CHAPITRE II
LA POLITIQUE DE L'ÉNERGIE
En 1973,
le pétrole couvrait 69 % de la consommation française
d'énergie et le Moyen-Orient représentait 75 % de notre
approvisionnement pétrolier, soit 50 % de notre approvisionnement
total en énergie.
Grâce au programme nucléaire, aux économies
d'énergie, à la diversification vers les énergies
renouvelables et le gaz, la part du pétrole a pu être
ramenée de 69 % à 41 % actuellement, tandis que le taux
d'indépendance énergétique passait de 22 % à
53 % en 1994. Néanmoins, ce taux d'indépendance
énergétique est redescendu à 48,5 % en 1998, ce qui
montre l'importance de maintenir nos efforts.
En effet, des chocs pétroliers futurs sont possibles, sinon probables.
La dépendance des pays consommateurs vis-à-vis de l'OPEP, qui
représente 40 % de la production pétrolière mondiale
et près de 80 % des réserves connues, ne pourra que
croître au fur et à mesure que les ressources
pétrolières de l'OCDE et de la CEI s'épuisent. Les
importations pétrolières des Etats-Unis pèsent lourdement
sur le marché pétrolier international. A ces facteurs, s'ajoute
le risque d'un choc gazier lié à la croissance de la demande de
la part d'un grand nombre de pays occidentaux qui désirent
développer cette énergie en raison de ses qualités
techniques et environnementales, d'où un risque de forte tension sur les
prix d'ici 2005-2010, du moins en Europe.
Pour toutes ces raisons, il convient de conforter le parc nucléaire
français (qui a permis à la France d'être quasiment
autosuffisant pour sa production d'électricité), de renforcer les
efforts de maîtrise de l'énergie et de promotion des
énergies renouvelables, de développer en amont la production de
gaz et de pétrole, et de renforcer la compétitivité des
entreprises françaises du secteur de l'énergie.
On ne peut pas dire que le gouvernement s'y emploie avec toute la
détermination nécessaire, du moins s'agissant de la
filière nucléaire qui attend encore certaines décisions
stratégiques importantes, et des entreprises françaises du
secteur de l'énergie qui sont, pour certaines pénalisées
par une fiscalité de plus en plus lourde et une augmentation du
coût du travail, et pour d'autres, bridées par la lenteur de la
transposition des directives européennes.
Les crédits consacrés à la politique
énergétique de la France sont recensés dans le tableau
ci-après :
On observe plusieurs évolutions :
En premier lieu, les deux agrégats qui regroupaient, d'une part, les
crédits du Commissariat à l'énergie atomique, et,
d'autre part, les divers crédits consacrés à la politique
énergétique, sont désormais fusionnés en un seul
agrégat dénommé " énergie et
matières " premières " et doté de 4.454,4
millions de francs (en DO et CP), soit une hausse de 10,5 % à
structure 2000 constante par rapport à 1999.
La progression des crédits traduit, pour l'essentiel, la
budgétisation des crédits destinés à financer les
travaux d'expertise en matière de sûreté nucléaire
menés par la Direction de la sécurité des installations
nucléaires (DSIN), qui étaient jusqu'à présent
financés par des redevances acquittées par les exploitants, dont
le produit était rattaché au budget de l'industrie par voie de
fonds de concours. 497,5 millions de francs sont ainsi désormais
inscrits sur le chapitre 54-93.
En outre, 100 millions de francs sont provisionnés pour faire face aux
risques fiscaux liés à la scission du CEA et de l'Institut de
protection et de sûreté nucléaire (IPSN)
La hausse globale des crédits masque cependant la forte diminution des
crédits dévolus aux actions de maîtrise de l'énergie
et au Fonds de soutien aux hydrocarbures.
I. LA REMISE À PLAT DE LA POLITIQUE DE MAÎTRISE DE L'ÉNERGIE ET DE PROMOTION DES ÉNERGIES RENOUVELABLES
L'Agence
de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) est un
établissement public à caractère industriel et commercial,
placé sous la triple tutelle des ministères de l'Environnement,
de l'Industrie et de la Recherche. Elle a pour missions principales la
maîtrise de la consommation d'énergie, le développement du
recyclage et de la valorisation des déchets ménagers et la
réduction des pollutions atmosphériques. Elle s'appuie pour cela
sur trois types de compétences : l'expertise scientifique et
technique, l'aide à la décision pour le montage de projets et
l'aide financière.
Toutefois, suite aux travaux d'évaluation de la politique de
maîtrise de l'énergie menée de 1973 à 1993,
réalisés en 1997 par le Comité interministériel de
l'évaluation des politiques publiques avec l'aide du Commissariat
général du Plan, il est apparu que l'ADEME s'était
progressivement éloignée de sa mission de promotion des efforts
de maîtrise de l'énergie et des énergies renouvelables au
profit des autres missions dont elle a la charge (prévention des
pollutions et des atteintes à l'environnement, financement d'actions de
recherche).
Le rapport relevait ainsi que les crédits d'intervention de l'agence en
faveur de la maîtrise de l'énergie avaient décru de 304
à 75 millions de francs entre 1992 et 1997 alors que, dans le même
temps, les crédits d'intervention en faveur de l'environnement avaient
progressé de 297 à 1.229 millions de francs.
L'année dernière, le gouvernement a en conséquence
annoncé, à l'issue du comité interministériel sur
le nucléaire, son intention de rééquilibrer les actions de
l'Agence au profit de celles destinées à encourager les efforts
de maîtrise de l'énergie. Cette volonté s'est
concrétisée dans la mise en place d'une enveloppe
budgétaire dite " pérenne " de 500 millions de
francs pour ces actions, sans toutefois que le gouvernement fut en mesure, au
moment du vote du budget pour 1999, de préciser l'allocation exacte de
ces ressources et les grandes lignes d'action de l'Agence.
On notera toutefois que les crédits d'intervention de l'Ademe sont
fortement contractés en crédits de paiement dans le budget pour
2000, traduisant peut-être un mauvais calibrage des besoins initiaux.
A. DE NOUVELLES ORIENTATIONS POUR L'ADEME
Le
premier chantier ouvert par la nouvelle direction de l'ADEME en 1998 a
été l'
élaboration d'un
plan d'entreprise
définissant en collaboration avec ses trois tutelles une
stratégie pour l'Agence. Le contrat de plan que l'établissement
devrait signer avec l'Etat fin 1999 comportera à cet égard un
engagement de résultats.
En outre, conformément aux orientations du plan d'entreprise,
l'activité de l'ADEME au premier semestre 1999 a été
consacrée en priorité à une
refonte totale de son
dispositif d'aides financières
. Tous les domaines d'activité
ont été concernés et les options proposées ont
été validées par deux conseils d'administration de
l'Agence.
Le nouveau dispositif comporte désormais quatre catégories
d'aides :
- les aides à la décision destinées à sensibiliser
les décideurs et à évaluer les investissements à
réaliser ;
- le soutien aux opérations de démonstration pour favoriser la
première réalisation en grandeur réelle d'une technique
issue de la R&D ;
- le soutien aux opérations exemplaires pour favoriser la diffusion des
bonnes pratiques ;
- les aides à l'investissement dans le domaine des véhicules
" propres " et pour certains secteurs des énergies
renouvelables pour faire émerger une taille critique des marchés
et induire une baisse des coûts de fabrication et de commercialisation
(chauffe-eau solaires en particulier).
Le secrétariat d'Etat à l'industrie indique qu'il est pour
l'instant difficile de présenter un bilan intermédiaire
chiffré de l'impact de ces nouvelles aides dont les effets ne se feront
pleinement sentir qu'au dernier semestre 1999 et sur l'exercice 2000, compte
tenu des délais de mise en place. Les priorités d'action portent
actuellement sur les conditions pratiques de mise en oeuvre des
procédures et sur la mobilisation des partenaires sur le terrain,
contribution essentielle au succès de l'entreprise.
Concrètement, il s'agit :
- de structurer les réseaux de bureaux d'études capables de
contribuer efficacement à la relance des aides à la
décision concernant la maîtrise de l'énergie ; faute
de soutiens publics, les compétences qui existaient jusque dans le
début des années 1990 ont très souvent disparu ;
- d'inclure les actions de l'ADEME dans les négociations actuelles avec
les régions dans le cadre de la préparation des contrats de plan
Etat-Régions ;
- de favoriser la création d'une offre de qualité dans les
domaines du solaire thermique et en particulier pour la promotion des
chauffe-eau solaires qui font l'objet d'aides systématiques à
l'investissement (soutien à l'émergence de matériels
performants, formation et qualification de réseaux d'installateurs
compétents, aide à la structuration de réseaux de
distribution...) ;
- de préciser les types d'opérations exemplaires (bonnes
pratiques du développement durable) que l'agence souhaite soutenir dans
tous les secteurs de la maîtrise de l'énergie sur la base de
critères de performance, d'efficacité économique et de
reproductibilité ;
- d'étendre le champ d'intervention du " plan bois
énergie
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"
à toutes les régions et de mobiliser l'ensemble des acteurs de la
filière bois pour structurer les réseaux d'approvisionnement en
bois énergie.
Les niveaux actuels d'affectation des crédits et l'évaluation du
portefeuille d'opérations mettent en évidence la montée en
puissance des programmes de maîtrise de l'énergie dont un
véritable bilan pourra être réalisé à la fin
de l'année.