CHAPITRE PREMIER
UNE PART IMPORTANTE DES CRÉDITS
DES
TITRES V ET VI DU PROJET DE BUDGET
N'EST PAS CONSACRÉE À
L'ÉQUIPEMENT DES ARMÉES
La loi
de programmation militaire 1997-2002 avait réduit de 20 % les
crédits d'équipement programmés. Malgré cet effort
initial, les objectifs de la programmation n'ont pas été tenus.
Dès 1998 une nouvelle baisse de 8,7 %, qualifiée
" d'encoche ", a été présentée comme une
" contribution à la maîtrise des déficits publics et
au financement de l'action gouvernementale ". L'engagement du
gouvernement, à la suite de la " revue des programmes " de
stabiliser les ressources annuelles d'équipement à 86 milliards
de francs constants de 1999 jusqu'en 2002 n'aura tenu qu'une année.
De plus, une partie importante des crédits d'équipement des
armées est soit transférée au titre III du
ministère de la défense soit échappe totalement au budget
de ce ministère.
A. LA POURSUITE DE LA PROFESSIONNALISATION DES ARMÉES IMPLIQUERA VRAISEMBLABLEMENT QUE SE POURSUIVE L'AUGMENTATION DES DÉPENSES DU TITRE III
Les
dépenses de rémunérations et de charges sociales de
soldats de métier sont certainement plus importantes qu'on ne pouvait le
prévoir. La multiplication du nombre de militaires du rang
engagés pèse d'un poids d'autant plus important qu'ils sont les
premiers bénéficiaires des mesures de revalorisation des
rémunérations les plus basses.
En 1998, un décret d'avance et un arrêté d'annulation de
crédits du 22 août, ont ponctionné les titres V et VI de
3,8 milliards de francs en raison autant d'insuffisances sur les crédits
de rémunérations et de charges sociales.
Un décret d'avance et un arrêté d'annulation de
crédits du 2 septembre 1999 ont ponctionné les titres V et VI de
4 milliards de francs au bénéfice du titre III. Les
crédits de fonctionnement des armées sont descendus à un
niveau tel que les difficultés de vie, de travail et
d'entraînement des armées ont rendu nécessaire, comme votre
Rapporteur en avait exprimé la crainte il y a un an, d'affecter une
partie de ce prélèvement, 500 millions de francs, au
fonctionnement des armées et de la gendarmerie.
B. UNE PARTIE DES DOTATIONS DES TITRES V ET VI ÉCHAPPERA, IN FINE, AU BUDGET DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE POUR DEUX RAISONS
-
D'une façon générale, les annulations de crédits
sont une raison majeure de douter de l'utilisation réelle des
crédits d'équipement des armées.
Dans son rapport sur " l'exécution des lois de finances pour
l'année 1998 ", la Cour des comptes établit le tableau des
annulations de crédits des titres V et VI de 1995 à 1998
auxquelles il convient d'ajouter celles de 1999 constituées des 4
milliards de francs annulés par l'arrêté du 2 septembre
1999 précité et de 5,3 milliards de francs annulés par un
arrêté du 24 novembre 1999.
(En millions de francs)
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Total |
11 893 |
8 507 |
5 010 |
7 350 |
9 300 |
42 060 |
-
La reprise en 1998, les augmentations en 1999 et 2000 des contributions de la
défense, interdites par la loi de programmation militaire, au budget
civil de recherche et de développement, ajoute au caractère
partiellement illusoire de l'augmentation des crédits
d'équipement des armées. Reverser 1 500 millions de francs
au CNES, sans aucune possibilité de contrôle de l'utilisation qui
en est faite, non seulement est sans intérêt pour les
armées mais encore les porte à regretter vivement le
caractère factice de ce détour.
-
le ministère de la défense connaît encore
d'importantes difficultés à consommer réellement les
autorisations de programme et les crédits de paiement accordés
pour l'équipement des forces. Sont invoqués les effets de
changements de nomenclature, de réorganisations ou de difficultés
à passer les marchés. Quoi qu'il en soit, il n'est pas possible
d'arguer qu'un taux de consommation des crédits de 90 % est
satisfaisant. Il signifie que chaque année un montant de plus de 7
milliards d'équipement n'est pas consommé soit la moitié
du prix d'un porte-avions.
En résumé, le montant minimal de perte de pouvoir d'achat des
titres V et VI pour les quatre premières années de la
programmation s'établit ainsi, en milliards de francs.
|
Montant en francs constants en application de la loi de programmation |
Dépense nette connue |
Ou annulations connues |
Ou montant du projet de L.F.I. |
Perte de pouvoir d'achat |
1997 |
88,50 |
76 |
- |
- |
12,5 |
1998 |
89,33 |
68,9 |
- |
- |
20,43 |
1999 |
89,86 |
- |
9,3 |
86 |
13,16 |
2000 |
90,90 |
- |
- |
82,9 |
8 |
Total |
358,59 |
- |
- |
- |
54,09 |
soit au
minimum, puisque ne sont connues ni les dépenses nettes de 1999 ni
celles de 2000, une perte de 15 % du montant des titres V et VI tel qu'il avait
été fixé par la loi de programmation militaire.
Les efforts conduits par la Délégation générale
pour l'armement pour réduire à la fois son propre coût
d'intervention et le coût d'acquisition du matériel auprès
des industriels ont certes abouti à des économies non
négligeables. Elles restent cependant éloignées des
abattements relevés.
Dans ces conditions, il est clair que la programmation ne sera pas
respectée, que les armées devront durablement se satisfaire d'un
équipement en large partie obsolète, difficile et coûteux
à entretenir et que la loi de programmation militaire à venir
devra commencer par intégrer ce pesant retard.