2. Un phénomène dont le caractère structurel demeure à démontrer
a) Certains estiment que ce phénomène aurait des causes structurelles
Comme l'indiquent MM. Eloi Laurent et Jacques Le Cacheux dans la Lettre de l'OFCE précitée, les « petits » et les « grands » pays n'ont pas intérêt à réagir de la même manière en situation de ralentissement conjoncturel. La cause en est qu'un soutien isolé de la demande par la politique budgétaire est encore moins efficace dans le cas des « petits » pays que dans celui des « grands ». En effet, le taux d'ouverture des « petits » pays 96 ( * ) est de l'ordre des 2/3 du PIB, contre environ 25 % du PIB pour les « grands » pays. En conséquence, pour les « petits » pays le « multiplicateur keynésien », c'est-à-dire le mécanisme par lequel une stimulation budgétaire se diffuse dans l'économie, est très faible, à cause des « fuites » constituées par les importations.
Dans l'article précité du Monde , M. Jean-Paul Fitoussi affirme même que « dans un petit pays, une politique budgétaire restrictive est expansionniste ».
Il souligne qu'une telle politique ne conduit pas les « petits » pays à réduire la part de leurs prélèvements obligatoires dans leur PIB, l'élargissement de la base imposable qui en résulte, permettant « généralement » de compenser largement la perte de recettes due à la baisse des taux d'imposition.
Les « petits » pays se placent délibérément dans une logique de concurrence fiscale, à la différence des « grands », pour lesquels celle-ci est davantage une contrainte qu'un moyen d'action et qui sont « bien en peine de faire de la vertu le moteur de la croissance ».
En définitive, selon la Lettre de l'OFCE déjà citée, « les « petits » seront incités à se comporter en « passagers clandestins » de l'Union , bénéficiant des politiques de soutien à l'activité mises en oeuvre chez les « grands » voisins sans en supporter les coûts, notamment budgétaires, et des bas taux d'intérêt, sans nécessairement avoir une inflation plus faible ».
Le fait que les Pays-Bas aient eu une croissance négative en 2003 s'explique-t-il par les efforts de ce pays pour respecter le pacte de stabilité ?
En 2003, la croissance des Pays-Bas a été de -0,8 %, soit inférieure de 1,2 point à la moyenne de la zone euro, comme l'indique le graphique ci-après.
La croissance des Pays-Bas et de la zone euro
(croissance annuelle, en %)
Source : Commission européenne
Par ailleurs, l'année 2003 a correspondu à une forte réduction du déficit structurel, comme l'indique le graphique ci-dessous.
Le déficit public des Pays-Bas
(en %)
Source : Commission européenne
Les économistes considèrent cependant généralement que, du fait de la forte ouverture de l'économie des Pays-Bas, résultant de sa petite taille, la mauvaise performance économique de l'année 2003 s'explique essentiellement par une dégradation de la compétitivité des exportations. L'inflation a en effet été toujours été supérieure depuis 1997 à celle de la zone euro, comme l'indique le graphique ci-après.
L'inflation aux Pays-Bas
(croissance en
moyenne annuelle, en %)
Source : Commission européenne
La croissance négative de l'économie néerlandaise en 2003, et plus généralement le creusement depuis 2001 de son déficit de croissance par rapport à la zone euro, semblent donc moins révélateurs des difficultés d'application du pacte de stabilité que de la nécessité, pour chaque Etat, de maîtriser son inflation, alors que l'euro l'empêche de compenser un différentiel d'inflation défavorable par une dévaluation de sa monnaie.
* 96 Le taux d'ouverture est la moyenne des importations et des exportations, exprimée en part du PIB.