E. LES PROBLEMES POSES PAR LE DECRET DU 16 DECEMBRE 1999
3. Une dérogation sans fondement prévue pour les aides de restructuration
Le décret du 10 mars 1972, en ne visant que les subventions accordées « en vue de la réalisation des investissements publics ou d'utilité collective », ne couvrait sans doute pas les aides de restructuration, mais la rédaction plus large du décret de 16 décembre 1999, qui concerne toute « réalisation de projets d'investissement matériel ou immatériel, pour la mise en oeuvre d'une politique d'intérêt général », conduit logiquement à l'appliquer à l'ensemble des aides du titre VI à des entreprises, sachant que cette imputation implique normalement le caractère de subvention d'investissement et que toute aide publique ne peut en principe que s'inscrire dans une politique d'intérêt général... Il est à noter que l'insuffisance de définition des équipements subventionnés et des justifications fournies a déjà fondé un rejet de mandat dans le cas d'une aide sur CPI à une chambre de commerce : ne s'agissant pas d'une entreprise, le comptable avait considéré que le décret de 1972 devait s'appliquer.
En ce qui concerne le décret de 1999, la circulaire d'application du 19 octobre 2000 a cependant écarté, entre autres, son application aux « subventions accordées dans le cadre d'un plan d'ensemble de restructuration industrielle d'une entreprise en difficulté, en particulier par le CIRI », de même qu'aux autres formes d'intervention du CIRI, des CORRI et des CODEFI (garanties, prêts). D'autres dérogations précisées par la circulaire trouvent leur fondement explicite dans le décret (par exemple celle bénéficiant aux dotations aux collectivités territoriales), mais ce n'est pas le cas des aides de restructuration. Une circulaire ne saurait évidemment instituer une dérogation à un décret sans aucun fondement dans le texte de celui-ci.
4. La question du service fait
Le décret de 1999 mentionne un certain nombre de règles de bonne gestion en ce qui concerne les subventions d'investissement : celles-ci doivent être conditionnées à la présentation d'un projet d'investissement ; des avances et acomptes peuvent être versés, mais le solde de la subvention ne peut l'être que sur justification de la réalisation du projet conformément à la prévision initiale.
Or, le fait est que les dossiers d'aides dites de restructuration ou de reconversion examinés de 1996 à 2001 ne répondent guère à ces spécifications, ce qui explicite la dérogation irrégulière susmentionnée : d'une part, comme on l'a déjà indiqué, il ne s'agit pas véritablement d'aides d'investissement dans la majorité des cas. D'autre part, les conventions passées avec les entreprises bénéficiaires prévoient souvent un paiement intégral dès notification de la convention et en contrepartie d'obligations limitées pour le bénéficiaire. On a déjà cité à cet égard l'exemple de la subvention accordée en 1996 au repreneur de la « Lainière de Roubaix ». De même, les aides récurrentes versées aux deux sociétés du groupe FINATEC en 1996-1997, pour plus de 3,8 M€ (sur les seuls CPI et sur ces seules années), l'ont-elles été sur présentation d'états de trésorerie prévisionnels trimestriels. Dans de tels cas, la vérification du « service fait », formellement effectuée, n'a évidemment plus beaucoup de portée.