II. ETAT DE LA RECHERCHE EN MATIÈRE VACCINALE
La première sérothérapie anti-aphteuse a été réalisée par le français Charles Mérieux en 1926. Initialement facultative, la vaccination a été généralisée en 1961, à titre obligatoire, dans une optique d'éradication. Malgré la suppression de l'obligation de vacciner en Europe, depuis plus de dix ans, des industriels continuent de produire des vaccins qui demeurent utilisés dans de nombreuses régions du monde et sont susceptibles d'être injectés aux animaux, en cas d'urgence.
La vaccination anti-aphteuse a montré son efficacité en permettant l'éradication de la maladie . Cependant, un reproche adressé aux vaccins traditionnels tient à ce qu'ils empêchent de distinguer les animaux vaccinés des animaux porteurs de la maladie. Aussi, des industriels ont-ils mis au point des vaccins « purifiés » (dans lesquels est isolée une partie du virus ou du microbe pathogène) tandis que d'autres cherchent à mettre au point des vaccins « délétés » (réalisés à partir du virus du microbe entier auquel on retire une protéine, ce qui permet de distinguer les anticorps sécrétés contre cette protéine car ils sont distincts des anticorps sécrétés contre le virus à l'état naturel).
A. LES VACCINS HAUTEMENT PURIFIÉS
1. Nature et avantages
D'après la société Mérial, des vaccins anti-aphteux purifiés éliminent les protéines virales non structurales, témoins de l'infection virale, selon une méthode retenue pour les vaccins humains. Ils permettent d'éviter les allergies et d'induire une différence sérologique entre animaux vaccinés et animaux infectés , de sorte que les animaux vaccinés peuvent être distingués des animaux infectés.
Cette méthode permet de distinguer les troupeaux infectés ou porteurs (caractérisés par une double séropositivité : vis-à-vis des particules virales envers lesquelles ils sont protégés et vis-à-vis des protéines non structurales qui révèlent une infection) des troupeaux vaccinés par un vaccin purifié (caractérisés par séropositivité simple vis-à-vis des particules virales qui traduisent une protection face à la maladie et une séronégativité simple vis-à-vis des protéines non structurales qui marque une absence d'infection). Enfin, ils mettent en évidence les animaux immunologiquement « naïfs », caractérisés par une double séronégativité : vis-à-vis des particules virales, ce qui équivaut à une absence de protection, et vis-à-vis des protéines non structurales, ce qui correspond à une absence d'infection.
2. Les limites à l'utilisation des vaccins
Sans méconnaître l'intérêt des vaccins purifiés, le professeur B. Toma note à ce sujet : « les techniques actuelles de recherche d'anticorps vis-à-vis de protéines non structurelles (anticorps que l'on peut trouver chez des bovins ayant multiplié le virus sauvage, mais pas chez des bovins ayant simplement reçu du vaccin à virus inactivé) n'apportent pas une garantie pour affirmer qu'un animal donné n'est (ou n'a pas été) infecté par une souche sauvage (et ceci à cause d'erreurs par défaut, dans la mesure où des bovins vaccinés et infectés peuvent ne pas produire suffisamment d'anticorps anti-protéines non structurelles pour donner une réponse positive lors de cette recherche). La garantie est meilleure au plan d'un troupeau (selon la règle bien connue, du moins des épidémiologistes, que la sensibilité collective est supérieure à la sensibilité individuelle d'un test de dépistage) (Bergmann et al., 2000) 62 ( * ) . Cependant, ceci entraîne, à l'évidence, des coûts supplémentaires (prises de sang, examens de laboratoire) venant s'ajouter au coût de la vaccination ». 63 ( * )
On notera, en outre, que pour être efficacement mise en oeuvre, la méthode de contrôle sérologique liée à l'utilisation d'un vaccin, que celui-ci soit purifié ou qu'il soit « délété », nécessite de travailler sur des troupeaux , ce qui est, pratiquement, difficile si l'on songe, par exemple, aux conditions dans lesquelles s'effectuent des mouvements d'ovins entre la France et la Grande-Bretagne et, en particulier, au manque de traçabilité des animaux qui les caractérise.
En outre, s'il est envisageable de réaliser des examens sérologiques par échantillons sur des animaux vivants appartenant à des troupeaux, on ne saurait tester, avant leur abattage, tous les animaux exportés sous forme de carcasse. Or, on sait que seule la viande désossée et maturée est insusceptible de véhiculer le virus.
* 62 I. E. Bergmann et al. - « Improvement or a serodiagnostic strategy for foot-and-mouth disease virus surveillance in cattle under systematic vaccination : a combined system of an indirect ELISA - 3ABC with an enzyme-linked immunoelectrotransfer blot assay » , Arch. Virol., 2000, 145, 473-489.
* 63 B. Toma, « les leçons d'une épizootie », article précité.