ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 11
Application du taux
réduit de TVA aux réseaux de chaleur utilisant du bois de
chauffage
Commentaire : cet article additionnel manifeste la
volonté de votre commission des finances de voir adaptées les
règles communautaires relatives à la TVA afin que le
bénéfice du taux réduit puisse être étendu
aux ventes d'énergie des réseaux de chaleur utilisant du bois de
chauffage.
L'article 20 de la loi de finances pour 1997, voté à l'initiative
de votre commission des finances, a étendu le champ du taux
réduit de la TVA au bois de chauffage "
à usage domestique
"
(y compris pour les produits assimilés, tels que les produits de la
sylviculture agglomérés et les déchets de bois).
L'instruction fiscale nécessaire à l'application de cette mesure
est toujours en instance de parution.
D'après les engagements pris devant le Sénat par le
secrétaire d'Etat au budget lors du dernier débat
budgétaire, cette instruction devrait trancher en sens opposés
deux questions qui ont été soulevées depuis le vote de
cette disposition :
- une interprétation très large de "
l'usage domestique
" du
bois de chauffage, qui ferait bénéficier du taux réduit le
chauffage de tous les locaux collectifs non lucratifs, et notamment ceux
dépendant des collectivités locales ;
- la confirmation que les réseaux de chaleur restent exclus du
bénéfice la mesure, ainsi que cela avait d'ailleurs
été indiqué dès le vote de la disposition.
Ce dernier point avait fait l'objet d'amendements lors du dernier débat
budgétaire, tant au Sénat qu'à l'Assemblée
nationale. La commission des finances de l'Assemblée avait notamment
défendu l'idée de permettre aux réseaux de chaleur de
répercuter vers leurs clients le taux de 5,5%, en proportion de la part
du bois de chauffage dans leurs approvisionnements en combustibles.
Toutefois, le gouvernement avait alors opposé à cette demande le
droit communautaire en matière de TVA, à juste titre. En effet,
la sixième directive TVA de 1977 prévoit expressément que
la fourniture d'énergie relève du taux normal : cette
règle prévaut sur l'exception faite, dans l'annexe H de la dite
directive, en faveur du bois de chauffage.
C'est d'ailleurs la justification de la restriction prévue, en droit
interne français, à "
l'usage domestique
" de ce
combustible. On peut en effet considérer qu'il n'y a pas lieu
d'appliquer le taux de 5,5% aux usages industriels et commerciaux du bois de
chauffage, dès lors que le bénéfice du taux réduit
ne peut pas être répercuté vers les clients. Par ailleurs,
la taxe supportée en amont, au taux de 20,6%, est déduite par
l'entreprise et reste sans incidence sur son résultat.
Pour sa part, votre commission des finances estime que l'application, en amont,
du taux réduit au bois de chauffage dans tous ses usages industriels et
commerciaux ne peut que favoriser le développement de cette
énergie renouvelable, en apportant un avantage de trésorerie aux
entreprises concernées. C'est pourquoi elle entend supprimer la
restriction "
à usage domestique
" dans l'article 278
bis
du
code général des impôts. Tel est l'objet du I. de
l'amendement qu'elle vous propose.
Cette extension du champ de la mesure n'est pas interdite par
l'annexe H de la directive TVA, qui prévoit l'application du taux
réduit au "
bois de chauffage
" sans restriction
particulière.
Son coût pour l'Etat, qui reste à
évaluer mais est vraisemblablement modique, serait une perte de
trésorerie uniquement, s'agissant par hypothèse de TVA
déductible.
Par ailleurs, votre commission des finances vous propose d'aller plus loin et
de permettre aux entreprises principalement intéressées par le
développement du bois de chauffage, à savoir les réseaux
de chaleur, de répercuter vers leurs clients le bénéfice
du taux réduit. Tel est l'objet du II. de l'amendement qu'elle vous
propose, qui précise par ailleurs expressément dans la loi que
les exploitations de chaufferies collectives utilisant du bois de chauffage
sont fiscalement transparentes au regard du taux réduit.
Cette disposition relative aux réseaux de chaleur présente
l'inconvénient d'être pour l'instant contraire au droit
communautaire.
Toutefois, elle pourrait devenir compatible si la Commission
européenne hâtait sa réflexion sur la "fiscalité
écologique de l'énergie ", ainsi qu'elle s'y est
engagée
, et proposait enfin de modifier la sixième directive
TVA en conséquence. D'autres énergies renouvelables que le bois
de chauffage pourraient d'ailleurs bénéficier du taux
réduit de TVA, telles la géothermie ou la
cogénération.
La procédure de révision de la directive étant assez
lourde et nécessitant un accord des quinze Etats-membres, la France
aurait intérêt à demander une dérogation sur ce
point précis. Tel était d'ailleurs le souhait exprimé par
le rapporteur général de la commission des finances de
l'Assemblée nationale dans son rapport en seconde lecture sur le projet
de loi de finances pour 1998, qui précisait :
"
Cette orientation irait dans le sens des préoccupations,
régulièrement exprimées, tant par le Parlement
européen que par la Commission, en faveur de l'utilisation des
énergies renouvelables.
"Au demeurant, on note que l'article 13-3-b de la sixième directive TVA
prévoit que les Etats membres peuvent appliquer un taux réduit
aux fournitures de gaz naturel et d'électricité, à
condition qu'il n'en résulte aucun risque de distorsion de concurrence.
On voit mal pourquoi ce qui est prévu pour les énergies fossiles
et fissiles ne pourrait pas être étendu à la chaleur
produite à partir d'une énergie renouvelable et locale".
A priori, les partenaires de la France au sein de l'Union européenne ne
devraient pas voir d'inconvénient à cette demande de
dérogation, car l'application du taux réduit à
l'énergie produite par les réseaux de chaleur à partir du
bois de chauffage n'est pas susceptible d'entraîner de distorsions de
concurrence. En effet, cette forme d'énergie n'est pas exportable, sous
réserve de l'hypothèse très théorique de
réseaux de chaleur transfrontaliers.
L'amendement que votre commission des finances a jugé opportun de
présenter sur le sujet du taux réduit de TVA applicable au bois
de chauffage, vise ainsi un double but :
-
hâter
la parution, depuis trop longtemps imminente, de
l'instruction fiscale annoncée ;
-
encourager le Gouvernement à défendre au sein des
instances communautaires une adaptation de la directive TVA, ou une
dérogation à celle-ci, afin que le bénéfice du taux
réduit puisse être étendu aux réseaux de chaleur
utilisant du bois de chauffage.
Le Gouvernement, qui a fait de la "fiscalité écologique" l'un de
ses thèmes de réflexion pour la prochaine loi de finances, ne
peut qu'être sensible au souhait ainsi exprimé par le Parlement.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
le présent article additionnel.