b) L'accès aux documents administratifs est effectivement garanti aux États-Unis
Par contraste, l'accès aux documents administratifs apparaît effectivement garanti aux États-Unis.
En premier lieu, le public est effectivement informé de ses droits.
La page d'accueil des sites Internet des principales agences fédérales comporte ainsi le plus souvent un chemin direct vers une section FOIA ( Freedom of Information Act ), qui rappelle les droits des citoyens et les devoirs de l'administration et qui expose très précisément les modalités de demande de documents.
Par contraste, on peut souligner que le site Internet du ministère français de l'économie, des finances et de l'industrie n'informe aucunement le public de son droit d'accès aux documents administratifs.
En second lieu, les administrations américaines se sont organisées pour répondre aux demandes de documents administratifs .
Toutes les grandes agences fédérales disposent ainsi d'un service spécialisé pour la gestion des demandes de renseignement effectuées sur la base du Freedom of Information Act (FOIA).
Dirigés par un FOIA Officer , ces services sont généralement distincts des autres services de communication et de diffusion. Les services FOIA de certaines agences fédérales, comme le ministère des affaires étrangères, la CIA ou le FBI, peuvent employer plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de personnes. En effet, le nombre total de demandes de documents formulées en application du FOIA dépasse 600.000 par an pour les seules administrations fédérales.
Par contraste, on peut signaler que l'introduction des mots-clef « accès aux documents administratifs » dans le moteur de recherche du site Internet du ministère français de l'économie, des finances et de l'industrie renvoie après quelques péripéties au Centre de documentation économie finances (CEDEF) du ministère, qui ne propose en fait pour l'essentiel que des documents déjà publics, notamment « les brochures d'information du ministère ».
Chaque agence fédérale doit d'ailleurs transmettre à l' Attorney General des États-Unis un rapport annuel public relative à la mise en oeuvre du Freedom of Information Act .
Ce rapport doit notamment recenser les requêtes, les recours gracieux et leurs suites, le délai moyen de réponse, les droits collectés et les moyens mis en oeuvre.
Plus généralement, le Freedom of Information Act est à certains égards plus détaillé que les dispositions de la loi du 17 juillet 1978 relatives à l'accès aux documents administratifs .
Le FOIA prévoit ainsi la faculté pour les agences fédérales de mettre en place une politique tarifaire différenciée , selon que les demandes répondent à des finalités commerciales ou à des finalités éducatives et scientifiques.
Lorsqu'elles ne présentent pas des fins commerciales, les requêtes sont ainsi gratuites dans la limite de deux heures de recherche et de la duplication de 100 pages.
Par surcroît, les recherches qui excédent ces plafonds doivent être gratuites ou facturées à un tarif très réduit si « leur transmission au public (disclosure) est de nature à accroître significativement la connaissance par le public des activités ou du fonctionnement des administrations et ne sert pas les intérêts commerciaux du demandeur ».
Cette pratique part du principe selon lequel l'information utile au public doit être en fait spontanément divulguée, le FOIA ne jouant donc qu'un rôle de dernier ressort.
Enfin, le FOIA empêche les administrations de solliciter le paiement préalable des frais, sauf si leur montant prévisible excède 250 dollars, ou si le demandeur a précédemment connu des incidents de paiement.
En pratique, les politiques tarifaires des agences fédérales sont ainsi très souples afin de concilier l'exercice effectif de la liberté d'accès aux documents administratifs avec l'impératif de bonne gestion des deniers publics.
Cette souplesse est essentielle car elle permet de servir avec efficacité et diligence aussi bien les demandes ponctuelles de citoyens isolés, que les demandes massives d'information de certains média (par exemple la demande de plusieurs journaux d'accéder aux bulletins de vote des électeurs de Floride après la dernière élection présidentielle, pour pouvoir en effectuer eux-mêmes le recompte).
Par contraste, on peut signaler que le centre de documentation du ministère de l'économie et des finances facture de manière uniforme un franc chaque page copiée.
De même, le FOIA précise que les agences fédérales doivent accomplir des efforts raisonnables pour effectuer des recherches dans leurs fichiers informatiques ou manuels.
Le Freedom of Information Act a d'ailleurs été complété en 1996 par l' Electronic Freedom of Information Act (EFOIA) qui prend en compte le développement du réseau Internet.
L'EFOIA prévoit en effet que les documents administratifs produits depuis le 1 er novembre 1996 doivent être accessibles sous forme électronique.
Concrètement, les agences fédérales doivent être en place des « salles de lecture » électroniques, procéder à l'indexation informatique des documents disponibles, mettre en ligne la liste des principaux documents disponibles et, dans la mesure du possible, transmettre les documents demandés sous forme électronique.
Au delà de ces contraintes légales, les agences fédérales sont d'ailleurs incitées par des contraintes de gestion à favoriser l'accès électronique aux documents administratifs. En effet, les droits de traitement et de duplication des documents papiers transmis en application du FOIA sont très loin de couvrir l'ensemble administratif de gestion du dispositif.
Par ailleurs, les délais d'accès aux documents administratifs sont beaucoup plus resserrés aux États-Unis .
En effet, l'administration n'a, en principe, que vingt jours ouvrables pour répondre à la première demande, puis de nouveau vingt jours ouvrables pour répondre à un éventuel recours gracieux, de sorte que la procédure précontentieuse ne dure, en principe, au plus que deux mois aux États-Unis, contre cinq mois en France.
Enfin, la procédure contentieuse prévue en cas de refus persistant de l'administration est beaucoup plus efficace .
En cas de rejet de son recours gracieux, le demandeur peut en effet saisir le District Court . L'administration doit alors faire valoir ses observations sous trente jours. Les juges examinent l'affaire au fond, au besoin en se déplaçant dans les administrations concernées. Si les tribunaux donnent raison aux plaignants, l'administration est astreinte aux dépens et se voit enjointe de transmettre les documents incriminés.
En outre, si les magistrats estiment que le personnel de l'agence fédérale concernée a agi de manière arbitraire ou « capricieuse », ils peuvent saisir le Conseil spécial de la fonction publique, qui doit engager des investigations et le cas échéant des poursuites disciplinaires .
Par surcroît, le non respect des décisions du pouvoir judiciaire est considéré comme un délit ( Contempt of the Court ). L'employé concerné ou le responsable du service peuvent alors être personnellement poursuivis .
Ces précisions expliquent que les dispositions législatives relatives aux documents administratifs soient beaucoup plus largement utilisées aux États-Unis qu'en France.