EXAMEN PAR LA DÉLÉGATION
Sous la présidence de Mme Françoise Henneron, la délégation a examiné, le mardi 14 janvier 2003, le rapport d'information de Mme Sylvie Desmarescaux sur le projet de loi n° 189 (2001-2002), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la bioéthique.
Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.
Après avoir exprimé son approbation à l'égard d'une large partie des réflexions et des propositions de recommandations formulées, Mme Danièle Pourtaud a souhaité attiré l'attention sur ce que devrait être le double objectif des travaux de la délégation : protéger les femmes, tout en restant fidèle à la volonté du législateur de permettre la recherche. Elle a ensuite émis deux réserves sur le projet de recommandations. Tout en estimant la pratique du don relationnel insatisfaisante, elle a rappelé que certains pays voisins ne soumettaient pas le don d'ovocytes au principe de gratuité, et souligné qu'en durcissant trop ce point dans la législation, on risquait d'accentuer la pénurie d'ovocytes en France, et d'inciter les couples à recourir au don à l'étranger. Au sujet du dispositif d'évaluation des nouvelles techniques d'assistance médicale à la procréation prévu par l'actuel projet de loi, elle a fait valoir que, si le clonage reproductif devait être fermement condamné, en revanche, la recherche sur l'embryon était nécessaire à l'avancée de la science.
Evoquant le don relationnel, M. Patrice Gélard a également mis en garde contre une interdiction trop radicale de celui-ci, en dressant un parallèle avec le don d'organe.
Après avoir félicité Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , pour la clarté de son rapport et de ses propositions de recommandations, M. Francis Giraud, rapporteur au nom de la commission des Affaires sociales, a précisé la différence entre la recherche sur les embryons surnuméraires, autorisée et encadrée par le projet de loi, et la création d'embryons à des fins de recherche, prohibée. Il a également suggéré une réécriture du projet de recommandation relatif au don relationnel, tout en reconnaissant la réalité du problème soulevé.
Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a alors proposé une nouvelle rédaction de cette recommandation, évoquant les dérives auxquelles pourrait conduire la pratique du don relationnel. La délégation a approuvé cette modification.
A Mme Josiane Mathon , qui considérait que le délai de deux ans posé pour l'accès à l'AMP n'était pas justifié et reposait en outre sur la notion, floue et souvent difficile à prouver, de « vie commune », Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a évoqué le risque de dérive vers l'accès à l'AMP de femmes célibataires se présentant avec un compagnon occasionnel.
Répondant à Mme Gisèle Printz , qui exprimait des doutes sur la nécessité d'un tel délai, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a insisté sur le caractère dissuasif et l'importance symbolique de celui-ci, notamment par rapport aux couples mariés.
M. André Vallet ayant soulevé le problème des preuves de la vie commune, M. Patrice Gélard a mentionné les déclarations de concubinage et les certificats de PACS. Par ailleurs, il a précisé à Mme Gisèle Printz que les femmes célibataires pouvaient recourir à l'adoption, mais pas à l'AMP.
A M. Jean-Guy Branger , qui mentionnait l'existence de mères célibataires, Mme Françoise Henneron, présidente , a fait observer que l'AMP constituait un engagement très lourd et contraignant.
Evoquant le transfert d'embryons post mortem, Mme Danièle Pourtaud a fait valoir que le législateur ne devait pas se substituer au libre choix des femmes. A ce dernier titre, elle a déploré que les femmes stériles soient « doublement punies », et se retrouvent dans une situation d'inégalité par rapport aux femmes célibataires, qui peuvent donner naissance à un enfant en dehors de tout projet de couple.
Mmes Janine Rozier et Annick Bocandé , ayant attiré l'attention sur la nécessaire prise en compte de l'intérêt de l'enfant, Mme Danièle Pourtaud a insisté sur l'importance pour ce dernier d'être désiré.
Mentionnant le problème des « stérilités relatives », M. Francis Giraud a rappelé la volonté du législateur de protéger les femmes face à des traitements extrêmement lourds en ne permettant pas le recours à ceux-ci sans aucune condition de délai.
A M. André Vallet, qui estimait inutile de mentionner dans les recommandations l'obligation d'information des médecins à l'égard des couples, en raison du caractère évident de celle-ci, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a fait valoir la nécessité de maintenir cette obligation en évoquant le manque de réceptivité des couples à l'information durant les consultations.
M. Patrice Gélard ayant observé qu'une telle obligation figurait déjà dans la loi relative aux droits des malades, Mme Danièle Pourtaud a jugé, quant à elle, nécessaire de rappeler cette obligation, de même que l'exigence de renforcement de la pluridisciplinarité des équipes d'AMP, dont l'insuffisance avait été relevée lors des auditions.
Après que M. Serge Lagauche eut exprimé ses réticences à l'égard de l'adjectif « clairement », mentionné dans le projet de recommandation relatif à l'information donnée aux couples, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a proposé de le supprimer, ce que la délégation a approuvé. Par ailleurs, M. Serge Lagauche a relevé qu'une suppression du dispositif d'évaluation prévu par le projet de loi pour les nouvelles techniques d'AMP conduirait à « utiliser la femme comme matériel de recherche », ce qui serait particulièrement dommageable. Il a également souligné la nécessité de ne pas freiner la recherche scientifique.
Après que Mme Danièle Pourtaud eut repris cette objection, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur , a soulevé le problème de l'approvisionnement en ovocytes dans un tel dispositif.
La délégation a ensuite procédé à un vote sur chaque proposition de recommandation.
Les recommandations 1, 2, 3 et 4 et 7 modifiées, ont été adoptées à l'unanimité par la délégation. Mmes Danièle Pourtaud , Gisèle Printz et M. Serge Lagauche ont voté contre les recommandations 5 -relative au rétablissement de la condition de deux ans de vie commune- et 6 -relative à la suppression du dispositif d'évaluation prévu par le projet de loi.
Le rapport d'information a ensuite été adopté par la délégation à l'exception de Mmes Danièle Pourtaud, Gisèle Printz et M. Serge Lagauche, qui se sont abstenus.