B. LE FONDS FORESTIER NATIONAL : LA FRAGILITÉ DES RESSOURCES
L'année 1999 enregistrerait une légère
dégradation des ressources affectées au FFN. Mais, l'essentiel
des problèmes du fonds vient de la contestation permanente de sa
principale ressource, la taxe forestière.
L'année 1995 avait vu se poursuivre l'effort de consolidation
financière du Fonds forestier national (FFN) qui s'était
trouvé en quasi cessation de paiement à l'automne 1993.
La réforme de la taxe forestière en 1991 et la crise
traversée par le secteur de la transformation du bois avaient en effet
entraîné une forte dégradation des ressources du FFN
divisées par deux et nécessité un plan de redressement.
En 1995, le fonds avait bénéficié en particulier, de la
suppression du préciput de 15 % sur le produit de la taxe
forestière qui lui revenait désormais en totalité et de
l'augmentation d'un tiers des taux de la taxe de défrichement.
Votre rapporteur s'était en son temps inquiété de
l'optimisme sous jacent aux évaluations de recettes pour 1996.
524 millions de francs avaient été prévus provenant
en particulier d'une estimation des produits de la taxe forestière de
390 millions de francs et de la taxe de défrichement de
32 millions de francs.
Le chiffre des réalisations observées en 1996 avait
malheureusement donné raison aux alarmes alors exprimées.
Evolution du produit des "taxes forestières"
(en millions de francs)
|
1994 |
1995 |
1996 |
|||
|
Estimation |
Réalisation |
Estimation |
Réalisation |
Estimation |
Réalisation |
Taxe forestière |
312 |
276,4 |
330 |
313,3 |
390,0 |
288,7 |
Taxe défrichement |
50 |
26,9 |
58 |
30,6 |
32,0 |
33,1 |
Les
perspectives pour 1997, apparaissaient relativement plus réalistes, mais
faisaient ressortir une évolution peu favorable.
Toutefois, alors qu'en 1996 l'exécution s'était soldée par
des moins-values de recettes considérables, en 1997, elle fut "grosso
modo" conforme aux prévisions.
Ecarts entre les prévisions de recettes et l'exécution en 1997
Recettes |
Evaluation 1997 |
Constatation 1997 |
Ligne 1 : produit de la taxe forestière |
317.000.000 |
310.232.268 |
Lignes 2 et 3 : remboursement des prêts pour reboisement |
39.800.000 |
41.278.283 |
Lignes 4 et 5 : remboursement des prêts pour équipement et protection de la forêt |
50.000.000 |
56.233.039 |
Ligne 6 : remboursement des prêts pour éviter le démembrement et les coupes abusives |
1.500.000 |
1.051.665 |
Ligne 7 : recettes diverses et accidentelles |
1.500.000 |
2.545.878 |
Ligne 8 : produit de la taxe papetière |
|
0 |
Ligne 9 : produit de la taxe de défrichement |
34.000.000 |
31.866.088 |
Total |
443.800.000 |
443.207.221 |
Au
terme de l'exercice 1997, les recettes du FFN se sont élevées
à 443,2 millions de francs. Elles ont donc été non
seulement conformes aux prévisions mais encore légèrement
supérieures aux recettes encaissées en 1996 (+ 3,8 %).
Mais, cette évolution n'est pas venue des recettes fiscales
affectées au FFN qui en constituent pourtant le socle. Leur produit
s'est inscrit en retrait de 9 millions de francs par rapport aux
prévisions. Elle a été le fruit d'une progression plus
importante que prévu du produit des remboursements de prêts.
L'exécution des recettes 1998 devrait quant à elle être
conforme aux prévisions si l'on en juge à partir des
données disponibles à mi-parcours.
Etat des recettes du FFN au premier semestre 1998
Recettes |
Evaluation 1998 |
Constatation au 30/6/1998 |
Ligne 1 : produit de la taxe forestière |
300.000.000 |
159.082.116 |
Lignes 2 et 3 : remboursement des prêts pour reboisement |
37.000.000 |
14.711.455 |
Lignes 4 et 5 : remboursement des prêts pour équipement et protection de la forêt |
50.000.000 |
14.499.162 |
Ligne 6 : remboursement des prêts pour éviter le démembrement et les coupes abusives |
1.500.000 |
14.499.162 |
Ligne 7 : recettes diverses et accidentelles |
1.500.000 |
402.489 |
Ligne 8 : produit de la taxe papetière |
0 |
0 |
Ligne 9 : produit de la taxe de défrichement |
31.500.000 |
17.705.977 |
Total |
421.500.000 |
207.173.625 |
Pour
1999, les recettes affectées au FFN seraient réduites de
4,5 millions du fait d'une révision à la baisse des
remboursements de prêts pas entièrement compensée par la
progression des recettes fiscales affectées. Mais, l'essentiel est sans
doute ailleurs, dans la constante contestation des taxes forestière et
de défrichement.
Votre commission s'inquiète depuis trois ans du mauvais recouvrement de
la taxe forestière.
Elle ne peut que renouveler ses observations et
souhaiter avec la plus extrême insistance que les moyens de
remédier à cette situation soient trouvés au plus vite.
Car les difficultés de recouvrement de la taxe font apparaître
comme purement théorique son taux minimal. Le taux effectif de la taxe
serait en effet un peu inférieur à 1 % contre un taux
théorique de 1,2 %. D'ailleurs, certains redevables paraissent
mettre sous séquestre la partie de leurs obligations fiscales
correspondant à cet écart.
De la même manière, des interrogations persistent sur le
régime de
la taxe de défrichement.
Il existe en effet une
différence importante entre les montants liquidés et les montants
recouvrés au terme duquel les recouvrements sont usuellement
inférieurs d'1/5e aux liquidations. Le taux de recouvrement
apparaît étrangement bas alors même que la direction
générale des impôts est incitée à faire
diligence au moyen d'un prélèvement pour "frais d'assiette et de
recouvrement" de 4 % du produit de la taxe. Ce prélèvement
dont le principe est peu justifiable paraît ainsi manquer son but. Il
pourrait être utile de s'interroger sur sa pérennité.
On le voit, les prévisions de recettes du fonds sont tributaires d'une
augmentation des produits fiscaux affectés au FFN -les
évaluations de produits de la taxe forestière s'accroissant de
10 millions de francs (+ 3,33 %), et celles de la taxe de
défrichement augmentant de 0,5 million de francs
(+ 1,6 %)- à laquelle l'exécution de 1998 donne quelque
crédit. Mais, les nuages s'accumulent.
Les moyens du FFN seraient utilisés pour 61,6 % d'entre eux
à des opérations d'investissement, le reste (160 millions de
francs) couvrant des dépenses de fonctionnement.
Les crédits d'investissement qui diminueraient de 4,6 %
serviraient comme d'habitude de variable d'ajustement dans le contexte de
réduction des recettes du compte. Leur évolution est largement
conditionnée par des engagements passés au titre des
autorisations de programme. L'essentiel des actions est concentré sur
des opérations de boisement, de reboisement et de gestion des
forêts de production qui bénéficient de subventions.
Une partie toujours en déclin des interventions est
réalisée à travers des prêts (environ 19 % des
dépenses d'investissement). L'encours de prêts accordé par
le fonds est d'ailleurs extrêmement important avec 1 milliard de
francs. Il s'agit cependant d'emplois peu porteurs de recettes : les
prêts sont en effet accordés à des conditions
préférentielles avec un taux effectif de l'ordre de 1,5 %.
En toute hypothèse, les concours accordés ne
bénéficient plus ni aux entreprises ni aux particuliers,
l'essentiel étant consenti aux collectivités locales tandis
qu'une part importante (25 %) finance des travaux exécutés
par l'Etat.
Mais, la substitution observée des subventions aux prêts est
lourde de menaces pour les ressources à venir du compte. Elle conduit en
effet à tarir, à terme, les remboursements de prêts qui ne
représentent plus qu'1/10ème des recettes du FFN.
Les dépenses d'investissement seraient significativement
inférieures aux besoins de reboisement.
La France se trouverait
ainsi en défaut par rapport à son engagement de lutte contre
l'effet de serre puisque l'accroissement des surfaces boisées est,
annuellement, de l'ordre de 10.000 hectares contre les
30.000 hectares nécessaire au respect de cet engagement.
En ce qui concerne les dépenses de fonctionnement
, elles sont
majorées par rapport à leur niveau de 1998
(+ 7,9 millions de francs) et sont principalement constituées
de subventions aux organismes publics ou privés chargés de
l'animation de la filière.
Priorité est donnée au financement des actions structurantes
(formation, recherche, développement), ce dont il faut se
féliciter.