ARTICLE 70 RATTACHÉ
Cet
article tend à centraliser les excédents financiers du capital de
temps de formation au niveau d'une section particulière
créée au sein du fonds national habilité à
gérer les excédents financiers du congé individuel de
formation.
I. LA SITUATION ACTUELLE
A. LE CAPITAL DE TEMPS DE FORMATION
Le capital de temps de formation (CTF) a pour objet de permettre aux
salariés de suivre au cours de leur vie professionnelle, à leur
demande, pendant le temps de travail, des actions de formation prévues
au plan de formation de leur entreprise, dans le but de se perfectionner,
d'élargir ou d'accroître leur qualification.
Sa mise en oeuvre a été confiée aux partenaires sociaux
par la voie d'un accord national interprofessionnel, complété par
des conventions de branche ou des accords professionnels étendus.
Le CTF, proposé par la loi n°93-1313 quinquennale sur l'emploi du
20 décembre 1993, a véritablement été mis en place
dans certaines branches et secteurs professionnels à compter de 1996. En
effet, après la conclusion par les partenaires sociaux, de l'avenant du
5 juillet 1994 à l'accord national interprofessionnel du 3 juillet 1991,
et d'un certain nombre d'accords de branche ou professionnels, la publication
de plusieurs textes, légaux et réglementaires, fut
nécessaire pour sa mise en place effective, en particulier en ce qui
concerne son financement.
L'article 78 de la loi n° 95-116 du 4 février 1995 portant diverses
dispositions d'ordre social a confirmé le principe posé par
l'avenant du 5 juillet 1994, selon lequel
le CTF sera
financé
, par voie d'accords de branche,
sur 50 % au plus de
la participation des entreprises au financement du congé individuel
de
formation (CIF) à hauteur de 0,20 % des salaires
.
Cette disposition a été codifiée au 1° de l'article
L. 951-1 du code du travail.
Les modalités de collecte de la contribution destinée au CTF ont
été déterminées par l'avenant du 18 novembre 1996.
Dans le cadre du financement des actions de formation professionnelle continue,
les entreprises versent à l'organisme paritaire collecteur
agréé (OPCA) de la branche professionnelle concernée,
avant le 1
er
mars de chaque année, la contribution CTF, dont
le montant est égal au plus à 0,10 % des salaires de
l'année de référence.
B. LE FONDS DE GESTION DES EXCÉDENTS FINANCIERS DU CONGÉ
INDIVIDUEL DE FORMATION
L'article L. 931-1 du code du travail définit le congé individuel
de formation (CIF) comme un droit, pour le salarié, de
bénéficier d'une formation au cours de sa vie professionnelle, de
façon indépendante du plan de formation de l'entreprise.
L'employeur ne peut différer qu'une seule fois le CIF, qui se
déroule pendant le temps de travail.
Le CIF est financé par une participation des entreprises égale
à 0,20 % des salaires, versée à un organisme
paritaire agréé par l'Etat au titre du CIF (OPACIF). Un OPACIF a
pour mission statutaire de collecter les contributions des entreprises dues au
28 février de chaque année. Les sommes collectées au titre
du congé individuel de formation s'élèvent à
environ 3 milliards de francs.
Or, par le passé, les OPACIF ont dégagé d'importants
excédents financiers : 3,5 milliards de francs bruts et 1,9
milliard de francs nets en 1995.
C'est pourquoi, l'article 29 de la loi n° 95-1346 de finances pour 1996 a
rendu possible la
mutualisation de ces excédents
, en
créant un
fonds national habilité à gérer les
excédents financiers dont peuvent disposer certains organismes
collecteurs paritaires gérant les contributions des employeurs au
financement du CIF.
La gestion de ce fonds a été
confiée au comité paritaire du congé individuel de
formation (COPACIF), organisme créé en 1982 et investi d'une
mission de coordination en matière de CIF.
Il convient de préciser que le système engendre presque
nécessairement des disponibilités excédentaires.
En effet, un certain temps s'écoule entre le moment de la collecte et
celui où l'OPACIF verse des fonds à un organisme, car la
formation commence généralement plus tard : elle concerne
deux exercices, voire plus. L'OPACIF est cependant amené à
collecter de nouveau, avant d'avoir financé l'ensemble des formations
prévues au titre des exercices précédents.
Toutefois, lors de son audition devant la mission d'évaluation et de
contrôle (MEC) de l'Assemblée nationale sur le sujet des fonds de
la formation professionnelle, M. Gilles Loffredo, directeur
général de l'association pour la gestion des fonds de
l'alternance (AGEFAL) et du COPACIF, déclara :
" les
excédents se régulent, lentement mais sûrement, à la
baisse ".
II. LA MESURE PROPOSÉE PAR LE GOUVERNEMENT
A. LA CENTRALISATION DES EXCÉDENTS FINANCIERS DU CAPITAL DE TEMPS
DE FORMATION
Le présent article propose d'étendre le champ de
compétence du fonds
créé par la loi de finances pour
1996 précitée, et qui, actuellement, gère les
excédents financiers des organismes collectant les fonds du CIF,
à la gestion des excédents financiers dont disposent les OPCA
gérant les contributions des employeurs affectées au financement
du capital de temps de formation (CTF).
L'exposé des motifs précise que, au sein de ce fonds, serait
créée une section particulière à laquelle seraient
affectés les excédents financiers du capital de temps de
formation. En effet, le CTF, comme les autres dispositifs de formation
professionnelle, engendre des excédents, pour les raisons
évoquées plus haut.
Le COPACIF centraliserait et gérerait ces excédents financiers,
s'établissant à un milliard de francs au 31 décembre 1998
mais évalués à environ
700 millions de francs
aujourd'hui.
L'exposé des motifs apporte une autre précision : la
centralisation des disponibilités excédentaires du CTF
permettrait de procéder à
l'affectation d'une contribution de
500 millions de francs, versée par le COPACIF au budget de l'emploi par
voie de fonds de concours, afin de compenser la diminution des crédits
destinés au financement de l'indemnité compensatrice forfaitaire
à l'apprentissage.
En effet, le chapitre 43-70 " Financement de la formation
professionnelle " du budget de l'emploi voit son article 11
" Formation en alternance. Primes des contrats d'apprentissage "
passer de 4.664,6 millions de francs en 1999 à 4.113,8 millions de
francs dans le projet de loi de finances pour 2000, soit une diminution de
550,8 millions de francs (-11,8 %).
La position de votre commission :
Le présent article ne tend, finalement, à centraliser les
disponibilités du CTF auprès du COPACIF que pour mieux
opérer un futur prélèvement sur ce dernier au profit du
budget de l'Etat.
La
" rationalisation du financement de la formation
professionnelle "
invoquée par le gouvernement apparaît
donc, avant tout, comme un argument destiné, une fois encore, à
procéder à un prélèvement exceptionnel, cette
fois-ci qualifié de
" volontaire "
, mais qui est, en
réalité, récurrent :
- la loi de finances pour 1996 avait réalisé un
prélèvement exceptionnel de 60 % sur les excédents
financiers du fonds d'affectation qu'elle venait de créer, soit 1,465
milliard de francs ;
- la loi de finances pour 1997 avait autorisé un
prélèvement exceptionnel de 40 % sur la trésorerie de
l'AGEFAL, soit 1,37 milliard de francs ;
- enfin, la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et
financier pour 1998 a opéré un nouveau prélèvement,
de 500 millions de francs cette fois, sur la trésorerie de l'AGEFAL.
Après avoir sollicité les fonds de la formation en alternance, la
nouvelle contribution concernerait désormais ceux du capital de temps de
formation. Cette technique budgétaire permet ainsi au gouvernement
d'afficher une économie de 500 millions de francs sur le budget de
l'emploi, cette diminution de crédits étant, en fait,
annulée grâce au prélèvement opéré.
Le gouvernement avancera probablement l'argument selon lequel il mobilise une
" trésorerie dormante " au profit de la formation en
alternance.
Votre commission observe que de tels prélèvements, en principe
" exceptionnels ", sont de plus en plus fréquents, presque
annuels. Ils traduisent également
une mauvaise gestion des finances
publiques
, qui conduit à faire financer des dépenses
courantes par des " recettes de poche ", à caractère
exceptionnel. Par ailleurs, en pénalisant les trésoreries
excédentaires, ces ponctions constituent, de fait, une incitation
à la mauvaise gestion.
Au regard du caractère récurrent des prélèvements
opérés sur les fonds de la formation professionnelle,
il
apparaît que ces excédents sont structurels. Il conviendrait,
dès lors, de revoir le mode de financement des organismes collecteurs de
fonds, et de réduire, le cas échéant, les cotisations
versées par les entreprises.
Il s'agit sans doute du meilleur moyen
de faire disparaître les " trésoreries dormantes ".
Or, votre commission s'est désormais fixée une doctrine en ce
qui concerne les prélèvements opérés sur les
trésoreries d'organismes publics ou parapublics. Si de tels
prélèvements peuvent, dans certains cas, être
légitimes, leur caractère systématique, en revanche, est
le reflet d'une mauvaise gestion.
Lors du dernier prélèvement sur les fonds de l'AGEFAL,
décidé en 1998, votre rapporteur général
écrivait :
" votre commission vous demande d'autoriser
pour la dernière fois
un tel prélèvement sur la
trésorerie des organismes chargés de collecter les fonds de la
formation professionnelle ".
Mettant en oeuvre sa doctrine, votre commission estime légitime la
suppression du présent article.