III. LA POLITIQUE ÉCONOMIQUE DANS LE CONTEXTE DU PACTE DE STABILITÉ : NE PAS HYPOTHÉQUER LA CROISSANCE

Le pacte de stabilité fixe aux Etats membres de l'Union européenne l'obligation de tendre, sans préciser l'échéance, vers des finances publiques équilibrées, ou proches de l'équilibre.

Faut-il cependant, indépendamment de la conjoncture, subordonner entièrement la politique budgétaire à cet objectif ? Un tel choix de politique économique ne risquerait-il pas de compromettre la croissance à long terme des économies européennes ? Des écarts par rapport à la tendance de retour à l'équilibre ne doivent-ils pas être tolérés, lorsque la conjoncture se dégrade et que l'évolution des recettes est inférieure aux prévisions ? Ne faut-il pas souscrire aux propos du ministre du budget, qui déclarait, le 28 février 2003 : « s'agissant des recettes, il serait inapproprié, voire dangereux, de vouloir les compenser par des baisses supplémentaires de dépenses, car on pourrait entraîner une récession économique » ?

A. PACTE DE STABILITÉ OU PACTE DE CROISSANCE ?

1. L'équilibre des finances publiques, corollaire indispensable du passage à l'euro ?

L'une des idées servant de fondement au pacte de stabilité et de croissance est que si un Etat a un déficit public important, les autres en pâtiront du fait de taux d'intérêt plus élevés.

Ce phénomène, avéré, ne doit cependant pas être surestimé. Ainsi, selon l'OFCE, « les conséquences d'une politique budgétaire expansionniste sur le taux d'intérêt de l'euro ne peuvent être que mineures, pour ne pas dire marginales » 33 ( * ) . Il est clair que le niveau relatif des taux d'intérêt entre les Etats-Unis et l'Europe dépend davantage des anticipations comparées de croissance des économies de part et d'autre que du respect mécanique, par les Etats de la zone euro, des normes du pacte de stabilité.

2. Une réduction du déficit structurel nuit-elle à court terme à la croissance ?

Pour respecter la lettre du pacte de stabilité, deux pays (la France et l'Allemagne), représentant la moitié du PIB de la zone euro, doivent à très court terme ramener leur déficit en dessous de la limite de 3 % du PIB. Quel impact un ajustement de cette ampleur serait-il susceptible d'avoir sur la croissance économique de la zone euro à court et moyen terme ?

S'appuyant sur des simulations réalisées à l'aide du modèle QUEST, la Commission européenne minore l'impact négatif qu'une réduction du déficit public aurait sur la croissance du PIB 34 ( * ) .

Certes, elle reconnaît que « l'assainissement budgétaire peut avoir un léger effet de contraction sur le PIB à court terme ».

Elle nuance cependant ce constat, estimant qu'à certaines conditions, l'impact sur la croissance pourrait être positif , tant à court terme qu'à moyen terme.

a) L'impact pourrait-il être positif à court terme ?

La Commission européenne considère que « l'effet de l'assainissement budgétaire sur le PIB à court terme pourrait être atténué, voire devenir positif, si ce processus est associé à des réformes structurelles des marchés de facteurs et de produits et s'il s'accompagne d'une politique monétaire souple », l'assainissement budgétaire jouant souvent « un rôle de catalyseur propice aux réformes structurelles ».

L'analyse de la Commission peut sembler volontariste, voire optimiste.

Pour autant, il convient d'en accepter l'augure, notre pays étant engagé dans la mise en oeuvre de profondes réformes structurelles, la réforme des retraites étant appelée à être prolongée par celle de l'assurance-maladie. En outre, dès - il faut l'espérer - la loi de finances pour 2004, le « redimensionnement » des effectifs de la fonction publique qui constitue le moyen le plus puissant de dégager des marges de manoeuvres budgétaires, devrait être à l'oeuvre.

b) L'impact pourrait-il être positif à moyen terme ?

La Commission européenne estime en outre que l'impact sur le PIB d'un assainissement budgétaire est « positif à moyen terme lorsqu'il prend la forme de réductions de dépenses et non de hausses d'impôts ». Cette analyse est partagée par le gouvernement dans son rapport en vue du présent débat d'orientation budgétaire.

Ce jugement peut néanmoins sembler optimiste. C'est ce que suggèrent des simulations réalisées pour votre commission des finances par le centre d'observation économique (COE) de la chambre de commerce et d'industrie de Paris, à l'occasion du débat d'orientation budgétaire pour 2001.

Selon le COE, en France une réduction de l'impôt sur le revenu et des cotisations sociales employeurs de l'ordre de 3 points de PIB en quatre ans, accompagnée d'une diminution des dépenses publiques de manière à réduire le déficit public de 2,4 points de PIB 35 ( * ) , réduirait le PIB de 0,7 point la première année. Cet impact négatif serait progressivement annulé à un horizon de quatre ans, mais le PIB à moyen terme ne s'en trouverait pas accru.

Dans ces conditions, il semble que le respect du pacte de stabilité et de croissance alors que l'économie de la zone euro ralentit serait peut-être procyclique à court terme , et vraisemblablement neutre à moyen terme .

* 33 Jean-Paul Fitoussi, Jérôme Creel, « How to reform the European Central Bank », Centre for European Reform, octobre 2002.

* 34 Les finances publiques dans l'UEM - 2003, communication de la Commission européenne au Conseil et au Parlement européen, 21 mai 2003.

* 35 Ce chiffre s'explique par le fait qu'il s'agissait d'étudier la possibilité d'un retour à l'équilibre du solde public, alors que le déficit public était de 2,4 %.

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