RAPPORT N° 219 - PROJET DE LOI, ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE, AUTORISANT LA RATIFICATION DE L'ACCORD INTERNE RELATIF AU SECOND PROTOCOLE FINANCIER DE LA QUATRIEME CONVENTION ACP-CE, PROJETS AUTORISANT LA RATIFICATION DU PROTOCOLE ET DE L'ACCORD
Mme Paulette BRISEPIERRE, Sénateur
COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES, DE LA DEFENSE ET DES FORCES ARMEES - RAPPORT N° 219 - 1997/1998
Table des matières
- I. LOMÉ : UN MODÈLE EN QUESTION
- II. LA RÉVISION À MI-PARCOURS : DES AMÉNAGEMENTS UTILES EN-DEÇÀ DES RÉFORMES NÉCESSAIRES
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
- PROJET DE LOI
- PROJET DE LOI
- PROJET DE LOI
N° 219
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 14 janvier 1998
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères,
de la défense et des forces armées (1) sur :
- le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant
la
ratification
de l'
accord
interne
entre les représentants des gouvernements des Etats membres,
réunis au sein du Conseil relatif au
financement
et
à la
gestion
des
aides
de la
Communauté dans le cadre du
second
protocole
financier
de la
quatrième
convention
ACP-CE
,
- le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant
la
ratification
du
protocole
à la
quatrième
convention
entre la
Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le
groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part
(dite
convention ACP-CE de Lomé
), à la suite de
l'adhésion de la République d'Autriche, de la République
de Finlande et du Royaume de Suède à l'Union européenne,
- le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant
la
ratification
de l'
accord
portant modification de
la quatrième convention entre la Communauté européenne et
ses Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats d'Afrique, des
Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite
convention ACP-CE de
Lomé
),
Par Mme Paulette BRISEPIERRE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM. Xavier
de Villepin,
président
; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet,
François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton,
vice-présidents
; Michel Alloncle, Jean-Luc
Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë,
secrétaires
; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet,
Jean-Luc Bécart, Jacques Bellanger, Daniel Bernardet, Pierre
Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette
Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique
Cerisier-ben Guiga, MM. Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre
Croze, Marcel Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André
Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure,
Philippe de Gaulle, Daniel Goulet
,
Jacques Habert, Marcel Henry,
Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune,
Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Mme Lucette
Michaux-Chevry, MM. Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard
Plasait, Régis Ploton, André Rouvière, André Vallet.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
4
,
5
,
6
,
484
et T.A.
58
,
57
,
56.
Sénat
:
197, 198 et 199
(1997-1998).
Traités et conventions.
Mesdames, Messieurs,
La relation privilégiée nouée entre les membres de l'Union
européenne et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du
Pacifique (71 pays aujourd'hui compte tenu de l'adhésion, en 1997, de
l'Afrique du Sud) n'a cessé d'évoluer au fil des années
à la faveur de la renégociation périodique de la
première convention de Lomé signée en février 1975.
Les trois textes soumis à notre Haute Assemblée constituent la
dernière adaptation majeure du dispositif avant le deuxième
millénaire. Ils n'ont toutefois pas la même portée : si le
premier se borne à prendre en compte les conséquences de
l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède à
l'Union européenne, le second procède à la révision
à "mi parcours" de la quatrième convention de Lomé
(1990-2000) ; le troisième, enfin, fixe dans le cadre d'un accord
interne entre les membres de l'Union européenne, le protocole financier
destiné à couvrir la période 1995-2000.
Deux ans après la signature de ces accords, l'examen de ceux-ci par le
Sénat se présente de façon quelque peu paradoxale. D'une
part, la France se distingue comme l'un des derniers Etats membres de l'Union
européenne
1(
*
)
à n'avoir pas
encore ratifié des accords auxquels elle a pourtant apporté une
contribution décisive. En particulier, faute de ratification, le
protocole financier n'a pu entrer en vigueur et l'action de l'Union
européenne en faveur de ses partenaires du Sud pourrait ainsi se trouver
privée de moyens au début de l'année 1998. A l'inverse,
l'accord portant modification de la quatrième convention de Lomé
est entré en vigueur dès janvier 1996, ce qui naturellement
limite l'impact de la procédure de ratification. Enfin, et surtout, ces
accords seront remis en cause en l'an 2000, à l'échéance
de l'actuelle convention de Lomé IV : à cette date, la relation
entre l'Union européenne et les pays d'Afrique, des Caraïbes et du
Pacifique sera entièrement redéfinie ; les discussions portent
aujourd'hui précisément sur les principes fondateurs d'un nouveau
partenariat.
Cependant, les questions soulevées au moment de la renégociation,
en 1995, de la convention de Lomé IV préfigurent en partie le
débat sur les orientations des relations entre l'Union et les pays ACP.
La première interrogation porte sur l'effort que les Quinze sont
prêts à consentir en faveur des pays du Sud. La part des
financements accordés aux pays ACP a décru continûment au
cours des dernières années au sein de concours extérieurs
communautaires (Asie, Amérique latine, Méditerranée, Phare
et Tacis) :
elle représentait 65 % de l'enveloppe globale en 1990
mais 33,5 % seulement en 1997
.
Quels doivent être, en second lieu, les objectifs de notre aide ? Cette
interrogation générale appelle une réflexion sur
les
moyens mis en oeuvre
, le régime des préférences
commerciales accordé, le champ géographique de l'aide et
l'éventuelle différenciation en fonction de la situation des pays
intéressés ...
La nature et le contenu de l'accord qui sera signé en 2000
détermineront de façon décisive les relations entre
l'Europe et les pays du Sud. L'enjeu est essentiel non seulement pour les ACP
mais aussi pour les Quinze et le rôle de l'Europe dans le monde.
C'est dans cette perspective que les trois accords qui sont soumis à la
Haute Assemblée doivent être examinés. C'est pourquoi votre
rapporteur évoquera d'abord les principaux enjeux de la relation
ACP-Union européenne avant d'analyser le dispositif des accords dont
certains aspects peuvent apporter des éclairages utiles sur les
orientations que prendront les négociations sur un nouveau partenariat
Nord-Sud.
I. LOMÉ : UN MODÈLE EN QUESTION
A. LE BILAN NUANCÉ DES ACCORDS DE LOMÉ
1. Une coopération aux objectifs ambitieux
La coopération mise en place dans le cadre de la
convention de Lomé demeure sans exemple dans le monde. Trois traits au
moins singularisent en effet les modalités d'aide au
développement mises en place :
- la place essentielle qui revient à la
concertation
entre les
deux groupes de pays -dans le cadre de l'Assemblée paritaire ou du
Conseil des ministres UE-ACP- pour définir les modalités de
coopération ;
- la définition
d'une coopération prévisible et
durable
à travers une
programmation pluriannuelle de l'aide
;
- l'utilisation
d'un large éventail d'instruments au service de
l'aide au développement
allant d'un régime commercial
très libéral à la stabilisation des recettes
d'exportations de certains produits de base, en passant par l'octroi d'une aide
généreuse.
Il n'est pas inutile de revenir ici sur les moyens d'une aide dont les
principales modalités font aujourd'hui l'objet d'une remise en cause.
a) Un dispositif original
.
Un régime commercial très libéral
Les pays ACP bénéficient, pour la quasi-totalité des
exportations, du libre accès au marché européen
sans
obligation de réciprocité
.
Le principe des règles d'origine qui peut conduire à limiter
sérieusement l'avantage procuré par la franchise des droits
s'entend dans le cadre de l'accord de Lomé de façon très
souple. En effet, tandis que dans le droit commun un produit composé de
plus de 10 % de produits étrangers perd les bénéfices
d'une exemption douanière, un produit ACP constitué à
hauteur de 45 % d'éléments d'origine communautaire ou provenant
d'un autre pays ACP conserve l'avantage douanier qui lui est consenti. En
outre, plusieurs protocoles annexés à la convention de
Lomé IV prévoient des dispositifs très favorables pour des
produits tels que la banane, le sucre, le rhum ou la viande bovine, dont la
part dans les échanges de certains pays ACP peut revêtir une place
essentielle.
.
Les mécanismes de stabilisation de recettes à
l'exportation
Ces mécanismes de stabilisation de recettes d'exportation des produits
de base agricoles (Stabex) ou d'aide au rétablissement de la
viabilité du secteur minier (Sysmin) constituent de réelles
innovations par rapport au seul régime des préférences
commerciales.
Le Stabex permet de compenser par des aides financières directes (depuis
1990, il s'agit exclusivement de dons) les pertes de recettes imputables aux
fluctuations de prix ou de quantités des produits agricoles
exportés vers les Etats membres de la Communauté.
Cet appui financier se concentre principalement sur une dizaine de produits :
café, cacao, coton, thé, arachide, oléagineux et banane.
De fait, ces aides bénéficient à une demi-douzaine de
grands pays exportateurs. Les fonds, dont l'affectation relève
désormais d'une décision concertée dans un " cadre
d'obligations mutuelles ", bénéficient à la
réorganisation des filières de production et d'exportation et
à la mise en place de stratégies de diversification
économique.
L'Ouganda, le Cameroun, la Côte-d'Ivoire, l'Ethiopie, le Kenya et la
Papouasie Nouvelle-Guinée, ont reçu l'essentiel des ressources
attribuées au titre du Stabex.
Le Sysmin destiné à l'origine à restaurer la
" viabilité économique des entreprises minières en
situation de crise temporaire ", permet aujourd'hui d'accorder sous
forme
de dons (depuis Lomé IV) une aide aux Etats demandeurs dont les
exportations minières -pour sept produits : bauxite/aluminium,
cuivre/cobalt, fer, étain, phosphates, manganèse, uranium-
représentent plus de 15 % de leurs recettes d'importation (10 % pour les
pays les moins avancés). Ces subventions peuvent être
rétrocédées sous forme de prêts à des
sociétés d'exploitation minière pour leur modernisation ou
l'amélioration de leur rentabilité.
b) Des ressources financières importantes
Le
Fonds européen de développement
(FED)
alimenté par des contributions spécifiques des Etats-membres
constitue l'outil financier majeur de la coopération UE-ACP. Les
ressources sont accordées pour une période de cinq ans. Ainsi,
depuis sa création en 1958, sept protocoles financiers se sont
succédé. Ils représentent un montant de 28,6 milliards
d'écus sur une période de 35 ans. Jusqu'en 1995, ces ressources
étaient allées croissantes. Ainsi, le 7e FED (1990-1995) -avec
10,8 milliards d'écus- enregistrait une progression de 38 % en valeur
nominale et 18 % en valeur réelle par rapport au 6e FED. Les dons
représentent près de 92 % des fonds -un niveau très proche
du premier FED après une légère érosion à la
suite du 5e FED -72 %- (Lomé II) et 75 % du 6e FED (Lomé
III).
Les concours financiers recouvrent deux volets :
- d'une part,
l'aide programmable
-les Programmes indicatifs nationaux
(PIN) ou Programmes indicatifs régionaux (PIR)- destinée à
fixer pour chaque Etat -ou région- les projets de développement
et l'enveloppe financière subséquente ;
- d'autre part
l'aide non programmable
consentie au cas par cas et en
fonction des besoins. Dans ce cadre, le Sysmin, le Stabex mais aussi les aides
humanitaires d'urgence constituent les principaux instruments financiers
sollicités.
Les financements accordés dans le cadre du FED prennent presque
toujours, désormais,
la forme de dons
. Toutefois les pays ACP
bénéficient également d'une assistance de la Banque
européenne d'investissemernt (BEI) accordée sous la forme de
prêts consentis à partir des ressources propres de la banque ou de
capitaux à risques
2(
*
)
.
Par ailleurs, l'aide repose également en partie sur le budget annuel des
Communautés européennes, qu'il s'agisse de l'aide alimentaire ou
de l'appui aux réformes institutionnelles.
L'aide communautaire représente aujourd'hui 10 % environ de l'aide
publique au développement
à l'échelle du monde et, si
l'on y ajoute les contributions accordées par chacun des Etats membres,
50 % de l'aide totale
provenant des pays industrialisés et
60
% de l'aide apportée à l'Afrique subsaharienne.
Sans cette
contribution accordée -il faut encore le souligner- principalement sous
forme de dons, de nombreux projets n'auraient sans doute jamais vu le jour.
Toutefois, au regard de l'ampleur des moyens mis en oeuvre, les
résultats peuvent paraître décevants.
2. Des résultats en-deçà des espérances
a) Une situation économique fragile
En premier lieu, la coopération européenne n'a
pu prévenir
le mouvement de marginalisation économique et
commerciale de l'Afrique.
Comme le soulignait une étude récente
3(
*
)
le
revenu par habitant en Afrique subsaharienne n'a
progressé que de 0,4 % par an entre 1960 et 1992, contre 2,3 % sur la
même période pour l'ensemble des pays en développement. En
conséquence un écart de l'ordre de 1 à 4 sépare
désormais le produit par tête de l'Afrique de celui des autres
pays en développement.
Si l'investissement étranger direct dans les pays en
développement a atteint un niveau record en 1996 -109 milliards de
dollars, soit quatre fois plus qu'au début de la décennie- ces
flux ont bénéficié à un nombre restreint de pays
(73 % des investissements ont profité à moins de douze pays). La
Chine a ainsi reçu à elle seule 52 milliards de dollars.
L'Afrique subsaharienne pour sa part a bénéficié d'un flux
de capitaux privés inférieurs à 11 milliards de dollars.
Encore ces investissements n'ont-ils profité qu'à une
minorité d'Etats -principalement le Nigéria et les pays d'Afrique
australe. Le désintérêt des investisseurs étrangers
apparaît d'autant plus préoccupant qu'il s'est conjugué
avec
la désaffection continue des bailleurs de fonds publics.
En effet, l'aide publique au développement s'est encore réduite
en 1996 (55,1 milliards de dollars contre 58,8 milliards de francs en 1995) et
représente moins de 0,25 % du PNB de l'ensemble des pays donateurs de
l'OCDE
4(
*
)
.
En outre, le continent africain n'a pas réellement participé au
développement des échanges internationaux. La part de l'Afrique
subsaharienne dans le commerce mondial ne dépasse pas 2 %. Par ailleurs,
les pays ACP ne sont pas vraiment encore parvenus à diversifier leurs
exportations fondées, à hauteur de 80 %, sur les produits
primaires (14 produits primaires représentent 71 % des exportations ACP).
Au-delà même de la faiblesse du bilan économique des pays
ACP,
l'évolution des échanges entre les deux zones ACP-UE
s'est révélée décevante
. Certes,
l'étroitesse des liens entre les deux ensembles a pu être
préservée :
le marché européen représente
41 % des recettes d'exportation des Etats ACP
(cette dépendance
apparaît plus élevée pour l'Afrique -46 %- que pour les
Caraïbes -18 %- et le Pacifique -23 %-).
Paradoxalement, cependant, les exportations de la zone ACP vers l'UE ont moins
progressé que les exportations des Etats en développement non ACP
(respectivement + 5,7 % contre 13 % sur la période 1986-1992). Ainsi,
les parts de marché des pays ACP en Europe se sont
dégradées continûment
au cours des dernières
décennies (de 6,7 % à 2,8 % entre 1996 et 1994).
b) L'affaiblissement progressif du principe du partenariat
L'esprit même de la coopération UE-ACP a tendu
à s'altérer au fil du temps. D'une part, si par souci
d'efficacité la Communauté s'est montrée de plus en plus
directive, le rythme de décaissement des crédits affectés
à la coopération est resté marqué par une lenteur
excessive.
En effet, le principe de contractualité qui commandait l'organisation
des relations UE-ACP a perdu sa force originelle sous l'effet d'une double
évolution. En premier lieu, comme le soulignait le livre vert, sur les
relations Union européenne/ACP, publié au début de
l'année 1997, l'" interventionnisme " des instances
communautaires les a conduits parfois à se substituer au partenaire
défaillant.
Par ailleurs, la part accrue accordée aux critères de
conditionnalité s'est accompagnée d' " un retrait de
responsabilité de la part des pays bénéficiaires, dans la
mesure où les conditions imposées, liées aux
critères appliqués par les institutions de Bretton Wood, ont pu
être trop spécifiques, trop nombreuses ou trop formalistes ".
A titre d'exemple près de 10 % de la dotation programmable de
Lomé IV se sont trouvés gelés en 1993 (soit 6 milliards de
francs) compte tenu de la situation politique dans six Etats ACP. Ces facteurs
d'ordre politique n'expliquent cependant qu'en partie les longs délais
d'exécution des opérations du FED. En 1989, au moment de la
signature de Lomé IV, seuls 29 % des crédits prévus
dans le cadre de Lomé III (1986-1990) avaient été
effectivement dépensés.
Ces délais traduisent les difficultés de fonctionnement d'un
système d'aide dont certains éléments appellent
aujourd'hui une remise en cause.
B. LA NÉCESSAIRE REDÉFINITION DE LA POLITIQUE DE COOPÉRATION EUROPÉENNE
La convention de Lomé n'a pas vraiment enrayé le phénomène de marginalisation économique de l'Afrique subsaharienne. Par ailleurs les instruments mis en place ne se sont pas toujours montrés pleinement efficaces comme en témoigne la consommation ralentie des crédits. Il convient de s'interroger dès lors sur les raisons de ces insuffisances avant de prendre la mesure des adaptations nécessaires dans la perspective de la négociation d'un nouvel accord à l'horizon 2000.
1. Les raisons d'une déception
Certes les difficultés de la coopération européenne ne sauraient être mises sur le seul compte des instruments mis en place par la convention de Lomé.
a) Un environnement difficile
L'évaluation des politiques d'aide conduites par la
Communauté le montre, le contexte institutionnel et la politique
économique dans le pays bénéficiaire, ont souvent
représenté une contrainte majeure. Le livre vert ajoute :
" Même si un grand nombre de projets financés par l'UE se
révèlent pertinents et efficaces, comme c'est le cas pour la
plupart des projets d'infrastructures ainsi que pour les interventions dans les
secteurs sociaux, ils ne conduisent pas automatiquement à une
amélioration des indicateurs de développement au niveau national
(...). Ce constat, qui concerne tous le bailleurs de fonds, s'est traduit par
une tendance de l'aide internationale à se concentrer sur les pays
démontrant une capacité à l'utiliser de la manière
la plus efficace, c'est-à-dire actuellement dans les pays sous
ajustement structurel ".
Quels sont les facteurs déterminants de la croissance et les fondements
d'une confiance retrouvée chez les opérateurs économiques
? Un environnement politique et social stable, une gestion rigoureuse, un
système fiscal équilibré, le respect de l'Etat de droit :
autant de choix dont la responsabilité incombe principalement aux Etats
en développement.
Toutefois l'UE a-t-elle suffisamment cherché à agir sur ces
différents éléments dont la prise en compte apparaissait
nécessaire à une coopération équilibrée ?
Une vision d'ensemble des problèmes de développement a sans
doute manqué
, même si la Commission n'est pas, et de loin, le
seul bailleur de fonds à encourir ce reproche.
En outre,
l'impact des préférences commerciales
accordées par la Communauté s'est érodé
, non
pas du fait d'une insuffisance du dispositif de Lomé, mais bien
plutôt en raison de la libéralisation des échanges
organisée dans le cadre du GATT (Accord général sur les
tarifs douaniers et le commerce) d'abord, et depuis 1995 de l'Organisation
mondiale du commerce (OMC). Dans ce contexte, le maintien d'un régime,
fondé d'une part sur la non-réciprocité -interdisant
d'assimiler la convention à un accord de libre-échange-, et
d'autre part sur la discrimination vis-à-vis d'autres pays, ne repose
que sur une dérogation reconnue en 1994 par le GATT et applicable
juqu'au 29 février 2000, date d'expiration de la convention de
Lomé.
L'évolution des règles relatives au commerce mondial impose
d'ores et déjà une réflexion sur la définition des
nouvelles conditions nécessaires à la sauvegarde d'un
régime préférentiel -indispensable pour votre rapporteur-
en faveur de la zone ACP.
b) Les faiblesses du dispositif européen
Cependant la politique d'aide de l'UE n'est pas exempte de
reproches. La complexité des procédures, l'absence d'une vision
cohérente de l'aide au développement, l'insuffisance de la
coordination avec les autres bailleurs de fonds constituent les principaux
défauts du dispositif européen et de son application.
La complexité du dispositif européen
ne favorise
guère la transparence : avant sa révision, la convention de
Lomé ne comprenait pas moins de 369 articles et de 9 protocoles. Les
Etats ACP peuvent se trouver relativement démunis devant un tel
" maquis " : certaines ONG ont d'ailleurs développé une
activité de familiarisation des pays intéressés aux
instruments de la convention, ainsi qu'une aide à la mise en forme des
projets.
En outre, comme le soulignait d'ailleurs notre collègue Michel Charasse
dans son rapport sur le projet de budget du ministère de la
coopération pour 1997, il convient de déplorer l'absence d'une
politique communautaire d'aide au développement réellement
planifiée. Soumises aux pressions souvent divergentes des Etats-membres,
les instances communautaires tendent à ajouter les mesures
particulières les unes aux autres au risque de compromettre la
cohérence de son action. Aussi apparaît-il indispensable de
définir des orientations politiques précises à
l'échelle du conseil européen et de fixer " des directives
claires et détaillées aux services de la Commission afin ensuite,
de pouvoir contrôler la mise en oeuvre de l'aide accordée par
l'Union européenne ".
Cette clarification des objectifs devrait favoriser par ailleurs une meilleure
coordination entre les différents bailleurs de fonds. Aujourd'hui cette
coordination indispensable en particulier entre l'UE et les principaux Etats
européens, apparaît globalement insuffisante. Elle est encore trop
laissée au hasard de la bonne entente -heureusement souvent
vérifiée- entre les représentants sur place des
différent contributeurs.
2. Quelle coopération pour l'an 2000 ?
A la faveur de la redéfinition d'un nouveau partenariat
à l'horizon 2000, les pays ACP et l'UE doivent tirer parti des
enseignements fournis par l'application de la convention de Lomé IV.
Dans cette perspective, il leur faut également tenir compte du contexte
international et de ses évolutions : la
mondialisation des
économies
mais aussi, fait décisif, la
différenciation croissante entre les pays en développement
au sein même du groupe des Etats ACP. Comme votre rapporteur l'a souvent
observé à l'occasion de l'examen du budget du ministère de
la coopération, l'image d'un continent africain à la
dérive ne reflète plus guère une réalité
devenue beaucoup plus complexe. Si l'Afrique centrale connaît encore une
situation très instable, la plupart des pays d'Afrique occidentale
-ceux, d'ailleurs où l'influence française apparaît la plus
forte- se sont engagés sur la voie des réformes et de
l'assainissement économique. Ces efforts ont porté leurs fruits :
le retour de la croisssance dans les pays de la zone franc l'atteste.
Le " Livre vert " élaboré par un groupe de
réflexion au sein de la Commission européenne en novembre 1996 a
permis d'esquisser quelques pistes intéressantes pour définir un
partenariat UE-ACP réformé. Ce document servira de base au projet
soumis par la Commission au Conseil dans la perspective de la
négociation d'un mandat, au premier semestre 1998, sous
présidence britannique.
a) Les orientations proposées par la Commission
Le Livre vert retient quatre orientations majeures :
- la recherche d'une
dimension politique forte
; le dialogue avec les
Etats ACP doit contribuer d'une part, à répondre aux objectifs de
la politique étrangère et de sécurité commune
(PESC), en particulier dans le domaine de la prévention des conflits et
d'autre part, assurer la cohérence du cadre politique et des actions
conduites en faveur du développement économique ;
-
le recentrage des politiques communautaires sur la lutte contre la
pauvreté
à travers un effort accru en faveur des politiques
sociales et en direction des acteurs de la société civile et du
secteur privé ;
-
une meilleure prise en compte des spécificités
régionales
avec la conclusion d'accords régionaux ou
sous-régionaux fondés sur la mise en place progressive, sur trois
ans d'avantages commerciaux réciproques dans la perspective d'une
libéralisation à terme des échanges (la
différenciation entre ACP recherchée par la Commission reposant
alors essentiellement sur le niveau de réciprocité
concédé).
-
la simplification des instruments de l'aide
par la constitution de
trois enveloppes regroupant plusieurs instruments existants (en particulier, la
compensation des pertes de recettes à l'exportation -Stabex- dont le
principe pourrait être préservé), et une mise en oeuvre
dans le cadre d'une
programmation glissante
pour tenir compte à
la fois de l'évolution des besoins et des orientations adoptées
par les pays bénéficiaires.
b) L'aide : dimension indispensable du nouveau partenariat
Si la nécessité d'une réforme du
dispositif de Lomé ne fait pas de doute, elle ne doit toutefois pas
conduire à renoncer à la dimension essentielle de notre
partenariat : l'aide au développement.
Pour votre rapporteur, cet impératif suppose le maintien des trois
éléments dont l'union fait à la fois l'originalité
et la force de Lomé : un dialogue politique étroit, un
régime commercial préférentiel et une aide publique au
développement importante. Il n'est sans doute pas inutile de rappeler ce
principe au moment où certains de nos partenaires européens
pourraient être tentés par une " banalisation " de la
relation UE-ACP, considérée sous le seul angle commercial. Or le
volet commercial, certes essentiel, n'a pas vocation à éclipser
les deux autres dimensions de l'accord de Lomé. En outre, l'approche
commerciale, elle-même, ne saurait se résumer à la
recherche exclusive du libre-échange.
La sauvegarde d'un élément préférentiel en
particulier pour les pays les moins avancés apparaît primordiale.
L'approche intégrée propre à l'accord de Lomé
répond aux besoins des économies en développement et
à ce titre, elle mérite de perdurer.
Par ailleurs, la cohésion du groupe formé par les Etats ACP doit
être préservée. En effet, ces Etats ont pris
progressivement conscience de leurs intérêts communs. Le sommet
ACP de Libreville en novembre 1997 en a apporté le témoignage.
Cette cohésion constitue incontestablement un facteur d'influence dans
les négociations commerciales à l'échelle mondiale
où les intérêts des pays en développement ne sont
pas toujours reconnus. L'Europe peut se flatter d'avoir favorisé une
telle évolution. Cet acquis doit être sauvegardé. C'est
pourquoi il est important d'inscrire le partenariat UE-ACP dans le cadre d'un
accord global commun. Ce cadre commun ne fait pas obstacle à la
signature d'accords complémentaires négociés sur une base
régionale dont la nécessité s'impose au contraire pour
tenir compte des différences de situations économiques des pays
bénéficiaires de l'aide européenne.
D'une manière différente, mais avec un résultat
comparable, l'extension du champ géographique de la convention pourrait
provoquer un effet de dilution et menacer l'esprit de cohésion
indispensable au partenariat UE-ACP.
Votre rapporteur insistera sur deux autres orientations. La dimension politique
du partenariat doit, certes, être renforcée mais elle suppose
parallèlement une révision des conditions de mise en oeuvre de
l'aide. Actuellement, en effet, la communauté verse l'aide en plusieurs
tranches accordées sur la base d'indicateurs de performance très
détaillés et surveillés sur des périodes
rapprochées. Souvent, les gouvernements des Etats ACP souhaitent avant
tout satisfaire de façon formelle les conditions sans s'approprier
réellement les réformes entreprises. Par ailleurs comme le notait
l'étude sur Lomé précédemment citée, une
conditionnalité trop pesante place les bailleurs devant un dilemme :
" interrompre l'aide en raison d'un écart mineur par rapport au
programme convenu ou renoncer aux conditions ". Il ne s'agit certes
pas de
renoncer aux conditions mais d'en renforcer la crédibilité en
subordonnant les versements d'aide non aux engagements formels mais aux
résultats passés appréciés dans un équilibre
d'ensemble et évalués à des échéances
pertinentes pour prendre la mesure des efforts accomplis par le pays
bénéficiaire.
En second lieu, si la simplification des instruments et des procédures
de l'aide suggérée par le Livre vert apparaît en effet
nécessaire, elle doit s'accompagner d'un effort d'évaluation de
la coopération européenne et aussi et surtout, d'une meilleure
coordination de l'aide au sein de l'Union européenne (entre aides
bilatérales d'une part et aide bilatérale et multilatérale
d'autre part).
Telles sont les orientations qui, pour votre rapporteur, doivent guider la
négociation d'un nouveau partenariat.
II. LA RÉVISION À MI-PARCOURS : DES AMÉNAGEMENTS UTILES EN-DEÇÀ DES RÉFORMES NÉCESSAIRES
Les principales modifications apportées par les accords aujourd'hui soumis à l'examen du Sénat comportent un volet politique et commercial d'une part, financier d'autre part.
A. LE VOLET POLITIQUE ET COMMERCIAL : DES ADAPTATIONS NÉCESSAIRES
1. Une dimension politique renforcée
Le présent accord renforce la dimension politique du
partenariat UE-ACP. D'une part, il prévoit une clause de suspension de
l'accord avec l'Etat-membre où serait constatée une violation des
principes démocratiques ou des droits de l'homme. D'autre part, par
souci d'équilibre il vise à élargir le dialogue politique,
afin d'écarter le risque de décisions unilatérales.
S'agissant de la clause de suspension, l'accord procède en deux temps :
il fait d'abord du respect des droits un " élément essentiel
de l'accord " (art. 5) et institue ensuite une clause de suspension
partielle ou totale en cas de violation de l'un des principes fondamentaux
visés à l'article 5 (art. 366 bis).
a) Les bases du dialogue politique
Si la convention de Lomé reconnaissait
déjà " le respect des droits de l'homme comme un facteur
fondamental d'un véritable développement " et concevait la
coopération elle-même comme " une contribution à la
promotion de ces droits " (art. 5), la révision à
mi-parcours place " le respect des droits de l'homme, des principes
démocratiques et de l'Etat de droit " au rang d'
" élément essentiel de la présente convention ".
En outre, le présent accord ajoute la " bonne gestion des affaires
publiques " comme nouvel objectif de la coopération,
référence au principe de la " bonne gouvernance " que
la France, pour sa part, entend promouvoir dans le cadre de sa politique d'aide
au développement.
b) La clause de suspension : un cadre juridique clarifié
Un article additionnel à la cinquième partie de
Lomé (art. 366 bis) prévoit une suspension totale ou partielle de
la convention en cas de violation de " l'un des éléments
essentiels " visés à l'article 5 à la demande de
l'une des parties à la convention. il organise une procédure
consultative encadrée dans des délais rigoureux. Organisée
au plus tard quinze jours après qu'une partie aura invité l'autre
à examiner " de façon approfondie " la situation, la
consultation ne doit pas excéder trente jours.
Au terme de ces consultations -dont il est possible de se dispenser en cas
d'urgence-, une suspension totale ou partielle de la convention -même si
elle représente un " dernier recours "- peut être
décidée.
Certes, jusqu'alors, l'absence de base juridique n'avait pas
empêché l'UE de suspendre ou de geler l'aide au
développement mais les instances communautaires agissaient de
façon unilatérale sans procédure préalable et
donnaient prise, à ce titre, aux critiques des Etats ACP. En outre,
tandis que la suspension ne reposait sur aucune base assurée, la reprise
des relations restait également entourée d'un certain flou
juridique. Finalement une large place revenait aux initiatives de la
Commission, à l'exception des cas de suspension décidés
par le Conseil à la suite d'une position ou d'une action communes
adoptées par le Conseil des ministres dans le cadre de la politique
étrangère et de sécurité commune (PESC).
L'Etat de droit et la reconnaissance des droits de l'homme constituent un
élément fondateur de l'Union européenne. Il est donc
logique et souhaitable que l'Union cherche à promouvoir ces valeurs
fondamentales dans ses relations extérieures. Mais cette
" diplomatie des droits de l'homme ", si louables soient ses
intentions initiales, a parfois tenu lieu de politique étrangère
pour les Quinze et déguisait l'absence d'un véritable dessein
politique et d'une vision planifiée et concertée de l'aide au
développement.
A cet égard, il faut se réjouir de la volonté
affichée dans le préambule modifié de la convention de
Lomé de renforcer le dialogue politique et de l'ouvrir à des
" thèmes et problèmes de politique étrangère
et de sécurité ". L'expérience montre cependant que
le dialogue politique tend à s'enliser dans des procédures
excessivement lourdes. Gageons qu'il y a là un thème de
réflexion où la sagacité des négociateurs du
nouveau partenariat UE-Etats ACP pourra s'exercer pour favoriser,
au-delà des formules incantatoires, une efficacité plus grande.
De toute façon, pour l'heure, les Etats membres ne sont pas parvenus
à un accord sur les modalités internes de mise en oeuvre de
l'article 366 bis. Le débat porte sur le recours à la
majorité qualifiée pour les décisions de suspension ou de
reprise de l'application de Lomé. Aussi ce dispositif,
théoriquement entré en vigueur le 1er janvier 1996, n'a-t-il
été utilisé que
dans le cas du Niger (suspension du 1er
janvier au 1er juillet 1996).
Les décisions dans ce domaine continuent dès lors de relever des
procédures antérieures : une décision formelle du Conseil
(Gambie, Zaïre, Nigeria), un gel décidé par la Commission
(Soudan, Guinée équatoriale, Rwanda, Salomon, Togo). Les
améliorations attendues de la révision de la convention n'ont
donc pas eu, dans ce domaine, d'effets. La Commission conserve une large marge
d'appréciation et d'action. La situation juridique reste confuse et
appelle de rapides éclaircissements.
La révision à mi-parcours de la convention de Lomé a
également permis de renforcer la coopération commerciale entre
les partenaires du Nord et du Sud.
2. Un régime commercial amélioré
Les résultats économiques des Etats ACP
demeurent décevants malgré des réussites
indéniables mais limitées : dans l'ensemble ces pays souffrent
d'une trop faible compétitivité et d'une dépendance
excessive à l'égard de quelques produits de base. Dans le
même temps, les préférences commerciales accordées
dans le cadre de Lomé se sont érodées.
Le présent accord prend acte de ces insuffisances et tente d'y
remédier par deux voies principales : une amélioration du
dispositif institutionnel et la mise en place de nouveaux avantages commerciaux
Ces modifications, il faut le souligner, s'inscrivent dans un contexte
marqué par la libéralisation économique. Ainsi à la
priorité accordée à la protection de l'environnement et
à la conservation des ressources naturelles, il est significatif que le
nouvel accord ajoute la " promotion, dans les Etats ACP, d'un
environnement favorable au développement de l'économie de
marché et du secteur privé " (art. 6).
a) Un cadre institutionnel renforcé
Au titre des adaptations apportées au dispositif
institutionnel, il convient de mentionner principalement d'une part, les
modifications relatives au Centre de développement industriel et d'autre
part, les nouvelles modalités applicables au Stabex.
Le Centre de développement industriel (CDI) s'emploie à favoriser
la création, l'expansion et la restructuration d'entreprises
industrielles -principalement dans le secteur manufacturier et agro-industriel-
dans les pays ACP. Il cherche notamment à promouvoir les partenariats
entre entreprises ACP et entreprises européennes dans les domaines
technique, commercial ou encore dans la sous-traitance. A cette fin, le CDI
installé à Bruxelles mais doté d'antennes dans les Etats
ACP, bénéficie d'un financement assuré par le FED -73
millions d'écus dans le cadre du 8e FED.
En 1996, le CDI a soutenu quelque quatre cents projets sous la forme d'aide
à la conception de projets par la mise à disposition d'experts ou
de subventions non remboursables.
Le présent accord cherche à améliorer l'efficacité
de l'action du CDI à travers trois modifications principales (art. 87 et
89) :
- concentration des activités du CDI dans les pays ACP dont le programme
indicatif national place le développement industriel au rang d'axe
stratégique ;
- coordination renforcée entre la Banque européenne
d'investissements, le CDI et la Commission européenne ;
- les modalités de fonctionnement du CDI relèvent
désormais de la compétence du Comité des ambassadeurs et
non plus du Conseil des ministres UE/ACP.
Par ailleurs les accords de Maurice aménagent les modalités de
fonctionnement du mécanisme de stabilisation des recettes d'exportation
de produits de base non agricoles : ils précisent notamment les
conditions préalables de consultations entre l'UE et les Etats ACP pour
définir " les bases de transfert " à partir desquelles
sont calculées les compensations de pertes de recettes à
l'exportation (art. 203). Dans l'hypothèse où les ressources
financières prévues par le Stabex se révèleraient
insuffisantes, au-delà d'un abattement de 10 % applicable à tous
les transferts, aucune réduction supplémentaire ne s'applique
désormais aux pays ACP les moins développés ou
enclavés, contrairement à la situation réservée aux
autres pays ACP (art. 194).
Au-delà de ces aménagements d'ordre essentiellement
institutionnel, la convention prévoit en faveur des Etats ACP de
nouveaux avantages commerciaux.
b) De nouvelles concessions commerciales
Ces nouveaux avantages tiennent principalement d'une part,
à l'amélioration des concessions pour certains produits agricoles
et d'autre part, à l'assouplissement des principes relatifs aux
règles d'origine.
Entre les aspirations initiales des Etats ACP -une liberté
d'accès de l'ensemble des produits agricoles sur le marché
communautaire- et le souci légitime exprimé par plusieurs
Etats-membres de l'UE de protéger certains pans de leur production
agricole, un compromis a pu être établi autour de trois formules.
En premier lieu l'accord retient pour les produits ne bénéficiant
jusqu'ici d'aucune préférence, une réduction de 16 % des
droits de douane et prélèvements à l'exception de certains
produits méditerranéens (olive, vin, citron). Les
céréales et la viande de porc font l'objet d'une baisse de 50 %
de l'équivalent tarifaire (dans les limites de 15 000 tonnes pour les
céréales et de 250 tonnes pour la viande de porc).
La révision à mi-parcours de Lomé III a permis en second
lieu de transformer des contingents en plafonds et de doubler le contingents
pour certains produits (lait, fromage, poire, viande ovine, viande de volaille
et préparation à base de viande). Certains contingents ont
été maintenus, même si les droits applicables ont pu
être réduits comme pour le riz (de 15 %). Par ailleurs, les
quantités de référence ont été
supprimées sauf pour les oranges et les mandarines.
Enfin l'accord prévoit, s'agissant des produits
bénéficiant de préférences dans le cadre de
calendriers, de procéder à une baisse de 15 % des droits de
douane à l'extérieur de ces calendriers (sauf pour les produits
pour lesquels existe déjà une préférence à
l'extérieur de ces calendriers, ainsi que pour les fraises, les cerises
et les tomates notamment).
Deux types de production font l'objet d'une attention particulière : la
viande bovine et la banane.
S'agissant de la viande bovine, les contingents d'exportation sont
augmentés pour certains pays ACP tandis que les droits à
l'importation sont réduits de deux points supplémentaires -de 90
% à 92 %- afin de préserver l'avantage comparatif des pays
concernés après la signature des accords de Marrakech (protocole
n° 7).
Par ailleurs, la déclaration commune sur les bananes (annexe LXXXVIII)
témoigne du souci de prendre au compte les besoins liés à
la restructuration de ce secteur quand des " circonstances
extérieures " indépendantes de la volonté des pays
producteurs le justifient.
Cette déclaration ne satisfait toutefois qu'en partie les pays ACP
désireux que le système d'assistance spéciale mis en place
pour favoriser l'adaptation à la nouvelle organisation commune de
marché instaurée en juillet 1993 soit prolongée
au-delà de 1996.
La question paraît toutefois secondaire au regard des remises en cause
dont le régime commercial de la banane fait aujourd'hui l'objet. L'OMC a
en effet jugé incompatible avec les règles de droit international
le système de gestion des contingents tarifaires (répartition du
quota entre différents types d'opérateurs) et l'accord-cadre avec
quatre pays fournisseurs d'Amérique latine. Cette décision
souligne les difficultés que ne manquera pas de soulever le maintien
d'éléments préférentiels dans le nouvel accord
UE-ACP prévu pour l'an 2000.
Si les avantages commerciaux accordés aux Etats ACP sont ainsi
renforcés, l'UE maintient les clauses de sauvegarde que Lomé IV
lui avait reconnues. la Communauté peut ainsi prendre les mesures
nécessaires pour faire face aux " perturbations graves dans un
secteur d'activité économique de la Communauté ou d'un ou
de plusieurs Etats-membres ". Dans cette hypothèse elle notifie ces
mesures au Conseil des ministres UE/ACP sans toutefois être tenue d'en
préciser la durée et les modalités d'application comme le
supposait la rédaction initiale de l'article avant sa révision en
1995.
.
Les règles d'origine
La possibilité déjà admise de Lomé IV pour les pays
ACP d'inclure des éléments non originaires des ACP dans leurs
exportations vers la Communauté, tout en continuant à
bénéficier du régime préférentiel,
reçoit dans la présente convention, deux assouplissements
notables.
En premier lieu, la valeur autorisée d'éléments
extérieurs dans les exportations ACP passe de 10 % à 15 %
(protocole n° 1, titre 1, art. 5).
Ensuite, le cumul de l'origine est accordé à la demande des Etats
ACP aux pays en développement voisins, " apppartenant à une
entité géographique cohérente " (Algérie,
Egype, Libye, Maroc, Tunisie, Colombie, Costa-Rica, Cuba, El Salvador,
Guatemala, Honduras, Nicaragua, Panama, Vénézuela, Nauru). Cette
disposition, destinée à encourager le commerce régional
-élément décisif de l'intégration
économique- demeure toutefois strictement encadrée. Elle
apparaît soumise à des règles spécifiques en
particulier pour un secteur aussi sensible que le textile. En outre sa mise en
oeuvre reste conditionnée à la conclusion d'un " accord
définissant des procédures administratives adaptées,
propres à garantir une application correcte " du nouveau dispositif.
En dernier lieu, la Communauté augmente le contingent annuel
d'exportations de produits transformés à base de thon (longes et
conserves) -de 2 500 tonnes à 4 500 tonnes (dont 500 tonnes de longes)
bénéficiaires d'une dérogation automatique aux
règles d'origine (protocole n° 1, titre 1, art. 6).
En contrepartie de ces aménagements favorables aux Etats ACP, la
Communauté a obtenu de ses partenaires la reconnaissance des produits
des pays et territoires d'outre-mer (PTOM) comme produits originaires de la
Communauté afin de permettre aux PTOM d'accéder aux
marchés ouverts par les financements du FED dans les pays ACP. L'accord
rétablit l'équilibre avec les entreprises ACP habilitées
à participer aux marchés financés par le FED dans les PTOM
(déclaration commune ad art. 294).
Malgré leur importance, les aspects commerciaux connaissent dans un
contexte de libéralisation des échanges un impact limité.
Dès lors la coopération financière apparaît un
instrument déterminant de l'aide publique au développement. A cet
égard, l'accord revêt naturellement une importance
déterminante non seulement parce qu'il fixe l'enveloppe
financière du FED mais aussi parce qu'il aménage les
procédures d'intervention dans ce domaine.
B. UNE PARTICIPATION FINANCIÈRE RÉDUITE
1. La recherche de procédures d'intervention plus efficaces
Les principales modifications apportées par les accords de Maurice concernent les aides à l'ajustement structurel et les conditions de programmation de l'aide.
a) Les aides à l'ajustement structurel : une plus grande souplesse
Inspirés par la recherche d'une plus grande souplesse,
les principaux aménagements comprennent deux possibilités
nouvelles :
- un appui budgétaire direct pour les pays dotés d'une monnaie
convertible et librement transférable (pour les autres pays, le soutien
demeure indirect : il repose sur le recours aux programmes
généraux d'importation -art. 224 d) ;
- une aide à l'intégration régionale (harmonisation des
politiques économiques, réformes sectorielles à
l'échelle régionale, libéralisation des échanges et
des investissements) -art. 243.
b) La programmation financière : une plus grande marge d'appréciation pour la Commission
Les conditions d'affectation de l'aide dans le cadre du FED
ont été infléchies afin de laisser, par souci
d'efficacité, une plus grande marge de manoeuvre à la Commission.
Deux modifications principales ont été adoptées :
- la Commission ne garantit que 70 % des fonds qu'elle accorde pour la mise en
oeuvre des programmes indicatifs nationaux ou des programmes indicatifs
régionaux élaborés d'un commun accord entre la
Communauté et les Etats concernés ;
- la deuxième tranche -soit les 30 % restants de la dotation initiale-
n'est versée qu'à la suite d'une évaluation rigoureuse :
elle intervient trois ans après la signature du programme ou lorsque 80
% de la première tranche ont déjà été
engagés et prend en compte l'efficacité de la mise en oeuvre des
financements (taux d'engagement, respect des priorités affichées
dans le programme indicatif, projets envisagés dans le cadre de la
seconde phase du PIN, situation spécifique de l'Etat ACP
concerné).
Si cette évaluation ne se révèle pas probante, les fonds
non utilisés se trouvent dès lors employés au profit de
l'aide programmable des pays ayant réalisé de bonnes performances
ou, à défaut, de l'ajustement structurel ou de l'aide d'urgence
(art. 282).
Les modifications apportées par l'accord de Maurice aux conditions
d'attribution de l'aide financière comporte également deux
dispositions favorables aux pays les moins développés. En premier
lieu ces derniers bénéficient de 50 % de la moitié des
capitaux à risque gérés par la Banque européenne
d'investissement (soit 500 millions de francs au titre du 8e FED), art. 284.
Ensuite ils disposent d'une prime dans le mode de calcul des dotations au titre
du PIN.
Si les nouvelles modalités de financement constituent un volet important
du présent accord, les discussions se sont toutefois
cristallisées à l'occasion de la révision à
mi-parcours de la convention de Lomé sur le montant de l'aide
financière des Quinze et les conditions de sa répartition.
2. Une aide simplement maintenue en termes réels
Au prix d'un réajustement de la part respective des différents contributeurs et d'un effort financier particulier de la France, l'aide financière prévue dans le cadre du FED a pu être maintenue en termes réels.
a) Le rôle décisif de la France
Lomé I |
4e FED (1976-1980) |
3 450 millions d'écus |
Lomé II |
5e FED (1980-1985) |
5 700 millions d'écus |
Lomé III |
6e FED (1985-1990) |
8 500 millions d'écus |
Lomé IV |
7e FED (1990-1995) |
12 000 millions d'écus |
Lomé IV bis |
8e FED (1996-2000) |
13 000 millions d'écus |
La simple reconduction de la dotation du FED en termes
réels -12 967millions d'écus- alors même que le nombre
des donateurs est passé de 12 à 15, reste en-deçà
des attentes des pays ACP. Cependant le résultat n'en demeure pas moins
un succès au regard des contestations dont le FED avait
été l'objet de la part de nos partenaires européens. Au
premier rang des objections avancées contre un effort financier accru
figuraient la faible consommation des crédits constatée lors de
l'exécution du 7e FED, les difficultés rencontrées dans la
mise en oeuvre des projets de développement, les
préférences données à l'aide bilatérale,
enfin la nécessité partagée de réduire les
déficits budgétaires nationaux.
Or il convient de le rappeler, les fonds affectés au FED ne
relèvent pas du budget communautaire. Ils reposent sur des
contributisons nationales fixées selon une clé de
répartition ad hoc susceptible de remise en cause tous les cinq ans au
moment de la renégociation du FED. Ainsi l'Allemagne arguant des
priorités accordées à la politique de réforme des
pays d'Europe centrale et orientale, souhaitait obtenir une réduction
d'un tiers de sa contribution.
Par ailleurs l'ouverture de l'UE à de nouveaux pays soulève
quelques interrogations et contribue à distendre la relation originelle
entre UE et ACP. Certes ces pays et, au premier chef, la Suède,
apparaissent attachés à l'aide publique au développement.
Cependant leur situation géographique, l'absence de liens historiques
avec les Etats ACP, ne les conduisent pas à envisager le lien UE-ACP
sous un angle privilégié.
Or, si la lettre des traités d'adhésion ne contraint pas à
participer au FED, l'esprit des textes engage les nouveaux Etats-membres
à accepter les " acquis majeurs des actions extérieures de
la Communauté " comme le soulignait un rapport de la
Délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée
nationale
5(
*
)
. L'Autriche, la Finlande et la
Suède ont suivi cette logique. Le protocole soumis à l'examen de
notre assemblée prévoit ainsi l'adhésion de ces trois pays
à la convention de Lomé IV. La participation des nouveaux
Etats-membres repose sur le principe d'une contribution proportionnelle
à leur part au sein du PIB de l'UE.
L'effort financier de ces pays n'est pas toutefois apparu suffisant pour
compenser la volonté de désengagement manifestée par
plusieurs gros contributeurs au FED.
Aussi les négociations UE-ACP entamées en 1994 durent-elles
être suspendues jusqu'à l'obtention d'un accord sous
présidence française de l'Union européenne au Conseil
européen de Cannes (26 et 27 juin 1995) grâce à une
initiative diplomatique et financière de notre pays. La France en effet
est devenue le premier contributeur au FED tandis que la participation de
l'Allemagne et du Royaume-Uni, notamment, recule par rapport à l'effort
consenti dans le cadre du 7e FED.
Répartition de la contribution des pays membres aux 7e et 8e FED |
||
|
7e FED (%) |
8e FED (%) |
Allemagne |
25,97 |
23,37 |
Belgique |
3,96 |
3,92 |
Danemark |
2,07 |
2,15 |
Espagne |
5,90 |
5,85 |
France |
24,37 |
24,30 |
Grèce |
1,22 |
1,25 |
Irlande |
0,55 |
0,63 |
Italie |
12,96 |
12,54 |
Luxembourg |
0,19 |
0,29 |
Pays-Bas |
5,57 |
5,21 |
Portugal |
0,88 |
0,97 |
Royaume-Uni |
16,37 |
12,69 |
Suède |
- |
2,72 |
Autriche |
- |
2,64 |
Finlande |
- |
1,47 |
b) La répartition sectorielle du protocole financier
Le protocole financier (hors PTOM) porte sur une enveloppe de
12 967 millions d'écus, au titre du FED, répartis de la
façon suivante :
- 9 592 millions d'écus de subventions (dont 1 400 millions
d'écus pour l'ajustement structurel, 260 millions d'écus pour
l'aide d'urgence et aux réfugiés, 1 300 millions d'écus
pour la coopération régionale, ces derniers étant
partiellement affectés pour 73 millions d'écus au budget du CDI,
85 millions d'écus aux programmes régionaux de
développement du commerce, 80 millions d'écus pour l'appui
institutionnel),
- 1 000 millions d'écus pour les capitaux à risque,
- 1 800 millions d'écus pour le Stabex
- 575 millions d'écus pour le Sysmin
A titre de comparaison, les affectations du FED ont évolué de la
façon suivante depuis 1976 :
·
4e FED
(bilan des dépenses fin 1991) : 3,053 milliards
d'écus
- 2,114 milliards d'écus correspondent à l'aide non remboursable
(subventions dans le cadre de l'aide projet, bonifications
d'intérêts, aides d'urgence)
- 539 millions d'écus à l'aide remboursable (prêts
spéciaux, capitaux à risques)
- 390 millions d'écus au Stabex
·
5e FED
(bilan des dépenses fin 1993) : 4,198 milliards
d'écus
- 2,754 milliards d'écus correspondent à l'aide programmable
(subventions aux projets dans le cadre des PIN et des PIR)
- 1,428 milliard d'écus à l'aide non programmable (Stabex,
Sysmin, aide aux réfugiés, aide d'urgence capitaux à
risques, bonification d'intérêts)
- 14,6 millions d'écus aux reliquats transférés du 3e FED
·
6e FED
(sur les 7,509 milliards d'écus engagés
fin 1996)
- 4,896 milliards d'écus correspondent à l'aide programmable
- 2,514 milliards d'écus à l'aide non programmable
- 94 millions d'écus aux reliquats transférés du 4e FED
- 6 millions d'écus à des études relatives à
l'ajustement structurel
·
7e FED
(sur les 9,727 milliards d'écus engagés
fin 1996)
- 4,684 milliards d'écus correspondent à l'aide programmable
- 3,588 milliards d'écus à l'aide non programmable
- 1,104 milliard d'écus à la Facilité ajustement structurel
- 350 millions d'écus aux reliquats transférés du 5e FED.
Par ailleurs, le nouveau protocole financier prévoit également
que la BEI accordera sur ses ressources propres 1 658 millions d'écus de
prêts.
Enfin, l'accord interne relatif au financement des aides à la
communauté comprend également un volet consacré aux pays
et territoires d'outre-mer.
Ces derniers sont en effet associés à la Communauté par la
décision 91/482/CEE du Conseil du 25 juillet 1991, qui fait actuellement
l'objet d'une procédure de révision à mi-parcours. Cette
décision les rend éligibles au FED.
Le point b de l'article 2 de l'accord interne répartit les 165 millions
d'écus destinés aux PTOM entre les différents instruments
utilisés par l'Union dans le cadre du partenariat Lomé :
- 2,5 millions d'écus sous forme de facilité de financement
spéciale, en vertu des dispositions de la décision d'association
relatives aux produits miniers, équivalant au Sysmin
- 5,5 millions d'écus sous forme de transfert pour les PTOM, en vertu
des dispositions de la décision d'association relatives au
système de stabilisation des recettes d'exportation, équivalant
au Stabex
- 3,5 millions d'écus réservés à l'aide d'urgence
et à l'aide aux refugiés
- 10 millions d'écus réservés à la
coopération régionale, équivalant aux programmes
indicatifs régionaux des ACP
- 8,5 millions d'écus réservés au financement de
bonifications d'intérêts
- 105 millions d'écus réservés au financement de l'aide
programmable nationale, dans le cadre de programmes indicatifs pour chaque
PTOM, signés à la fois par les élus territoriaux, le
représentant de l'Etat membre concerné et un représentant
de l'Union.
Les capitaux à risques du Fonds sont gérés par la Banque
européenne d'investissement et se présentent sous la forme de
prêts ou de participations. Dans le cas des prêts, il s'agit
essentiellement de prêts subordonnés (remboursables après
le règlement des autres créances) ou conditionnels (assortis de
certaines conditions en terme de résultats escomptés du projet
financé). Dans le cas des prises de participation, il s'agit de prises
de participations minoritaires et temporaires, au nom de la Communauté,
au capital d'entreprises des PTOM, d'institutions finançant des projets
de développement ou favorisant et contribuant à financer les
investissements privés dans les PTOM. Ces dépenses du FED sont
remboursables aux Etats membres.
CONCLUSION
Les difficultés rencontrées au moment de la
révision de la convention de Lomé IV préfigurent sans
aucun doute les problèmes que soulèvera la négociation
d'un nouveau partenariat à l'approche de l'an 2000.
Les Etats membres de l'Union européenne ne partagent pas des positions
communes sur le contenu d'un accord avec les pays du sud. L'Allemagne insiste
sur le respect des principes posés par l'Organisation mondiale du
commerce. En fait, pour notre voisin d'outre-Rhin, la priorité politique
et financière doit s'attacher, dans les années à venir,
à l'intégration des pays d'Europe centrale et orientale à
l'Union. Le Royaume-Uni défend quant à lui dans le domaine
commercial, le maintien des préférences actuelles pendant une
période transitoire de cinq ans puis la mise en place d'un dispositif de
préférences généralisées pour l'ensemble des
pays en développement.
La spécificité de la relation nouée avec les Etats ACP
apparaît ainsi menacée.
La France doit s'efforcer pour sa part de sauvegarder le principe d'un lien
privilégié avec l'ensemble géographique formé par
les Etats ACP. En premier lieu, un premier bilan de l'application de la
quatrième convention de Lomé révisée apparaît
encourageant, comme en témoigne la récente progression des parts
de marché européen revenant aux pays ACP (de 2,8 % en 1994
à 3,8 % en 1996).
De même, pour la première fois depuis longtemps, l'Afrique a connu
pendant trois années consécutives une augmentation du produit
intérieur brut supérieure à la croissance
démographique.
Ensuite, notre pays a su intéresser nos partenaires européens au
développement d'un continent trop souvent négligé par les
grandes puissances. De ce point de vue les accords de Lomé constituent
un atout précieux pour la présence française en Afrique
mais aussi au-delà, pour le rayonnement de l'Europe dans le monde.
Le rôle que pourra jouer la France dans le maintien d'un partenariat
privilégié UE-ACP constituera à coup sûr un test de
l'influence de notre pays au sein des instances européennes.
A cet égard, notre pays n'a que trop tardé à ratifier les
trois accords liés à la convention de Lomé. C'est pourquoi
votre rapporteur vous invite à donner un avis favorable aux trois
présents projets de loi.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission des Affaires étrangères, de la
Défense et des forces armées a examiné le présent
rapport lors de sa réunion du mercredi 14 janvier 1996.
A l'issue de l'examen du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, a
rappelé ses préoccupations relatives à la baisse de
l'effort consacré par l'Union européenne au développement
des pays du Sud. Il s'est demandé si cette évolution pouvait
s'expliquer en partie par la dévaluation du franc CFA en 1994. Par
ailleurs, il a souhaité savoir si la clause de suspension de l'accord en
raison d'une violation des droits de l'homme avait déjà
été mise en oeuvre.
Mme Paulette Brisepierre a relevé que le désengagement relatif de
l'Union européenne vis-à-vis des Etats ACP s'expliquait
principalement par la priorité que certains pays et, en particulier,
l'Allemagne, accordaient désormais au soutien économique des pays
d'Europe centrale et orientale. Elle a par ailleurs précisé que
la décision de suspension de l'accord de Lomé avait
été mise en oeuvre du 1er janvier au 1er juillet 1996 au Niger.
M. Xavier de Villepin, président, MM. Charles-Henri de
Cossé-Brissac et André Rouvière ont alors
évoqué le problème de la dette bilatérale des pays
africains qui serait libellée en euros à la suite de la mise en
oeuvre de la monnaie unique au sein de l'Union européenne. Mme Paulette
Brisepierre a observé pour sa part que l'aide dispensée dans le
cadre du Fonds européen de développement prenait la forme de dons
et non de prêts.
M. André Rouvière a souhaité savoir si l'assouplissement
des règles d'origine ne conduirait pas à détourner les
principes posés par les accords de Lomé en élargissant les
avantages commerciaux à des pays n'appartenant pas à la zone ACP.
Mme Paulette Brisepierre a rappelé que la valeur autorisée
d'éléments extérieurs dans les exportations ACP ne devait
pas dépasser 15 % de la valeur totale du produit. Selon le rapporteur,
cette disposition devait permettre d'encourager le commerce régional et
l'intégration économique.
La commission a alors, suivant l'avis de son rapporteur, approuvé les
trois projets de loi qui lui étaient soumis.
PROJET DE LOI
(Texte adopté par l'Assemblée nationale)
Article unique
Est autorisée la ratification de l'accord interne entre les représentants des gouvernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil relatif au financement et à la gestion des aides de la Communauté dans le cadre du second protocole financier de la quatrième convention ACP-CE, fait à Bruxelles le 20 décembre 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi 6( * ) .
PROJET DE LOI
(Texte adopté par l'Assemblée nationale)
Article unique
Est autorisée la ratification du protocole à la quatrième convention entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite convention ACP-CE de Lomé), à la suite de l'adhésion de la république d'Autriche, de la république de Finlande et du Royaume de Suède à l'Union européenne, signé à Maurice le 4 novembre 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi 7( * ) .
PROJET DE LOI
(Texte adopté par l'Assemblée nationale)
Article unique
Est autorisée la ratification de l'accord portant modification de la quatrième convention entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite convention ACP-CE de Lomé), signé à Maurice le 4 novembre 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi 8( * ) .
1 Avec la Belgique, la Grèce et les Pays-Bas.
2
Participation directe au nom de la
Communauté européenne, concours en quasi-capital sous la forme de
prêts subordonnés ou de prêts conditionnels.
3
" L'avenir de Lomé : que peut l'Europe pour la
croissance de l'Afrique ? " Paul Collier, Patrick Guillaumont,
Sylviane
Guillaumont-Jeanneney et Jan Willem Gunning.
4
Source : cinquième rapport " Réalité de
l'aide " publié en novembre 1997 par les principales ONG des pays
de l'OCDE.
5
Patrick Hoguet : " La Convention de Lomé : un
modèle en danger " - Assemblée nationale, rapport
d'information n° 2070.
6
Voir le texte annexé au document AN (n°
4, 11e législature).
7
Voir le texte annexé au document AN (n° 5, 11e
législature).
8
Voir le texte annexé au document AN (n° 6, 11e
législature).