CHAPITRE III

LES TENDANCES DES FINANCES PUBLIQUES

Le modèle e-mod.fr de l'OFCE, utilisé pour réaliser cette projection, ne permet qu'une approche globale des finances publiques.

Son utilisation pour une projection à moyen terme garantit néanmoins la cohérence entre les hypothèses de politique budgétaire, les évolutions macroéconomiques et celles des comptes publics.

Comme chaque année, il a donc été demandé aux équipes de l'OFCE d'en tirer le maximum d'indications sur l'évolution détaillée des finances publiques.

Les résultats de la projection devraient être très favorables. La croissance soutient le redressement des finances publiques. En outre, les hypothèses conventionnellement retenues vont toutes dans le sens d'une maîtrise des dépenses publiques. Pourtant, malgré cette « combinaison facilitante », l'équilibre des finances publiques n'est pas atteint avant 2006. Des évolutions plus tendancielles dégageraient des résultats encore moins bons au regard de l'objectif d'équilibre des comptes publics.

I. UN ÉQUILIBRAGE DES FINANCES PUBLIQUES QUI N'EST PAS ATTEINT AVANT 2006

L'évolution des finances publiques dépend à la fois de l' orientation délibérée de la politique budgétaire et de l' environnement macro-économique .

A. MALGRÉ DES HYPOTHÈSES FAVORABLES...

L'environnement macroéconomique décrit par la projection se caractérise par une croissance soutenue (près de + 2,8 % par an en moyenne), soit une croissance supérieure à la croissance potentielle de l'économie française.

Ce contexte économique porteur favorise spontanément le rééquilibrage des finances publiques. Mais, celui-ci dépend également de l' orientation délibérée de la politique budgétaire.

La définition d'hypothèses sur l'orientation de la politique des finances publiques, et plus particulièrement sur l'évolution des dépenses publiques, est un exercice particulièrement complexe.

Il relève du pronostic lorsque sont en cause les dépenses publiques discrétionnaires, celles sur lesquelles les pouvoirs publics peuvent avoir une action relativement aisée.

Il relève davantage du diagnostic pour les autres dépenses et, en particulier, pour les prestations sociales, dont l'évolution à moyen terme est plus difficile à maîtriser par les pouvoirs publics.

En théorie, le pronostic devrait être facilité par le dévoilement de la politique des finances publiques du gouvernement auquel aboutit l'élaboration annuelle du programme de stabilité à moyen terme que la France notifie désormais dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance.

En réalité, il n'en est rien pour de multiples raisons. La valeur informative du programme de stabilité reste extrêmement limitée du fait du haut niveau d'agrégation des données qu'il comporte. Il conviendrait sur ce point que lui soit jointe une annexe comptable détaillant les grands postes de charges publiques et explicitant les hypothèses qui en déterminent l'évolution. Mais, est-ce réellement possible à un gouvernement qui, alors, devrait révéler des choix qu'il ne compte pas faire. La question mérite, en tout cas, d'être posée, au vu des résultats d'une étude réalisée l'an dernier pour la commission des finances du Sénat par l'OFCE, qui visait à préciser les hypothèses implicites sous-jacentes au programme de stabilité 2001-2004.

De plus, la valeur prédictive des programmes de stabilité demeure incertaine . L'un des principes des programmes de stabilité français consiste à s'engager à respecter une norme de progression des dépenses publiques. Une conséquence devrait s'ensuivre : à supposer que les dépenses, dont l'évolution est difficilement maîtrisable, s'accroissent plus que prévu, les autres dépenses devraient s'accroître moins. Or, la crédibilité d'un tel mécanisme dépend des constats qu'il est possible de faire sur ses conditions passées d'application.

Etant rappelé que la frontière entre les dépenses discrétionnaires et les autres dépenses est, en pratique, beaucoup moins nette que dans une approche théorique, comme le montre l'inertie d'une partie considérable des charges budgétaires, en théorie maîtrisables, (la masse salariale tout particulièrement), l'on est conduit à un réel scepticisme sur la crédibilité de la politique des finances publiques à moyen terme. De fait, les dépenses publiques ont systématiquement progressé davantage que dans les programmes de stabilité successifs adoptés par les gouvernements depuis 1999 . Ainsi, selon une récente étude du FMI 9 ( * ) , le niveau cumulé des dépenses publiques excéderait en volume de 2,2 % les cibles des différents programmes de stabilité pour la période 1999-2003.

Malgré ces éléments, la projection a été construite en dépenses comme si le programme de stabilité à l'horizon 2004 devait être respecté.

Normes de progression des dépenses publiques dans le programme pluriannuel des finances publiques à l'horizon 2004

Administrations publiques

4,5 %

Administrations publiques centrales
(en comptabilité budgétaire)

1,0 %

Administrations sociales

4,8 %

dont maladie

5,5 %

Dont retraites

5,8 %

Administrations publiques locales

5,2 %

Une progression des dépenses publiques de 1,5 % en volume et par an est donc posée en hypothèse jusqu'en 2004 (+ 0,3 % pour les seules dépenses budgétaires). Par la suite pour 2005 et 2006, ces normes sont prolongées pour les dépenses « discrétionnaires » mais, les autres dépenses évoluent en fonction de leurs déterminants naturels.

Pour les recettes, les prélèvements obligatoires sont « modélisés » compte tenu des mesures annoncées par le gouvernement, qui comportent cette année la poursuite du plan d'allégements fiscaux annoncés en septembre 2000, dont l'évaluation initialement réalisée est rappelée ci-après.

ÉVALUATION DU PROGRAMME DE REDUCTION DES PRELEVEMENTS OBLIGATOIRES ANNONCE PAR LE GOUVERNEMENT

(en milliards de francs)

2000

2001

2002

2003

Cumul

Total

-110

-88

-49

-30

-277

en points de PIB

-1,1

-0,9

-0,5

-0,3

-2,9

Ménages (hors TVA)

-40

-46

-25

-21

-132

Impôt sur le revenu

-11

-23

-12

-9

-55

CSG CRDS

0

-9

-10

-10

-28

Taxe d'habitation

-11

0

0

0

-11

Droits de mutation, vignette

-15

-3

0

0

-18

Fiscalité pétrolière

0

-8

1

1

-7

Cotisations Unedic

0

-4

-2

-1

-6

Droit de bail, autres

-4

1

-2

-2

-7

TVA

-38

-13

0

0

-51

Entreprises

-31

-29

-25

-10

-94

Taux impôt sur les sociétés

-12

-11

-13

-10

-46

Autres mesures IS

4

8

4

2

18

Taxe professionnelle

-2

-8

-8

0

-18

Fiscalité pétrolière

-1

-2

2

2

1

TGAP

1

4

3

3

11

Cotisations patronales (Forec)

-24

-16

-12

-8

-60

Cotisations Unedic

0

-4

-4

-2

-9

Cotisation sur les bénéfices

4

0

4

4

13

Autres

-2

0

0

0

-2

Source : OFCE.

Au-delà, les taux des prélèvements obligatoires sont réputés constants.

* 9 Rapport sur la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne. Novembre 2001.

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