont en effet été nombreuses depuis les visites d'Etat des Présidents respectifs en 1997 et 1999. A titre d'exemple, en 2003, se sont succédés côté roumain trois déplacements en France du Premier ministre, M. Adrian Nastase, et une visite officielle du Président, M. Ion Iliescu. Lors de cette dernière rencontre, qui s'est déroulée en novembre 2003, M. Jacques Chirac a « confirmé notre volonté de soutenir l'ambition 2004-2005 qui a été posée comme souhait ou condition par la Roumanie », ajoutant que la France l'aiderait « dans toute la mesure de ses moyens pour que ces objectifs soient atteints ».

Dans le même temps se rendaient en Roumanie le ministre délégué aux affaires européennes, Mme Noëlle Lenoir, le ministre du commerce extérieur, M. François Loos, et le ministre de l'agriculture, M. Hervé Gaymard, tandis que le ministre des affaires étrangères roumain, Mircea Geoana, était accueilli par deux fois en France. Ces visites croisées ont été l'occasion de réaffirmer le soutien de la France, tant à l'adhésion de la Roumanie en 2007 qu'à la signature du traité d'adhésion en 2005 au plus tard.

S'agissant de la Bulgarie, le soutien de la France s'est d'abord traduit par une coopération administrative s'inscrivant dans la perspective de l'adhésion à l'Union européenne. Notre pays a ainsi déployé des moyens pour relever la capacité administrative de la Bulgarie, condition indispensable pour intégrer l'acquis communautaire. La France a également aidé la Bulgarie dans de nombreux secteurs tels que l'agriculture, la justice et les affaires intérieures, les affaires sociales, la réforme de l'administration et de la fonction publique. Par ailleurs, notre pays a envoyé auprès du Premier Ministre bulgare un conseiller français chargé des questions européennes et de la coordination interministérielle.

Sur un plan plus politique, et malgré de brèves tensions dans nos relations bilatérales suite aux positions pro-Etats-Unis prises par la Bulgarie dans la crise irakienne, les contacts entre nos deux pays se sont nettement développés depuis 2001 : visites à Sofia du ministre de la défense, M. Alain Richard (novembre 2001), du ministre délégué aux affaires européennes, M. Pierre Moscovici (décembre 2001), du ministre de l'intérieur, M. Daniel Vaillant (mars 2002) et de la ministre déléguée aux affaires européennes, Mme Noëlle Lenoir (novembre 2002). Inversement, se sont rendus à Paris le ministre bulgare des affaires étrangères, M. Solomon Passy (octobre 2002), et le Premier Ministre, Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha (novembre 2002).

Si toutes ces rencontres ont été l'occasion d'affirmer le soutien de la France au processus d'adhésion de la Bulgarie, celui-ci a été rappelé avec insistance en 2003 lors de la visite à Paris du ministre de l'intérieur, M. Georgi Petkanov (janvier), et à Sofia de son homologue français (février), et enfin lors de la visite à Paris du Président de la République, M. Gueorgui Parvanov (novembre) et à Sofia de la ministre déléguée aux affaires européennes, Mme Lenoir (décembre).

2. L'objectif 2007 est politiquement viable et économiquement réaliste

Le soutien de la France à l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie en 2007 ne constitue pas uniquement une pétition de principe qui serait dépourvue de tout lien avec les capacités réelles de ces pays à intégrer l'Union européenne. Il s'inscrit au contraire dans une démarche tenant compte des réalités économiques propres à ces pays et des déclarations politiques émanant des personnes les mieux qualifiées pour en juger .

Ce sont en premier lieu les chefs d'Etat et de gouvernement des Quinze qui ont adressé un signal politique fort à la Roumanie et à la Bulgarie dès le Conseil européen de Copenhague en décembre 2002, en se donnant pour objectif l'adhésion en 2007. Ce signal a été réaffirmé lors du Conseil européen de Thessalonique en juin 2003, où ont été également soutenus les efforts des deux pays pour atteindre l'objectif de conclusion des négociations dans le courant de l'année 2004. Tout récemment encore, ce message a été répété clairement lors du Conseil européen de Bruxelles en juin 2004.

Aujourd'hui, et au regard de l'avancement des négociations et des travaux d'adhésion des deux pays, le respect du calendrier fixé semble largement soutenable. Les responsables politiques et administratifs, tant nationaux que communautaires, rencontrés par la délégation ont dans l'ensemble très largement confirmé que d'énormes progrès avaient été consentis par les deux pays sur la voie de l'adhésion et que les différents chapitres restant à clôturer le seraient en temps voulu si les efforts continuaient d'être aussi soutenus, ce à quoi se sont d'ailleurs très fermement engagés les dirigeants roumains et bulgares.

Les populations de ces pays, qui ont consenti de très importants sacrifices en vue de l'adhésion, attendent impatiemment de se voir confirmer le calendrier et les orientations qui ont été fixés depuis plusieurs années. Il s'agit donc aujourd'hui de faire en sorte que leur « europhilie », qui ne s'est pas démentie depuis, malgré les difficultés économiques et sociales auxquelles elles ont été confrontées, ne soit pas déçue .

En outre, repousser l'horizon de l'adhésion à une date ultérieure à 2007 laisserait à penser, comme l'ont d'ailleurs fait remarquer les différentes personnalités roumaines et bulgares rencontrées, que leur pays serait relégué dans un autre groupe de pays candidats incluant, notamment, certains des pays de l'ex-Yougoslavie, sans que ne soient récompensés les efforts fournis depuis plusieurs années pour être intégrés aussi rapidement que possible après l'entrée récente des dix nouveaux Etats adhérents.

Enfin, la délégation se doit d'évoquer les excellents travaux déjà réalisés par plusieurs de nos collègues députés et sénateurs 3 ( * ) qui, tous sans exception, concluent à la capacité de la Roumanie et de la Bulgarie de remplir très rapidement les conditions requises à l'adhésion et appellent la France à continuer de soutenir clairement l'ambition des dirigeants de ces deux pays d'achever les négociations en 2004, de signer le traité d'adhésion en 2005 et de rejoindre l'Union européenne en 2007.

3. Roumanie et Bulgarie doivent adhérer en même temps

La France doit continuer, non seulement à soutenir la double adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l'Union européenne, mais également une double adhésion simultanée, au 1 er janvier 2007, avec si possible un calendrier identique pour les deux pays (clôture des négociations en 2004 et signature du traité d'adhésion en 2005). Il ne s'agit évidemment pas d'un simple souci de symétrie, mais d'une volonté de satisfaire équitablement des pays qui ont suivi un processus d'adhésion parallèle et ont consenti des sacrifices proportionnellement identiques pour satisfaire aux exigences communautaires dans le délai leur étant imparti .

La délégation est bien consciente du fait que Roumanie et Bulgarie ne présentent pas aujourd'hui le même degré d'avancement dans les négociations en vue de l'adhésion, puisque six des trente chapitres restent à clore pour la première tandis que la seconde a achevé provisoirement ses négociations techniques. Mais il faut garder à l'esprit que la Roumanie est partie de beaucoup plus loin que les autres pays candidats et qu'elle avait donc un retard bien plus important à rattraper. De plus, l'opinion publique roumaine a besoin de messages d'encouragement pour comprendre que les efforts demandés par le Gouvernement et les institutions communautaires ne sont pas vains.

Les dirigeants roumains rencontrés par la délégation ont souligné toute l'importance qu'ils attachaient à une double adhésion simultanée. Les responsables bulgares s'y sont également montrés très favorables, et se sont même dits prêts à apporter à la Roumanie toute l'assistance technique dont elle aurait besoin pour être en mesure d'adhérer début 2007. Ils ont toutefois précisé refuser, fort légitimement d'ailleurs, qu'un éventuel retard de la Roumanie ne pénalise leur pays en reportant pour les deux la date d'adhésion après 2007.

La délégation a bien noté que l'évolution des négociations d'adhésion entre l'Union européenne et les deux pays était guidée par le principe
-parfaitement équitable- selon lequel chacun d'entre eux serait traité selon ses mérites propres. Elle a également retenu que la Commission européenne, dont elle a rencontré l'un des représentants pour la Bulgarie, était favorable au principe d'une double adhésion simultanée. Aussi tient-elle à insister sur l'intérêt politique et économique qu'il y aurait, tant pour les deux pays concernés que pour les pays déjà adhérents, à ce que la Roumanie et la Bulgarie puissent toutes deux rejoindre en même temps les 25 membres actuels de l'Union européenne.

B. UN ACCROISSEMENT INDISPENSABLE DE NOTRE PRÉSENCE

1. La France est très inégalement implantée dans ces pays

L'intensité des relations économiques entre la France d'un côté, la Roumanie et la Bulgarie de l'autre, est extrêmement inégale, et de façon générale nettement insuffisante par rapport au rôle qu'ambitionne d'y jouer notre pays .

De par la plus grande proximité historique, culturelle et linguistique la rapprochant de la Roumanie, la France est bien mieux implantée dans ce pays qu'en Bulgarie puisqu'elle constituait, au 31 décembre 2003, le deuxième investisseur étranger avec un stock d'environ 1,5 milliard d'euros représentant un peu plus de 11 % des investissements totaux. Encore faut-il préciser que si la France se situe derrière les Pays-Bas (mais devant l'Allemagne, les Etats-Unis et l'Italie), le montant des IDE hollandais est artificiellement gonflé car il intègre des investissements ne faisant que transiter par les Pays-Bas pour des raisons fiscales.

Les entreprises françaises sont présentes dans de très nombreux secteurs et visent de plus en plus directement le marché des consommateurs roumains. Ainsi, sont aujourd'hui largement implantées en Roumanie des entreprises telles que, dans l'ordre décroissant des investissements : Orange, Société Générale-BRD, LafargeRomcim, Renault-Dacia, Veolia, Carrefour, Alcatel, Danone, Alstom transport ... La Roumanie compte par ailleurs plus de 2 000 entreprises à capitaux mixtes franco-roumains.

Toutes ces sociétés françaises ont participé très activement au processus de privatisation : 75 % des 45.000 personnes qu'elles emploient appartiennent à des sociétés issues du secteur public roumain. Mais ce dynamisme n'est pas l'apanage de quelques grands groupes nationaux : un nombre croissant de PME, représentant des montants de moindre importance et situées le plus souvent en province, ont investi dans des secteurs aussi divers que la confection, les chaussures, la transformation du bois, l'agroalimentaire, l'industrie mécanique, électrique et électronique, ou encore les nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Si ces chiffres sont très favorables à notre pays, ils doivent cependant être en partie relativisés. La France n'est en effet que le quatrième partenaire commercial de la Roumanie, avec une part de marché d'un peu plus de 7 %. Elle reste encore loin derrière l'Italie (20 %), l'Allemagne (15 %) et, dans une moindre mesure, la Russie (8 %), qui mènent une politique d'implantation beaucoup plus « agressive » de par leur proximité géographique, culturelle et entrepreneuriale. Le montant des échanges franco-roumains reste donc bien inférieur à son potentiel et pourrait à n'en pas douter être conséquemment augmenté.

Les faiblesses françaises en Roumanie sont toutefois très relatives au regard de celles constatées en Bulgarie. Notre pays n'y est en effet que le treizième investisseur européen, très loin derrière, dans l'ordre décroissant des investissements, la Grèce, l'Allemagne, l'Italie, la Belgique, l'Autriche, les Pays-Bas, la Hongrie et la Grande-Bretagne.

En termes de flux, les investissements français ont crû de 1994 à 1996, se sont ensuite contractés pour reprendre vivement en 1999, et ont à nouveau fortement baissé depuis. Les huit principaux investisseurs français sont la Société générale, BNP Paribas, Dewavrin, Ciments français, Mecamidi, Danone, Air Liquide et Schneider. Au total, seules 77 implantations françaises sont actuellement dénombrées par la Mission économique, pour une communauté française estimée à un demi-millier de personnes environ.

Ces résultats médiocres sont toutefois à relativiser par la tendance observée en termes d'échanges commerciaux bilatéraux, ceux-ci ayant doublé lors des quatre dernières années pour atteindre, en 2003, 852 millions d'euros. La France se classe ainsi au sixième rang des partenaires commerciaux de la Bulgarie, où elle occupe une part de marché de 5,6 %.

S'il reste encore positif à notre profit, le solde commercial de la France par rapport à la Bulgarie tend à se détériorer : il se montait en effet à 12 millions d'euros en 2003 contre 48 l'année précédente. Ainsi, le secteur énergétique est resté déficitaire, tandis que les secteurs agroalimentaires et industriels ont vu leurs excédents se réduire fortement. La hausse du nombre de délocalisations et de contrats de sous-traitance explique pour l'essentiel cette évolution.

2. Les demandes, tant françaises que roumaines et bulgares, sont pourtant très fortes

L'insuffisante présence française a été unanimement très largement regrettée, tant par la communauté française que la délégation a pu rencontrer que par les responsables roumains et bulgares .

Les entrepreneurs français présents dans ces deux pays ont surtout regretté le manque de soutien -ou du moins son insuffisante visibilité- des pouvoirs publics français à leur installation et se sont dits très demandeurs d'un appui technique et financier plus marqué. Ainsi, la délégation a rencontré un exploitant agricole dirigeant en Roumanie une entreprise d'une trentaine de salariés, qui a souligné avoir été peu aidé par les autorités administratives françaises, que ce soit en France avant l'expatriation, ou bien une fois arrivé sur le territoire roumain, et avoir dû se « débrouiller » seul face aux nombreux contretemps qu'entraîne l'implantation d'une structure agricole dans un tel pays (obtention des titres de propriété des terres, recherche de financements, sécurisation des installations ...). Il a souligné le contraste existant avec les exploitants agricoles étrangers -allemands et italiens, notamment- qui se montrent beaucoup plus solidaires et bénéficient de la part de leur gouvernement d'un appui soutenu à l'installation, ce explique naturellement leur très forte implantation.

Ce constat a été globalement partagé par d'autres chefs d'entreprises intervenant dans d'autres secteurs d'activité, qui ont fréquemment mis l'accent sur le peu d'information délivrée en France quant à l'intérêt que pourraient avoir nos compatriotes à investir en Roumanie ou en Bulgarie, ainsi que sur le caractère très limité des moyens de conseil et de suivi mis en oeuvre dans ces pays.

Les dirigeants roumains et -surtout- bulgares que la délégation a rencontrés ont quant à eux mis l'accent sur la nécessité pour la France de poursuivre ou d'accentuer ses efforts d'investissement dans ces pays. Si les responsables roumains se sont principalement félicité de la place prééminente de la France dans leur pays et l'ont appelée à conserver son dynamisme, les dirigeants bulgares ont clairement regretté qu'elle ne soit pas davantage présente sur leur territoire et ont souhaité voir cette situation évoluer.

C'est ainsi que le Président de la République, M. Gueorgui Parvanov, a clairement exprimé son insatisfaction quant à la treizième place occupée par la France en matière d'investissements étrangers en Bulgarie. Considérant que la France était légitimement en droit de nourrir bien d'autres prétentions, il a appelé nos deux pays à prendre toutes les mesures politiques et administratives nécessaires pour favoriser un accroissement substantiel des échanges bilatéraux .

De son côté, le Président du Parlement bulgare, M. Ognian Stefanov Guerdjikov, a insisté sur l'apport très appréciable que pourraient fournir les agriculteurs français en matière de technologie et de savoir-faire et s'est montré très ouvert à leur venue, indiquant à cette occasion quels étaient les moyens pour les investisseurs non bulgares de contourner l'interdiction d'allouer des terres à des étrangers.

3. Le soutien des pouvoirs publics et la présence des investisseurs privés doivent donc être accrus

De très nombreux moyens s'offrent aux pouvoirs publics français pour renforcer la présence de notre pays en Roumanie ou en Bulgarie, au premier rang desquels la coopération administrative et judiciaire, dont le coût est relativement limité pour le pays « offreur » et l'apport substantiel pour le pays « cible » . En matière administrative, la France pourrait utilement faire profiter la Roumanie et la Bulgarie de son expérience en matière de gestion des structures publiques afin de leur apprendre à mieux utiliser les différents fonds européens de préadhésion (Phare, ISPA, Sapard). Les autorités communautaires ont en effet souligné que les retards et les dysfonctionnements relevés dans la gestion de ces fonds provenaient essentiellement des problèmes rencontrés par ces pays dans l'organisation et le fonctionnement de leur administration publique.

En matière judiciaire et policière, une plus grande coopération entre la France et ces deux pays permettrait de traiter « en amont » les problèmes d'immigration illégale et de trafics divers, qui ont des répercussions jusque sur notre territoire. Serait ainsi envisageable, en matière judiciaire, un accroissement des échanges entre les écoles de formation et les barreaux de nos pays respectifs. Pour ce qui est des domaines policiers et douaniers, la France pourrait s'engager à conseiller et former des personnels roumains et bulgares au contrôle des frontières, et à échanger davantage d'informations.

En matière économique et commerciale, diverses pistes pourraient être suivies par notre pays pour accroître sa présence. D'une façon générale, la promotion de ces pays devrait être très largement accrue sur le territoire français, mais aussi en Roumanie et en Bulgarie, que ce soit de façon ponctuelle avec l'organisation de colloques, forums et autres évènements permettant de faire découvrir les opportunités qu'ils recèlent, ou bien de façon plus continue à travers les différents organismes d'appui et de conseil aux investissements. A cet égard, notre pays ne manque pas de structures parfaitement adaptées à ce type d'actions, qu'il s'agirait d'activer en ce sens : directions des ministères en charge de l'économie et du commerce extérieur chargées des actions internationales, Ubifrance, chambres de commerce et d'industrie, agence française des investissements internationaux, missions économiques, agences de développement auxquelles recourent les collectivités locales ...

En matière plus spécifiquement agricole, notre pays dispose de compétences reconnues qu'il lui serait relativement aisé de valoriser dans des pays dont le potentiel est extrêmement important. Outre le fait que la France pourrait apporter un support technique aux processus de remembrement et de mise aux normes des industries agroalimentaires, elle devrait surtout intensifier son soutien aux agriculteurs français souhaitant profiter du bas prix et de la fertilité des terres roumaines et bulgares . Ici encore, les nombreux organismes, privés comme publics, que possède notre pays en matière agricole devraient jouer un rôle plus important : services du ministère de l'agriculture chargés des actions internationales, réseau des conseillers au commerce extérieur, Sopexa, chambres d'agriculture, organisations syndicales ...

Le secteur touristique est également emblématique des carences françaises, dont la responsabilité est il est vrai partagée avec la Roumanie et la Bulgarie. Bénéficiant d'un climat semi-continental, de paysages très variés et d'activités de loisir fort diverses (plage, montagne, thermalisme, culture, agrotourisme ...), ces deux pays ont très largement développé leur secteur touristique ces dernières années, ce dernier affichant une progression de 15 à 20 % par an.

Or, les touristes français sont encore très peu nombreux à choisir ces destinations et les opérateurs français à y investir. Ainsi, en Bulgarie, la France n'occupe que la seizième place de ce double point de vue, alors qu'allemands, britanniques, grecs, italiens et russes passent très fréquemment leurs vacances dans ce pays et investissent massivement dans des équipements touristiques .

Ce retard français, qui s'explique par le fait que la Roumanie et - a fortiori - la Bulgarie sont deux pays dont les attraits touristiques sont relativement méconnus de nos compatriotes, pourrait être résorbé grâce à une double action. Les autorités des ces pays, ainsi que les agences privées spécialisées, devraient tout d'abord les promouvoir davantage auprès des français. Les perspectives en ce domaine semblent favorable, puisque le Président du Sénat roumain, M. Nicolae Vacaroiu, a déclaré à la délégation vouloir faire des relations franco-roumaines en matière de tourisme une priorité, tandis que nous avons été informés que la vice-premier ministre et ministre de l'économie bulgare, Mme Lydia Chouleva, envisageait d'implanter prochainement un office de tourisme bulgare à Paris. Resteront également des efforts à consentir en matière de formation du personnel et de qualité des services, pour lesquels ces pays accusent encore un certain retard.

En sens inverse, il serait profitable aux agences de voyage et opérateurs français de s'intéresser davantage à la Roumanie et la Bulgarie, à destination desquelles les offres de voyage sont encore trop rares. Si des séjours de montagne ou balnéaires ne semblent pas en mesure d'attirer nos compatriotes -car ils se heurteraient à la concurrence d'offres plus compétitives pour des destinations moins lointaines-, le marché de l'écotourisme et du tourisme culturel semble en revanche prometteur. En plein développement actuellement, ces nouvelles façons de voyager bénéficieraient en effet d'espaces privilégiés en Roumanie et Bulgarie, dont la diversité des paysages et la richesse des monuments est particulièrement appréciée.

Enfin, la France gagnerait à intensifier ses efforts en Roumanie et en Bulgarie au point de vue culturel et linguistique, tant il est vrai qu'une présence importante en ces domaines constitue souvent le fondement indispensable à un développement dans d'autres secteurs, politique et économique notamment. La francophonie offre à cet égard un cadre privilégié qu'il semble aujourd'hui nécessaire de redynamiser. Il y aurait largement matière à renforcer les échanges culturels entre nos pays respectifs, que ce soit en organisant des « semaines » consacrées à la France en Roumanie et en Bulgarie -et inversement- ainsi que des festivals destinés à mieux découvrir la richesse de leur patrimoine culturel et artistique, ou encore en promouvant les jumelages de villes et villages appartenant à chaque pays.

Très peu parlé en Bulgarie, et de plus en plus concurrencé par d'autres langues -au premier rang desquels l'anglais- en Roumanie, le français devrait être davantage promu dans les établissements scolaires nationaux et locaux. Aux dires de plusieurs des personnes rencontrées par la délégation, un plus large enseignement du français dans ces pays constituerait même le principal objectif vers lequel devraient tendre les pouvoirs publics de notre pays . Dans cette optique, il s'agirait non seulement d'accroître le nombre d'écoles et de lycées français en Roumanie et Bulgarie, mais aussi d'augmenter l'offre d'enseignement en français auprès des établissements roumains et bulgares.

Une telle politique de promotion des intérêts nationaux à l'étranger n'est pas sans coût, c'est indéniable. Il s'agit cependant d'un effort indispensable si la France veut figurer aux premières places lorsque Roumanie et Bulgarie rejoindront l'Union européenne. Il importe, à cet égard, de bien avoir conscience que le très important capital de sympathie dont y dispose notre pays constitue un atout incomparable que l'on se rendrait coupable de ne pas exploiter .

* *

*

CONCLUSION

Il convient de souligner comme particulièrement encourageantes les conclusions du Conseil européen de Bruxelles du 18 juin dernier sur le processus d'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie, le calendrier initial ayant été confirmé à cette occasion. Ainsi, l'objectif reste de conclure les négociations techniques avec la Roumanie d'ici à fin 2004, et de signer un traité d'adhésion, commun aux deux pays, aussitôt que possible en 2005, les travaux techniques sur la rédaction de ce traité devant commencer dès le mois de juillet 2004.

Le Conseil européen a souligné qu'il était « crucial » que la Roumanie et la Bulgarie soient prêtes à assumer toutes leurs obligations en tant que futurs pays membres, ce qui nécessite, de leur part, « d'intensifier » leurs efforts. Les conclusions du Conseil insistent sur l'attention particulière qui doit être accordée au renforcement de la capacité administrative et judiciaire, la poursuite des réformes économiques et structurelles et à la mise en oeuvre de l'acquis communautaire, conformément au calendrier initialement établi.

L'Union européenne entend veiller scrupuleusement au respect des engagements pris et la Bulgarie, comme très prochainement la Roumanie, a dû accepter une clause de sauvegarde renforcée qui permettrait à l'Union européenne de retarder leur adhésion d'un an, s'il s'avérait que ces deux pays rencontrent des problèmes graves à remplir leurs obligations comme pays membre. Cette clause supplémentaire traduit essentiellement la volonté de l'Union européenne d'assurer un « monitoring » efficace durant la période intermédiaire relativement longue qui va s'écouler entre la conclusion des négociations techniques et la date d'adhésion de ces deux Etats.

La délégation se félicite de la tonalité générale très positive des conclusions du Conseil européen de Bruxelles qui confirme le respect du calendrier initial d'adhésion tant pour la Roumanie que pour la Bulgarie. Les recommandations émises par le Conseil rejoignent les préoccupations exposées dans le présent rapport, mais elles ne remettent pas en cause le processus lui-même qui reste qualifié de scénario « réaliste ».

Dans le temps qui reste jusqu'à la signature du traité d'adhésion, la Roumanie et la Bulgarie doivent pouvoir compter sur le soutien de la France pour tenir leurs engagements en tant que futurs pays membres.

* *

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ANNEXE I -

COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION

Sénateurs

- M. Gérard CÉSAR (UMP)- Gironde, vice-président de la Commission des Affaires économiques, président de la délégation ;

- Mme Odette TERRADE (CRC) - Val de Marne, vice-présidente de la Commission des Affaires économiques ;

- M. Jean-Paul ÉMIN (UMP)- Ain, secrétaire de la Commission des Affaires économiques ;

- M. Gérard CORNU (UMP)- Eure-et-Loir, secrétaire de la Commission des Affaires économiques ;

- M. Bernard JOLY (RDSE)- Haute-Saône, secrétaire de la Commission des Affaires économiques ;

- M. Jean-Pierre BEL (Soc.)- Ariège ;

- M. Max MAREST (UMP)- Essonne ;

- M. Daniel REINER (Soc.)- Meurthe-et-Moselle ;

- M. Henri REVOL (UMP)- Côte d'Or ;

Administrateurs

Mme Marie de la Bretesche, conseiller à la commission des affaires économiques ;

M. Maxime Reversat, administrateur à la commission des affaires économiques.

ANNEXE II -

AUDITIONS PRÉPARATOIRES DE LA DÉLÉGATION

I - Mardi 2 mars 2004

Audition de M. Marin Raykov, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Bulgarie en France.

Audition de M. Oliviu Gherman, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Roumanie en France.

Audition de M. Luc-Alexandre Ménard, président de la Chambre de commerce et d'industrie franco-roumaine, accompagné de MM. Christian Estève, président de la Chambre de commerce et d'agriculture franco-roumaine et François Gontard, ancien président de KPMG-Roumanie

II - Mardi 13 avril 2004

Audition de M. Pierre Ménat, directeur de la Coopération européenne au ministère des Affaires étrangères.

ANNEXE III -

PROGRAMME DE LA DÉLÉGATION
EN ROUMANIE ET EN BULGARIE

Dimanche 18 avril 2004

Arrivée à Timisoara le soir et installation à l'hôtel .

Lundi 19 avril 2004

Trajet Timisoara - Arad ;

- Visite d'AF ROMANIA SARL (céréales, aliments pour bétail et engraissements de bovins), à Arad ;

Trajet Arad /Timisoara ;

- Visite de la société UTT (filature de fils acryliques et commercialisation) ;

- Déjeuner-débat avec des chefs d'entreprises et des représentants de la communauté française, offert par ALCATEL au centre culturel français de Timisoara ;

- Visite d'ALCATEL (télécommunications, maintenance, logiciels centraux téléphoniques) ;

- Visite d'ELBROMPLAST (fabricant de boîtiers pour téléphone) ;

Transfert à Bucarest en avion et installation à l'hôtel.

Mardi 20 avril 2004

Départ pour Pitesti en mini-bus ;

- Visite de sites industriels sur la plate-forme industrielle de Pitesti (DACIA, VALEO, ACI) ;

Trajet Pitesti - Sâmburesti ;

- Déjeuner offert par la société VINARTE ;

- Visite vignoble et cave de Sâmburesti (soc.VINARTE) ;

Trajet vers Poiana Brasov et installation à l'hôtel.

Mercredi 21 avril 2004

- Visite de la société MTI (fabricant de mobiliers de jardin et d'intérieur) ;

Trajet vers Floresti en minibus ;

- Visite de l'usine de MICHELIN ROUMANIE à Floresti ;

Retour sur Bucarest en mini-bus ;

- Visite de la société Kepler (société de services informatiques) ;

- Entretien avec MM. Andrei POPESCU et Léonard ORBAN, représentants de M. Alexandru FARCAS, ministre de l'Intégration européenne ;

- Dîner-débat avec la communauté d'affaires franco-roumaine à l'ambassade de France ;

Nuit à Bucarest .

Jeudi 22 avril 2004

- Entretien avec M. Iulan IANCU, secrétaire d'Etat auprès du Ministre d'Etat chargé des questions économiques ;

- Entretien avec M Aristide ROIBU, président de la Commission juridique du Sénat et président du groupe d'amitié Roumanie France ;

- Entretien avec M Nicolae VACAROIU, président du Sénat auquel participaient M. Florin BADULESCU, président de la Commission pour les Affaires économiques et MM. Mircea NEDELCU (PRM, nationaliste, opposition) et Stefan PETE ( UDME, minorité magyare) ;

- Déjeuner offert par le Groupe d'amitié Roumanie-France ;

Transfert Bucarest - Sofia en avion ;

- Entretien avec M. Ognian Stefanov GUERDJIKOV, Président du Parlement bulgare ;

- Entretien avec M. Valentin PARVANOV, vice-ministre de l'Economie ;

- Dîner à la Résidence de l'Ambassade de France ;

Installation à l'hôtel .

Vendredi 23 avril 2004

- Entretien avec M. Giovanni DI GIROLAMO, représentant permanent adjoint de la Commission européenne en Bulgarie ;

- Audience de M. Guéorgui PARVANOV, Président de la république de Bulgarie ;

- Déjeuner avec la presse francophone ;

- Visite de l'entreprise OBS (conception et développement de logiciels informatiques) ;

- Visite de l'entreprise Texar (ateliers de confection textile) ;

Départ pour Plovdiv en minibus ;

- Visite de la vieille ville avec le conseiller des Affaires culturelles ;

Installation à l'hôtel et nuit à Plovdiv .

Samedi 24 avril 2004

Départ pour Perushtica en minibus ;

- Visite de l'usine de Schneider Electric ;

- Déjeuner à la cave Todoroff, organisé par la mission économique ;

Départ pour Assenovgrad en minibus ;

- Visite d'une exploitation laitière (fournisseur de Danone) ;

- Visite du monastère de Bachkovo ;

Retour à Sofia ;

- Dîner-buffet à la résidence avec des représentants de la communauté française et du club d'affaires franco-bulgare.

Nuit à Sofia.

Dimanche 25 avril 2004

Retour sur Paris.

* 1 Auxquels il faut en réalité ajouter le 31 ème chapitre « Divers ».

* 2 « Délocalisations : pour un néo-colbertisme européen », rapport d'information de M. Francis Grignon au nom du groupe de travail présidé par M. Christian Gaudin, n° 374 (2003-2004).

* 3 Rapport d'information de M. François Loncle pour la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur le processus d'adhésion à l'Union européenne de la Bulgarie, déposé le 22 novembre 2001 (n° 3417) ; Rapport d'information de M. André Ferrand pour la Délégation pour l'Union européenne du Sénat sur la Roumanie et l'Union européenne, déposé le 4 novembre 2003 (n° 52) ; Rapport d'information de M. Jérôme Lambert pour la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur l'adhésion de la Bulgarie à l'Union européenne, déposé le 3 mars 2004 (n° 1479) et Rapport de M. Jacques Myard pour la même délégation sur le processus d'adhésion de la Roumanie à l'Union européenne, déposé le même jour (n° 1480).

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