CHAPITRE II
PERSPECTIVES MACROÉCONOMIQUES À MOYEN
TERME
L'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) a réalisé pour la Délégation pour la Planification trois projections de l'économie française à l'horizon 2007, à l'aide de son modèle e-mod.fr . Cet exercice est présenté de manière détaillée en annexe (page 175).
La première projection a été construite sur la base de l'hypothèse d'une croissance de l'économie française au rythme de sa croissance potentielle. On la dénomme projection centrale dans la suite du présent rapport.
Un second scénario est exploré, celui d'une croissance plus rapide de l'économie française sur la période 2004-2007 (+ 3 % par an).
Pour illustrer l'ampleur des incertitudes entourant la reprise, une variante a été réalisée, à partir de l'hypothèse d'une croissance plus faible de l'investissement en 2003.
Il ressort de la projection centrale qu'une croissance de l'économie française au rythme de sa croissance potentielle se traduirait par une stabilité du taux de chômage à un niveau élevé (9,3 % de la population active).
I. UN SCÉNARIO DE REPRISE MODÉRÉE DE LA CONSOMMATION ET DE L'INVESTISSEMENT
Dans le scénario central retenu pour cette projection, la croissance redémarre à partir de 2003. La croissance du PIB serait de 1,8 % l'année prochaine, contre seulement 0,8 % en 2002. Puis, sur la période 2004-2007, la croissance s'établirait à un rythme conforme à la croissance potentielle de l'économie française, de l'ordre de 2,2 % par an .
A. UNE CONSOMMATION RELATIVEMENT DYNAMIQUE
Par construction, la contribution du commerce extérieur à la croissance est considérée comme nulle dans la projection. L'activité dépend, en conséquence, de l'évolution de la demande intérieure.
a) La consommation serait bien orientée
La consommation des ménages progresserait de 2,5 % par an, en moyenne, sur la période 2003-2007. Il s'agit d'un rythme de progression relativement soutenu. A titre de comparaison, la consommation des ménages a progressé de 2,3 % par an, en moyenne, sur la période 1995-2000, et de seulement 0,6 % par an sur la période 1990-1995.
Le tableau suivant retrace le profil de l'évolution de la consommation des ménages de 2002 à 2007.
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
|
Consommation des ménages (en % et en volume) |
1,7 |
1,6 |
2,6 |
2,4 |
2,4 |
2,5 |
La consommation ralentit en 2002-2003, avant de se reprendre à partir de 2004. Ce profil de la consommation s'explique par les évolutions du revenu disponible brut des ménages et de leur taux d'épargne.
b) La consommation est soutenue par la progression du revenu des ménages...
La progression du revenu des ménages est un facteur décisif d'évolution de leur consommation. Dans la projection, le revenu des ménages progresse, sur la période 2003-2007, plus vite que le PIB, soit de 2,4 % par an. La part du revenu disponible des ménages dans le PIB augmenterait ainsi progressivement, retrouvant, à la fin de la période, son niveau de la fin des années 1990.
La progression de la masse salariale est moins rapide que celle du revenu disponible brut des ménages (2 % contre 2,4 %). Les prestations sociales croissent à un rythme modéré de + 1,3 % par an en moyenne.
Le dynamisme du revenu disponible des ménages tient à deux facteurs essentiels : la baisse de la fiscalité pesant sur les ménages, et la progression soutenue des revenus financiers, perçus notamment au titre des dividendes.
Une analyse en termes de contribution à la croissance du revenu disponible des ménages montre que la hausse des revenus salariaux n'explique qu'un peu plus de la moitié de la progression du revenu des ménages ( cf . tableau suivant).
Contributions à la croissance du revenu des ménages |
|||||||
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
|
Revenu disponible brut |
5 |
4,2 |
3 |
3,9 |
3,9 |
4,3 |
4,2 |
dont : |
|||||||
Salaire brut |
3,2 |
2,3 |
1,6 |
2,1 |
2,1 |
2,2 |
2,3 |
Revenu brut des EI |
0,5 |
0,4 |
0,1 |
0,2 |
0,2 |
0,4 |
0,4 |
Cotisations sociales (hors CSG) |
- 0,4 |
- 0,4 |
- 0,3 |
- 0,3 |
- 0,3 |
- 0,4 |
- 0,4 |
Prestations sociales |
1,2 |
1,5 |
1,3 |
0,9 |
0,8 |
1 |
1 |
Impôts (y compris CSG) |
- 0,5 |
- 0,1 |
- 0,4 |
- 0,3 |
- 0,4 |
- 0,4 |
- 0,5 |
Dividendes et intérêts |
0,5 |
0,1 |
0,4 |
0,9 |
1 |
1,1 |
1,1 |
Autres éléments |
0,5 |
0,4 |
0,3 |
0,4 |
0,5 |
0,4 |
0,3 |
Le scénario tient compte des annonces, relatives aux prélèvements obligatoires, contenues dans la programmation pluriannuelle des finances publiques associée à la présentation du projet de loi de finances, ainsi que des mesures prises dans le cadre du programme triennal de baisse des impôts 2000-2002. Ainsi, les impôts sur le revenu des ménages ne représenteraient plus que 8,1 points de PIB en 2007 contre 8,5 points en 2001.
Dans le même temps, les dividendes perçus par les ménages progresseraient à un rythme soutenu. L'augmentation projetée est de + 12,2 % sur la période 2003-2007. Cette progression est beaucoup plus forte que celles observées antérieurement (+ 7,6 % sur la période 1990-95, puis + 8,5 % sur la période 1995-2000). On observe une accélération tendancielle des revenus perçus au titre des dividendes, ce qui ne rend pas totalement irréaliste une telle projection. Toutefois, une telle hypothèse peut être jugée relativement fragile. Comme on le verra par la suite, le scénario de l'OFCE repose sur une hypothèse de baisse sensible du taux d'autofinancement des sociétés, et donc de hausse de leur endettement. Les chefs d'entreprise pourraient, raisonnablement, préférer une autre stratégie, à savoir retenir une plus grande partie de leurs bénéfices pour autofinancer une proportion plus importante de leurs investissements. Les décisions des chefs d'entreprise dépendront de leur appréciation sur la fragilité financière de leur entreprise.
Principales caractéristiques de
l'évolution du compte des ménages
|
|||||||
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
|
Revenu disponible brut |
3,5 |
2,6 |
1,3 |
2,3 |
2,2 |
2,6 |
2,5 |
Masse salariale |
3,9 |
2,2 |
1 |
2 |
1,9 |
2,1 |
2,1 |
Dividendes |
7,3 |
0,3 |
2,3 |
12,6 |
13 |
11,8 |
11,6 |
c) ... ainsi que par une baisse modérée du taux d'épargne des ménages
Le taux d'épargne des ménages français se situe, depuis plusieurs années, à des niveaux historiquement élevés. En 2002, les ménages devraient épargner 16,9 % de leur revenu disponible. A titre de comparaison, le taux d'épargne des ménages était de seulement 12,9 % dans la deuxième moitié des années 1980. Dans le scénario présenté par l'OFCE, le taux d'épargne baisserait modérément (de 0,5 point) sur la période 2002-2007, ce qui permettrait de soutenir la consommation.
Taux d'épargne des ménages
|
|||||||||
1985-1990 |
1990-1995 |
1995-2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
12,9 |
14,7 |
15,6 |
16,1 |
16,9 |
16,6 |
16,4 |
16,3 |
16,4 |
16,4 |
Il existe, certes, une importante marge de baisse du taux d'épargne des ménages. On voit mal cependant quel événement serait susceptible d'inciter les ménages à réduire, même modérément, leur taux d'épargne dans un contexte de croissance peu dynamique. La remontée du chômage, puis sa stabilisation à un niveau élevé, les incertitudes sur l'avenir des régimes de retraite, sont de nature à encourager le maintien d'un important volant d'épargne de précaution. La persistance de déficits publics élevés pourrait jouer dans le même sens. On ne peut donc pas exclure que la tendance, lourde, à l'augmentation du taux d'épargne des ménages se poursuive encore dans les années à venir.
Le deuxième moteur de la croissance, après la consommation des ménages, est l'investissement des entreprises. Dans la projection, celui-ci progresserait à un rythme convenable à partir de 2004, sans retrouver toutefois les hauts niveaux de la fin des années 1990.