II. ACCROÎTRE LA LISIBILITÉ DE L'ACTION DE L'ÉTAT

A. RENDRE PLUS COHÉRENT LE PÉRIMÈTRE DES POLITIQUES PUBLIQUES

Votre commission des finances se félicite de la prise en compte de l'interministérialité de certaines politiques publiques dans la maquette du 21 janvier 2004.

Lors de la discussion de la proposition de loi organique relative aux lois de finances , un amendement avait été adopté à l'initiative du Sénat précisant , au premier alinéa de l'article 7, que les missions peuvent regrouper des crédits « relevant d'un ou plusieurs services d'un ou plusieurs ministères » .

L'affirmation par le Sénat de la nécessité de prévoir des missions interministérielles lors de la discussion de la proposition de loi organique relative aux lois de finances

« M. Alain Lambert, rapporteur. Cet article 7, qui concerne la budgétisation par objectifs, les missions et les programmes, est l'un des points importants de la réforme.

« Il fixe les règles générales qui sont applicables aux autorisations budgétaires en matière de crédits, comme d'emplois.

« Notre amendement répond à l'une de nos préoccupations essentielles, qui est de rendre possibles, quand la volonté politique le souhaitera et quand les moyens techniques le permettront, des politiques interministérielles exprimées dans la nomenclature budgétaire de vote et d'exécution, ce qui, à nos yeux, est essentiel.

« Ainsi cet amendement supprime-t-il la contrainte qui a été introduite par l'Assemblée nationale de disposer de missions uniquement ministérielles et permet qu'une mission regroupe les crédits relevant d'un ou de plusieurs ministères.

« Madame la secrétaire d'Etat, l'interministérialité est une réalité incontournable aux yeux de notre commission. Imagine-t-on en effet la politique de la ville ou celle de la lutte contre la toxicomanie sans interministérialité ?

« On nous objectera, que présenter ainsi des crédits est techniquement difficile, que des « jaunes » budgétaires permettent d'apprécier une politique interministérielle, que les responsabilités risquent d'être diluées.

« Mais je répondrai à ces trois arguments.

« La difficulté technique ne me semble pas vraiment exister. Il est possible de déléguer des crédits à différents ministres, chacun ordonnançant les crédits qui relèvent de son ministère. C'est ce qui se passe aujourd'hui pour les transferts de crédits.

« Il est même envisageable de déléguer des crédits interministériels aux préfets, à charge pour eux de subdéléguer aux acteurs de terrain les plus compétents à leurs yeux : la politique de la ville pourra ainsi être confiée, ici, à un sous-préfet, là, à un directeur de l'équipement, ailleurs, à un directeur de la jeunesse et des sports.

« Si les « jaunes » offrent, certes, une vue globale, ils ne constituent en aucun cas une unité de discussion parlementaire et ne se prêtent donc pas à une unité de vote. Dans la solution proposée, avec l'architecture des missions et des programmes, le Parlement pourrait se prononcer sur des crédits interministériels regroupés, leur assortir des objectifs et des indicateurs.

« Reconnaissez qu'il serait ridicule et illogique que le Parlement vote des crédits ministériels et leur assortisse des objectifs ministériels, alors que ces crédits seraient destinés à des politiques interministérielles sur lesquelles le Parlement n'aurait pas eu son mot à dire.

« S'agissant des responsabilités, rien n'empêche qu'un ministre chef de file, devienne l'interlocuteur du Parlement sur une politique interministérielle.

« Par ailleurs, les délégations interservices, aujourd'hui possibles au niveau des préfectures, peuvent donner autorité à un directeur départemental sur des services qui, théoriquement, ne dépendent pas de lui.

« Au total, pour ne pas insulter l'avenir et pour ne pas proposer des verrous qui pourraient être gênants demain, mais aussi parce qu'il est normal que le Parlement puisse discuter et voter les crédits comme les objectifs des politiques interministérielles, cet amendement semble beaucoup plus sage que révolutionnaire ».

Source : Journal officiel, compte rendu des débats du Sénat, séance du 7 juin 2001 (discussion en première lecture de l'article 7 de la LOLF)

La position de principe du Sénat en faveur de missions interministérielles vise à éviter la reproduction de l'actuelle structuration par ministère des débats budgétaires au Parlement.

La possibilité de constituer des missions interministérielles permet également d'éviter de refondre la nomenclature budgétaire à chaque modification des attributions ministérielles. Le changement de gouvernement intervenu en avril 2004 en a fourni un exemple : l'élargissement du périmètre du ministère des affaires sociales aurait en effet contraint à modifier celui des missions proposées dans la maquette présentée le 21 janvier, en l'absence de missions interministérielles, puisque la définition des mission aurait été subordonnée à la délimitation des attributions de chaque ministère. A contrario , on relèvera que la mission « Sport et jeunesse » a perdu son caractère interministériel avec le retour de la jeunesse, qui relevait auparavant du ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, au ministère des sports.

La constitution de missions interministérielles avait été envisagée favorablement par la direction de la réforme budgétaire dans une note d'orientation sur la loi organique relative aux lois de finances et l'interministérialité. Cette note, dont l'encadré ci-après reproduit des extraits, en souligne toutefois les limites et aborde la création de nouveaux outils permettant la coordination des politiques interministérielles, les documents de politique transversale (DPT). Ces documents seront préparés, à l'initiative d'un chef de file préalablement désigné, en amont de la discussion budgétaire. Ils viseront à coordonner les objectifs et les indicateurs des programmes concernés par la politique publique retracée par le DPT. D'après les renseignements recueillis par votre commission des finances, il serait envisagé de mettre en oeuvre ces documents pour les politiques suivantes : ville, sécurité, outre-mer, sécurité routière, action extérieure de l'Etat, aide publique au développement et enseignement supérieur.

La LOLF et l'interministérialité

Dans une note d'orientation sur « la loi organique relative aux lois de finances et l'interministérialité » 37 ( * ) , la direction de la réforme budgétaire indique que « la logique de résultat et de performance et la structuration des programmes ministériels par finalité incitent à la prise en compte d'objectifs ou de politiques publiques dont le périmètre peut dépasser les frontières ministérielles.

« Il existe ainsi des objectifs par nature transversaux, qui concernent les activités de nombreux ministères comme les enjeux liés à la territorialité tels que ceux de la ville, de l'outre-mer, de l'aménagement du territoire ou de l'administration territoriale ou des affaires étrangères et les enjeux partagés entre plusieurs entités administratives (politique de l'eau, de la recherche, de la sécurité routière, de lutte contre la toxicomanie, d'intégration, de lutte contre les exclusions, etc.).

« Les travaux préparatoires de la loi organique ont prévu que le budget soit structuré par un nombre limité de programmes (de 100 à 150) afin qu'ils aient une taille suffisamment importante pour bénéficier notamment de la fongibilité des crédits et afin d'assurer une bonne lisibilité de l'action de l'Etat. Cette contrainte paraît difficilement compatible avec la constitution de programmes transversaux dans l'ensemble des ministères (...)

« Le cas échéant, la mission peut fournir au Parlement une présentation interministérielle rassemblant, parce qu'ils concourent à une politique définie, des programmes relevant de plusieurs ministres. Ainsi, par exemple, une mission « sécurité intérieure » pourrait rapprocher les programmes « police nationale » et « sécurité civile » du ministère de l'intérieur et le programme « gendarmerie nationale » du ministère de la Défense. Dans une telle hypothèse, les modalités selon lesquelles les différents ministres responsables des programmes rassemblés par la mission viendraient présenter la mission au Parlement restent à définir (...)

« En cas de mission interministérielle, le vote des crédits par le Parlement concernerait les différents ministères. La loi organique ne prévoit pas de vote des crédits par ministère (sauf s'il n'y a pas de mission interministérielle) : les crédits d'un ministère pourront être reconstitués en additionnant ses différents programmes, certains relevant de missions ministérielles, certains relevant de missions partagées avec d'autres ministères (...)

« Dans les cas où émergent des pans de politiques de l'Etat aux finalités voisines correspondant à des programmes, leur rapprochement dans une même mission interministérielle peut permettre, le cas échéant, d'améliorer la lisibilité de l'action de l'Etat. Un exemple serait la mission interministérielle « police nationale » - « gendarmerie nationale » - « sécurité civile » qui sont des programmes dotés d'un responsable identifié et qui ont une cohérence suffisante pour lui permettre de tirer parti de la fongibilité des crédits. Ce cas de figure ne devrait pas être très fréquent.

« Ce cas de figure est à distinguer du cas où on découperait au sein d'un grand nombre de ministères comme par exemple, l'Intérieur, l'Education nationale ou l'Equipement, des périmètres de crédits correspondant à des enjeux transversaux ou territoriaux que l'on érigerait en programmes regroupés au sein de missions : ville, outre-mer, sécurité routière, intégration, etc.

« Cette solution reviendrait à considérer que la cohérence des politiques qui justifient la constitution d'un ministère est de second ordre par rapport à ces enjeux transversaux (...)

« Par ailleurs, cette solution des missions interministérielles n'est pas toujours possible car les activités concernées sont rarement dissociables, en terme de crédits et de personnels, des autres activités des ministères.

« Enfin, la lisibilité des politiques de ces ministères serait fortement amoindrie : ainsi, par exemple, éclatée en une demi-douzaine de missions, la politique en matière d'éducation serait moins lisible si l'on soustrayait aux possibles programmes « enseignement primaire » ou « enseignement secondaire », des crédits pour les mettre dans un programme « ville », un programme « sécurité routière », un programme «intégration » et un programme « outre-mer » qui rejoindraient chacun leur mission respective. La gestion des crédits et des personnels figurant sur ces petits programmes deviendrait très compliquée puisque les redéploiements entre chacun de ces programmes devraient passer par un décret de virement qui est limité à 2 % des crédits initiaux. L'émiettement des ministères concernés en une série de petits programmes ferait perdre le bénéfice de la fongibilité des crédits (...)

« Pour ces raisons, la constitution de missions interministérielles ne peut concerner qu'un nombre très limité de politiques interministérielles dont les programmes sont d'une taille suffisante, qui identifient une politique sectorielle lisible, qui font l'objet d'une gestion propre et qui ne sont pas la déclinaison territoriale d'une politique sectorielle ».

Afin de répondre à l'objectif de lisibilité du budget de l'Etat et de cohérence accrue des politiques publiques, il vous est proposé de porter le nombre de missions interministérielles de 8 (sur les 32 du budget général de l'Etat) à 15 (sur 31) 38 ( * ) , et de modifier le rattachement de certains programmes et actions.

Par ailleurs, votre commission des finances émet le souhait que la nomenclature budgétaire puisse, sur le long terme, guider la constitution de ministères mettant en oeuvre des politiques publiques cohérentes et clairement identifiées .

1. La mission interministérielle « Sécurité »

Il vous est proposé de constituer une mission interministérielle « Sécurité », formée de deux programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » , afin de tenir compte du concours de ces deux forces au même service public de la sécurité. Dans la mesure où chaque programme resterait ministériel, ce regroupement n'impliquerait en aucune façon la remise en cause du statut militaire de la gendarmerie.

La mise en place de la LOLF traduisant la recherche d'une performance accrue de l'action publique, il importe également de parvenir à une structuration comparable par actions et à une définition commune des objectifs et des indicateurs associés à ces deux programmes. Cette présentation doit garantir la cohérence de la politique publique de sécurité et permettre de disposer de données globales pour pouvoir effectuer, le cas échéant, des comparaisons en vue d'éventuels redéploiements de crédits.

A cette fin, à la demande commune de leurs ministères de tutelle respectifs, l'inspection générale de l'administration, le contrôle général des armées et l'inspection générale des finances ont remis, en juin 2003, un « rapport de synthèse sur la définition des programmes de la police et de la gendarmerie dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances » : « Constatant que police et gendarmerie consacrent la plus grande part de leurs activités à des missions communes, ils [les ministres de tutelle] estimaient que les objectifs et les indicateurs de performance présentés dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1 er août 2001 devaient être, autant que possible, harmonisés » 39 ( * ) .

Proposition de structuration des actions des programmes
de la police et de la gendarmerie nationales

Action spécifique à la gendarmerie

Sous-actions

Défense militaire

Contrôle et surveillance de l'arme nucléaire

Défense opérationnelle du territoire

Préparation des réserves

Missions militaires

Actions communes à la police et à la gendarmerie

Sous-actions

Ordre public et protection de la souveraineté

Maintien de l'ordre et services d'ordre

Protection spécialisée

Renseignement

Sécurité et paix publiques

Sauvetage des personnes et sauvegarde des biens

Sécurité générale et prévention

Police et action administratives

Accueil du public et animation

Sécurité routière

Prévention et information routières

Surveillance, contrôle et régulation de la route

Police des étrangers et sûreté des transports internationaux

Contrôle des flux transfrontières

Sûreté des moyens de transport internationaux

Lutte contre l'immigration clandestine et éloignement

Police judiciaire et concours à la justice

Investigations, enquêtes et recherches

Expertise technique et scientifique

Coopération opérationnelle internationale

Appui à l'autorité judiciaire et administration pénitentiaire

Commandement, formation, logistique

Commandement, études et transmission

Relations publiques et coopération internationale

Gestion des ressources humaines, formation, soutien des personnels

Gestion des moyens

Source : inspection générale de l'administration, contrôle général des armées, inspection générale des finances, rapport de synthèse sur la définition des programmes de la police et de la gendarmerie dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, mai 2003, page 11

Si la présentation par actions du programme « Police nationale » dans la maquette du 21 janvier 2004 reprend ces propositions, le programme « Gendarmerie nationale » est composé de deux actions aux intitulés assez flous : « Maintenir et renforcer l'aptitude de la composante Gendarmerie à honorer son contrat opérationnel » et « Equiper la composante Gendarmerie ». Votre commission des finances vous propose ainsi d'adopter pour la gendarmerie nationale la structuration par actions détaillée ci-dessus, et partage les observations des corps d'inspection sur la nécessité de mettre en place des systèmes d'information permettant d'opérer des ventilations, s'agissant des agents polyvalents et des fonctions dites « supports ».

2. La mission interministérielle « Ecologie et maîtrise des risques »

Avant la présentation de la nouvelle nomenclature budgétaire, il avait été envisagé que la politique publique de l'environnement relève d'une mission  mono-programme, ce qui aurait été contraire aux principes de la LOLF. Dans la maquette gouvernementale du 21 janvier 2004, le projet de créer une mission « Ecologie et développement durable » constituée de trois programmes (« Prévention des risques et lutte contre les pollutions », « Soutien aux politiques environnementales » et « Gestion des milieux et biodiversité ») constituait donc une évolution positive.

Votre commission des finances vous propose cependant d'améliorer encore la nomenclature budgétaire, en créant une mission interministérielle relative à l'écologie et la maîtrise des risques, selon une approche commune avec la commission des finances de l'Assemblée nationale.

La mission interministérielle « Ecologie et maîtrise des risques » regrouperait :

- les trois programmes de l'actuelle mission ministérielle « Ecologie et développement durable » (montant budgétaire : 581 millions d'euros) ;

- le programme « Sécurité civile » de la mission mono-programme « Protection des populations » (montant budgétaire : 374 millions d'euros) qui relève du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ;

- le programme « Météorologie » de la mission « Transports » (montant budgétaire : 186 millions d'euros) ;

- un programme nouvellement créé « Prévention et contrôle des risques industriels », formé des actions « Prévention des nuisances et des risques industriels » et « Contrôles techniques de sécurité et de métrologie » du programme « Développement des entreprises » de la mission « Politique économique » (montant budgétaire : 173 millions d'euros) ; ce programme relèverait du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le programme « Prévention et contrôle des risques industriels » reprendrait une partie des compétences des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE). Votre commission des finances réfute l'argument selon lequel il ne serait pas possible de séparer, dans l'action de ces directions, l'aide aux entreprises des autres activités, telle la surveillance des établissements classés.

La constitution de la mission interministérielle « Ecologie et maîtrise des risques » permettrait de regrouper un volume plus significatif de crédits (de l'ordre de 1,3 milliard d'euros) que ceux des missions « Ecologie et développement durable » et « Protection des populations », parmi les plus faiblement dotées dans la maquette gouvernementale présentée le 21 janvier.

Cette proposition part d'un constat : la mission régalienne de protection des populations et de l'environnement correspond à une politique publique interministérielle, devant pouvoir être identifiée comme telle.

La lisibilité accrue conférée à l'action de l'Etat dans ce champ de compétences répond à une attente croissante des citoyens, ainsi qu'à un souci de cohérence sur le plan opérationnel, par l'articulation entre la prévention et la gestion des risques lorsque surviennent des catastrophes naturelles : la commission d'enquête parlementaire du Sénat sur les inondations dans la Somme avait d'ailleurs souligné le besoin de renforcer la coordination interministérielle dans ce domaine.

Le nécessaire renforcement de l'action interministérielle face aux risques naturels :
l'exemple des inondations de la Somme

« L'organisation du système de surveillance et d'annonce des crues illustre l'émiettement des responsabilités entre plusieurs services de l'Etat, ce qui nuit indéniablement à l'efficacité d'ensemble du dispositif.

« Comme le relevait M. Claude Allègre, ancien ministre, ancien président du BRGM 40 ( * ) , lors de son audition devant la commission : « en France, le cycle de l'eau concerne cinq ministères : l'eau qui tombe relève de la météorologie nationale, c'est-à-dire du ministère des transports ; l'eau qui ruisselle sur le sol, du ministère de l'agriculture ; l'eau collectée par les rivières, du ministère de l'environnement ; l'eau souterraine, du ministère de l'industrie. Enfin, le ministère de la recherche est également concerné à divers titres ».

« S'agissant du réseau d'alerte météorologique, Météo France a conclu depuis 1995 des conventions avec les différents services de l'Etat :

- la Direction de la défense et de la sécurité civiles pour les catastrophes de type météorologique ;

- la Direction de l'eau pour les services d'annonce des crues (...)

« Qu'il s'agisse de l'un ou l'autre de ces circuits d'information, le système souffre d'un excès d'informations, non hiérarchisées et insuffisamment corrélées, ce qui rend plus difficile l'anticipation et le déclenchement de l'alerte (...)

« En matière de réseau d'alerte des crues, il est clair que la collaboration reste très insuffisante entre météorologues, hydrologues et géologues, et qu'il n'existe pas de structure fédératrice, alors même qu'il s'agissait d'une recommandation forte de l'Instance d'évaluation de la politique publique de prévention des risques naturels, qui, sous la direction de M. Paul-Henri Bourrelier, a rendu ses conclusions en 1998 ».

Source : Sénat, commission d'enquête sur les inondations de la Somme, rapport d'information de nos collègues Marcel Deneux, président, et Pierre Martin, rapporteur : « Inondations dans la Somme : des leçons pour l'avenir », n° 34 (2001-2002)

En outre, face à l'accroissement des charges financières qui pèsent sur les collectivités territoriales pour le financement des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), il est nécessaire de pouvoir chiffrer plus précisément l'effort global consenti par l'Etat dans le domaine de la prévention et de la gestion des risques naturels.

Votre commission des finances observe par ailleurs que les services relevant de la nouvelle mission « Ecologie et maîtrise des risques » devront coopérer avec ceux en charge de l'action « Gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises » du programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire ». Le rattachement de l'action « Gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises » à la mission « Ecologie et maîtrise des risques » n'a toutefois pas été proposé, afin de privilégier la coordination et le regroupement des moyens de l'ensemble des services en charge de la politique de sécurité sanitaire.

3. La mission interministérielle « Urbanisme et logement »

La maquette présentée par le gouvernement le 21 janvier 2004 comporte une mission ministérielle « Ville » formée de trois programmes « Equité sociale et territoriale et soutien », « Rénovation urbaine » et « Allègements de charges sociales en zones urbaines sensibles ».

Le choix de ne pas regrouper dans une mission interministérielle l'ensemble des crédits pouvant relever de la politique de la ville apparaît conforme à la position de votre commission des finances. Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2002, la Cour des comptes estimait également qu'une telle mission n'était pas souhaitable. En effet, sa « finalité d'intérêt général » ne serait « qu'une des finalités, secondaire, des programmes ministériels susceptibles de la composer ». Ainsi, « une telle mission supposerait notamment d'ériger en programmes une fraction des crédits des ministères chargés de l'éducation nationale ou de l'intérieur représentative de leur contribution à la politique de la ville ».

Votre commission des finances déplore cependant que la politique de l'espace urbain apparaisse, dans la nomenclature présentée le 21 janvier 2004, limitée à une action ministérielle fondée sur la discrimination positive en faveur des quartiers en difficulté.

De surcroît, les crédits proposés pour la mission « Ville » (650 millions d'euros) sont à peine supérieurs au montant (500 millions d'euros) que, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2002, la Cour des comptes estimait correspondre au montant minimal souhaitable pour un programme afin de permettre un bon usage de la fongibilité des crédits.

Dans ces conditions, le montant des crédits de chacun des programmes de la mission « Ville » est nettement inférieur au seuil de 500 millions d'euros recommandé par la Cour des comptes :

- environ 300 millions d'euros pour le programme « Allègements de charges sociales en zones urbaines sensibles » ;

- environ 300 millions d'euros pour le programme « Equité sociale et territoriale et soutien » ;

- environ 60 millions d'euros pour le programme « Rénovation urbaine », lequel ne regroupe de surcroît qu'une part très minoritaire des crédits consacrés à la rénovation urbaine, ceux-ci étant principalement gérés par le ministre en charge du logement.

Aussi vous est-il proposé de créer une mission interministérielle intitulée « Urbanisme et logement » qui regrouperait les crédits de l'actuelle mission « Ville » et du programme « Logement » de la mission « Logement, aménagement et tourisme », cette dernière regroupant un ensemble de crédits particulièrement hétéroclite dans la maquette présentée par le gouvernement.

Il vous est également proposé d'en modifier la structuration en programmes et actions :

- le programme « Logement », du fait de l'importance des crédits qu'il regroupe (7,38 milliards d'euros), serait scindé en deux programmes « Soutien à la construction et à l'amélioration du logement » (1,95 milliard d'euros) et « Politiques sociales du logement » (5,43 milliards d'euros). Cette scission permettrait d'opérer une distinction entre les aides à la pierre et les aides à la personne, et, par conséquent, d'évaluer de manière plus fine la mise en oeuvre de la politique du logement ;

- le programme « Allègements de charges sociales en zones urbaines sensibles » 41 ( * ) de l'actuelle mission « Ville », constitué d'une action éponyme, serait fondu au sein du programme « Equité sociale et territoriale et soutien » : la distinction opérée dans la maquette gouvernementale semblait principalement justifiée par le souci d'éviter qu'un seul programme regroupe 91 % des crédits de la mission « Ville », mais l'élargissement de celle-ci au logement ne justifie plus cette division ;

- la subvention à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) serait unifiée, par le transfert des crédits logement bénéficiant aux zones urbaines sensibles (action « Logements participant à la rénovation urbaine » de l'actuel programme « Logement ») vers le programme « Rénovation urbaine », qui serait ainsi constitué de deux actions, et non plus d'une seule.

Le programme élargi « Equité sociale et territoriale et soutien » serait doté d'environ 610 millions d'euros sur la base de la loi de finances initiale pour 2004.

* 37 Cette note a été transmise à votre commission des finances le 6 juin 2003.

* 38 Ces statistiques sont fondées sur la délimitation des périmètres ministériels lors de la présentation de la maquette du 21 janvier 2004, nonobstant le changement de gouvernement intervenu en avril 2004.

* 39 Inspection générale de l'administration, contrôle général des armées, inspection générale des finances, rapport de synthèse sur la définition des programmes de la police et de la gendarmerie dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, mai 2003, page 1.

* 40 Bureau de recherches géologiques et minières.

* 41 Cette action correspond aux exonérations de charges sociales en zones de revitalisation urbaine (10,53 millions d'euros dans la loi de finances pour 2004) et dans les zones franches urbaines (300,58 millions d'euros dans la loi de finances pour 2004).

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