D. LES MÉCANISMES DE VÉRIFICATION
Le régime de vérification prévu par la convention du 13 janvier 1993 est étroitement lié à la mise en place d'une nouvelle organisation internationale ; il tend à créer un système d'inspection dont le caractère intrusif mérite d'être souligné, et qui vise à garantir l'élimination complète des armes chimiques.
1. Une nouvelle organisation internationale : l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques
L'article VIII de la convention crée l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), dont le siège est à La Haye, et qui s'appuie sur trois institutions : la Conférence des Etats Parties, le Conseil exécutif et le Secrétariat technique. Notons que le volet institutionnel de la Convention du 13 janvier 1993 a inspiré celui du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (CTBT) du 24 septembre 1996.
a) La Conférence des Etats Parties
Organe plénier de l'OIAC, la Conférence se réunit au moins une fois par an. La première session a eu lieu en mai 1997, conformément au paragraphe 10 de l'article VIII, qui prévoit que la première session est convoquée au plus tard trente jours après l'entrée en vigueur de la convention. Chaque Etat membre a un représentant à la Conférence. Principal organe de l'OIAC, la Conférence examine "toutes les questions (...) entrant dans le cadre de la convention". Entre autres prérogatives, mentionnons qu'elle élit les membres du Conseil exécutif, et détermine le barème des quotes-parts de chaque Etat au budget de l'OIAC. L'article XII de la Convention investit, par ailleurs, la Conférence de la responsabilité de "prendre (...) les mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention et pour redresser et corriger toute situation contrevenant aux dispositions de la convention". Dans cette perspective, la Conférence est habilitée à "restreindre ou suspendre les droits et privilèges" d'un Etat contrevenant aux stipulations de la Convention. En cas de situation grave, causée par des activités interdites par la Convention, la Conférence "peut recommander aux Etats Parties des mesures collectives, conformément au droit international".
b) Le Conseil exécutif.
Composé de 41 membres, élus par la
Conférence, le Conseil exécutif "oeuvre à l'application
effective et au respect de la convention" (article VIII - 31). Outre ses
compétences d'ordre général (présentation du budget
de l'OIAC à la Conférence, organisation des sessions de celle-ci,
demande de convocation des sessions extraordinaires de la
Conférence...), le Conseil exécutif examine les cas de
non-respect de la Convention (ou les motifs de doute et de préoccupation
quant au respect de la Convention). Dans ces circonstances, le Conseil
exécutif est habilité à demander à un Etat-Partie
de "prendre des mesures pour redresser la situation dans des délais
fixés" (article VIII - 36) et, le cas échéant, il peut
porter le problème à l'attention de la Conférence, voire,
dans les cas les plus graves et les plus urgents, saisir le Conseil de
sécurité des Nations unies et l'Assemblée
générale des Nations unies.
La composition du Conseil exécutif est fondée sur des
critères géographiques. L'Afrique est ainsi
représentée par neuf Etats, de même que l'Asie. L'Europe
orientale dispose de cinq sièges, la région Amérique
latine-Caraïbes, de sept sièges. La catégorie "Europe
occidentale et autres Etats", est représentée par dix Etats
Parties. Selon le paragraphe 23 de l'article VIII, il n'est pas
nécessaire qu'un Etat dispose d'une industrie chimique importante pour
siéger au Conseil exécutif.
La composition du Conseil exécutif désigné par la
Conférence le 12 mai 1997
est la suivante :
-
Afrique
: Afrique du Sud, Algérie, Kenya, Maroc, Cameroun,
Côte d'Ivoire, Ethiopie, Tunisie, Zimbabwe ;
-
Asie
: Bangladesh, Oman, Philippines, Sri Lanka, Arabie
Saoudite, Chine, Japon, Inde, république de Corée ;
-
Europe orientale
: Belarus
16(
*
)
, Bulgarie, Roumanie, Hongrie, Pologne ;
-
Amérique latine et Caraïbes
: Equateur, Pérou,
Uruguay, Argentine, Brésil, Chili, Mexique ;
-
Europe occidentale et autres Etats
: Australie, Espagne, Malte,
Norvège, Pays-Bas, Allemagne, Etats-Unis, France, Italie, Royaume-Uni.
c) Le Secrétariat technique
Le Secrétariat technique "aide la Conférence et
le Conseil exécutif dans l'accomplissement de leurs fonctions" (article
VII - 37). Il fournit un
appui administratif et technique
à la
Conférence et au Conseil exécutif, ainsi qu'aux organes
subsidiaires. Il établit le projet de budget de l'OIAC, qu'il
présente au Conseil exécutif, ainsi que le projet de rapport sur
l'application de la Convention. Le Secrétariat technique informe le
Conseil exécutif "de toute difficulté qu'il a pu rencontrer dans
l'exercice de ses fonctions, y compris des doutes, ambiguïtés ou
incertitudes quant au respect de la convention qu'il a constatés dans
l'exécution de ses activités de vérification".
La
conduite des vérifications et inspections
constitue, en
effet, la principale responsabilité du Secrétariat technique,
dont le personnel a le statut de fonctionnaire international.
L'organigramme du Secrétariat technique comprend quatre services :
vérification, coopération technique et assistance,
administration, et relations extérieures. La
Direction de la
Vérification
est dirigée par un expert français. Les
principaux pays pourvoyeurs d'inspecteurs sont les suivants :
Hollande : 16 inspecteurs ;
Inde : 16 inspecteurs ;
Royaume-Uni : 12 inspecteurs ;
Etats-Unis : 11 inspecteurs ;
Chine : 7 inspecteurs ;
Pologne : 7 inspecteurs ;
Canada : 6 inspecteurs ;
France : 6 inspecteurs ;
Brésil : 5 inspecteurs ;
Irlande : 5 inspecteurs.
Quatre inspecteurs sont également originaires de chacun des pays
suivants : Roumanie, Afrique du Sud, Allemagne, Finlande,
Nouvelle-Zélande, et République tchèque.
d) Le budget de l'OIAC
Adopté par la Conférence des Parties, le budget
de l'OIAC est alimenté par les quotes-parts des Etats. Celles-ci sont
assises sur un barème
17(
*
)
très comparable à celui des contributions au budget des Nations
unies, et non fondées sur la responsabilité
présumée des différents Etats dans la prolifération
chimique.
Ainsi les
dix premiers contributeurs
au budget de l'OIAC sont-ils :
- les Etats-Unis (25 %) ;
- le Japon (16,3 %) ;
- l'Allemagne (9,4 %) ;
- la France (6,69 %) ;
- le Royaume-Uni (5,5 %) ;
- l'Italie (5,4 %) ;
- la Russie (4,4 %) ;
- le Canada (3,2 %) ;
- l'Espagne (2,4 %) ;
- le Brésil (1,6 %).
Les quotes-parts les plus faibles (0,01 % du budget de l'OIAC) concernent
quelque 39 Parties (Côte d'Ivoire, Seychelles, Sri Lanka, Jordanie,
Kenya, Ethiopie, Cameroun, Costa Rica, Niger,
Papouasie-Nouvelle-Guinée...).
Le budget de l'OIAC ne finance pas la destruction des armes chimiques et des
installations de fabrication, dont le coût est à la charge des
Etats propriétaires ou détenteurs. De même les
opérations de vérification mises en oeuvre dans le cas
d'inspections de routine sont-elles financées par les Etats faisant
l'objet de ces visites.
Le budget de l'OIAC pour 1998, qui s'élève à quelque 122
millions de florins, a été adopté au cours de la
deuxième Conférence des Parties, réunie à La Haye
entre le 1er et le 4 décembre 1997.