AVIS N° 90 Tome VIII - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - TERRITOIRES D'OUTRE MER


M. Jean-Marie GIRAULT, Sénateur


COMMISSION DES LOIS - AVIS n° 90 - TOME VIII - 1997/1998

Table des matières






N° 90

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VIII

TERRITOIRES D'OUTRE-MER

Par M. Jean-Marie GIRAULT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Robert Pagès, Georges Othily, vice-présidents ; Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Jean Derian, Michel Dreyfus-Schmidt, Michel Duffour, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud, Jean-Claude Peyronnet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich, Robert-Paul Vigouroux.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 230 , 305 à 310 et T.A. 24 .

Sénat : 84 et 85 (annexe n° 33 ) (1997-1998).

Lois de finances.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le 19 novembre 1997 sous la présidence de M. Michel Dreyfus-Schmidt, président d'âge, la commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. Jean-Marie Girault, les crédits consacrés aux territoires d'outre-mer par le projet de loi de finances pour 1998.

Outre les grandes lignes de l'effort budgétaire consenti en faveur des territoires d'outre-mer, elle a souhaité concentrer son attention d'une part, sur les évolutions politiques et institutionnelles de ces territoires, en particulier le déroulement des négociations sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, d'autre part, sur l'application des lois et les réformes normatives envisagées par le Gouvernement.

La commission des Lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés aux territoires d'outre-mer par le projet de loi de finances pour 1998.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Chaque année, l'examen du budget du ministère de l'outre-mer permet à votre commission des Lois d'exprimer son profond attachement à la protection des intérêts propres des territoires d'outre-mer au sein de la République et à la nécessité de garantir l'égalité des ressortissants de ces territoires et des ressortissants métropolitains devant la loi.

Les deux dernières années ont vu l'adoption par le Parlement de plusieurs textes d'importance pour les territoires d'outre-mer. La mise en oeuvre de ces réformes, la modernisation des liens d'association qui unissent ces territoires à l'Union européenne et les évolutions du dossier calédonien qui devra aboutir avant la fin de l'année 1998 sont autant de perspectives qui retiennent l'attention de votre commission des Lois.

Aussi se propose-t-elle, au-delà des grandes lignes de l'effort financier consenti par l'État en faveur des territoires d'outre-mer (I), de vous présenter les évolutions de la situation politique et institutionnelle de chacun d'eux (II) ainsi que les réformes normatives contribuant à la préservation de leurs intérêts spécifiques (III).

I. LES CRÉDITS CONSACRÉS AUX TERRITOIRES D'OUTRE-MER

A. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS

Selon le jaune annexé au projet de loi de finances pour 1998, les crédits alloués aux territoires d'outre-mer dans le budget de l'État au titre des dépenses ordinaires et des crédits de paiement (y compris les crédits non répartis et le coût de gestion des services métropolitains) s'élèvent au total à 10.548.174 milliers de francs, contre 10.420.665 milliers de francs dans le budget initial pour 1997, soit une augmentation de 1,2 %, légèrement inférieure à celle du budget général qui progresse de 1,4 %.

Les crédits consacrés aux territoires d'outre-mer dans le budget du ministère de l'outre-mer s'élèvent à 1.085.760 milliers de francs, soit un peu plus du cinquième de ce budget qui connaît globalement une forte progression de 7,3 %, laquelle bénéficie essentiellement aux départements d'outre-mer.

Cette part des crédits du budget du ministère de l'outre-mer représente près de 10,3 % de l'effort global consenti par le budget de l'État en faveur des territoires d'outre-mer. Quatre autres ministères, en effet, contribuent substantiellement à cet effort : le ministère de l'éducation nationale et de la recherche (42 %), le ministère de la défense (19 %), le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (12 %) et le ministère de l'intérieur (7 %).

Dans le budget du ministère de l'outre-mer, les crédits consacrés aux territoires d'outre-mer sont, depuis la révision de la nomenclature en 1996, répartis sous trois agrégats :

· L'agrégat Administration générale regroupe les crédits consacrés aux moyens de fonctionnement et au parc immobilier de l'administration centrale et des services déconcentrés du ministère de l'outre-mer, à la formation des agents, à l'action sociale, à l'assistance et à la solidarité en faveur des victimes de calamités naturelles. Les crédits figurant sous cet agrégat s'élèvent pour 1998 à 318.797 milliers de francs, soit une progression de près de 4,5 % par rapport au projet de loi de finances initiale pour 1997.

· L'agrégat Collectivités locales regroupe les subventions aux budgets locaux des territoires d'outre-mer et les subventions à la section décentralisée du FIDES (Fonds d'investissement pour le développement économique et social). Les crédits qui y sont inscrits s'élèvent à 115.690 milliers de francs, soit une diminution de l'ordre de 2,7 %.

· L'agrégat Développement économique et social regroupe les moyens d'intervention et les crédits d'investissement du ministère de l'outre-mer destinés à la mise en oeuvre de la politique de l'emploi, du logement social et du développement économique, dans le cadre des contrats de plan et des conventions de développement. Les crédits consacrés au financement de ces actions s'élèvent pour 1998 à 605.560 milliers de francs, en diminution là encore de près d'1,5 %.

Ces évolutions doivent être cependant relativisées du fait de transferts vers l'agrégat Administration générale de crédits en provenance, d'une part, du budget du ministère de la défense (4,2 millions de francs), et d'autre part, de l'agrégat Collectivités locales (près de 5 millions de francs).

B. LA RÉPARTITION DES CRÉDITS ENTRE LES TERRITOIRES

La répartition des crédits entre les quatre territoires, conformément aux données inscrites dans le jaune, indique le montant des dépenses ordinaires et des crédits de paiement affectés à chacun, hors crédits non répartis (2.392 milliers de francs en 1997 ramenés à 2.297 dans le projet de loi de finances pour 1998) et crédits correspondant au coût de gestion des services métropolitains (53.173 milliers de francs en loi de finances initiale pour 1997 ; 51.492 pour 1998).

Près de 58 % des crédits du budget de l'outre-mer vont à la Nouvelle-Calédonie, seule collectivité d'outre-mer à avoir échappé l'an dernier à la mesure d'étalement des contrats de plan sur une année supplémentaire. Plus de 32 % de ces mêmes crédits bénéficient à la Polynésie française. Seule la dotation affectée aux T.A.A.F. régresse, après un gel de crédits de 1,77 million de francs au cours de l'année 1997.

AFFECTATION DES CRÉDITS DU MINISTÈRE DE L'OUTRE-MER

(hors crédits non répartis et coût de gestion des services métropolitains)

Territoire

1997

1998

Nouvelle-Calédonie

583.429

598.238

Polynésie française

320.051

332.996

Wallis-et-Futuna

40.666

42.908

T.A.A.F.

58.110

57.829

TOTAL

1.002.256

1.031.971

(en milliers de francs)

VENTILATION PAR TERRITOIRE DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE GLOBAL CONSACRÉ AUX TERRITOIRES D'OUTRE-MER (hors crédits non répartis et coût de gestion des services métropolitains)

Territoire

1997

1998

Nouvelle-Calédonie

4.525.057

4.676.777

Polynésie française

5.323.905

5.283.985

Wallis-et-Futuna

298.854

309.963

T.A.A.F.

113.161

119.008

TOTAL

10.260.977

10.389.733

(en milliers de francs)

Comme les années précédentes, l'effort consenti par l'ensemble des ministères en faveur des territoires d'outre-mer bénéficie en premier lieu à la Polynésie française, bien que les crédits qui lui sont alloués pour 1998 soient en diminution par rapport à ceux inscrits dans la loi de finances initiale pour 1997.

II. LA SITUATION DE CHACUN DES QUATRE TERRITOIRES

A. LA NOUVELLE-CALÉDONIE

1. Les forces politiques en présence

Les consultations électorales intervenues au cours de l'année 1995 ont substantiellement modifié le paysage politique calédonien.

Si les élections municipales du mois de juin se sont caractérisées par une progression des indépendantistes (23 communes sur 33), les élections provinciales du 9 juillet se sont traduites par une perte d'influence des deux partis signataires des accords de Matignon, le RPCR (Rassemblement pour la Calédonie dans la République) et le FLNKS (Front de libération nationale kanak socialiste). Le RPCR a en effet perdu la majorité absolue au Congrès du territoire (22 sièges sur un total de 54, contre 27 lors des élections de 1989) et le FLNKS a obtenu 12 sièges (contre 19 précédemment).

Si MM. Jacques Lafleur (RPCR) et Léopold Jorédié (FLNKS) ont respectivement été reconduits à la présidence des assemblées de la province sud et de la province nord, M. Richard Kaloï (FLNKS) a dû céder celle de la province des Îles à M. Nidoish Naisseline (LKS), grand chef coutumier de Gwahma (Maré).

Élu en 1995 président du Congrès du territoire et reconduit dans cette fonction en juin 1996, M. Pierre Frogier (RPCR), député de la deuxième circonscription et maire du Mont-Dore (province sud) ne s'est pas représenté lors du renouvellement annuel de la présidence et du bureau, le 16 juillet 1997 . M. Harold Martin (RPCR), membre de l'assemblée de la province sud et maire de Païta lui a succédé. M. Rock Wamytan (FLNKS-UC) conserve la première vice-présidence. Au total, le RPCR obtient trois postes de vice-président de même que le FLNKS, tandis que l'UNCT (Une Nouvelle-Calédonie Pour Tous) conduite par M. Didier Leroux et le FDIL (Front de Développement des Îles Loyauté) en obtiennent chacun un.

Dès son élection, M. Harold Martin a réaffirmé l'attachement du RPCR aux accord de Matignon, sa volonté de passer à la nouvelle étape d'un accord négocié excluant l'indépendance pour 1998, et le soutien de son parti à la réalisation d'une usine métallurgique dans la province nord . Pour sa part, le président du FLNKS, M. Rock Wamytan, a estimé qu'il fallait poursuivre avec le RPCR dans le sens du partenariat, rendu nécessaire par l'ouverture prochaine des négociations politiques sur l'avenir institutionnel du territoire. Il cependant souligné la volonté des indépendantistes d'arriver à la table des négociations avec son projet d'un État en association avec la France .

A l'occasion des élections législatives du printemps 1997 , le FLNKS, considérant que ce scrutin présentait avant tout un intérêt hexagonal et que le découpage des deux circonscriptions était contraire à l'esprit des accords de Matignon a décidé de ne pas y participer et de ne pas donner de consigne de vote. Cette attitude est conforme à la charte du mouvement indépendantiste de 1984, excluant toute participation à des élections nationales. Le FLNKS avait cependant présenté des candidats aux élections sénatoriales de 1992 et aux élections législatives de 1993.

Dans la première circonscription, regroupant Nouméa, l'île des Pins et les trois communes de la province des Îles Loyauté, M. Jacques Lafleur (RPCR), député sortant, a été réélu dès le premier tour avec 63,7 % des suffrages exprimés. Son principal adversaire, M. Didier Leroux (UNCT) a obtenu un peu moins de 20 % des voix. Dans la seconde circonscription, qui recouvre les vingt-huit autres communes du territoire, M. Pierre Frogier (RPCR), député depuis le décès en novembre 1996 de M. Maurice Nenoupwataho, a été élu au deuxième tour de scrutin avec 60,99 % des suffrages exprimés. Au premier tour en effet, bien qu'ayant recueilli 56,70 % des suffrages exprimés, 112 voix lui avaient fait défaut pour atteindre le seuil du quart des électeurs inscrits.

2. Vers une reprise des négociations sur l'avenir institutionnel du territoire

La Nouvelle-Calédonie évolue, depuis 1988, dans le cadre des accords de Matignon-Oudinot signés le 26 juin qui ont permis d'assurer durablement la paix civile sur le territoire. La loi référendaire du 9 novembre 1988 précise dans son article 2 qu' entre le 1er mars et le 31 décembre 1998, les populations intéressées de la Nouvelle-Calédonie seront appelées à se prononcer par un scrutin d'autodétermination, conformément aux dispositions de l'article 53 de la Constitution, sur le maintien du territoire dans la République ou sur son accession à l'indépendance . Cette échéance est désormais proche et les négociations politiques sur l'avenir institutionnel du territoire, engagées à l'automne 1995, ont été interrompues en avril 1996 par le FLNKS qui a fait du règlement de la question minière un préalable à la reprise des discussions. Or, le projet de création d'une usine métallurgique de transformation du nickel semble aujourd'hui pouvoir trouver une issue favorable.

a) Un préalable : le règlement du conflit minier

Le nickel constitue la première richesse du territoire qui fournit plus de 12 % de la production mondiale et détient plus de 20 % des réserves mondiales. En 1996, le nickel, sous forme de minerais ou de produits métallurgiques, a représenté près de 94 % des exportations calédoniennes. 55 % de la production extraite ont été exportés sous forme de minerai brut, essentiellement vers le Japon, l'Australie et les États-Unis, pour une valeur de 665 millions de francs. L'extraction et le traitement de cette matière première sont pourvoyeurs d'emplois pour le territoire : 3.500 emplois sont en effet directement liés à l'exploitation du nickel, pour une population d'environ 200.000 habitants.

La Nouvelle-Calédonie compte huit sociétés minières dont la SLN (Société Le Nickel), filiale du groupe Eramet dont l'État est actionnaire, par l'intermédiaire d'ERAP, à hauteur de 55,5 %. La SLN est seule à transformer le minerai sur place : elle possède à Nouméa une usine de traitement, emploie 2.130 salariés (1.480 à Nouméa et 650 dans les mines) et assure environ 10 % de la production intérieure brute du territoire.

La SMSP (Société minière du sud Pacifique), qui emploie quant à elle 700 personnes sur cinq sites, est devenue le premier exportateur de minerai du territoire (1.381.000 tonnes en 1996). L'usine de traitement qu'elle envisage de construire avec son partenaire canadien Falconbridge dans la province nord, projet dont le coût est évalué à 5 milliards de francs, devrait contribuer à un rééquilibrage économique du territoire. La viabilité du projet est cependant subordonnée à la réalisation d'un échange de massifs miniers entre Eramet et la SMSP, dossier qui a connu de multiples rebondissements.

Le processus d'élaboration d'un accord fut en effet laborieux malgré un vote unanime du Congrès en novembre 1996 en faveur de la création de l'usine du nord. En dépit des pressions exercées, en particulier par les autorités gouvernementales françaises, les dirigeants d'Eramet, soucieux de préserver les intérêts de ses actionnaires minoritaires, se sont longtemps montrés réticents, souhaitant un accord d'échange sur des bases équitables entre les titres miniers du massif de Koniambo et ceux du massif de Poum appartenant à la SMSP.

Au mois de juillet 1997, le Premier ministre, M. Lionel Jospin, a ainsi été conduit à confier à un médiateur, M. Philippe Essig, la mission de procéder à une évaluation des perspectives économiques et industrielles du projet de construction d'une usine métallurgique de nickel dans la province nord. Après avoir élaboré un rapport d'étape, rendu public le 20 septembre, considérant comme crédible le projet présenté par la SMSP et Falconbridge, M. Philippe Essig a remis le 1er novembre dernier son rapport définitif. Selon le Gouvernement, la solution qu'il préconise a recueilli l'accord des trois sociétés concernées, Eramet, la SMSP et Falconbridge. L'accord prévoit la création d'une structure ad hoc chargée d'acquérir les titres miniers des deux gisements de nickel de Poum et Koniambo, situés au nord du territoire. Celle-ci céderait ensuite ses droits à la SMSP dès lors que la décision de construire l'usine sera prise . Cette usine serait alimentée en minerai par le massif de Koniambo tandis que la production du massif de Poum approvisionnerait l'actuelle usine de Doniambo, exploitée par le groupe Eramet-SLN.

Cet accord a été approuvé le 6 novembre par le PDG du groupe Eramet, M. Yves Rambaud.

Après une reconnaissance du massif de Koniambo et une étude approfondie de la faisabilité technique et financière de l'opération, la SMSP et Falconbridge devront décider, au 1er janvier 2002, si la construction de l'usine doit être engagée. Ces sociétés pourraient cependant disposer d'un délai de réflexion supplémentaire de trois ans pour prendre leur décision.

b) L'avenir institutionnel : vers une solution consensuelle

La conclusion d'un accord minier, exigée comme préalable à la reprise des négociations politiques sur l'avenir institutionnel du territoire par les indépendantistes, à l'exception d'une de ses composantes, le Palika (Parti de Libération Kanak), devrait permettre d'engager de nouvelles discussions avant la fin de l'année.

A l'occasion du 28ème congrès de l'Union calédonienne (UC), principale composante du FLNKS, M. Bernard Lepeu, reconduit à la présidence de ce mouvement, dressant un bilan de neuf années de mise en oeuvre des accords de Matignon, a noté l'amorce d'un rééquilibrage économique du territoire et a rappelé l'objectif du FLNKS d'obtenir l'instauration d'une indépendance-association avec la France dès 1998 tout en se prononçant pour la recherche d'une solution consensuelle négociée avec l'État et les anti-indépendantistes. Lors d'une visite en France, à la fin du mois de juin dernier, M. Rock Wamytan, président du FLNKS, avait expliqué que son parti, plutôt qu'un référendum d'autodétermination prévu par les accords de Matignon, souhaitait parvenir à une solution négociée soumise à un référendum d'approbation . De son point de vue, une souveraineté partagée reviendrait à confier la justice, la monnaie, la défense et la sécurité intérieure à la France, les autres compétences, dont le contrôle de l'immigration, relevant du nouvel État associé qui serait créé.

Lors de son déplacement en Nouvelle-Calédonie au début du mois de septembre, M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'outre-mer, avait déclaré : l'objectif c'est une solution qui s'inspire des accords de Matignon, qui permette aux deux communautés de continuer à vivre ensemble dans la paix, en assurant la promotion des Kanaks. La Nouvelle-Calédonie a une possibilité de se maintenir dans le cadre de la République, en donnant une plus large autonomie . Prenant en considération les observations du grand chef coutumier Evanes Boula relatives au nécessaire élargissement du rôle joué par les conseils coutumiers, il a en outre assuré que sa requête serait intégrée dans les réflexions sur les futures institutions de la Nouvelle-Calédonie.

Quelle que soit la solution politique qui sera négociée, le Gouvernement, en application de la loi référendaire du 9 novembre 1988, a pris les dispositions nécessaires pour faire réviser les listes électorales et établir les tableaux annexes répertoriant les électeurs non admis à participer au scrutin de 1998.

3. La poursuite du rééquilibrage économique entre les provinces

L'article 85 de la loi référendaire du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie dispose que des contrats de développement déterminent les actions à engager pour atteindre un certains nombre d'objectifs dont : Favoriser un rééquilibrage du territoire par rapport à l'agglomération chef-lieu et améliorer les infrastructures pour permettre le désenclavement des populations isolées. L'effort devra porter, d'une part, sur l'aménagement des voies routières transversales et la réalisation des équipements, y compris portuaires, nécessaires au développement d'un centre urbain dans la province nord, d'autre part, sur le renforcement des infrastructures communales et provinciales d'adduction d'eau, d'assainissement, de communication et de distribution électrique .

Pour atteindre ces objectifs et en application de l'article 84 de la loi précitée, des conventions et des contrats de développement ont été conclus entre, d'une part, l'État et le territoire, et d'autre part, l'État et chacune des trois provinces. Après une série de contrats couvrant la période 1990-1992, de nouveaux contrats ont été conclus pour la période 1993-1997 : une convention de développement entre l'État et le territoire en date du 8 juin 1993 et trois contrats entre l'État et les provinces en date du 4 février 1993. Le montant total des aides contractualisées s'élève à 3,9 milliards de francs, dont 1,65 milliards de francs représentant la contribution de l'État, 1,07 milliards de francs étant imputés sur le budget du secrétariat d'État à l'outre-mer.

Les trois contrats de développement État-provinces représentent un montant de 2,603 milliards de francs dont 1,426 milliards, soit 55 %, sont à la charge de l'État et 1.177 milliards, soit 45 %, sont assumés par les provinces. Près de la moitié de la contribution de l'État bénéficie à la province nord. Les principales opérations d'aménagement financées dans le cadre de ces contrats sont les suivantes :

· Pour la province nord :

- l'achèvement de la transversale Koné-Tiwak ainsi que l'aménagement de routes provinciales ;

- l'achèvement des aéroports de Koumac et Canala et différents aménagements portuaires ;

- la mise en place d'équipements sportifs, de centres culturels et de constructions scolaires ;

- des actions dans le domaine de l'environnement (alimentation en eau potable, création de fosses septiques) ;

- l'aménagement de zones d'activités.

· Pour la province sud :

- la réalisation de trois opérations routières : route de Thio à Grand Borendy, voie de dégagement ouest et route de Bourabé ;

- deux aménagements de routes combinés à la création de zones industrielles et artisanales et à la mise en valeur des sites du sud de la Grande Terre ;

- la mise en place d'équipements sanitaires et sociaux, d'équipements sportifs et de salles culturelles ;

- la rénovation d'hôtels ;

- la mise en place de réseaux d'alimentation en eau potable.

· Pour la province des Îles :

- l'aménagement de réseaux d'alimentation en eau potable ;

- l'aménagement de décharges contrôlées ;

- la réfection du pont de Tekiné ;

- la mise en place d'équipements sanitaires et scolaires.

Pour ces trois contrats, le taux d'engagement des dépenses était au 30 juin 1997 de 50,8 %, chiffre qui révèle un retard d'exécution certain, dû pour une part aux difficultés techniques rencontrées dans l'instruction des dossiers. Il est donc prévu que 1998 soit une année de transition permettant d'achever les programmes en cours, l'effort financier étant maintenu avec une dotation de 262,2 millions de francs.

La convention État-territoire , d'un montant de 520 millions de francs, dont 47 % à la charge de l'État, doit quant à elle permettre la construction d'un centre de formation des apprentis à Nouméa, la rénovation du centre hospitalier territorial G. Bourret, et la poursuite du programme d'électrification rurale, de la mise en place d'équipements communaux structurants et du programme téléphone rural.

Pour aider les provinces et le territoire à définir les investissements productifs et à accompagner la réalisation des projets de développement, un poste de commissaire au développement économique de la Nouvelle-Calédonie a été créé par un décret du 23 février 1995. Ce commissaire, nommé pour trois ans renouvelables, est placé auprès du haut-commissaire de la République. Pour accomplir sa tâche, il bénéficie du soutien de l'ADECAL (Agence pour le Développement Économique de la Nouvelle-Calédonie), association regroupant l'ensemble des interlocuteurs politiques, économiques et sociaux concernés. En 1996, des études ont été menées en matière d'aménagement du territoire (zone de développement de Nepoui-Koni-Pouembout) et de développement de différentes filières (pêche industrielle, lait, tourisme).

La commission de rééquilibrage et du développement , créée au mois de décembre 1995, chargée d'identifier les dossiers prioritaires et de coordonner les efforts de l'ensemble des acteurs du territoire, s'est réunie au début de l'année 1996. Elle s'est engagée dans un important travail d'analyse et de réflexion mené au sein de huit sous-groupes réunissant chacun élus, fonctionnaires de l'État et du territoire et représentants des organisations socio-professionnelles.

Chaque sous-groupe a rendu fin février 1996 un rapport sur les thèmes dont il était en charge (éducation, emploi-formation, logement, développement touristique, transports, économie minière, énergie, coopération régionale et développement). Leurs rapports constituent une importante documentation et contiennent les éléments de réflexion permettant de définir des orientations à long terme pour un développement équilibré du territoire. L'arrêt des discussions politiques sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie en avril 1996 a cependant interrompu l'activité de la commission: les travaux de synthèse prévus n'ont donc pas vu le jour. Avec la reprise des négociations, la réflexion devra être poursuivie, la difficulté étant d'effectuer des choix et d'établir un ordre de priorités parmi toutes les actions envisagées (base pour pêche industrielle lourde dans la province nord, pour une pêche industrielle plus légère dans la province des Îles ; poursuite du développement touristique ; réorientation de la formation de cadres de l'administration vers les activités du secteur marchand ; poursuite de l'installation d'un réseau de production et de distribution d'électricité en faveur de la province nord ...etc).

B. LA POLYNÉSIE FRANÇAISE

1. Les évolutions institutionnelles et politiques

a) La mise en oeuvre du nouveau statut

L'année écoulée constitue la première année de mise en oeuvre du nouveau statut d'autonomie de la Polynésie française résultant de deux lois, l'une organique, l'autre simple, du 12 avril 1996. La notion d'autonomie constitue la clef de voûte de cette réforme statutaire. Si la Polynésie française reste une collectivité territoriale de la République, elle bénéficie désormais d'une autonomie institutionnelle renforcée :

- les compétences de l'État sont d'attribution et strictement limitées aux matières de souveraineté telles que les relations internationales - sous réserve des possibilités offertes au président du gouvernement de la Polynésie française -, la défense, la justice, le droit civil, les libertés publiques ...

- la légalité des délibérations de l'assemblée de la Polynésie française et de sa commission permanente sont désormais jugées par le tribunal administratif de Papeete après avis du Conseil d'État dès lors que l'exacte application de la répartition des compétences entre l'État et le territoire est en cause.

Le décret n° 97-30 du 13 janvier 1997 a précisé les conditions dans lesquelles le Conseil d'État se prononce : le jugement de transmission ainsi que le dossier sont communiqués au secrétariat du contentieux du Conseil d'État par le greffe du tribunal administratif et le dossier est examiné par le Conseil d'État conformément aux règles applicables en matière de procédure contentieuse ; les parties et le ministre de l'outre-mer disposent d'un mois à compter de la notification du jugement de renvoi pour produire des observations ; l'avis du Conseil d'État est notifié aux parties, au haut-commissaire de la République et au ministre de l'outre-mer ; cet avis est publié au journal officiel de la Polynésie française et peut l'être au journal officiel de la République française si le Conseil d'État le prévoit. Cette procédure de demande d'avis a déjà mise en oeuvre à trois reprises.

La possibilité de solliciter l'avis du Conseil d'État en dehors de toute procédure contentieuse lorsque l'appréciation de la répartition des compétences entre l'État et le territoire soulève une difficulté, a également été utilisée : quatre demandes d'avis ont ainsi émané du président du gouvernement de la Polynésie française. Dans ce cas, le décret précité prévoit que la demande est examinée conformément aux dispositions régissant la procédure devant les sections administratives du Conseil d'État.

- Afin de renforcer les possibilités données à la Polynésie française de réussir son insertion dans son environnement régional, les pouvoirs du président du gouvernement sont accrus.

Aux termes du statut de 1984, celui-ci disposait d'un pouvoir d'initiative pour proposer au Gouvernement de la République la négociation d'accords concernant la région du Pacifique et pouvait être désigné pour mener les négociations et représenter la France dans les institutions et organismes régionaux.

Avec le nouveau statut, il peut non seulement négocier mais aussi signer, au nom de l'État, des accords internationaux concernant la région du Pacifique s'il y a été préalablement habilité par les autorités de la République. Il est par ailleurs plus étroitement associé aux négociations internationales se déroulant dans cette région : cette association est de droit lorsque les négociations concernent des domaines de la compétence du territoire ; lorsque les négociations intéressent les domaines de compétence de l'État, cette association reste facultative. Investi par les autorités de la République, il peut également négocier et signer des arrangements administratifs destinés à préciser les conventions internationales dans des domaines de compétence territoriale. Dans ces mêmes matières, il peut négocier et signer au nom du territoire, dans le respect des engagements internationaux souscrits par la France, des conventions de coopération décentralisée avec des collectivités locales françaises ou étrangères. Il peut enfin être autorisé par les autorités de la République à représenter la France au sein des organismes régionaux du Pacifique dépendant d'institutions spécialisées des Nations-Unies.

- Avec la conviction que les élus polynésiens sont plus aptes à définir les mesures propres à favoriser le développement économique, social et culturel du territoire, les compétences de ce dernier ont été élargies.

Le territoire assure ainsi désormais l'exploration et l'exploitation des ressources de la mer dans les eaux intérieures, les eaux territoriales et la zone économique exclusive : il gère de ce fait les richesses naturelles d'un espace maritime d'une superficie de plus de cinq millions de kilomètres carrés. La totalité du domaine public maritime lui est transféré, à la seule exception des emprises affectées à l'exercice des compétences de l'État (sécurité maritime, police en mer). La Polynésie française reste tenue par les engagements internationaux de la France qui conserve ses responsabilités d'État côtier au regard des conventions internationales. Enfin, une loi devra fixer ultérieurement la date d'entrée en vigueur du transfert au territoire des lagons de Mururoa et de Fangataufa.

- les dessertes maritimes et aériennes internationales pour lesquelles la Polynésie française représente la seule escale sur le territoire national deviennent une compétence exclusive du territoire. Pour les dessertes reliant la Polynésie à un autre point du territoire national, l'État, qui demeure compétent, doit recueillir l'avis du conseil des ministres de la Polynésie française. Il s'agit de favoriser le développement de l'industrie touristique qui constitue un atout majeur de l'économie du territoire.

L'ambition de la réforme statutaire est de conférer aux responsables polynésiens les compétences et les moyens de s'engager sur la voie d'un véritable développement dans le cadre d'un statut de large autonomie au sein de la République. A cet égard, le nouveau dispositif institutionnel paraît fonctionner de façon satisfaisante.

L'élargissement des compétences territoriales se traduit au quotidien par de nombreuses initiatives des autorités locales. Ainsi, en matière de transport aérien international, le président du gouvernement de la Polynésie française a signé un accord avec l'Australie le 21 février 1997 qui doit permettre de développer les relations aériennes régionales. Dans un autre domaine, l'assemblée de la Polynésie française a adopté une délibération le 20 février 1997 sur l'exploitation des ressources de la mer territoriale et de la zone économique exclusive (Z.E.E.).

Enfin, l'article 91 de la loi organique du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, introduit à l'initiative du Sénat, a créé une commission paritaire de concertation entre l'État, le territoire et les communes, comprenant six représentants de l'État désignés par le haut-commissaire, six représentants du territoire désignés par l'assemblée de la Polynésie française à la représentation proportionnelle des groupes politiques la composant et six représentants des communes à raison d'un pour chacun des archipels, élu par les maires de ces archipels. Cette commission est présidée alternativement pour un an par un représentant de chaque collège et se réunit au moins une fois par an à l'initiative de son président. Elle a pour mission d'assurer aux communes la possibilité de participer au développement économique, social et culturel du territoire.

La constitution et l'installation de cette commission ont nécessité plusieurs mois. La désignation de ses membres est intervenue au printemps 1997. Concernant les représentants de l'État, le haut-commissaire qui préside la commission, a désigné : le secrétaire général de la Polynésie française, les chefs de subdivision administrative des îles du Vent, des îles Sous-le-Vent et des Marquises, le directeur de la mission d'aide financière et de coopération du haut-commissariat. La première réunion de la commission paritaire de concertation a été reportée plusieurs fois : elle s'est finalement tenue le 29 août 1997. Une deuxième réunion s'est tenue le 14 novembre et une troisième est programée pour le 26 novembre. Plusieurs thèmes ont été évoqués : l'éducation, l'adduction d'eau, le traitement des déchets, l'assainissement, la circulation routière et le développement des archipels.

b) Le paysage politique polynésien

Le renouvellement de l'assemblée de la Polynésie française , qui a eu lieu le 12 mai 1996, a confirmé une certaine bipolarisation du paysage politique polynésien.

Le Tahoeraa, parti de M. Gaston Flosse, président du gouvernement de la Polynésie française, a obtenu la majorité absolue avec 22 sièges sur les 41 composant l'assemblée (contre 18 précédemment). Le Tavini, parti indépendantiste présidé par M. Oscar Temaru, a plus que doublé le nombre de ses élus territoriaux en emportant 10 sièges (contre 4 auparavant). Le nombre de membres de l'assemblée de la Polynésie française favorables à l'indépendance s'élève cependant à 11 du fait du ralliement du représentant de la liste Alliance 2000. Les autres élus sont : 5 représentants du Aia Api, présidé par M. Émile Vernaudon, et respectivement 1 représentant du Fetia Api (opposition DVG), du Te Avei' a Mau (centriste) et du Te Henua Enata Kotoa (parti marquisien). M. Justin Arapari (Tahoeraa) a été élu président de l'assemblée de la Polynésie française le 23 mai 1996 et M. Henri Flohr (Aia Api) préside la commission permanente. Ils ont été reconduits le 10 avril 1997. M. Gaston Flosse a été réélu président du gouvernement de la Polynésie française le 28 mai 1996 et a désigné le 29 mai son gouvernement, composé de quatorze ministres.

Les élections législatives du mois de mai dernier ont conduit à la désignation de deux nouveaux députés de la Polynésie française, les députés sortants, MM. Gaston Flosse (RPR) et Jean Juventin (République et Liberté) ne se représentant pas. En application des dispositions de l'article 25 de la loi du 4 janvier 1993, elles se sont déroulées sur ce territoire une semaine avant le scrutin organisé dans le reste de la France, soit le 18 mai 1997.

Dans la première circonscription, M. Michel Buillard (RPR), maire de Papeete et ministre du gouvernement de la Polynésie française, a été élu dès le premier tour avec 51,58 % des suffrages exprimés. M. Oscar Temaru, chef de file des indépendantistes, son principal adversaire, a cependant obtenu 41,62 % des voix. Concerné par les dispositions relatives au cumul des mandats, M. Michel Buillard, conservant la mairie de Papeete, a démissionné de ses fonctions de ministre et de membre de l'assemblée territoriale. Dans la seconde circonscription, M. Émile Vernaudon (DVD), membre de l'assemblée de la Polynésie française et maire de Mahina, a été élu, lui aussi, dès le premier tour, avec 58,91 % des suffrages exprimés. Son principal adversaire, M. James Salmon (indépendantiste), a obtenu 23,64 % des voix.

2. Vers une reconversion de l'économie polynésienne

a) Le démantèlement du Centre d'expérimentation du Pacifique (C.E.P.)

Le programme d'essais nucléaires dans le Pacifique a constitué une source d'activités et de revenus très importante pour la Polynésie française (versements au budget du territoire correspondant aux taxes de nature douanière frappant les matériels introduits en Polynésie ; commandes passées à des entreprises locales ; emplois procurés à des personnels locaux bénéficiant souvent, de ce fait, d'une formation professionnelle ; retombées, pour l'économie locale, des rémunérations versées aux personnels d'origine métropolitaine résidant temporairement en Polynésie).

L'arrêt définitif des essais (le dernier date du 27 janvier 1996) et la décision de fermer le C.E.P. ont mis un terme à ces transferts. Aussi le principe d'une compensation financière devant permettre à l'économie polynésienne d'organiser sa reconversion a-t-il été décidé : en conséquence, une convention pour le renforcement de l'autonomie économique de la Polynésie française a été signée le 25 juillet 1996 entre le Premier ministre et le président du gouvernement de la Polynésie française. Elle prévoit le versement annuel au territoire, pendant dix ans, d'une somme de 990 millions de francs et distingue trois enveloppes :

- la première, d'un montant de 220 millions de francs par an, fait l'objet d'un versement global de l'État, et compense la perte de recettes douanières résultant de la fermeture du C.E.P. ;

- la deuxième tend à compenser la disparition de l'activité de formation que le centre dispensait aux personnels recrutés. Le service militaire adapté (SMA) doit être maintenu avec pour objectif de former 300 personnes par an ;

- le solde a vocation à alimenter un fonds de reconversion d'aide à la création et au développement d'activités pourvoyeuses d'emplois, en particulier dans les domaines du tourisme, de l'agriculture et du logement. Pendant une première période de trois ans, 110 millions de francs doivent être consacrés à la réalisation de programmes de logements sociaux utilisant la main d'oeuvre locale. Un comité de gestion du fonds de reconversion, co-présidé par le haut-commissaire et le président du gouvernement de la Polynésie française, a été mis en place le 15 juillet 1997. Un comité technique consultatif complète ce dispositif en associant les communes et les organisations socio-professionnelles à l'examen des projets : il s'est réuni pour la première fois le 11 septembre 1997.

Le démantèlement des installations du C.E.P. constituant un chantier important dont le coût total est estimé à plus de 130 millions de francs, les sommes versées au territoire au titre de la compensation n'atteindront qu'en 1999 les montants précités. Les opérations de démantèlement, commencées il y a plus d'un an, devraient être achevées à l'été 1998. Actuellement, 60 % des installations ont été démontées et les équipements scientifiques et techniques du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), ainsi que ceux considérés comme majeurs pour la défense ont été réexpédiés en métropole. Certains matériels doivent être transportés sur l'atoll de Hao pour servir aux légionnaires du 5ème régiment étranger. Un comité consultatif de répartition destiné à assurer la transparence de ces cessions a été chargé de veiller à une attribution équitable de ces matériels aux cinq archipels.

L'ensemble des mesures, arrêtées d'un commun accord entre l'État et le territoire, doivent permettre d'organiser la mutation économique de la Polynésie française. Un programme stratégique a ainsi été défini : il a reçu au mois d'avril 1997, après consultation des différents ministères concernés, l'approbation de l'État. Les premières actions envisagées pour favoriser le développement de archipels sont : la création de nouveaux aérodromes aux Tuamotu et aux Australes, la construction d'un aéroport international aux Marquises, l'installation aux Marquises d'équipements portuaires pour favoriser le développement de la pêche (quais, entrepôts frigorifiques), la mise en place de moyens de traitement des eaux usées et des déchets pour prévenir la pollution des lagons.

Un dispositif de suivi doit enfin être mis en place pour procéder à une évaluation périodique des projets engagés. M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'outre-mer, a en effet estimé, lors de son déplacement en Polynésie française au mois d'août dernier, que l'État devait assumer toute sa part dans le développement économique, social et culturel du territoire, mais que corrélativement, il avait aussi pour obligation de contrôler l'attribution des fonds publics et la transparence de leur utilisation .

b) Les concours financiers de l'État

La convention du 25 juillet 1996 pour le renforcement de l'autonomie économique de la Polynésie française est venue compléter un dispositif contractuel déjà en place constitué par le contrat de développement du 2 mai 1994, conclu entre l'État et le territoire pour cinq ans en application de l'article 8 de la loi du 5 février 1994 d'orientation pour le développement économique, social et culturel de la Polynésie française, et par le contrat de ville relatif à la zone urbaine de Papeete conclu pour la même période le 30 août 1994 et inclu dans le contrat de développement. La durée d'exécution de ces contrats a été portée à six ans en vertu de la décision d'étalement sur une année supplémentaire prise l'an dernier.

Le contrat de développement s'articule autour de trois programmes d'intervention d'un coût total sur la période de 2.902 millions de francs, dont 1.451 millions de francs à la charge de l'État :

- le développement économique, en particulier dans les domaines du tourisme, de l'agriculture et de la formation professionnelle ;

- l'équipement du territoire et le désenclavement des archipels ;

- l'insertion sociale.

Le contrat de ville prévoit une participation de l'État de 100 millions de francs, les communes et le territoire s'engageant respectivement à hauteur de 23,4 et de 0,8 millions de francs. Les actions qu'il finance concernent la prévention de la délinquance, l'insertion des jeunes, le logement social et les aménagements urbains.

La signature relativement tardive de ces contrats n'a pas permis le lancement d'opérations nombreuses dès 1994. Ce retard initial a été en grande partie comblé en 1995 et la mise en oeuvre des projets décidés s'est poursuivie à un rythme soutenu en 1996. Aussi le taux d'engagement des crédits au 31 décembre 1996 s'élève-t-il à près de 50 %.

Hormis cette politique contractuelle tout à fait essentielle pour le développement de l'économie polynésienne, il convient de souligner l'importance pour ce territoire des aides fiscales à l'investissement résultant de la loi du 11 juillet 1986, dite loi Pons. Selon l'Institut d'émission de l'outre-mer, les aides accordées en faveur de la Polynésie ont été, en 1996, les plus élevées de celles bénéficiant aux collectivités d'outre-mer : 68 dossiers ont ainsi été agréés pour un montant global de 165 millions de francs, essentiellement dans les domaines de l'hôtellerie et des transports. Le développement de ces domaines d'activité est crucial pour l'économie polynésienne en phase de reconversion. Si des abus ont pu être commis, justifiant une moralisation du dispositif, il convient de veiller à ce que les modifications qui seraient introduites par la loi de finances pour 1998 n'aient pas de répercussions négatives sur le développement économique du territoire et préservent les créations d'emplois.

C. WALLIS ET FUTUNA

1. Les évolutions institutionnelles et politiques

Ce territoire demeure régi par la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961, modifiée successivement par les lois du 29 décembre 1971, du 26 juin 1973, du 18 octobre 1978 et par la loi organique du 20 février 1995.

Le statut fait de l'administrateur supérieur à la fois le représentant de l'État et l'exécutif du territoire, chargé d'assurer l'exécution des délibérations de l'assemblée territoriale. Une place importante est cependant réservée aux institutions traditionnelles, le roi et les ministres de chacun des trois royaumes étant chargés de veiller au respect de la coutume.

Alors qu'au début des années 1980 avait été évoquée la possibilité d'une révision de ce statut, ces velléités sont restées sans lendemain. A la fin de la session budgétaire de 1995, il est cependant apparu que les dispositions du décret du 14 mars 1962 applicables à l'élection des membres de la commission permanente de l'assemblée territoriale conduisaient à des difficultés de fonctionnement. Aussi l'État a-t-il pris l'initiative, par un décret n° 96-1007 du 22 novembre 1996, de moderniser les conditions de désignation des membres de cette commission en supprimant l'obligation de résidence dans l'île de Wallis.

Lors de son déplacement à Paris au mois de juin 1996, le président de l'assemblée territoriale avait indiqué qu'après avoir consulté les autorités coutumières et religieuses il avait proposé aux élus d'engager une réflexion sur les réformes statutaires à envisager. Néanmoins, la question statutaire n'a pas été abordée lors de la visite à Paris, au mois de novembre suivant, d'une délégation de l'assemblée territoriale, ni, plus récemment, lors de la campagne électorale précédant le renouvellement de cette assemblée du mois de mars 1997.

La volonté de faire évoluer les modalités de fonctionnement des institutions territoriales s'est traduite par une demande adressée au représentant de l'État tendant à ce que les membres du conseil territorial soient plus complètement informés des dossiers et des projets de délibération qui leur sont obligatoirement soumis avant leur transmission à l'assemblée territoriale ou à la commission permanente. En outre, la réunion des conseils de circonscription en présence de l'administrateur supérieur devrait être l'occasion d'élaborer les projets, notamment de nature budgétaire, dans la plus grande concertation avec les autorités coutumières.

Le 24 novembre 1996, une délégation d'élus et de chefs coutumiers a été reçue par le Président de la République. A cette occasion, le président de l'assemblée territoriale qui conduisait la délégation a réaffirmé la fidélité du territoire à la France et souhaité la mise en place pour les dix prochaines années des moyens nécessaires à l'engagement d'une véritable politique de rattrapage et de développement économique, social et culturel.

Le renouvellement de l'assemblée territoriale a eu lieu le 16 mars 1997 . Le scrutin a été marqué par une forte participation (87,21 % de votants sur 7.645 inscrits), y compris à Poï (83,80 % de participation), sur l'île de Futuna, en dépit des dommages causés au réseau routier par le cyclone Gavin la semaine précédente. 12 des 20 membres composant l'assemblée ont été reconduits pour cinq ans. Le RPR a emporté une majorité de 14 sièges, soit cinq de plus qu'aux précédentes élections, les 6 autres revenant aux candidats socialistes et divers gauche. M. Victor Brial (RPR), originaire de Futuna, a été élu président de l'assemblée territoriale.

Cependant, le conseil du contentieux administratif, juge de l'élection, saisi de contestations des opérations électorales, a annulé les élections dans quatre circonscriptions sur cinq. Le Conseil d'État, saisi en appel, n'a pas encore statué.

Lors des élections législatives des 25 et 1er juin 1997 , M. Victor Brial a été élu au second tour avec 51,34 % des suffrages exprimés, devançant le député sortant M. Kamilo Gata (socialiste) de 169 voix. Un recours a été formé devant le Conseil constitutionnel qui n'a pas encore rendu sa décision.

2. La politique contractuelle de développement

Si dans les territoires d'outre-mer les infrastructures relèvent généralement de la compétence locale, la reconnaissance par l'État de besoins importants à Wallis-et-Futuna en matière de désenclavement et d'aménagement du territoire l'ont conduit à participer à leur financement, pour l'essentiel dans un cadre contractuel.

Le contrat de plan associant l'État et le territoire, signé le 14 novembre 1994 et concrétisant le projet de développement économique et social élaboré par l'assemblée territoriale, s'articule autour de quatre objectifs essentiels : l'éducation et le développement du sport, l'emploi et la formation professionnelle, les infrastructures, l'environnement. Ce contrat couvrant la période 1994-1998 doit contribuer au développement du territoire à hauteur de 72,6 millions de francs, dont 58,03 à la charge de l'État, soit près de 80 %.

Sur 58,03 millions de francs de crédits d'État contractualisés, 28,05  ont été délégués au 31 décembre 1996 et 15,378 ont été engagés à cette même date, soit des taux de délégation et d'engagement de 48,34 % et de 26,5 %.

La convention de développement , signée le 2 mars 1995 entre l'État et le territoire, prévoit un effort complémentaire de l'État sur cinq ans (1995-2000) de 159,075 millions de francs. Cette nouvelle source de financement doit permettre d'amplifier certaines opérations inscrites au contrat de plan telles que la création d'équipements scolaires et l'amélioration des infrastructures routières et des réseaux d'eau potable. Elle a permis de contractualiser à hauteur de 30 millions de francs le financement des chantiers de développement local. 25 millions de francs sont en outre consacrés au logement et 26 sont affectés à la réfection du quai de Leava à Futuna et des phares et balises du chenal de Mata Utu. Enfin, une dotation de 16 millions de francs revient au secteur sanitaire, dont 5 sont réservés à la modernisation de l'hôpital.

Sur les 159,075 millions de francs de crédits d'État inscrits, 42,742, soit 26,87 %, ont été délégués, et 35,486, soit 22,31 %, ont été engagés au 31 décembre 1996. Bien que les taux d'engagement de crédits restent faibles et révèlent d'importants retards dans la mise en oeuvre des projets d'aménagement envisagés, un certain nombre d'opérations ont progressé.

Ainsi, en matière de développement des infrastructures aéroportuaires, la construction à Wallis d'une salle de transit a été achevée, de même que la modernisation et l'extension de l'aérogare, le remplacement de la centrale électrique permettant le doublement de la puissance énergétique de l'aéroport. Les balisages de la piste ont été rénovés. A Futuna, l'aérogare a été agrandi, la tour de contrôle aménagée et les travaux de drainage de la piste effectués. La direction générale de l'aviation civile a défini un projet d'installation de balisage nocturne : les travaux de génie civil ont été menés à bien au premier semestre 1997 et l'installation du matériel de balisage est actuellement en cours. En matière d'adduction d'eau, un programme d'amélioration du réseau est en cours à Wallis afin de doubler les capacités de production d'eau potable et de pouvoir alimenter dans de meilleures conditions les points hauts de l'île. A Futuna, les stations de chloration de l'eau ont été achevées sur les trois points de captage existants et la réalisation d'un nouveau captage est en cours.

Hormis les dotations octroyées au territoire dans le cadre des conventions précitées, l'État verse chaque année à Wallis-et-Futuna une subvention d'équilibre qui, destinée initialement à compenser le déficit résultant des dessertes aériennes, finance désormais les dépenses générales du budget territorial. Depuis 1995, cette subvention est en constante diminution : elle s'élèvera pour 1998 à 1,6 millions de francs, soit une régression de près de 40 % par rapport à 1997. On peut regretter une baisse d'une telle ampleur alors que le budget global de l'outre-mer pour 1998 connaît une forte progression (+ 7,3 %).

D. LES TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES (T.A.A.F.)

Par décret du Premier ministre en date du 16 mars 1996, le siège de l'administration des T.A.A.F. , jusque-là situé dans le 17ème arrondissement de Paris, a été transféré à Saint-Pierre de la Réunion . Il s'agit de réduire les délais et les distances entre les services administratifs et le territoire et d'exercer un meilleur contrôle sur les opérations de stockage et de conditionnement des équipements embarqués sur le Marion Dufresne II.

Cette délocalisation nécessite la construction d'un bâtiment destiné à abriter les 29 personnes qui constituent l'effectif de cet administration placée sous l'autorité d'un administrateur supérieur, actuellement M. Pierre Lise. Cette opération nécessitant des délais, il a été décidé, dans une phase transitoire, d'installer à compter du 2 avril 1997, une équipe restreinte de huit personnes (5 agents du ministère de l'outre-mer, dont le secrétaire général des T.A.A.F., et 3 agents du ministère de la défense). Le reste des effectifs rejoindra Saint-Pierre lorsque la construction sera terminée, l'installation définitive étant prévue pour la fin de l'année 1998.

Les TA.A.F. comprennent la Terre Adélie et les îles Kerguelen, Crozet, Amsterdam et Saint-Paul. Le territoire est divisé en quatre districts, l'un en Antarctique, la Terre Adélie où est implantée la base scientifique de Dumont d'Urville, les trois autres constituant les terres australes.

L'Antarctique jouit d'un statut particulier : les 14 millions de kilomètres carrés du continent sont partagés entre des secteurs qui, à l'exception d'une seule zone représentant moins de 20 % de la superficie totale, font l'objet de revendications de souveraineté de la part des États dits États possessionnés.

Les parties au Traité de l'Antarctique signé à Washington le 1er décembre 1959 étaient initialement au nombre de douze. Aujourd'hui, on dénombre 43 États signataires. Le traité organise, dans l'intérêt de la coopération scientifique, la démilitarisation et la dénucléarisation de la zone située au sud du 60ème parallèle et un régime de gestion en commun ; il instaure un gel des revendications territoriales. Un protocole au traité de l'Antarctique relatif à la protection de l'environnement a été signé le 4 octobre 1991 à Madrid ; il qualifie l'Antarctique de réserve naturelle, de paix et de science . Sa ratification par la France a été autorisée par la loi du 18 décembre 1992. La Russie et les États-Unis venant également de ratifier ce protocole, son entrée en vigueur ne dépend plus désormais que du Japon.

La 21ème conférence consultative du Traité de l'Antarctique s'est tenue à Christchurch (Nouvelle-Zélande) du 19 au 30 mai 1997 . Les travaux ont été consacrés à la définition des mesures de protection de l'environnement dans la région et en particulier à la responsabilité pour dommages causés à cet environnement. Ils ont cependant été quelque peu occultés par la question du pillage du légine, poisson antarctique à forte valeur commerciale. Plusieurs pays, dont la France, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, l'Afrique du sud et les États-Unis ont tenu une réunion séparée sur ce sujet et ont décidé d'élaborer une position commune en vue de la prochaine réunion de la commission pour la conservation des ressources marines vivantes de l'Antarctique.

Les T.A.A.F. constituent un lieu privilégié de la recherche scientifique . Les recherches entreprises sont effectuées grâce au soutien logistique de l'Institut Français pour la Recherche et la Technologie Polaires (I.F.R.T.P.), groupement d'intérêt public créé en 1992 dont sont membres, en particulier, le ministère de l'outre-mer, le territoire des T.A.A.F., le ministère de la recherche et le CNRS. Les nombreux programmes mis en oeuvre concernent essentiellement les sciences de l'univers (glaciologie, physico-chimie de l'atmosphère, géologie, sismologie, magnétisme ...) et les sciences de la vie (ornithologie, ichtyologie, écophysiologie, enzymologie ...).

En 1993, un accord de coopération a été conclu entre les deux instituts français et italien chargés des recherches polaires pour construire sur le plateau antarctique, au lieu-dit Dôme C, une base scientifique permanente, la base Concordia . Les recherches qui doivent y être effectuées concerneront la géophysique interne (mesure des variations du champ magnétique, tomographie du manteau supérieur de la terre ...), la physique de l'atmosphère (évolution du contenu en ozone de la stratosphère, mesure des gaz à effet de serre) et l'astronomie. Par ailleurs, un forage de la calotte glaciaire dont l'épaisseur à cet endroit est d'environ 4.000 mètres, doit permettre d'obtenir des informations sur la température et la composition de l'atmosphère au cours des quatre ou cinq derniers cycles glaciaires. Le programme EPICA , soutenu par la commission européenne, fait coopérer dix pays européens à la réalisation de ce forage. La quasi-totalité des matériels nécessaires aux expérimentations au Dôme C transitent par la station française de Dumont d'Urville et rejoignent ce site par des raids de surface. Lors de la campagne 1996/1997, cinq rotations du navire l'Astrolabe entre Hobart et Dumont d'Urville et trois raids de surface ont pu être organisés. Le camp de montage a été quasiment achevé, la tour de forage a été érigée et un trou de 130 mètres de profondeur a été creusé et cuvelé.

Afin de mener une analyse d'ensemble des missions et des moyens du territoire, un groupe de réflexion a été mis en place au mois d'avril 1997. Ce groupe de réflexion est composé de quatre personnalités indépendantes : un membre de l'Inspection générale des finances, un membre de l'Inspection générale de l'administration, un contrôleur général des armées et un représentant du monde scientifique. Parmi les thèmes de réflexion retenus figureront la question du coût logistique et de la présence humaine sur les bases scientifiques, de l'utilisation du navire océanographique Marion Dufresne II, le problème des relations entre le ministère de la défense et l'I.F.R.T.P.. La mission de réflexion a commencé à auditionner les différentes parties intéressées, a effectué au cours de l'été une mission dans les T.A.A.F. et devrait prochainement rendre son rapport.

III. LA PRÉSERVATION DES INTÉRÊTS PROPRES DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER SUR LE PLAN NORMATIF

Votre commission des Lois procède traditionnellement à un examen détaillé de l'application des lois les concernant relevant de sa compétence au fond.

Elle estime en outre opportun de faire le point sur les réformes législatives annoncées par le Gouvernement et sur les évolutions du cadre juridique de l'association des pays et territoires d'outre-mer (PTOM) à l'Union européenne.

A. L'APPLICATION DES LOIS RELATIVES AUX TERRITOIRES D'OUTRE-MER

En 1996 , trois réformes d'importance concernant les territoires d'outre-mer ont été adoptées : deux lois du 12 avril, l'une organique, l'autre simple complétant la première, portant statut d'autonomie de la Polynésie française ; la loi du 5 juillet portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer ; deux ordonnances du 2 janvier portant extension et adaptation de la législation en matière pénale dans les territoires d'outre-mer et à Mayotte.

Concernant le nouveau statut d'autonomie de la Polynésie française , toutes les mesures réglementaires prévues par la loi organique ont été publiées, soit au total trois décrets :

- le décret n° 96-934 du 17 octobre 1996 pris pour l'application de l'article 32 de la loi organique, relatif à l'organisation et au fonctionnement du comité consultatif pour le contrôle de l'entrée et du séjour des étrangers en Polynésie française ;

- le décret n° 96-1094 du 10 décembre 1996 pris pour l'application de l'article 34, relatif à l'organisation et au fonctionnement du comité territorial consultatif du crédit ;

- le décret n° 97-30 du 13 janvier 1997 pris pour l'application des articles 113 et 114, relatif aux modalités de traitement de certains recours et demandes d'avis par le tribunal administratif de Papeete et modifiant les articles 57-11 du décret du 30 juillet 1963 et R. 207 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.

Concernant les ordonnances n° 96-267 relative à l'entrée en vigueur du nouveau code pénal dans les territoires d'outre-mer et à Mayotte et n° 96-268 portant actualisation des dispositions de procédure pénale dans ces mêmes collectivités, toutes deux en date du 28 mars 1996 et ratifiées par la loi n° 96-1240 du 30 décembre 1996 :

- le décret n° 97-544 du 28 mai 1997 portant extension et adaptation de la deuxième partie du code pénal dans les territoires d'outre-mer et à Mayotte a été publié le 30 mai 1997 ;

- le projet de décret portant extension et adaptation de la deuxième partie du code de procédure pénale est en cours d'examen par le Conseil d'État et en cours d'élaboration en ce qui concerne la troisième partie de ce même code ;

- les mesures réglementaires prévues respectivement par les articles 18 et 24 de la loi du 30 décembre 1996, relatifs au régime applicable à l'ouverture des casinos en Polynésie française n'ont pas encore été publiés.

En ce qui concerne la loi n° 96-609 du 5 juillet 1996 portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer, seuls quatre décrets sur vingt-huit mesures d'application prévues ont été pris, quatre autres étant en préparation pour une publication avant la fin de l'anné :

- les décrets n° 96-963 et n° 96-964 du 4 novembre 1996, pris en application de l'article 61 de la loi et étendant le bénéfice de certaines prestations familiales dans les départements d'outre-mer ;

- le décret n° 97-12 du 6 janvier 1997 portant application de l'article 38 de la loi, ayant pour objet de préciser les règles de procédures en vigueur devant la commission de conciliation en matière foncière en Polynésie française et de fixer les conditions de rémunération de ses membres ;

- le décret n° 97-1002 du 29 octobre 1997 portant application des articles 45 et 46 de la loi, prévoyant la possibilité pour le Garde des Sceaux d'autoriser au profit d'un ou plusieurs notaires une extension de compétence au territoire des collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

En 1997 , un seul texte concernant les territoires d'outre-mer a été adopté par le Parlement : il s'agit de la loi organique adoptée définitivement par le Sénat le 21 octobre 1997 relative à la fiscalité applicable en Polynésie française . La proposition de loi organique avait été adoptée par l'Assemblée nationale le 13 mars. L'examen de sa conformité à la Constitution par le Conseil constitutionnel est actuellement en cours.

Ce texte a pour objet essentiel de valider la délibération de l'assemblée de la Polynésie française du 8 décembre 1994 instituant sur ce territoire une contribution de solidarité territoriale, appelée CST 3, destinée à financer le régime de protection sociale généralisée. Plusieurs décisions d'imposition prises sur le fondement de cette délibération ont en effet fait l'objet de recours devant le tribunal administratif de Papeete, excipant de l'illégalité de cette dernière. Plus de 300 millions de francs ayant déjà été perçus au titre de la CST 3 au cours des exercices 1995 et 1996 et la pérennité du régime de protection sociale représentant une composante essentielle de l'autonomie territoriale consacrée par le statut du 12 avril 1996, il s'agit, par la validation, de rendre incontestable le régime fiscal institué et d'assurer la continuité du système. Le second volet du dispositif tend à régulariser la situation fiscale d'un certain nombre de communes polynésiennes et d'instaurer une base légale permettant aux quarante-huit communes de la Polynésie française d'instituer certaines taxes contribuant à alimenter leur budget de fonctionnement.

B. LES RÉFORMES ENVISAGÉES ET LES TRAVAUX DE CODIFICATION

L'aboutissement des négociations relatives à l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie devrait s'accompagner d'une réforme statutaire dont les contours ne sont pas encore définis.

Par ailleurs, les communes polynésiennes connaissent depuis plusieurs années une situation financière tendue qui se traduit par une multiplication des cas de gestion budgétaire déficitaire, entraînant la mise en oeuvre des procédures de contrôle renforcé par le représentant de l'État devant la commission spéciale. Contrairement aux communes calédoniennes, leurs actes restent soumis au contrôle de ce dernier.

Au mois d'octobre 1995, un rapport établi par l'Inspection générale de l'administration sur la situation des communes en Polynésie française a observé qu'elles traversaient une crise de croissance financière et juridique et a proposé une certain nombre de propositions pour une profonde modernisation de l'institution communale . Par ailleurs, le rapport d'information établi par MM. Lucien Lanier et Guy Allouche au nom de votre commission des Lois à la suite d'une mission effectuée en Polynésie française du 14 au 28 janvier 1996 a souligné que ces entités devaient jouer un rôle essentiel dans la perspective d'un développement équilibré de ce territoire.

Afin de remédier à la situation actuelle, le Gouvernement, interrogé par M. Guy Allouche à l'occasion de l'examen de la proposition de loi organique relative à la fiscalité applicable en Polynésie française, a annoncé le 21 octobre dernier qu'une véritable réforme de l'institution communale serait engagée ayant pour objectif de rapprocher le statut de ces communes de celui des communes métropolitaines . Le ministre a précisé que la réforme devait porter sur l'alignement de leur régime électoral sur le régime commun, notamment pour les communes de 3.500 habitants et plus , qu'elle devait abroger le régime de la tutelle administrative , qu'elle devait permettre une clarification des compétences dans des secteurs importants pour la population tels que l'adduction d'eau potable, l'assainissement ou encore les ordures ménagères et doter les communes des moyens nécessaires par l'adoption d'un statut du personnel communal et un réexamen de la fiscalité applicable.

Concernant le calendrier, il a indiqué que d'ici la fin de l'année, se tiendraient des réunions interministérielles d'élaboration du texte qui pourrait être " bleui " en début d'année 1998 et qu' après les différentes consultations nécessaires, le projet pourrait être présenté au conseil des ministres durant le deuxième trimestre de l'année 1998 et déposé sur le bureau du Parlement avant la fin du premier semestre . Il a enfin précisé que, pour renforcer le contrôle budgétaire, le Gouvernement était bien décidé à accompagner la réforme communale (...) par la mise en place à Papeete d'une chambre territoriale des comptes spécifique à la Polynésie .

Le Gouvernement projette également d' étendre un ensemble de dispositions législatives aux territoires d'outre-mer par voie d'ordonnances . Un projet de loi d'habilitation vient d'être déposé à cet effet sur le bureau de l'Assemblée nationale. De très nombreux domaines sont concernés : le droit du travail, le droit commercial, le droit civil, des dispositions du code de la construction et de l'habitation, la révision des accords de coordination des régimes métropolitains et néo-calédoniens de sécurité sociale, l'organisation juridictionnelle dans les territoires d'outre-mer, la modernisation des activités financières, le droit pénal et la procédure pénale, le droit électoral, le régime de la pêche dans les T.A.A.F., le régime applicable à l'enseignement supérieur dans les territoires d'outre-mer et les règles relatives à la procédure de recouvrement et à la procédure contentieuse en matière fiscale en Polynésie française.

Quant aux travaux relatifs à la codification des textes applicables dans les territoires d'outre-mer, ils progressent également en dépit du caractère particulièrement complexe d'une telle tâche. Les projets de code de la communication et du cinéma et le code de l'éducation ont été déposés sur le bureau du Parlement. Six autres codes sont en préparation : le code électoral des territoires d'outre-mer et de la collectivité territoriale de Mayotte, le code de l'environnement, le code de la santé publique, le code du patrimoine, le code de la monnaie et du crédit, le code de l'aide sociale et de la famille. Le ministère de l'outre-mer a par ailleurs été associé à la modification du code du service national et du code de justice militaire qui seront rendus applicables dans les territoires d'outre-mer et prépare un projet de livre relatif aux territoires d'outre-mer et à Mayotte dans le code civil.

Un projet de modification du décret n° 89-647 du 12 septembre 1989 relatif à la composition et au fonctionnement de la commission supérieure de codification est en préparation. Il s'agirait de supprimer la commission adjointe pour l'outre-mer. Trois rapporteurs spécialisés resteraient cependant chargés de ce secteur.

C. LA PRÉSERVATION DES INTÉRÊTS SPÉCIFIQUES DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER DANS LEURS LIENS AVEC L'UNION EUROPÉENNE

Comme le rappelle régulièrement notre excellent collègue M. Daniel Millaud, les territoires d'outre-mer ne sont pas partie intégrante de l'Union européenne mais jouissent, en application de la quatrième partie du traité de Rome, d'un régime spécifique défini par la décision d'association du 25 juillet 1991, adoptée pour une durée de dix ans, qui fait actuellement l'objet d'une révision à mi-parcours.

Les pays et territoires d'outre-mer (PTOM) français souhaitent une modernisation de leur mode de relation avec l'Union européenne, caractérisé par un trop grand parallélisme avec celui des États ACP. Depuis le mois de mai 1994, une réflexion est menée à ce sujet par le ministère de l'outre-mer.

A l'initiative de la France, les chefs d'État et de Gouvernement ont adopté à Amsterdam, le 17 juin dernier, une déclaration relative au régime d'association des PTOM à l'Union européenne, qui doit être annexée au prochain traité. Elle reconnaît l'inadaptation du régime en vigueur aux enjeux de développement des PTOM et invite le Conseil de l'Union à la réexaminer en profondeur d'ici 1999.

Le Gouvernement a par ailleurs déposé au début de l'année 1997 auprès de la Commission européenne un mémorandum développant ses propositions pour un nouveau régime d'association. Il propose notamment l'élaboration d'un programme de développement économique et social des PTOM par État membre concerné ainsi que la création d'un fonds particulier, différent du FED (Fonds européen de développement).

*

Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission des Lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés aux territoires d'outre-mer dans le projet de budget du ministère de l'Outre-mer, aux montants proposés par la commission des Finances.

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