3. Une volonté de pédagogie qui se contredit et aboutit à afficher que le fonds de réserve résout à lui seul la moitié du problème des retraites
a) Des ressources exagérées, des dépenses minorées
Dans la note précitée du 17 février 2000, la Direction de la Prévision, sous la rubrique « les limites de ce schéma », commente le choix de ces hypothèses « pédagogiques ».
« Un scénario macro-économique aussi favorable aboutit cependant à afficher un montant des excédents supérieur à ceux qui seraient effectivement disponibles pour le fonds de réserve ».
Et cette note ajoute que cette surévaluation touche « en particulier les comptes du fonds de solidarité vieillesse, qui représentent une part importante des abondements du fonds, et sont très sensibles à la situation sur le marché du travail ».
Si les hypothèses présentées par le Premier ministre tendaient à démontrer aux partenaires sociaux qu'un retour de la croissance n'éliminait pas la nécessité d'une réforme, elles aboutissent paradoxalement à gonfler les recettes disponibles et donc à minorer tant l'effort nécessaire pour constituer un fonds de réserve, que l'ampleur des déficits des régimes qu'il faudra couvrir.
Dans ces conditions, le Gouvernement se trouve devant un dilemme : minorer les recettes évaluées par un scénario artificiel afin de conserver quelque crédibilité à son objectif pédagogique, ou, à l'inverse, présenter en l'état les perspectives rassurantes d'un fonds de réserve constitué sans effort et couvrant « la moitié des déficits des régimes de retraite entre 2020 et 2040 », avec pour conséquence de renforcer les partenaires sociaux dans leur conviction que l'urgence n'est pas de mise sur la question des retraites.
b) Le choix d'une philosophie optimiste
Le Gouvernement a choisi cette seconde possibilité : c'est ainsi que les ministres successifs de l'Emploi et de la Solidarité n'ont eu de cesse de répéter que le fonds de réserve disposera en 2020 de «mille milliards de francs» et que « cette somme correspond à la moitié des déficits prévisionnels des régimes de retraite entre 2020 et 2040 ».
Il résulte de cette affirmation que les besoins financiers des régimes de retraite, entre 2020 et 2040, se chiffrent à 2.000 milliards de francs, puisqu'un fonds de réserve doté de 1.000 milliards couvrirait la moitié de ces déficits.
Cette déclaration est confirmée et précisée par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité 59 ( * ) qui ajoute même que « par prudence, les ministres ont évoqué la moitié alors que l'on pourrait avancer un taux de 60 % ».
En réalité, cette déclaration repose sur une habile ambiguïté : le fonds de réserve dont les ressources sont surévaluées par le « scénario pédagogique » ne traite pas la question des déficits des régimes publics.
* 59 Réponse au questionnaire de votre rapporteur, cf. annexe.