Proposition de loi, adoptée par l'assemblée nationale, tendant à limiter les licenciements des salariés de plus de cinquante ans,
SOUVET (Louis)
RAPPORT 165 (98-99) - Commission des Affaires sociales
Table des matières
- TRAVAUX DE LA COMMISSION
-
AVANT-PROPOS
- I. LA PROPOSITION DE LOI ÉTEND LA " CONTRIBUTION DELALANDE " AUX CONVENTIONS DE CONVERSION ET AUX REFUS DE CONVENTIONS DE PRÉRETRAITE
- II. LA PROPOSITION DE LOI SE FONDE SUR DES ÉLÉMENTS CONTESTABLES ET RÉPOND ESSENTIELLEMENT À DES IMPÉRATIFS POLITIQUES
- III. LA PROPOSITION DE LOI TÉMOIGNE D'UNE LOGIQUE PERNICIEUSE ET RISQUE DE CONSTITUER UN VÉRITABLE FREIN À L'EMPLOI
-
EXAMEN DES ARTICLES
-
Article premier
Assujettissement à la " contribution Delalande " des ruptures de contrats de travail des salariés de plus de cinquante ans ayant adhéré à une convention de conversion -
Art. 2
Assujettissement à la " contribution Delalande " des licenciements de salariés ayant refusé le bénéfice d'une préretraite ASFNE -
Art. 3
Date d'application des articles premier et 2
-
Article premier
N°
165
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 26 janvier 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, tendant à limiter les licenciements des salariés de plus de cinquante ans ,
Par M.
Louis SOUVET,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet, André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jacques Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Henri de Richemont, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.
Voir
les numéros :
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Travail. |
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Le
mardi 26 janvier 1999
,
sous la
présidence de
M. Jean Delaneau, président
, la commission a
procédé à
l'examen du rapport de M. Louis Souvet
sur la
proposition de loi n° 114
(1998-1999), adoptée
par l'Assemblée nationale, tendant à
limiter les licenciements
des salariés de plus de cinquante ans.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a présenté les grandes lignes de
son rapport
(cf. exposé général).
M. Guy Fischer
a déclaré qu'il ne partageait pas l'analyse du
rapporteur sur cette proposition de loi. Rappelant que cette dernière
répondait à l'origine à une volonté de justice
sociale et de lutte contre le chômage, il a souligné que
l'invocation de l'article 40 de la Constitution à
l'Assemblée nationale avait fait disparaître l'essentiel de ce
texte. Il a regretté que le Gouvernement ait choisi, pour la
première fois, d'invoquer l'article 40 de la Constitution avant le
débat d'une proposition de loi inscrite à l'ordre du jour en
application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution.
M. André Jourdain
a souligné que les entreprises ne
licenciaient pas par plaisir. Il a déclaré partager l'analyse du
rapporteur et s'est étonné qu'il puisse être
envisagé que les recettes supplémentaires induites par
l'augmentation et l'extension de la " contribution Delalande "
aillent à l'Etat et non à l'UNEDIC.
M. Claude Domeizel
a indiqué qu'il était opposé au
rejet de cette proposition de loi préconisé par le rapporteur. Il
a contesté l'analyse de ce dernier pour qui cette proposition de loi
répondait avant tout à un impératif politique.
En réponse aux intervenants,
M. Louis Souvet, rapporteur,
a
confirmé que les trois articles de la proposition de loi étaient
effectivement d'inspiration gouvernementale et que le Gouvernement avait
souhaité donner satisfaction au groupe communiste tout en supprimant les
dispositions qui le gênaient.
Il a considéré, comme M. André Jourdain, qu'aucun chef
d'entreprise ne licenciait par plaisir et que le licenciement était
toujours un constat d'échec. Jugeant anormal que les recettes
supplémentaires au titre de la " contribution Delalande "
puissent alimenter le budget de l'Etat, il a précisé que ces
sommes pourraient néanmoins finalement bénéficier à
l'UNEDIC si les partenaires sociaux acceptaient une amélioration de
l'indemnisation du chômage des jeunes.
La commission a ensuite examiné les amendements proposés par le
rapporteur.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article premier
qui assujettissait à la " contribution Delalande " les
ruptures de contrat de travail des salariés ayant adhéré
à des conventions de conversion.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 2
qui soumettait à la " contribution Delalande " les
licenciements des salariés ayant refusé le bénéfice
de la préretraite dans le cadre du FNE.
Elle a enfin adopté un amendement de suppression de
l'article 3
qui rendait applicables les dispositions de la
présente proposition de loi à toutes les ruptures de contrat de
travail intervenant à compter du 1
er
janvier
1999.
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Adoptée par l'Assemblée nationale le 10 décembre 1998,
avec l'accord du Gouvernement, la proposition de loi tendant à limiter
les licenciements des salariés de plus de 50 ans a
été déposée par M. Alain Belviso et les membres du
groupe communiste et apparentés.
Comprenant trois articles, elle vise à étendre le champ de la
" contribution Delalande " due pour tout licenciement d'un
salarié de plus de 50 ans.
La proposition de loi soumet ainsi à cette contribution les ruptures des
contrats de travail des salariés ayant adhéré à des
conventions de conversion
(article premier)
et les licenciements des
salariés ayant refusé le bénéfice de la
préretraite dans le cadre du fonds national de l'emploi (FNE)
(article 2).
Elle prévoit que ces dispositions seront applicables pour toutes les
ruptures de contrat de travail intervenant à compter du 1er janvier
1999, c'est-à-dire de manière rétroactive
(article
3).
Votre commission a jugé que cette proposition de loi reposait sur des
fondements fragiles et contestables : elle a considéré que
les prétendus contournements de la " contribution Delalande "
par les conventions de conversion et les refus de conventions de
préretraite n'étaient pas prouvés. Elle a refusé le
procès d'intention fait aux entreprises, globalement
considérées par les initiateurs de cette proposition de loi comme
ayant un comportement frauduleux.
Votre commission a estimé que cette proposition de loi ne semblait
répondre qu'à des considérations très politiques et
visait avant tout pour le Gouvernement, qui a demandé l'inscription de
ce texte à l'ordre du jour prioritaire du Sénat, à
renforcer la cohésion de sa majorité.
Elle a dénoncé la logique de sanction et d'accroissement des
charges des entreprises qui animait cette proposition de loi. Elle a enfin
exprimé la crainte que cette proposition de loi, qui entendait
préserver l'emploi, ne constitue en définitive un
véritable frein à l'emploi, notamment pour les salariés
âgés de 45 à 50 ans.
Votre commission vous propose par conséquent de supprimer les trois
articles du texte, ce qui équivaut à un rejet de la proposition
de loi.
I. LA PROPOSITION DE LOI ÉTEND LA " CONTRIBUTION DELALANDE " AUX CONVENTIONS DE CONVERSION ET AUX REFUS DE CONVENTIONS DE PRÉRETRAITE
A. LE DOUBLEMENT PAR VOIE RÉGLEMENTAIRE DE LA " CONTRIBUTION DELALANDE " AU 1ER JANVIER 1999
La
" contribution Delalande " a été instituée en
1987 au moment de la suppression de l'autorisation administrative de
licenciement. La loi n° 87-518 du 10 juillet 1987 modifiant le code
du travail et relative à la prévention et à la lutte
contre le chômage de longue durée a instauré cette
cotisation supplémentaire - dite " contribution
Delalande " du nom de l'auteur de l'amendement qui l'a
créée, M. Jean-Pierre Delalande, député du Val
d'Oise - due par l'employeur pour toute rupture du contrat de travail d'un
salarié âgé de plus de 50 ans (article L. 321-13 du code du
travail)
1(
*
)
.
A l'origine, le montant de cette cotisation, versée au régime
d'assurance chômage de l'UNEDIC, était fixé à trois
mois de salaire brut.
En 1992, le Gouvernement décida d'augmenter une première fois
cette cotisation et de la moduler selon un barème progressif en fonction
de l'âge du salarié licencié et de la taille de
l'entreprise concernée.
L'article D. 321-8 du code du travail fixe ainsi le montant de la
contribution en fonction de l'âge du salarié. Le barème
applicable depuis 1992 variait de un à six mois du salaire brut :
un mois à 50 ou 51 ans, deux mois à 52 ou 53 ans, quatre mois
à 54 ans, cinq mois à 55 ans et six mois pour les salariés
âgés de 56 ans et plus.
Conformément à ce qu'avait annoncé à
l'Assemblée nationale, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité, le 10 novembre dernier, cette cotisation a, de nouveau,
été augmentée à compter du 31 décembre 1998.
Le nouveau taux de la contribution, fixé par le décret n°
98-1201 du 28 décembre 1998, est progressif de deux mois de salaire brut
à 50 ans à douze mois de salaire brut à 56 et 57 ans. Il
est ensuite dégressif à partir de 58 ans.
Le nouveau barème procède pour l'essentiel à un doublement
- voire dans certains cas un triplement - de la " contribution
Delalande ".
Nouveau barème de la contribution Delalande
pour
les
entreprises de 50 salariés et plus
Montant de la contribution due |
Age du salarié à la date de la fin du contrat de travail |
|||||||||
(exprimée en mois de salaire brut) |
50 |
51 |
52 |
53 |
54 |
55 |
56 |
57 |
58 |
59 ou + |
Barème actuel* |
1 |
1 |
2 |
2 |
4 |
5 |
6 |
6 |
6 |
6 |
Nouveau barème |
2 |
3 |
5 |
6 |
8 |
10 |
12 |
12 |
10 |
8 |
* Ce
barème reste applicable aux entreprises de moins de 50
salariés.
Le Gouvernement justifie cette mesure en soulignant que la contribution est,
dans le cas d'un salarié de 57 ans, deux moins onéreuse pour
l'entreprise qu'une préretraite FNE.
Les entreprises de moins de 50 salariés restent assujetties au
barème antérieur. Les entreprises de moins de 20 salariés
continuent à être exonérées de la contribution pour
la première rupture de contrat de travail d'un salarié
âgé d'au moins 50 ans dans une période de douze mois.
Demeurent en outre exclus du champ d'application de la contribution, comme
précédemment, les salariés qui, lors de leur embauche
intervenue après le 9 juin 1992, étaient âgés de
plus de 50 ans et inscrits depuis plus de trois mois comme demandeurs
d'emploi.
B. L'EXTENSION DE " LA CONTRIBUTION DELALANDE " AUX CONVENTIONS DE CONVERSION ET AUX REFUS DE CONVENTIONS DE PRÉRETRAITE
L'article L. 321-13 du code du travail
prévoit que
la " contribution Delalande " n'est pas due dans un certain nombre de
cas : licenciement pour faute grave ou lourde, licenciement
résultant d'une cessation d'activité de l'employeur pour raison
de santé ou de départ en retraite entraînant la fermeture
définitive de l'entreprise, licenciement pour fin de chantier, rupture
du contrat due à la force majeure...
La contribution n'est notamment pas due en cas de rupture du contrat de travail
d'un salarié qui adhère à une convention de conversion et
dans le cas où l'employeur conclut avec l'Etat, dans le cadre des
actions du Fonds national de l'emploi (FNE), une convention d'allocation
spéciale de préretraite (ASFNE).
La présente proposition de loi soumet à la " contribution
Delalande " les ruptures des contrats de travail des salariés ayant
adhéré à des conventions de conversion et les
licenciements des salariés ayant refusé le bénéfice
de la préretraite FNE. Ces deux cas d'exonération sont en effet
considérés par le Gouvernement et les auteurs de la proposition
de loi comme
" deux failles "
du dispositif. La proposition de
loi est présentée par le Gouvernement comme le complément
indispensable du doublement de la " contribution Delalande ".
L'article premier de la proposition de loi insère un nouvel
alinéa dans l'article L. 321-13 du code du travail afin de
prévoir que la " contribution Delalande " est due
également pour chaque rupture de contrat de travail intervenue du fait
de l'adhésion d'un salarié à une convention de
conversion
2(
*
)
.
Cet alinéa précise également que le montant de cette
cotisation tient compte de la participation de l'entreprise au financement de
la convention de conversion. Cette disposition vise, selon le rapporteur de
l'Assemblée nationale, à permettre au pouvoir
réglementaire de moduler de manière spécifique le montant
de la cotisation dans ce cas : le montant de celle-ci pouvant être
d'autant plus réduit que la participation de l'entreprise au financement
de la convention de conversion est importante.
Le financement de l'allocation spécifique de conversion est aujourd'hui
assuré par l'employeur du salarié qui adhère à la
convention de conversion et par le régime d'assurance chômage. La
participation de l'employeur correspond au montant équivalant aux deux
mois d'indemnité de préavis qu'il aurait versés au
salarié si celui-ci n'avait pas adhéré à la
convention de conversion. L'employeur verse également une participation
forfaitaire aux frais de fonctionnement de 4.500 francs par
adhérent.
La rédaction retenue par l'article premier de la proposition de loi
concernant la participation financière de l'entreprise aux conventions
de conversion est pour le moins imprécise et peut s'interpréter
de deux façons : soit, la référence se fait sur la
base de l'article D. 322-2 du code du travail, qui détermine la
participation de l'entreprise au sens large du terme, préavis du
salarié y compris, soit l'interprétation se fait plus stricte et
la participation de l'entreprise se limite au forfait de 4.500 francs.
L'article 2 propose une nouvelle rédaction de l'avant-dernier
alinéa de l'article L. 321-13 du code du travail afin de
prévoir que la " contribution Delalande " n'est pas due dans
le cas où le salarié bénéficie des allocations
spéciales de préretraite du FNE
3(
*
)
.
Cette nouvelle rédaction de l'alinéa signifie
a contrario
que le refus du salarié de la proposition de préretraite
assujettit l'employeur au versement de la " contribution Delalande ".
L'article 3 prévoit que les dispositions de la présente loi
entreront en vigueur, de manière rétroactive, au
1
er
janvier 1999.
Le doublement et l'extension de la " contribution Delalande " devrait
générer des recettes supplémentaires. Cette contribution a
ainsi rapporté, en 1997, 1,7 milliard de francs à l'UNEDIC. Selon
les estimations de cet organisme, son doublement et son extension devraient
générer 1,4 milliards de francs de recettes
supplémentaires
(cf. encadré ci-dessous).
Les
conséquences financières du doublement et de
l'élargissement du champ de la " contribution Delalande "
(Estimations de l'UNEDIC)
•
Situation initiale
En 1997, le montant total encaissé au titre de la " contribution
Delalande " s'élevait à 1.665,4 millions de francs. En
1999, le montant encaissé serait de 1,7 milliard de francs hors
modifications réglementaires et législatives.
•
" Doublement " de la contribution à champ
constant
Le fichier national des allocataires de l'UNEDIC donne une évaluation
du poids des établissements de plus de 50 salariés dans les
licenciements de l'ordre de 38 %. Par ailleurs, les informations relatives
aux effectifs affiliés au régime permet d'estimer le poids des
entreprises de 50 salariés et plus. Compte tenu de ces
éléments, on estime à environ 49 % le poids des
licenciés issus d'entreprises de 50 salariés et plus.
Pour quelque 13.450 allocataires (sur 27.400 allocataires concernés),
la contribution supplémentaire serait alors fortement majorée
puisque
l'application des nouvelles règles revient à
multiplier en moyenne par 2,3 le montant moyen encaissé auparavant
(60.830 francs en 1997).
On évalue à
970 millions de francs cette majoration.
•
Extension du champ aux conventions de conversion
4(
*
)
La suppression de l'exonération concernerait environ 18.500
bénéficiaires des conventions de conversion âgés de
plus de 50 ans. Une fois prises en compte, les exonérations pour les
entreprises de moins de 20 salariés (dont c'est le premier licenciement
dans l'année) et les autres types d'exonération, le nombre
d'allocataires concernés s'établit à 14.100.
De l'augmentation des contributions perçues, il conviendrait de
décompter les 4.500 francs versés au titre de la formation par
48 % des entreprises environ
5(
*
)
. Au total,
le supplément de versement des entreprises est estimée à
1.015 millions de francs
6(
*
)
.
•
Effet des modifications réglementaires dans
l'hypothèse où les entreprises ne modifient pas leur comportement
Les nouvelles mesures devraient permettre ainsi l'encaissement de
1.985 millions de francs
supplémentaires, hors toute
limitation des licenciements de travailleurs âgés. Au total, le
montant perçu au titre de la contribution spéciale des
travailleurs âgés serait, sans modification des flux
concernés, de 3.685 millions de francs.
•
Effet d'une hypothèse de limitation de 15 % des
licenciements de travailleurs âgés
En l'absence de tout chiffrage précis sur la limitation des
licenciements des travailleurs âgés que pourraient provoquer ces
modifications réglementaires, il est fait l'hypothèse que
15 % des licenciements pourraient être évités. Le
montant perçu ne serait plus alors que de 3.130 millions de francs.
L'effet net des modifications législatives et réglementaires
serait alors de
1.430 millions de francs.
Ces estimations sont naturellement fortement dépendantes des
hypothèses de comportement des entreprises. Ces hypothèses
amènent d'ailleurs à s'interroger sur la nature exacte de cette
contribution : la " contribution Delalande " constitue-t-elle
une contribution de dissuasion ou une contribution de rendement ?
Dans le premier cas, l'objectif consiste à dissuader, autant que
possible, les licenciements des salariés : l'idéal serait
donc que le produit de cette contribution soit quasiment nul, ce qui
témoignerait de son efficacité.
Dans le second cas, la finalité est toute autre : il s'agit
d'accroître le produit d'un prélèvement en majorant son
taux et en élargissant son assiette.
Les recettes supplémentaires que le Gouvernement attend de la majoration
et de l'extension de la " contribution Delalande " conduisent
à penser que l'on se situe plutôt dans le cas d'une contribution
de rendement : le Gouvernement semble se faire peu d'illusions quant
à l'efficacité réelle du nouveau dispositif et
privilégie avant tout le rendement financier de cette contribution.
Le bénéficiaire final de ces recettes supplémentaires
n'est cependant pas encore définitivement connu.
D'un strict point de vue juridique, l'UNEDIC est seul
bénéficiaire des sommes prélevées au titre de la
" contribution Delalande ". L'article L. 321-13 du code du
travail prévoit en effet que toute rupture du contrat de travail d'un
salarié d'un âge déterminé par décret ouvrant
droit au versement de l'allocation d'assurance chômage de l'UNEDIC
entraîne l'obligation pour l'employeur de verser aux ASSEDIC la
" contribution Delalande ".
Si les recettes supplémentaires iront donc, dans un premier temps,
à l'UNEDIC, selon la stricte application de la loi, il n'est cependant
pas certain que cet organisme en garde effectivement le bénéfice
final.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a ainsi
indiqué le 18 janvier dernier, en marge de ses voeux à la presse,
que
" pour cette année au moins, la majoration du Delalande
était affectée au budget de l'Etat "
7(
*
)
.
Le Gouvernement semble en réalité décidé à
prélever sur les sommes qu'il avance à l'UNEDIC au titre des
préretraites FNE - versées par l'UNEDIC pour le compte de l'Etat
- une somme équivalente au surcroît de recettes induit par le
doublement et l'extension de la " contribution Delalande ".
L'UNEDIC se verrait ainsi privée d'une somme équivalente à
la recette supplémentaire que généreront l'augmentation et
l'extension de la " contribution Delalande ".
L'objectif poursuivi par le Gouvernement est simple : il s'agit de faire
pression sur les partenaires sociaux afin d'obtenir une meilleure indemnisation
du chômage des salariés précaires, notamment les jeunes,
qui, parce qu'ils n'accumulent que des contrats de courte durée, ne
parviennent pas à se constituer des droits à indemnisation au
titre de l'assurance chômage. Si les partenaires sociaux acceptaient
cette proposition, l'UNEDIC conserverait le bénéfice des recettes
supplémentaires au titre de la " contribution Delalande ". Les
négociations entre le Gouvernement et les partenaires sociaux se
poursuivent actuellement.
Si l'on suit ainsi la logique du Gouvernement, l'amélioration de la
prise en charge du chômage des jeunes dépend de recettes assises
sur les licenciements des salariés les plus
" âgés ". Il faudrait en quelque sorte souhaiter des
licenciements massifs de salariés de plus de 50 ans afin de disposer des
recettes nécessaires pour mener à bien cette tâche
prioritaire que constitue l'amélioration de l'indemnisation des jeunes
chômeurs !
II. LA PROPOSITION DE LOI SE FONDE SUR DES ÉLÉMENTS CONTESTABLES ET RÉPOND ESSENTIELLEMENT À DES IMPÉRATIFS POLITIQUES
A. DES FONDEMENTS FRAGILES ET CONTESTABLES
Pour
justifier la nécessité de cette proposition de loi, ses auteurs
évoquent la nécessité de
" mettre fin aux abus et
aux contournements "
, de
" stopper une
dérive ".
Ils expliquent ainsi que les conventions de conversion seraient de plus en plus
fréquemment utilisées pour échapper au paiement de la
" contribution Delalande ". Selon M. Gremetz, rapporteur de
l'Assemblée nationale, certaines entreprises feraient ainsi pression sur
leurs salariés pour qu'ils adhèrent à une convention de
conversion dans le seul but d'éviter le paiement de la contribution.
De même, toujours selon le rapporteur de l'Assemblée nationale,
certains employeurs concluraient une convention d'allocation spéciale de
préretraite (ASFNE) puis feraient pression sur leurs salariés
pour qu'ils renoncent au bénéfice de ce dispositif de
préretraite. Ces employeurs seraient alors exonérés du
versement de la " contribution Delalande ".
A l'appui de ces affirmations, le rapporteur et le Gouvernement se fondent sur
un argument très limité : la part des salariés de plus de
50 ans dans les conventions de conversion serait ainsi passée de
12 % en 1994 à 17 % en 1997, ce qui serait
révélateur d'un phénomène
généralisé de contournement.
Entrées en convention de conversion par tranche
d'âge
(France métropolitaine)
Source : UNEDIC, exploitations annuelles du fichier national des allocataires (FNA)
|
50 ans ou plus |
55 ans ou plus |
Tout âge |
||
Année |
Effectif |
% du total |
Effectif |
% du total |
Effectif total |
1990 |
4.277 |
10,0 |
451 |
1,0 |
42.966 |
1991 |
6.734 |
9,9 |
784 |
1,2 |
68.125 |
1992 |
10.659 |
9,3 |
1.059 |
0,9 |
115.146 |
1993 |
16.220 |
9,0 |
1.825 |
1,0 |
179.320 |
1994 |
16.026 |
10,8 |
2.824 |
1,9 |
147.803 |
1995 |
14.908 |
12,5 |
3.670 |
3,1 |
119.675 |
1996 |
18.737 |
13,8 |
4.753 |
3,5 |
136.217 |
1997 (e) |
21.428 |
15,8 |
5.369 |
4,0 |
135.793 |
1998 (e) |
20.282 |
19,1 |
6.053 |
5,7 |
106.188 |
(e)
Estimations provisoires
Les chiffres obtenus par votre rapporteur sur les entrées en conventions
de conversion montrent effectivement une progression de la part des plus de 50
ans, part qui est ainsi passée de 11 % en 1994 à 16 %
en 1997. En 1998, selon des chiffres encore provisoires qu'il convient
d'examiner avec prudence, le nombre d'entrées en convention de
conversion de salariés de plus de 50 ans serait en diminution mais leur
part dans le total des conventions de conversion augmenterait pour atteindre
19 %, en raison de la forte baisse du total des entrées.
En jugeant que le recours aux conventions de conversion pour les
salariés de plus de 50 ans résulte avant tout d'un contournement
de la " contribution Delalande ", le Gouvernement semble condamner
l'utilisation des conventions de conversion pour ces personnes.
Il apparaît contradictoire à faire porter la " contribution
Delalande ", qui procède d'une logique de sanction, sur les
conventions de conversion qui ont précisément pour objectif de
faciliter le reclassement du salarié dont le licenciement n'a pu
être évité.
Ouvertes aux salariés âgés de moins de 57 ans, aptes
physiquement à l'exercice d'un emploi et ayant au moins deux ans
d'ancienneté dans leur emploi, les conventions de conversion,
instituées en 1986, consistent en effet en une prise en charge
individualisée et immédiate, durant une période de six
mois, des salariés licenciés pour motif économique. Elle
sont souvent plus intéressantes financièrement pour le
salarié que l'indemnisation au titre de l'assurance chômage.
Le Gouvernement semble considérer qu'il serait presque anormal que des
salariés de plus de 50 ans entrent en convention de conversion. Si l'on
peut éventuellement s'interroger sur l'utilité réelle de
ces conventions pour les personnes âgées de plus de 55 ans, il
apparaît surprenant que l'on condamne ainsi l'usage de ces conventions
pour des personnes âgées de 50 à 55 ans. Faudrait-il en
conclure que ces salariés n'ont aucune chance de se reclasser ?
Votre rapporteur ne peut que refuser une telle logique qui semble se
satisfaire de l'exclusion définitive de ces salariés du
marché du travail
Taux de
reclassement des adhérents de 50 ans et plus
aux conventions de
conversion
L'analyse est faite sur les 14 dernières
cohortes d'adhérents (de janvier 1995 à avril 1996) et porte sur
23.000 adhérents de 50 ans et plus
Source : rapport Bruhnes, ANPE, octobre 1996
Age |
Taux de reclassement |
dont taux hommes |
dont taux femmes |
Bénéficiaires Formation |
Bénéficiaires Prestation |
Poids relatif |
50 |
41 % |
47 |
34 |
46 % |
58 % |
16 % |
51 |
39 % |
44 |
31 |
45 % |
58 % |
14 % |
52 |
36 % |
43 |
26 |
43 % |
58 % |
14 % |
53 |
35 % |
40 |
26 |
40 % |
56 % |
13 % |
54 |
32 % |
36 |
24 |
36 % |
55 % |
12 % |
55 |
27 % |
30 |
20 |
29 % |
51 % |
12 % |
56 et + |
18 % |
19 |
17 |
24 % |
44 % |
19 % |
Total 60 ans et + |
33 % |
37 |
26 |
38 % |
55 % |
100 % |
Total adh 14 cohortes |
49 % |
54 |
42 |
51 % |
57 % |
|
Pourtant, il apparaît que 33% des personnes de plus de
50 ans
parviennent à retrouver un emploi à l'issue de leur convention de
conversion. Ce taux est même de 41% à 50 ans et de 39% à 51
ans (contre 49% pour l'ensemble des bénéficiaires de conventions
de conversion).
Votre rapporteur considère donc la simple constatation d'une
augmentation de la part des salariés de plus de 50 ans dans les
entrées en convention de conversion paraît très insuffisant
à démontrer un contournement massif et un abus
généralisé justifiant une nouvelle intervention du
législateur.
Votre rapporteur ne nie pas que peuvent se produire ça et là des
abus caractérisés chez certains employeurs peu scrupuleux.
Toutefois, ces abus éventuels ne sauraient justifier une sanction
collective qui frapperait la totalité des entreprises. Rien ne permet en
effet de conclure aujourd'hui à un contournement massif par les
entreprises de la " contribution Delalande " par l'utilisation du
dispositif de la convention de conversion.
S'agissant des refus de préretraites FNE, l'hypothèses d'abus
éventuels revient à reconnaître une certaine
négligence de la part des services de l'Etat. En effet, la mise en place
d'un dispositif de préretraite suppose que l'employeur conclut avec
l'Etat une convention. Cette convention donne lieu à négociation
entre l'entreprise et l'administration, afin d'obtenir, en contrepartie de
l'aide de l'Etat, un recours maîtrisé aux mesures d'âge et
l'amélioration du plan social.
Conventions d'ASFNE de 1993 à mai 1998
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1/1/1998 au 31/5/1998 |
Conventions signées |
14.574 |
8.545 |
5.997 |
5.906 |
5.353 |
1.916 |
Entrées annuelles (1) |
56.345 |
49.462 |
23.683 |
21.015 |
21.669 |
9.862 |
Allocataires en fin de période |
174.662 |
179.219 |
152.409 |
128.442 |
107.789 |
101.015 |
(1)
Source UNEDIC : statistique de paiements
.
On notera de surcroît que les affirmations concernant d'éventuels
abus ne sont étayées par aucun élément
précis. La raison en est simple : sur une moyenne de 20.000
entrées en préretraite FNE chaque année, le nombre de
refus est extrêmement faible ;
il porte sur une soixantaine de
salariés par an seulement.
Lorsque l'on aura précisé que le refus du salarié peut,
dans certains cas, être motivé par une indemnisation au titre de
l'assurance chômage plus avantageuse que la préretraite, on
comprendra que le nombre des refus susceptibles de résulter d'une
éventuelle pression de l'employeur est, dans l'hypothèse la plus
pessimiste, de l'ordre de quelques dizaines à peine.
Dans ces conditions, votre rapporteur est amené à s'interroger
sur l'utilité d'une éventuelle intervention du législateur
pour réprimer un nombre effectif d'abus qui doit vraisemblablement se
compter sur les doigts d'une seule main...
Le procès d'intention fait aux entreprises, globalement
considérées par les initiateurs de cette proposition de loi comme
ayant un comportement frauduleux, paraît donc inacceptable. Le
prétendu contournement de la " contribution Delalande " par
les conventions de conversion et les refus de conventions de préretraite
est loin d'être avéré.
Dès lors, peut-être faut-il considérer que cette
proposition de loi trahit plutôt les craintes du Gouvernement que le
doublement par voie réglementaire de la " contribution
Delalande " ne génère effectivement, à l'avenir, de
tels phénomènes de contournement ?
B. UNE " PRIORITÉ " GOUVERNEMENTALE
La
véritable justification des dispositions que comporte cette proposition
de loi tient davantage à des nécessités politiques.
Les trois articles de la proposition de loi constituaient en
réalité les articles 5, 6 et 7 d'une proposition de loi qui en
comportait initialement neuf et qui tendait " à limiter les
licenciements et à améliorer la situation au regard de la
retraite des salariés de plus de 50 ans ".
Ce texte prévoyait, outre l'extension de la " contribution
Delalande ", le droit à la retraite à taux plein avec
quarante annuités de cotisation sans condition d'âge et la
prorogation et l'extension du dispositif d'allocation de remplacement pour
l'emploi (ARPE).
Or, suite à la saisine du Gouvernement, le bureau de la commission des
Finances a décidé d'opposer l'article 40 de la Constitution aux
articles 1er, 2, 3, 4 et 9 du texte. La proposition de loi s'est donc
trouvée amputée de plus de la moitié de ses articles et,
aux yeux de ses auteurs, de ses dispositions essentielles :
" Vidée d'une grande partie de sa substance,
a
souligné le rapporteur de l'Assemblée nationale
, sa
portée en est d'autant réduite et sa cohérence
affectée ".
L'article 8, qui instituait une contribution sur les revenus financiers
affectée à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des
travailleurs (CNAVTS), ayant été supprimé par la
commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de
l'Assemblée nationale, ne subsistent du texte initial que les
dispositions que nous examinons aujourd'hui.
Ces dispositions et l'argumentation qui les sous-tend émanent en
réalité des services du ministère de l'Emploi et de la
Solidarité. L'extension aux conventions de conversion de la
" contribution Delalande " avait d'ailleurs été
annoncée par Mme Aubry dès le début du mois de novembre
dernier et l'impact financier de cette extension avait été
partiellement intégré dans les prévisions
budgétaires de la loi de finances pour 1999.
En acceptant cette proposition de loi et en demandant son inscription à
l'ordre du jour prioritaire du Sénat, le Gouvernement poursuit un
objectif essentiellement politique : il permet, d'une part, à une
composante de sa majorité de revendiquer la paternité d'une
disposition dont il est en réalité l'auteur et qui constitue le
seul reliquat d'une proposition de loi embarrassante pour lui. Il apaise,
d'autre part, sa majorité, qui souhaitait une réforme plus large
du droit de licenciement. La prochaine étape de cette stratégie
pourrait d'ailleurs être la taxation des entreprises qui font un usage
jugé " abusif " des contrats à durée
déterminée ou de l'intérim.
On remarquera enfin qu'en choisissant la voie d'une proposition de loi, le
Gouvernement évite de communiquer au Parlement l'étude d'impact
qui accompagne nécessairement tout projet de loi.
III. LA PROPOSITION DE LOI TÉMOIGNE D'UNE LOGIQUE PERNICIEUSE ET RISQUE DE CONSTITUER UN VÉRITABLE FREIN À L'EMPLOI
Relevant d'une logique de soupçon et de sanction, cette proposition de loi n'apporte en réalité aucune solution au problème que constitue le chômage des plus de 50 ans et risque en outre de générer des effets pervers.
A. UNE LOGIQUE DE SANCTION ET D'ACCROISSEMENT DES CHARGES DES ENTREPRISES
La
proposition de loi témoigne d'une logique uniquement répressive
et se traduit, en définitive, par une nouvelle augmentation des charges
des entreprises.
Là où des dispositifs positifs, dynamiques et imaginatifs
seraient nécessaires, la proposition de loi ne met en place que des
mesures pénalisantes et contraignantes pour les entreprises.
Le problème du chômage des personnes âgées de plus de
50 ans est réel. Même si l'amélioration de la situation de
l'emploi profite également aux salariés âgés de plus
de 50 ans - les chiffres de l'ANPE pour l'ensemble de l'année 1998 font
état d'une baisse de 17,4 % des licenciements des salariés
de plus de 50 ans, contre une baisse de 20,4 % pour l'ensemble des
salariés - la situation des demandeurs d'emplois de cet âge est
préoccupante et mérite une attention soutenue. Ceux qui sont
frappés par le chômage après 50 ans et, surtout,
après 55 ans ont moins de chance de retrouver un emploi. Le
chômage des plus de 50 ans ouvre souvent la voie au chômage de
longue durée et, après la fin des droits, à l'exclusion.
Evolution du nombre des licenciements économiques
|
1996 |
1997 |
1998 |
Variation 1998/1997 |
Licenciements économiques |
468.534 |
422.013 |
335.759 |
- 20,4 % |
Dont salariés de plus de 50 ans |
81.389 |
80.517 |
66.501 |
- 17,4 % |
Source : ANPE
Le Sénat ne peut que partager l'objectif de lutter contre cette forme de
chômage particulièrement douloureuse. Toutefois, ce
problème aigu nécessite une approche globale, qui n'est pas celle
de ce texte.
Une action efficace contre le chômage des plus de 50 ans suppose une
réflexion préalable sur les raisons qui conduisent les
entreprises à licencier ces personnes : coût trop
élevé de la main d'oeuvre, adaptation insuffisante à
l'emploi et aux technologies nouvelles... Elle nécessite une
réforme d'ampleur reposant à la fois sur des exonérations
de charges sociales et une formation professionnelle à même
d'offrir aux salariés, quel que soit leur âge, les moyens de
s'adapter aux mutations de leur environnement professionnel.
Cette politique gagnerait à s'inscrire dans le cadre des axes
définis par
Les lignes directrices de l'emploi pour 1999,
proposées par la Commission européenne en octobre dernier.
La Commission européenne suggère ainsi d'intensifier les efforts
" pour développer des stratégies préventives et
axées sur la capacité d'insertion professionnelle en se fondant
sur l'identification précoce des besoins individuels ".
Elle
invite les Etats membres à
" développer des
possibilités d'apprentissage tout au long de la vie, notamment dans les
domaines des technologies de l'information et de la communication ".
Elle précise que
" l'accent sera notamment mis sur la
facilité d'accès des travailleurs âgés ".
La présente proposition de loi n'apparaît, à
l'évidence, pas à la hauteur de l'enjeu.
Elle amène également à s'interroger sur la
cohérence de la politique que mène aujourd'hui le Gouvernement en
matière d'emploi des salariés les plus âgés.
Il y a en effet quelque chose de paradoxal à augmenter la
" contribution Delalande ", afin de sanctionner les entreprises qui
licencient des salariés âgés de plus de 50 ans, tout en
encourageant simultanément certaines entreprises à rajeunir leur
pyramide des âges par des départs massifs et anticipés de
salariés " âgés ". Le Gouvernement semble en
réalité disposé à faire preuve de beaucoup de
compréhension à l'égard des entreprises qui favoriseront,
parallèlement aux départs des salariés
" âgés ", la création d'emplois au titre de la
réduction du temps de travail
8(
*
)
...
Une clarification des objectifs poursuivis par le Gouvernement en ce domaine
s'impose à l'évidence. Dans
Les lignes directrices pour
l'emploi en 1999
, la Commission européenne invite d'ailleurs
à
" réévaluer d'une manière critique les
mesures actuelles incitant les travailleurs à quitter relativement
tôt le monde du travail ".
B. DES EFFETS PERVERS SUR L'EMPLOI
S'il est
douteux qu'elle contribue à diminuer les licenciements des plus de 50
ans, il est certain que l'augmentation et l'extension de la " contribution
Delalande " n'incitera pas à la création d'emplois.
Cette proposition de loi qui entend préserver l'emploi pourrait en effet
constituer un véritable frein à l'emploi.
Certes, la contribution Delalande n'est pas due pour les salariés qui,
lors de leur embauche après le 9 juin 1992, était
âgés de plus de 50 ans et inscrits depuis plus de trois mois comme
demandeurs d'emplois.
Cependant, on peut craindre les effets conjugués de l'extension et du
doublement de la " contribution Delalande " sur les demandeurs
d'emplois approchant la cinquantaine : les entreprises hésiteront
à embaucher des salariés ayant un peu moins de 50 ans, craignant
d'avoir bientôt à supporter le coût d'un éventuel
licenciement ultérieur.
En majorant de manière excessive la " contribution Delalande "
et en l'étendant de manière abusive, le Gouvernement prend le
risque de dévoyer cette contribution. Afin de protéger les
salariés de plus de 50 ans, il choisit en définitive de
fragiliser les salariés âgés de 45 à 50 ans. Les
conséquences humaines et sociales d'un tel choix pourraient
bientôt se révéler très douloureuses.
*
* *
Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission vous propose d'adopter trois amendements de suppression des trois articles de cette proposition de loi. Leur adoption amènerait à un rejet de la proposition de loi.
EXAMEN DES ARTICLES
Article premier
Assujettissement à la
" contribution Delalande " des ruptures de contrats de travail des
salariés de plus de cinquante ans ayant adhéré à
une convention de conversion
Objet : Cet article assujettit à la
" " contribution Delalande " les ruptures de contrats de travail
de salariés âgés de plus de cinquante ans ayant
adhéré à une convention de conversion.
I - Le dispositif proposé
La loi n° 87-518 du 10 juillet 1987 modifiant le code du travail et
relative à la prévention et à la lutte contre le
chômage de longue durée a institué une contribution
supplémentaire -dite " contribution Delalande " du nom de
l'auteur de l'amendement qui l'a créée, M. Jean-Pierre Delalande,
député du Val d'Oise- due par l'entreprise au régime
d'assurance chômage de l'UNEDIC en cas de licenciement d'un
salarié de plus de cinquante ans.
Cette cotisation, prévue par l'article L. 321-13 du code du
travail, avait pour objet de mieux protéger ces salariés contre
le licenciement. Son taux était fixé initialement à trois
mois de salaire brut du salarié licencié.
La cotisation fut augmentée une première fois par
l'article 31 de la loi n° 92-722 du 29 juillet 1992 portant
adaptation de la loi n° 88-1088 du 1
er
décembre
1988 relative au revenu minimum d'insertion et relative à la lutte
contre la pauvreté et l'exclusion sociale et professionnelle qui
institue également une modulation de la contribution en fonction de
l'âge du salarié et de la taille de l'entreprise concernée.
Conformément à ce qu'avait annoncé à
l'Assemblée nationale, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité, le 10 novembre dernier, cette cotisation a de nouveau
été augmentée à compter du 31 décembre 1998.
L'article D. 321-8 du code du travail fixe le montant de la contribution
en fonction de l'âge du salarié. L'ancien barème applicable
avant la parution du décret n° 98-1201 du 28 décembre
1998 variait de un à six mois du salaire brut : un mois à 50
ou 51 ans, deux mois à 52 ou 53 ans, quatre mois à 54 ans, cinq
mois à 55 ans et six mois pour les salariés âgés de
56 ans et plus.
Le nouveau taux de la contribution, fixé par le décret n°
98-1201 du 28 décembre 1998, est progressif puis dégressif : deux
mois de salaire brut à 50 ans, trois mois à 51 ans, cinq mois
à 52 ans, six mois à 53 ans, huit mois à 54 ans, dix mois
à 55 ans, douze mois à 56 ans et 57 ans, dix mois à 58 ans
et huit mois à 59 ans.
Le nouveau barème témoigne pour l'essentiel d'un doublement -
voire dans certains cas d'un triplement - de la " contribution
Delalande ".
Les entreprises de moins de 50 salariés demeurent assujetties sur le
barème antérieur.
L'article L. 321-13 du code du travail, qui constitue le fondement
législatif de la " contribution Delalande ", prévoit
que toute rupture du contrat de travail d'un salarié d'un âge
déterminé par décret ouvrant droit au versement de
l'allocation d'assurance chômage de l'UNEDIC entraîne l'obligation
pour l'employeur de verser aux ASSEDIC une cotisation dont le montant est
fixé par décret dans la limite de douze mois de salaire brut
calculé sur la moyenne mensuelle des salaires versés au cours des
douze derniers mois travaillés. Ce montant peut varier selon l'âge
auquel intervient la rupture et la taille de l'entreprise concernée.
L'article L. 321-13 du code du travail prévoit en outre que
cette cotisation n'est pas due dans un certain nombre de cas :
1. licenciement pour faute grave ou lourde ;
2. licenciement résultant d'une cessation d'activité de
l'employeur, pour raison de santé ou de départ en retraite, qui
entraîne la fermeture définitive de l'entreprise ;
3. rupture d'un contrat de travail, par un particulier, d'un
employé de maison ;
4. licenciement visé à l'article L. 321-12 du
code du travail, c'est-à-dire à la fin d'un chantier ;
5. démission trouvant son origine dans un déplacement de la
résidence du conjoint, résultant d'un changement d'emploi ou d'un
départ en retraite de ce dernier ;
6. rupture du contrat due à la force majeure ;
7. rupture du contrat de travail d'un salarié qui était,
lors de son embauche intervenue après le 9 juin 1992,
âgé de plus de cinquante ans et inscrit depuis plus de trois mois
comme demandeur d'emploi ;
8. première rupture d'un contrat de travail intervenant au cours
d'une même période de douze mois dans une entreprise employant
habituellement moins de 20 salariés ;
9. licenciement pour inaptitude lorsque l'employeur justifie, par
écrit, de l'impossibilité où il se trouve de donner suite
aux propositions de reclassement du médecin du travail ou lorsque
l'inaptitude à tout poste dans l'entreprise a été
constatée par le médecin du travail.
En outre, l'employeur qui conclut avec l'Etat une convention d'allocation
spéciale de préretraite (ASFNE) et qui en propose le
bénéfice aux salariés concernés est dispensé
du versement de la " contribution Delalande ".
La contribution est due au moment de l'ouverture du droit au versement de
l'allocation chômage. Lorsqu'un des salariés est reclassé
sous contrat à durée indéterminée dans les trois
mois suivant l'expiration du délai-congé prévu en cas de
rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié,
l'employeur peut demander aux ASSEDIC le remboursement de la
" contribution Delalande " qu'il a acquittée.
L'article premier de la présente proposition de loi assujettit à
la " contribution Delalande " les ruptures de contrats de travail des
salariés qui adhèrent à une convention de conversion.
La cotisation n'était pas due auparavant dans ce cas puisque
l'entrée en convention de conversion n'est juridiquement pas
considérée comme une période de chômage et n'ouvre
donc pas droit à une allocation du régime d'assurance
chômage.
D'origine conventionnelle, le dispositif des conventions de conversion a
été mis en place en compensation de la suppression de
l'autorisation administrative de licenciement. Il a été
consacré et généralisé par la loi du
30 décembre 1986 relative aux procédures de licenciement. Le
dispositif (articles L. 321-5 à L . 321-15 et
article L. 322-3 du code du travail) a fait l'objet de plusieurs
modifications. Il est mis en oeuvre dans le cadre du régime d'assurance
conversion géré par l'UNEDIC. Il a été
prorogé plusieurs fois, en dernier lieu par une convention du
1
er
janvier 1997 pour une durée de trois ans, jusqu'au
31 décembre 1999.
La convention de conversion est, pour le salarié, un droit inscrit dans
le code du travail. Les entreprises, quelle que soit leur taille, doivent en
effet proposer à l'ensemble des salariés concernés par une
procédure de licenciement économique, quel que soit leur nombre,
la possibilité d'adhérer à une convention de conversion
afin de les aider à se reclasser. Conçue pour prévenir le
chômage de longue durée, la convention de conversion consiste dans
la prise en charge individualisée et immédiate, durant une
période de six mois, des salariés licenciés pour motif
économique.
Pour pouvoir bénéficier d'une convention de conversion, le
salarié doit être âgé de moins de 57 ans,
être apte physiquement à l'exercice d'un emploi et avoir au moins
deux ans d'ancienneté dans son emploi
9(
*
)
.
En cas d'adhésion à la convention de conversion, le contrat de
travail est rompu d'un commun accord entre les parties. La rupture qui ne
comporte pas de préavis ouvre droit au versement d'une indemnité
dont le montant correspond à l'indemnité de licenciement
légale ou conventionnelle qu'il aurait perçue s'il avait
effectué son préavis et du solde de ce qu'aurait
été l'indemnité de préavis si celui-ci avait
été supérieur à deux mois (les deux premiers mois
contribuant à financer l'allocation de conversion). Le salarié
n'est cependant pas inscrit comme demandeur d'emploi. Il est, en effet,
considéré comme stagiaire de la formation professionnelle
continue et bénéficie d'une allocation spécifique de
conversion, différente de l'allocation d'assurance chômage,
pendant la période de conversion, c'est-à-dire jusqu'à son
reclassement et au maximum pendant six mois. Il reçoit une allocation
égale à 83,4 % du salaire antérieur pendant les deux
premiers mois puis à 70,4 % pendant les quatre mois suivants. La
durée de cette allocation est validée au titre de l'assurance
vieillesse et des assurances complémentaires.
Le financement de l'allocation spécifique de conversion est
assuré par l'employeur du salarié qui adhère à la
convention de conversion et par le régime d'assurance chômage. La
participation de l'employeur correspond au montant équivalant aux deux
mois d'indemnité de préavis qu'il aurait versés au
salarié si celui-ci n'avait pas adhéré à la
convention de conversion. En cas de licenciement de moins de dix
salariés dans un délai de trente jours, un quart de la
participation peut être pris en charge par l'Etat. L'employeur verse
également une participation forfaitaire aux frais de fonctionnement de
4.500 francs par adhérent.
Le salarié en convention de conversion bénéficie d'un
bilan d'évaluation et d'orientation et d'actions de formation. A cet
effet, des unités techniques de reclassement (UTR) ont été
mises en place au sein de l'ANPE. Elles sont chargées d'assurer
l'accompagnement et le reclassement des adhérents à la
convention. Ceux-ci peuvent également recourir aux cellules de
reclassement éventuellement mises en place par les entreprises ayant
procédé à leur licenciement. Après la
réalisation d'un bilan avec le salarié, les actions à
engager en vue d'un reclassement sont déterminées (sessions de
recherche d'emploi, sensibilisation à la création d'entreprise,
évaluation en milieu de travail,...) et des actions de formation, dont
la durée ne doit pas excéder 300 heures, peuvent être
proposées. En 1996, 52 % des adhérents ont
bénéficié d'une formation. Pour plus de 40 % d'entre eux,
il s'agissait d'une formation technique assurée par un organisme de
formation.
Le présent article premier insère un nouvel alinéa dans
l'article L. 321-13 du code du travail afin de prévoir que la
" contribution Delalande " est due également pour chaque
rupture de contrat de travail intervenue du fait de l'adhésion d'un
salarié à une convention de conversion.
Cet alinéa précise également que le montant de cette
cotisation tient compte de la participation de l'entreprise au financement de
la convention de conversion. Cette disposition vise, selon le rapporteur de
l'Assemblée nationale, à permettre au pouvoir
réglementaire de moduler de manière spécifique le montant
de la cotisation dans ce cas : le montant de celle-ci pouvant être
d'autant plus réduit que la participation de l'entreprise au financement
de la convention de conversion est importante.
Cette rédaction est pour le moins imprécise et peut
s'interpréter de deux façons : soit, la
référence se fait sur la base de l'article D. 322-2 du code du
travail, qui détermine la participation de l'entreprise au sens large du
terme, préavis du salarié y compris, soit l'interprétation
se fait plus stricte et la participation de l'entreprise se limite au forfait
de 4.500 francs.
II - La position de votre commission
Cet article a été longuement analysé par votre rapporteur
dans l'exposé général du présent rapport. On se
contentera par conséquent de rappeler ici brièvement les raisons
qui motivent l'opposition de votre commission à cette disposition.
Votre commission a jugé qu'aucun élément précis ne
permettait de conclure aujourd'hui à un contournement massif par les
entreprises de la contribution Delalande par l'utilisation du dispositif de la
convention de conversion.
Même si des abus peuvent se produire ça et là chez certains
employeurs peu scrupuleux, ils ne sauraient justifier à eux seuls une
sanction collective qui frapperait la totalité des entreprises.
Votre commission s'est refusé en outre à condamner l'utilisation
des conventions de conversion, qui constituent un outil précieux d'aide
au reclassement, pour les salariés âgés de plus de 50 ans.
Elle a considéré par conséquent que la véritable
origine de cet article - et de l'ensemble de la proposition de loi - tenait
davantage à des impératifs politiques - visant à assurer
la cohésion de la majorité gouvernementale - qu'à de
réels motifs de fond.
Elle a enfin exprimé la crainte que cette proposition de loi qui
entendait préserver l'emploi ne constitue en définitive un
véritable frein à l'emploi, notamment pour les salariés
âgés de 45 à 50 ans.
Pour ces raisons, votre commission vous propose d'adopter un amendement de
suppression de cet article.
Art. 2
Assujettissement à la
" contribution Delalande " des licenciements de salariés ayant
refusé le bénéfice d'une préretraite
ASFNE
Objet : Cet article étend le champ de la
" contribution Delalande " aux licenciements de salariés ayant
refusé le bénéfice d'une préretraite dans le cadre
du Fonds national de l'emploi.
I - Le dispositif proposé
L'avant-dernier alinéa de l'article L. 321-13 du code du travail
prévoit que l'employeur qui conclut avec l'Etat une convention
d'allocation spéciale du FNE et qui en propose le bénéfice
aux salariés concernés est dispensé du versement de la
" contribution Delalande ".
Dans le cadre d'un plan social, une entreprise peut conclure avec l'Etat une
convention d'allocation spéciale du Fonds national de l'emploi (ASFNE)
permettant à des salariés âgés de
bénéficier d'un retrait anticipé du marché du
travail tout en percevant une allocation spécifique jusqu'à la
liquidation de leur pension de retraite. Cette disposition évite
à ceux-ci d'être licenciés pour motif économique.
Pour en bénéficier, le salarié doit adhérer
volontairement à la convention s'il remplit les conditions d'âge
(au moins 57 ans, par dérogation 56 ans), d'ancienneté
dans l'entreprise (au moins un an), de durée de cotisation (au moins
10 ans d'appartenance à un ou plusieurs régimes de
sécurité sociale) et ne plus exercer d'activité
professionnelle.
Il perçoit alors une allocation qui s'élève à
65 % du salaire antérieur de référence pour la part
du salaire inférieure au plafond de sécurité sociale et
à 50 % pour la part du salaire comprise entre une et deux fois ce
plafond. Il perçoit cette allocation jusqu'à 60 ans ou
au-delà, pour atteindre le nombre de trimestres de cotisation requis
afin de bénéficier de la retraite à taux plein mais au
plus tard à 65 ans.
Le salarié et son employeur contribuent tous deux au financement de
l'allocation. La participation du salarié est égale à la
part de l'indemnité conventionnelle dépassant le montant de
l'indemnité légale de licenciement ou, si elle est
supérieure, celui de l'indemnité conventionnelle de départ
ou de mise à la retraite. Elle est plafonnée forfaitairement. La
participation financière de l'employeur au dispositif ASFNE est un
élément-clé de la négociation avec la Direction
départementale du travail, de l'emploi et de la formation
professionnelle. Elle est fixée en fonction de la qualité du plan
social, de la taille de l'entreprise et de la capacité contributive de
l'entreprise : ces taux sont en général compris entre
12 % et 15 % pour les entreprises de moins de 500 salariés, et
entre 15 % et 23 % pour celles de 500 salariés et plus,
ou appartenant à un groupe d'importance nationale.
Le présent article propose une nouvelle rédaction de
l'avant-dernier alinéa de l'article L. 321-13 du code du
travail afin de prévoir que la " contribution Delalande "
n'est pas due dans le cas où le salarié bénéficie
d'une allocation spéciale de préretraite du FNE.
Cette nouvelle rédaction de l'alinéa signifie
a contrario
que le refus par le salarié de la proposition de préretraite
assujettit l'employeur au versement de la " contribution Delalande ".
II - La position de votre commission
Cet article a été longuement analysé par votre rapporteur
dans l'exposé général du présent rapport. On se
contentera par conséquent de rappeler ici brièvement les raisons
qui motivent l'opposition de votre commission à cette disposition.
Votre commission a relevé que les affirmations des initiateurs de la
proposition de loi concernant d'éventuels abus n'étaient
étayées par aucun élément précis.
Elle a souligné que le nombre des refus de préretraite FNE
était extrêmement faible : il concernait une soixantaine de
salariés par an pour un total de plus de 20.000 entrées annuelles
en conventions d'ASFNE.
Après avoir constaté que le refus du salarié pouvait, dans
certains cas, être motivé par une indemnisation au titre de
l'assurance chômage plus avantageuse que la préretraite, votre
commission a estimé que le nombre des refus susceptibles de
résulter d'une éventuelle pression de l'employeur était,
dans l'hypothèse la plus pessimiste, de l'ordre de quelques dizaines
à peine.
Dans ces conditions, votre commission s'est refusé à une
intervention législative destinée uniquement à sanctionner
quelques très rares abus éventuels.
Elle vous propose par conséquent d'adopter un amendement de
suppression de cet article.
Art. 3
Date d'application des articles premier
et 2
Objet : Cet article prévoit que les articles
premier et 2 sont applicables pour toutes les ruptures de contrat de travail
intervenant à compter du 1
er
janvier 1999.
I - Le dispositif proposé
Cet article prévoit que les dispositions de la présente loi
entreront en vigueur, de manière rétroactive, au
1
er
janvier 1999.
Le rapporteur de l'Assemblée nationale justifie cet article en arguant
de la nécessité d'éviter que des entreprises ne profitent,
afin d'échapper au paiement de la " contribution Delalande ",
du délai d'adoption de la proposition de loi pour multiplier les
départs en convention de conversion.
II - La position de votre commission
Par coordination avec les amendements qu'elle propose aux articles premier et 2
de la présente proposition de loi,
votre commission vous propose
d'adopter un amendement de suppression de cet article.
Elle considère de surcroît que cet article introduit une
rétroactivité qui poserait en pratique de redoutables
problèmes d'application et serait vraisemblablement source de nombreux
contentieux.
1
Pour une présentation
détaillée de la " contribution Delalande ", voir le
commentaire de l'article premier.
2
Pour une présentation détaillée des
conventions de conversion, voir le commentaire de l'article premier.
3
Pour une présentation détaillée des
conventions d'allocations spéciales de préretraite FNE, voir le
commentaire de l'article 2.
4
L'impact de l'extension de la " contribution Delalande "
aux refus de conventions de préretraite ASFNE n'a pas été
intégré en raison de son montant financier négligeable.
5
Ce chiffrage se réfère à la seconde
interprétation de la proposition de loi selon laquelle la participation
de l'entreprise se limite au forfait de 4.500 francs.
6
En intégrant les deux mois de préavis à la
participation financière de l'entreprise et donc en les déduisant
de la contribution, l'extension aux conventions de conversion ne rapporterait
plus que 575 millions de francs.
7 Le Figaro, 19 janvier 1999.
8
L'accord cadre sur le temps de travail, l'emploi
et la
formation qui vient d'être négocié chez PSA Peugeot
Citroën est à cet égard significatif : il comporte un
engagement de 5.600 embauches, dont 3.000 embauches au titre de la
réduction du temps de travail (RTT). Le groupe PSA anticipe
parallèlement une aide publique au titre des départs
anticipés de salariés âgés, après
négociation d'un accord sectoriel sur le sujet : le constructeur
automobile souhaite en effet rajeunir sa pyramide des âges grâce au
départ de 12.500 personnes sur cinq ans, dont un tiers serait
remplacé par des embauches (source : Liaisons sociales).
9
En 1996, la jurisprudence a étendu de fait l'accès
au dispositif à tout licencié pour motif économique,
quelle que soit son ancienneté.