b) Les manipulations par l'image
C'est l'autre type de manipulation : sans retouche, ni
montage, par simple sélection d'image, par la légende ou le
commentaire. Les exemples sont également nombreux.
La sélection d'images
. Le seul fait de montrer telle
ou telle image n'est évidemment pas neutre. Le contrôle des images
est un enjeu politique déterminant et s'applique notamment en
période de conflit
91(
*
)
.
L'évolution du rôle de l'image est parallèle à celle
de l'utilisation des médias en général et de la
télévision en particulier. Dans les émissions
d'information courantes, la caméra accorde rarement un regard aux
problèmes de fond, mais se contente d'illustrer, en privilégiant
les images susceptibles de provoquer des émotions. La recherche de
l'émotion est une priorité de l'information moderne.
L'abondance des moyens mis en œuvre et la sélection des images
sont, par conséquent, déterminantes et forgent le succès
des chaînes américaines d'information. Lors du colloque sur la
manipulation des images et du son organisé par l'Association des
journalistes de défense (AJD), un intervenant a ainsi parfaitement
décrypté la "méthode CNN
92(
*
)
" décomposée en trois
temps :
1er temps : l'image (guerre, famine...) sert à s'indigner :
" Pourquoi l'homme politique ne fait-il
rien ? ".
2e temps (après l'intervention) : image du premier mort
américain.
Conclusion :
" Quel est l'irresponsable qui a
envoyé des soldats américains ? "
3e temps : suivi de l'audimat. La sélection d'images est
pilotée depuis le siège du CNN à Atlanta. Dès que
le spectateur se lasse, la diffusion s'arrête. Il n'y a plus d'image ou,
plutôt,
" il n'y a plus rien à voir ".
Les légendes et le commentaire.
Une image
accompagnée d'une légende ou d'un commentaire, adroitement
rédigés en fonction du message à faire passer, est une
forme simple mais très efficace de manipulation. Les exemples sont
nombreux d'utilisation d'images sans rapport avec l'événement
relaté conduisant alors à des amalgames fautifs. Les images du
charnier de Timisoara
93(
*
)
, est le plus récent, le
plus connu et le plus intéressant de ces détournements d'images.
Tout d'abord par la manipulation réalisée et son impact
considérable, à l'échelle planétaire, ensuite par
l'origine de cette manipulation qui n'est d'ailleurs pas formellement
établie puisqu'elle est le résultat d'une rumeur publique sur
place -la population locale guidant les journalistes vers la fosse commune- et
d'une "attente" plus ou moins inconsciente et morbide de la part des
opinions
mondiales. Car le plus étonnant de cette histoire est que le
médecin de Timisoara avait expliqué, très tôt, que
les cadavres venaient de l'hôpital de la ville. Il fut accusé
d'être un agent de la sécurité, dut se résigner,
avant que la vérité, plus tard, ne s'impose.