2. Une éviction du Parlement assumée
Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la Commission avait souhaité amender le dispositif pour créer un compte de réserve sanctuarisant l'ensemble des excédents de la branche famille et garantissant leur utilisation en faveur des familles.
Mme Ségolène Royal 155 ( * ) , ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance s'y était alors opposée en ces termes :
« Je ne suis pas, monsieur le rapporteur, favorable à votre amendement parce que, si ce dispositif a été créé, au fond, c'est pour aller vite. (...) Vous venez de dire que le Parlement délibérerait sur le nouveau fonds que vous proposez. Mais, monsieur le rapporteur, où sommes-nous donc ? Le Sénat est précisément en train de délibérer sur l'utilisation des excédents de la branche famille !
(...) Mais permettez-moi, monsieur le rapporteur, de vous faire un petit cadeau ...(Mme le ministre délégué remet une plaquette à M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur.) »
En séance publique, alors que le projet de loi est en cours d'examen en première lecture, la ministre déléguée prétend ainsi que le débat démocratique demeure ouvert et, simultanément, remet au rapporteur une plaquette destinée aux gestionnaires de structures petite-enfance, qui, de toute évidence, montre que le dispositif est déjà en vigueur.
En réalité, l'instruction des dossiers était déjà presque close !
Notre collègue Charles Descours 156 ( * ) s'est justement interrogé : « à quoi sert le vote du Parlement ! Je le redirai à propos de l'ONDAM. Je ne vois pas pourquoi on vote ce fonds puisque, déjà, tout est décidé ! Mme le ministre vient de nous remettre solennellement une plaquette sur laquelle est apposé le timbre du ministère délégué à la Famille et à l'Enfance, alors que nous n'avons pas encore voté ! »
Traitant le Parlement comme une simple chambre d'enregistrement, le Gouvernement avait cherché, selon les termes mêmes de Mme Ségolène Royal « à aller vite », la fin justifiant en quelque sorte la méthode déplorable mise en oeuvre pour les atteindre.
Votre rapporteur ne saurait aller en ce sens pour plusieurs raisons.
En premier lieu, une telle initiative du Gouvernement était possible en loi de financement pour 1999 ou pour 2000. Il n'est pas crédible ainsi d'aggraver par action ou par omission un problème -en l'espèce l'accueil des jeunes enfants- pour prétendre ensuite qu'il y a urgence à le résoudre.
En second lieu, les conséquences de cette volonté d'« aller vite » tout en partant tard ont été très négatives ( cf. B-2 et C ci-dessous ).
* 155 Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, Sénat, séance du 15 novembre 2000, Journal Officiel p. 6117-6118.
* 156 M. Charles Descours, même référence.