II. LA CROISSANCE, LES PRIX ET L'EMPLOI
Le scénario présenté dans ce rapport décrit une croissance effective qui excède la croissance potentielle.
En outre, le ralentissement de l'augmentation de la population active, combiné avec le maintien de gains de productivité modestes, qui, en contrepartie, réduisent le niveau de la croissance potentielle, favorise une diminution du chômage.
Dans ce contexte, un repli du chômage se produit. Mais, le plein emploi (5 %) n'est pas atteint en projection. En 2006, le taux de chômage reste de 6,8 %.
Ce résultat, même s'il est décevant, repose sur une autre hypothèse très forte sans laquelle il ne saurait être atteint : la réduction du taux de chômage d'équilibre. Elle permet au chômage de reculer sans tensions sur les prix.
Comme c'est l'habitude dans un exercice d'exploration de cette nature, ce sont évidemment plutôt les conditions de réalisation des résultats qu'il extériorise qui présentent de l'intérêt. C'est pour cette raison que des variantes ont été réalisées dont le propos est de décrire ce qui se produirait si quelques variables-clefs de l'exercice de simulation connaissaient une orientation différente.
A. UNE CROISSANCE ROBUSTE
1. Une croissance supérieure à la croissance potentielle
a) Les résultats de la projection
Sur la période 2002-2006, la croissance effective (+ 2,8 % par an en moyenne) serait constamment supérieure à la croissance potentielle.
Inférieure en début de période (2001-2006), elle la dépasserait ensuite, d'abord nettement, puis plus légèrement.
Comparaison entre la croissance en projection et la croissance potentielle |
|||||||
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
||
Croissance en projection |
2 |
2,1 |
3,3 |
3,2 |
2,7 |
2,5 |
|
Taux d'activité des 15 ans et plus (en %) |
55,2 |
55,3 |
55,3 |
55,3 |
55,3 |
55,1 |
|
Variation de la population active |
0,8 |
0,7 |
0,7 |
0,6 |
0,4 |
0,2 |
|
Croissance potentielle |
2,4 |
2,3 |
2,3 |
2,2 |
2,0 |
1,8 |
|
Rappel : 2000 : PIB : 3,4 ; Croissance potentielle 55,1 ; 1,1 ; 2,7. |
L'écart de production, légèrement négatif en début de période, devient très important en 2003 et 2004, à mesure que la croissance accélère, tandis que la croissance potentielle marque le pas, avant de connaître une nette dégradation en fin de période.
On reviendra, dans la suite de ce rapport, sur les implications d'une situation économique marquée par une croissance supérieure à la croissance potentielle (voir infra ).
b) Quelques précisions sur la croissance potentielle
Votre rapporteur souhaite, à ce stade, préciser les conditions dans lesquelles la croissance potentielle est calculée dans la projection et les implications de sa décélération.
La croissance potentielle résulte de la combinaison des variations de la population active et des gains de productivité prévisibles.
(1) Les perspectives en matière de population active
Variation de la population active 2001-2006 (en milliers) |
|||||
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
221 |
185 |
180 |
162 |
113 |
57 |
Dans la projection, l'accroissement de la population active s'élève à 918 000 personnes au cours de la période (153 000 par an). Cette variation est moins importante que dans les estimations révisées de l'INSEE présentées dans le rapport du Conseil d'analyse économique « Plein emploi ». Dans celui-ci, si la population active tendancielle augmente de 132 000 personnes par an, entre 2000 et 2006, une importante flexion du taux d'activité intervient. Une telle flexion engendre un supplément de population active découlant de facteurs non-démographiques liés aux comportements à l'égard du travail. Une hausse du taux d'activité signifie qu'une proportion plus importante de la population en âge de travailler se présente sur le marché du travail. Ce phénomène porte l'accroissement de la population active à 174 000 personnes par an pour l'INSEE.
Cet écart de prévisions provient de facteurs complexes, que les différences de méthode permettent d'appréhender. La prévision de l'OFCE est fondée sur une analyse de la relation entre réduction du taux de chômage et attraction de nouveaux actifs sur le marché du travail. Lorsque le chômage diminue de 1 %, la population attirée sur le marché du travail représente un gain de population active de 0,4 %. Les estimations de l'INSEE sont fondées sur la prolongation de ce que l'institut considère comme une augmentation des taux d'activité. Ainsi, en va-t-il tout particulièrement des phénomènes de cumul d'activités et de formation pour les jeunes de 15 à 24 ans, qui ont crû de 6,5 % en moyenne depuis 1992.
Votre rapporteur se gardera bien de trancher entre ces deux prévisions. Mais, il fait observer qu'il est peut-être hasardeux de prolonger des inflexions aussi nettes que celle décrite ci-dessus, d'autant que, pour une part importante, elle résulte de la multiplication des « jobs » d'étudiants dont la pérennité n'est pas acquise.
Votre rapporteur souhaite en revanche souligner les nuances de perspectives que recèlent ces divergences. Une population active relativement moins dynamique favorise la résolution apparente du problème du chômage, mais, d'une part, elle pèse sur la croissance potentielle de l'économie et, d'autre part, dans la situation française, caractérisée par le faible niveau du taux d'activité, éloigne du retour au vrai plein-emploi. Celui-ci suppose en effet une baisse du taux de chômage, mais aussi une élévation du taux d'activité.
(2) Les perspectives en matière de gains de productivité
Quant aux gains de productivité, le scénario ne comporte pas d'hypothèse d'accélération de la productivité horaire du travail. Celle-ci augmente de 1,6 % entre 2003 et 2006, comme, en moyenne, entre 1995 et 2000.
L'épuisement du phénomène de réduction de la durée du travail en cours de projection a pour effet un retour des gains de productivité par tête à un rythme équivalant à celui de la productivité horaire (+ 1,5 %). Cette hypothèse est cohérente avec l'arrêt des effets de la réduction du temps de travail à partir de 2003. Elle a pour effet un net accroissement du rythme des gains de productivité par tête entre 1995 et 2000, qui s'est élevé en moyenne à 0,8 %.
Votre rapporteur souligne l'apport de cette rupture à la croissance potentielle de l'économie.