B. POUR LA PREMIÈRE FOIS DEPUIS DIX ANS, L'ENSEMBLE DES BRANCHES DU RÉGIME GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE DÉFICITAIRES EN 2004

Pour la première fois depuis 1994, les quatre branches du régime général de la sécurité sociale devraient être simultanément déficitaires en 2004. Le déficit du régime général reste concentré sur la branche maladie. Mais les résultats des autres branches se dégradent aussi à partir de 2003, sous l'effet de la conjoncture, de la hausse des prestations et des transferts .

En outre, il convient de noter que, d'après les dernières prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale, le solde global du régime général en 2004 devrait être dégradé de près de 3 milliards d'euros par rapport aux objectifs fixés en loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, dont deux milliards d'euros sont imputables à la seule branche maladie.

Solde du régime général depuis 1990

(en milliards d'euros)

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale (juin 2004)

Avec une dégradation de 6,7 milliards d'euros en un an, le solde du régime général a atteint - 10,2 milliards d'euros en 2003, un niveau similaire au point le plus bas enregistré au cours de la décennie 90. Le déficit devrait continuer de se creuser en 2004, pour atteindre 14 milliards d'euros, soit « le plus haut niveau jamais enregistré » .

1. L'impasse du déficit de la branche maladie

Comme le souligne le dernier rapport de printemps de la commission des comptes de la sécurité sociale, en 2004, « le déficit de la branche maladie dépasse de très loin les pires résultats antérieurs ».

Evolution comparée du solde de la branche maladie
et des autres branches du régime général

(en milliards d'euros)

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale (juin 2004)

Dès 2002, ce déficit avait atteint le point bas de 1995, soit plus de 6 milliards d'euros. Il a continué à se dégrader en 2003 (+ 5 milliards d'euros en un an) et augmenterait encore en 2004, bien au-delà des prévisions gouvernementales contenues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 et malgré les mesures d'économies mises en oeuvre par ce texte, puisqu'il se situerait, d'après les prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale, à 12,9 milliards d'euros, soit deux milliards d'euros de plus que les prévisions résultant du vote de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

En 2004, le déficit de l'assurance maladie représenterait l'équivalent de 10 % des dépenses de la branche, ce qui signifie, comme le souligne la commission des comptes de la sécurité sociale, que « 10 % des dépenses, soit l'équivalent des remboursements de médicaments, ne sont pas financés par des ressources permanentes ».

Il convient toutefois de noter un point positif en 2004 : l'inflexion de la progression des dépenses d'assurance maladie, liée à la fin des effets des mesures qui avaient pesé sur l'évolution des dépenses en 2002 et 2003, à savoir les revalorisations tarifaires des professionnels de santé ainsi que le coût de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux publics. D'après l'analyse de la commission des comptes de la sécurité sociale, on observe par ailleurs sur les premiers mois de 2004 un ralentissement de la croissance de l'activité des professionnels libéraux.

Hors incidence des revalorisations tarifaires des médecins et de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux, la croissance tendancielle des dépenses d'assurance maladie reste toutefois aujourd'hui sur un rythme de l'ordre de 5,5 % par an. Les ressources, quant à elles, augmentent à un rythme tendanciel proche de celui de la masse salariale, de l'ordre de 4 %.

Evolution des composantes de l'ONDAM

 

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004 prévision

Soins de ville

5,7 %

4,4 %

6,6 %

7,8 %

7,8 %

7,5 %

4,3 %

Etablissements

2,5 %

2,5 %

3,0 %

4,2 %

6,4 %

5,2 %

4,7 %

Dont : hôpitaux

1,6 %

2,3 %

3,3 %

3,7 %

5,9 %

4,8 %

3,9 %

Cliniques privées

3,4 %

2,9 %

0,6 %

4,1 %

7,3 %

5,5 %

5,4 %

Médico-social

6,4 %

3,3 %

3,5 %

7,4 %

8,7 %

6,6 %

8,4 %

ONDAM

4,0 %

3,3 %

4,7 %

5,8 %

7,2 %

6,4 %

4,6 %

NB : par rapport aux chiffres publiés, ce tableau comporte une correction qui rattache à l'exercice 1999 des dépenses enregistrées comptablement en 2000.

Source : Commission des comptes de la Sécurité sociale (juin 2004)

Comme le souligne fort justement la commission des comptes de la sécurité sociale, « la forte croissance de la masse salariale et donc des ressources de l'assurance maladie en 1999, 2000 et 2001, dans un contexte économique très favorable à l'emploi, a masqué la dérive structurelle des dépenses et retardé la prise de conscience de la gravité de la situation de l'assurance maladie. Celle-ci n'est finalement apparue au grand jour qu'en 2002, avec le retournement conjoncturel ».

Taux d'évolution des dépenses d'assurance maladie depuis 1997

(en %)

Evolution de

la masse salariale

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale (juin 2004)

Votre rapporteur général ne peut que partager ce constat et se félicite de ce que le gouvernement actuel ait compris l'importance de mettre en oeuvre une réforme structurelle de l'assurance maladie impliquant une modification des comportements individuels, des modes de consommation médicale et de l'organisation du système de soins .

Le déficit tendanciel de l'assurance maladie depuis 1990

Une analyse de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) datant du mois de février 2004 a tenté d'évaluer le déficit tendanciel de l'assurance maladie depuis 1990, à savoir le montant du déficit obtenu en extrayant de la chronique des déficits constatés chaque année depuis 1990 leur composante conjoncturelle et en analysant leur composante structurelle au regard des nombreuses mesures de financement intervenues durant cette période.

Cette étude montre que le déficit tendanciel du régime général d'assurance maladie, avant toute mesure de financement, s'est creusé de 25 milliards d'euros entre 1990 et 2003 et que, si les mesures de financement nécessaires n'avaient pas été prises, la dette accumulée depuis 1990 avoisinerait aujourd'hui les 200 milliards d'euros . Les mesures de financement qui sont intervenues représentent, en montant cumulé, près de 160 milliards d'euros.

Cette dérive n'a pas été régulière durant cette période. Le déficit s'est stabilisé en 1991, a augmenté faiblement en 1994 et, surtout, s'est stabilisé à nouveau, durant deux ans, entre 1995 et 1997. En dehors de ces périodes d'accalmie, le déficit du régime général d'assurance maladie a progressé à un rythme rapide et régulier, et cette progression, un peu plus importante depuis 1998, est, sur les dernières années, de près de 3 milliards d'euros par an, soit environ 0,2 point de PIB, à taux de prélèvement et de croissance constant.

La CNAMTS note que la stabilisation du déficit durant les trois périodes précitées a résulté, notamment, d'une « modification des comportements des acteurs du système : durant ces périodes qui semblent avoir été tout à la fois des périodes de faible croissance économique et des moments de mobilisation collective autour de réformes qui apparaissaient urgentes en raison des déséquilibres financiers qui se faisaient jour, la consommation médicale et l'activité des professionnels de santé ont connu une période de décélération ».

Source : Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

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