AVIS N° 90 Tome VIII - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - TERRITOIRES D'OUTRE MER
M. Jean-Marie GIRAULT, Sénateur
COMMISSION DES LOIS - AVIS n° 90 - TOME VIII - 1997/1998
Table des matières
- LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
-
INTRODUCTION
- I. LES CRÉDITS CONSACRÉS AUX TERRITOIRES D'OUTRE-MER
- II. LA SITUATION DE CHACUN DES QUATRE TERRITOIRES
- III. LA PRÉSERVATION DES INTÉRÊTS PROPRES DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER SUR LE PLAN NORMATIF
N° 90
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME VIII
TERRITOIRES D'OUTRE-MER
Par M. Jean-Marie GIRAULT,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Jacques Larché,
président
;
René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, Charles
Jolibois, Robert Pagès, Georges Othily,
vice-présidents
;
Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson,
secrétaires
; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert
Badinter, José Balarello, François Blaizot, André Bohl,
Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel
Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli,
Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Jean Derian, Michel
Dreyfus-Schmidt, Michel Duffour, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault,
Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel
Millaud, Jean-Claude Peyronnet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre
Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich, Robert-Paul Vigouroux.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
230
,
305
à
310
et T.A.
24
.
Sénat
:
84
et
85
(annexe n°
33
)
(1997-1998).
Lois de finances.
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Réunie le 19 novembre 1997 sous la présidence de
M. Michel Dreyfus-Schmidt, président d'âge, la commission des
Lois a examiné, sur le rapport de M. Jean-Marie Girault, les
crédits consacrés aux territoires d'outre-mer par le projet de
loi de finances pour 1998.
Outre les grandes lignes de l'effort budgétaire consenti en faveur des
territoires d'outre-mer, elle a souhaité concentrer son attention d'une
part, sur les évolutions politiques et institutionnelles de ces
territoires, en particulier le déroulement des négociations sur
l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, d'autre part, sur l'application des
lois et les réformes normatives envisagées par le Gouvernement.
La commission des Lois a émis un avis favorable à l'adoption des
crédits consacrés aux territoires d'outre-mer par le projet de
loi de finances pour 1998.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Chaque année, l'examen du budget du ministère de l'outre-mer
permet à votre commission des Lois d'exprimer son profond attachement
à la protection des intérêts propres des territoires
d'outre-mer au sein de la République et à la
nécessité de garantir l'égalité des ressortissants
de ces territoires et des ressortissants métropolitains devant la loi.
Les deux dernières années ont vu l'adoption par le Parlement de
plusieurs textes d'importance pour les territoires d'outre-mer. La mise en
oeuvre de ces réformes, la modernisation des liens d'association qui
unissent ces territoires à l'Union européenne et les
évolutions du dossier calédonien qui devra aboutir avant la fin
de l'année 1998 sont autant de perspectives qui retiennent l'attention
de votre commission des Lois.
Aussi se propose-t-elle, au-delà des grandes lignes de l'effort
financier consenti par l'État en faveur des territoires d'outre-mer (I),
de vous présenter les évolutions de la situation politique et
institutionnelle de chacun d'eux (II) ainsi que les réformes normatives
contribuant à la préservation de leurs intérêts
spécifiques (III).
I. LES CRÉDITS CONSACRÉS AUX TERRITOIRES D'OUTRE-MER
A. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS
Selon le jaune annexé au projet de loi de finances pour
1998, les crédits alloués aux territoires d'outre-mer
dans le
budget de l'État
au titre des dépenses ordinaires et des
crédits de paiement (y compris les crédits non répartis et
le coût de gestion des services métropolitains)
s'élèvent au total à 10.548.174 milliers de francs,
contre 10.420.665 milliers de francs dans le budget initial pour 1997, soit une
augmentation de 1,2 %, légèrement inférieure à
celle du budget général qui progresse de 1,4 %.
Les crédits consacrés aux territoires d'outre-mer
dans le
budget du ministère de l'outre-mer
s'élèvent à
1.085.760 milliers de francs, soit un peu plus du cinquième de ce budget
qui connaît globalement une forte progression de 7,3 %, laquelle
bénéficie essentiellement aux départements d'outre-mer.
Cette part des crédits du budget du ministère de l'outre-mer
représente près de 10,3 % de l'effort global consenti par le
budget de l'État en faveur des territoires d'outre-mer. Quatre autres
ministères, en effet, contribuent substantiellement à cet effort
: le ministère de l'éducation nationale et de la recherche (42
%), le ministère de la défense (19 %), le ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie (12 %) et le ministère
de l'intérieur (7 %).
Dans le budget du ministère de l'outre-mer, les crédits
consacrés aux territoires d'outre-mer sont, depuis la révision de
la nomenclature en 1996, répartis sous trois agrégats :
· L'agrégat
Administration générale
regroupe
les crédits consacrés aux moyens de fonctionnement et au parc
immobilier de l'administration centrale et des services
déconcentrés du ministère de l'outre-mer, à la
formation des agents, à l'action sociale, à l'assistance et
à la solidarité en faveur des victimes de calamités
naturelles. Les crédits figurant sous cet agrégat
s'élèvent pour 1998 à 318.797 milliers de francs,
soit une progression de près de 4,5 % par rapport au projet de loi de
finances initiale pour 1997.
· L'agrégat
Collectivités locales
regroupe les
subventions aux budgets locaux des territoires d'outre-mer et les subventions
à la section décentralisée du FIDES (Fonds
d'investissement pour le développement économique et social). Les
crédits qui y sont inscrits s'élèvent à
115.690 milliers de francs, soit une diminution de l'ordre de 2,7 %.
· L'agrégat
Développement économique et
social
regroupe les moyens d'intervention et les crédits
d'investissement du ministère de l'outre-mer destinés à la
mise en oeuvre de la politique de l'emploi, du logement social et du
développement économique, dans le cadre des contrats de plan et
des conventions de développement. Les crédits consacrés au
financement de ces actions s'élèvent pour 1998 à 605.560
milliers de francs, en diminution là encore de près d'1,5 %.
Ces évolutions doivent être cependant relativisées du fait
de transferts vers l'agrégat Administration générale de
crédits en provenance, d'une part, du budget du ministère de la
défense (4,2 millions de francs), et d'autre part, de l'agrégat
Collectivités locales (près de 5 millions de francs).
B. LA RÉPARTITION DES CRÉDITS ENTRE LES TERRITOIRES
La répartition des crédits entre les quatre
territoires, conformément aux données inscrites dans le jaune,
indique le montant des dépenses ordinaires et des crédits de
paiement affectés à chacun, hors crédits non
répartis (2.392 milliers de francs en 1997 ramenés à 2.297
dans le projet de loi de finances pour 1998) et crédits correspondant au
coût de gestion des services métropolitains (53.173 milliers de
francs en loi de finances initiale pour 1997 ; 51.492 pour 1998).
Près de 58 % des crédits du budget de l'outre-mer vont à
la Nouvelle-Calédonie, seule collectivité d'outre-mer à
avoir échappé l'an dernier à la mesure d'étalement
des contrats de plan sur une année supplémentaire. Plus de 32 %
de ces mêmes crédits bénéficient à la
Polynésie française. Seule la dotation affectée aux
T.A.A.F. régresse, après un gel de crédits de
1,77 million de francs au cours de l'année 1997.
AFFECTATION DES CRÉDITS DU MINISTÈRE DE
L'OUTRE-MER
(hors crédits non répartis et coût de gestion des
services métropolitains)
Territoire |
1997 |
1998 |
Nouvelle-Calédonie |
583.429 |
598.238 |
Polynésie française |
320.051 |
332.996 |
Wallis-et-Futuna |
40.666 |
42.908 |
T.A.A.F. |
58.110 |
57.829 |
TOTAL |
1.002.256 |
1.031.971 |
(en milliers de francs)
VENTILATION PAR TERRITOIRE DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE GLOBAL CONSACRÉ AUX TERRITOIRES D'OUTRE-MER (hors crédits non répartis et coût de gestion des services métropolitains)
Territoire |
1997 |
1998 |
Nouvelle-Calédonie |
4.525.057 |
4.676.777 |
Polynésie française |
5.323.905 |
5.283.985 |
Wallis-et-Futuna |
298.854 |
309.963 |
T.A.A.F. |
113.161 |
119.008 |
TOTAL |
10.260.977 |
10.389.733 |
(en milliers de francs)
Comme les années précédentes, l'effort consenti par l'ensemble des ministères en faveur des territoires d'outre-mer bénéficie en premier lieu à la Polynésie française, bien que les crédits qui lui sont alloués pour 1998 soient en diminution par rapport à ceux inscrits dans la loi de finances initiale pour 1997.
II. LA SITUATION DE CHACUN DES QUATRE TERRITOIRES
A. LA NOUVELLE-CALÉDONIE
1. Les forces politiques en présence
Les consultations électorales intervenues au cours de
l'année
1995
ont substantiellement modifié le paysage
politique calédonien.
Si les
élections municipales
du mois de juin se sont
caractérisées par une progression des indépendantistes (23
communes sur 33), les
élections provinciales
du 9 juillet se sont
traduites par une perte d'influence des deux partis signataires des accords de
Matignon, le RPCR (Rassemblement pour la Calédonie dans la
République) et le FLNKS (Front de libération nationale kanak
socialiste). Le RPCR a en effet perdu la majorité absolue au
Congrès du territoire (22 sièges sur un total de 54, contre 27
lors des élections de 1989) et le FLNKS a obtenu 12 sièges
(contre 19 précédemment).
Si MM. Jacques Lafleur (RPCR) et Léopold Jorédié (FLNKS)
ont respectivement été reconduits à la présidence
des assemblées de la province sud et de la province nord, M. Richard
Kaloï (FLNKS) a dû céder celle de la province des Îles
à M. Nidoish Naisseline (LKS), grand chef coutumier de Gwahma
(Maré).
Élu en 1995 président du
Congrès du territoire
et
reconduit dans cette fonction en juin 1996, M. Pierre Frogier (RPCR),
député de la deuxième circonscription et maire du
Mont-Dore (province sud) ne s'est pas représenté lors du
renouvellement annuel de la présidence et du bureau, le 16 juillet
1997
. M. Harold Martin (RPCR), membre de l'assemblée de la
province sud et maire de Païta lui a succédé. M. Rock
Wamytan (FLNKS-UC) conserve la première vice-présidence. Au
total, le RPCR obtient trois postes de vice-président de même que
le FLNKS, tandis que l'UNCT (Une Nouvelle-Calédonie Pour Tous) conduite
par M. Didier Leroux et le FDIL (Front de Développement des Îles
Loyauté) en obtiennent chacun un.
Dès son élection, M. Harold Martin a réaffirmé
l'attachement du RPCR aux accord de Matignon, sa volonté de passer
à la
nouvelle étape
d'un accord négocié
excluant l'indépendance pour 1998, et le soutien de son parti
à la réalisation d'une usine métallurgique dans la
province nord
. Pour sa part, le président du FLNKS, M. Rock Wamytan,
a estimé qu'il fallait poursuivre avec le RPCR
dans le sens du
partenariat, rendu nécessaire par l'ouverture prochaine des
négociations politiques
sur l'avenir institutionnel du territoire.
Il cependant souligné la volonté des indépendantistes
d'arriver à la table des négociations avec son projet d'un
État en association avec la France
.
A l'occasion des
élections législatives du printemps 1997
,
le FLNKS, considérant que
ce scrutin présentait avant tout un
intérêt hexagonal
et que le découpage des deux
circonscriptions était
contraire à l'esprit des accords de
Matignon
a décidé de ne pas y participer et de ne pas donner
de consigne de vote. Cette attitude est conforme à la charte du
mouvement indépendantiste de 1984, excluant toute participation à
des élections nationales. Le FLNKS avait cependant
présenté des candidats aux élections sénatoriales
de 1992 et aux élections législatives de 1993.
Dans la première circonscription, regroupant Nouméa, l'île
des Pins et les trois communes de la province des Îles Loyauté, M.
Jacques Lafleur (RPCR), député sortant, a été
réélu dès le premier tour avec 63,7 % des suffrages
exprimés. Son principal adversaire, M. Didier Leroux (UNCT) a obtenu un
peu moins de 20 % des voix. Dans la seconde circonscription, qui recouvre les
vingt-huit autres communes du territoire, M. Pierre Frogier (RPCR),
député depuis le décès en novembre 1996 de M.
Maurice Nenoupwataho, a été élu au deuxième tour de
scrutin avec 60,99 % des suffrages exprimés. Au premier tour en effet,
bien qu'ayant recueilli 56,70 % des suffrages exprimés, 112 voix lui
avaient fait défaut pour atteindre le seuil du quart des
électeurs inscrits.
2. Vers une reprise des négociations sur l'avenir institutionnel du territoire
La Nouvelle-Calédonie évolue, depuis 1988, dans le cadre des accords de Matignon-Oudinot signés le 26 juin qui ont permis d'assurer durablement la paix civile sur le territoire. La loi référendaire du 9 novembre 1988 précise dans son article 2 qu' entre le 1er mars et le 31 décembre 1998, les populations intéressées de la Nouvelle-Calédonie seront appelées à se prononcer par un scrutin d'autodétermination, conformément aux dispositions de l'article 53 de la Constitution, sur le maintien du territoire dans la République ou sur son accession à l'indépendance . Cette échéance est désormais proche et les négociations politiques sur l'avenir institutionnel du territoire, engagées à l'automne 1995, ont été interrompues en avril 1996 par le FLNKS qui a fait du règlement de la question minière un préalable à la reprise des discussions. Or, le projet de création d'une usine métallurgique de transformation du nickel semble aujourd'hui pouvoir trouver une issue favorable.
a) Un préalable : le règlement du conflit minier
Le nickel constitue la première richesse du territoire
qui fournit plus de 12 % de la production mondiale et détient plus de 20
% des réserves mondiales. En 1996, le nickel, sous forme de minerais ou
de produits métallurgiques, a représenté près de 94
% des exportations calédoniennes. 55 % de la production extraite
ont été exportés sous forme de minerai brut,
essentiellement vers le Japon, l'Australie et les États-Unis, pour une
valeur de 665 millions de francs. L'extraction et le traitement de cette
matière première sont pourvoyeurs d'emplois pour le territoire :
3.500 emplois sont en effet directement liés à l'exploitation du
nickel, pour une population d'environ 200.000 habitants.
La Nouvelle-Calédonie compte huit sociétés minières
dont la SLN (Société Le Nickel), filiale du groupe Eramet dont
l'État est actionnaire, par l'intermédiaire d'ERAP, à
hauteur de 55,5 %. La SLN est seule à transformer le minerai sur place :
elle possède à Nouméa une usine de traitement, emploie
2.130 salariés (1.480 à Nouméa et 650 dans les mines)
et assure environ 10 % de la production intérieure brute du territoire.
La SMSP (Société minière du sud Pacifique), qui emploie
quant à elle 700 personnes sur cinq sites, est devenue le premier
exportateur de minerai du territoire (1.381.000 tonnes en 1996). L'usine de
traitement qu'elle envisage de construire avec son partenaire canadien
Falconbridge dans la province nord, projet dont le coût est
évalué à 5 milliards de francs, devrait contribuer
à un rééquilibrage économique du territoire. La
viabilité du projet est cependant subordonnée à la
réalisation d'un échange de massifs miniers entre Eramet et la
SMSP, dossier qui a connu de multiples rebondissements.
Le processus d'élaboration d'un accord fut en effet laborieux
malgré un vote unanime du Congrès en novembre 1996 en faveur de
la création de l'usine du nord. En dépit des pressions
exercées, en particulier par les autorités gouvernementales
françaises, les dirigeants d'Eramet, soucieux de préserver les
intérêts de ses actionnaires minoritaires, se sont longtemps
montrés réticents, souhaitant un accord d'échange
sur
des bases équitables
entre les titres miniers du massif de Koniambo
et ceux du massif de Poum appartenant à la SMSP.
Au mois de juillet 1997, le Premier ministre, M. Lionel Jospin, a ainsi
été conduit à confier à un médiateur, M.
Philippe Essig, la mission de procéder à une évaluation
des perspectives économiques et industrielles du projet de construction
d'une usine métallurgique de nickel dans la province nord. Après
avoir élaboré un rapport d'étape, rendu public le 20
septembre, considérant comme
crédible
le projet
présenté par la SMSP et Falconbridge, M. Philippe Essig a remis
le 1er novembre dernier son rapport définitif. Selon le Gouvernement, la
solution qu'il préconise a recueilli l'accord des trois
sociétés concernées, Eramet, la SMSP et Falconbridge.
L'accord prévoit la création d'une
structure ad hoc
chargée d'acquérir les titres miniers des deux gisements de
nickel de Poum et Koniambo, situés au nord du territoire. Celle-ci
céderait ensuite ses droits à la SMSP dès lors que
la
décision de construire l'usine sera prise
. Cette usine serait
alimentée en minerai par le massif de Koniambo tandis que la production
du massif de Poum approvisionnerait l'actuelle usine de Doniambo,
exploitée par le groupe Eramet-SLN.
Cet accord a été approuvé le 6 novembre par le PDG du
groupe Eramet, M. Yves Rambaud.
Après une reconnaissance du massif de Koniambo et une étude
approfondie de la faisabilité technique et financière de
l'opération, la SMSP et Falconbridge devront décider, au 1er
janvier 2002, si la construction de l'usine doit être engagée. Ces
sociétés pourraient cependant disposer d'un délai de
réflexion supplémentaire de trois ans pour prendre leur
décision.
b) L'avenir institutionnel : vers une solution consensuelle
La conclusion d'un accord minier, exigée comme
préalable à la reprise des négociations politiques sur
l'avenir institutionnel du territoire par les indépendantistes, à
l'exception d'une de ses composantes, le Palika (Parti de Libération
Kanak), devrait permettre d'engager de nouvelles discussions avant la fin de
l'année.
A l'occasion du 28ème congrès de l'Union calédonienne
(UC), principale composante du FLNKS, M. Bernard Lepeu, reconduit à la
présidence de ce mouvement, dressant un bilan de neuf années de
mise en oeuvre des accords de Matignon, a noté l'amorce d'un
rééquilibrage économique du territoire et a rappelé
l'objectif du FLNKS d'obtenir l'instauration d'une
indépendance-association avec la France dès 1998 tout en se
prononçant pour la recherche d'une solution consensuelle
négociée avec l'État et les anti-indépendantistes.
Lors d'une visite en France, à la fin du mois de juin dernier, M. Rock
Wamytan, président du FLNKS, avait expliqué que son parti,
plutôt qu'un référendum d'autodétermination
prévu par les accords de Matignon, souhaitait parvenir à
une
solution négociée soumise à un référendum
d'approbation
. De son point de vue, une
souveraineté
partagée
reviendrait à confier la justice, la monnaie, la
défense et la sécurité intérieure à la
France, les autres compétences, dont le contrôle de l'immigration,
relevant du nouvel État associé qui serait créé.
Lors de son déplacement en Nouvelle-Calédonie au début du
mois de septembre, M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'outre-mer, avait
déclaré :
l'objectif c'est une solution qui s'inspire des
accords de Matignon, qui permette aux deux communautés de continuer
à vivre ensemble dans la paix, en assurant la promotion des Kanaks. La
Nouvelle-Calédonie a une possibilité de se maintenir dans le
cadre de la République, en donnant une plus large autonomie
. Prenant
en considération les observations du grand chef coutumier Evanes Boula
relatives au nécessaire élargissement du rôle joué
par les conseils coutumiers, il a en outre assuré que sa requête
serait
intégrée
dans les réflexions sur les futures
institutions de la Nouvelle-Calédonie.
Quelle que soit la solution politique qui sera négociée, le
Gouvernement, en application de la loi référendaire du 9 novembre
1988, a pris les dispositions nécessaires pour faire réviser les
listes électorales et établir les tableaux annexes
répertoriant les électeurs non admis à participer au
scrutin de 1998.
3. La poursuite du rééquilibrage économique entre les provinces
L'article 85 de la loi référendaire du 9
novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à
l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie dispose que
des
contrats de développement déterminent les actions à
engager
pour atteindre un certains nombre d'objectifs dont :
Favoriser
un rééquilibrage du territoire par rapport à
l'agglomération chef-lieu et améliorer les infrastructures pour
permettre le désenclavement des populations isolées. L'effort
devra porter, d'une part, sur l'aménagement des voies routières
transversales et la réalisation des équipements, y compris
portuaires, nécessaires au développement d'un centre urbain dans
la province nord, d'autre part, sur le renforcement des infrastructures
communales et provinciales d'adduction d'eau, d'assainissement, de
communication et de distribution électrique
.
Pour atteindre ces objectifs et en application de l'article 84 de la loi
précitée, des conventions et des contrats de développement
ont été conclus entre, d'une part, l'État et le
territoire, et d'autre part, l'État et chacune des trois provinces.
Après une série de contrats couvrant la période 1990-1992,
de nouveaux contrats ont été conclus pour la période
1993-1997 : une convention de développement entre l'État et le
territoire en date du 8 juin 1993 et trois contrats entre l'État et les
provinces en date du 4 février 1993. Le montant total des aides
contractualisées s'élève à 3,9 milliards de francs,
dont 1,65 milliards de francs représentant la contribution de
l'État, 1,07 milliards de francs étant imputés sur le
budget du secrétariat d'État à l'outre-mer.
Les trois contrats de développement État-provinces
représentent un montant de 2,603 milliards de francs dont 1,426
milliards, soit 55 %, sont à la charge de l'État et 1.177
milliards, soit 45 %, sont assumés par les provinces. Près de la
moitié de la contribution de l'État bénéficie
à la province nord. Les principales opérations
d'aménagement financées dans le cadre de ces contrats sont les
suivantes :
· Pour la province nord :
- l'achèvement de la transversale Koné-Tiwak ainsi que
l'aménagement de routes provinciales ;
- l'achèvement des aéroports de Koumac et Canala et
différents aménagements portuaires ;
- la mise en place d'équipements sportifs, de centres culturels et de
constructions scolaires ;
- des actions dans le domaine de l'environnement (alimentation en eau potable,
création de fosses septiques) ;
- l'aménagement de zones d'activités.
· Pour la province sud :
- la réalisation de trois opérations routières : route de
Thio à Grand Borendy, voie de dégagement ouest et route de
Bourabé ;
- deux aménagements de routes combinés à la
création de zones industrielles et artisanales et à la mise en
valeur des sites du sud de la Grande Terre ;
- la mise en place d'équipements sanitaires et sociaux,
d'équipements sportifs et de salles culturelles ;
- la rénovation d'hôtels ;
- la mise en place de réseaux d'alimentation en eau potable.
· Pour la province des Îles :
- l'aménagement de réseaux d'alimentation en eau potable ;
- l'aménagement de décharges contrôlées ;
- la réfection du pont de Tekiné ;
- la mise en place d'équipements sanitaires et scolaires.
Pour ces trois contrats, le taux d'engagement des dépenses était
au 30 juin 1997 de 50,8 %, chiffre qui révèle un retard
d'exécution certain, dû pour une part aux difficultés
techniques rencontrées dans l'instruction des dossiers. Il est donc
prévu que 1998 soit une année de transition permettant d'achever
les programmes en cours, l'effort financier étant maintenu avec une
dotation de 262,2 millions de francs.
La convention État-territoire
, d'un montant de 520 millions de
francs, dont 47 % à la charge de l'État, doit quant à elle
permettre la construction d'un centre de formation des apprentis à
Nouméa, la rénovation du centre hospitalier territorial G.
Bourret, et la poursuite du programme d'électrification rurale, de la
mise en place d'équipements communaux structurants et du programme
téléphone rural.
Pour aider les provinces et le territoire à définir les
investissements productifs et à accompagner la réalisation des
projets de développement, un poste de
commissaire au
développement économique de la Nouvelle-Calédonie
a
été créé par un décret du 23 février
1995. Ce commissaire, nommé pour trois ans renouvelables, est
placé auprès du haut-commissaire de la République. Pour
accomplir sa tâche, il bénéficie du soutien de l'ADECAL
(Agence pour le Développement Économique de la
Nouvelle-Calédonie), association regroupant l'ensemble des
interlocuteurs politiques, économiques et sociaux concernés. En
1996, des études ont été menées en matière
d'aménagement du territoire (zone de développement de
Nepoui-Koni-Pouembout) et de développement de différentes
filières (pêche industrielle, lait, tourisme).
La commission de rééquilibrage et du développement
,
créée au mois de décembre 1995, chargée
d'identifier les dossiers prioritaires et de coordonner les efforts de
l'ensemble des acteurs du territoire, s'est réunie au début de
l'année 1996. Elle s'est engagée dans un important travail
d'analyse et de réflexion mené au sein de huit sous-groupes
réunissant chacun élus, fonctionnaires de l'État et du
territoire et représentants des organisations socio-professionnelles.
Chaque sous-groupe a rendu fin février 1996 un rapport sur les
thèmes dont il était en charge (éducation,
emploi-formation, logement, développement touristique, transports,
économie minière, énergie, coopération
régionale et développement). Leurs rapports constituent une
importante documentation et contiennent les éléments de
réflexion permettant de définir des orientations à long
terme pour un développement équilibré du territoire.
L'arrêt des discussions politiques sur l'avenir institutionnel de la
Nouvelle-Calédonie en avril 1996 a cependant interrompu
l'activité de la commission: les travaux de synthèse
prévus n'ont donc pas vu le jour. Avec la reprise des
négociations, la réflexion devra être poursuivie, la
difficulté étant d'effectuer des choix et d'établir un
ordre de priorités parmi toutes les actions envisagées (base pour
pêche industrielle lourde dans la province nord, pour une pêche
industrielle plus légère dans la province des Îles ;
poursuite du développement touristique ; réorientation de la
formation de cadres de l'administration vers les activités du secteur
marchand ; poursuite de l'installation d'un réseau de production et de
distribution d'électricité en faveur de la province nord ...etc).
B. LA POLYNÉSIE FRANÇAISE
1. Les évolutions institutionnelles et politiques
a) La mise en oeuvre du nouveau statut
L'année écoulée constitue la
première année de mise en oeuvre du nouveau statut d'autonomie de
la Polynésie française résultant de deux lois, l'une
organique, l'autre simple, du 12 avril 1996. La notion d'autonomie constitue la
clef de voûte de cette réforme statutaire. Si la Polynésie
française reste une collectivité territoriale de la
République, elle bénéficie désormais d'une
autonomie institutionnelle renforcée :
- les compétences de l'État sont d'attribution et strictement
limitées aux matières de souveraineté telles que les
relations internationales - sous réserve des possibilités
offertes au président du gouvernement de la Polynésie
française -, la défense, la justice, le droit civil, les
libertés publiques ...
- la légalité des délibérations de
l'assemblée de la Polynésie française et de sa commission
permanente sont désormais jugées par le tribunal administratif de
Papeete après avis du Conseil d'État dès lors que l'exacte
application de la répartition des compétences entre l'État
et le territoire est en cause.
Le décret n° 97-30 du 13 janvier 1997 a précisé
les conditions dans lesquelles le Conseil d'État se prononce : le
jugement de transmission ainsi que le dossier sont communiqués au
secrétariat du contentieux du Conseil d'État par le greffe du
tribunal administratif et le dossier est examiné par le Conseil
d'État conformément aux règles applicables en
matière de procédure contentieuse ; les parties et le ministre de
l'outre-mer disposent d'un mois à compter de la notification du jugement
de renvoi pour produire des observations ; l'avis du Conseil d'État est
notifié aux parties, au haut-commissaire de la République et au
ministre de l'outre-mer ; cet avis est publié au journal officiel de la
Polynésie française et peut l'être au journal officiel de
la République française si le Conseil d'État le
prévoit. Cette procédure de demande d'avis a déjà
mise en oeuvre à trois reprises.
La possibilité de solliciter l'avis du Conseil d'État en dehors
de toute procédure contentieuse lorsque l'appréciation de la
répartition des compétences entre l'État et le territoire
soulève une difficulté, a également été
utilisée : quatre demandes d'avis ont ainsi émané du
président du gouvernement de la Polynésie française. Dans
ce cas, le décret précité prévoit que la demande
est examinée conformément aux dispositions régissant la
procédure devant les sections administratives du Conseil d'État.
- Afin de renforcer les possibilités données à la
Polynésie française de réussir son insertion dans son
environnement régional, les pouvoirs du président du gouvernement
sont accrus.
Aux termes du statut de 1984, celui-ci disposait d'un pouvoir d'initiative pour
proposer au Gouvernement de la République la négociation
d'accords concernant la région du Pacifique et pouvait être
désigné pour mener les négociations et représenter
la France dans les institutions et organismes régionaux.
Avec le nouveau statut, il peut non seulement négocier mais aussi
signer, au nom de l'État, des accords internationaux concernant la
région du Pacifique s'il y a été préalablement
habilité par les autorités de la République. Il est par
ailleurs plus étroitement associé aux négociations
internationales se déroulant dans cette région : cette
association est de droit lorsque les négociations concernent des
domaines de la compétence du territoire ; lorsque les
négociations intéressent les domaines de compétence de
l'État, cette association reste facultative. Investi par les
autorités de la République, il peut également
négocier et signer des arrangements administratifs destinés
à préciser les conventions internationales dans des domaines de
compétence territoriale. Dans ces mêmes matières, il peut
négocier et signer au nom du territoire, dans le respect des engagements
internationaux souscrits par la France, des conventions de coopération
décentralisée avec des collectivités locales
françaises ou étrangères. Il peut enfin être
autorisé par les autorités de la République à
représenter la France au sein des organismes régionaux du
Pacifique dépendant d'institutions spécialisées des
Nations-Unies.
- Avec la conviction que les élus polynésiens sont plus aptes
à définir les mesures propres à favoriser le
développement économique, social et culturel du territoire, les
compétences de ce dernier ont été élargies.
Le territoire assure ainsi désormais l'exploration et l'exploitation des
ressources de la mer dans les eaux intérieures, les eaux territoriales
et la zone économique exclusive : il gère de ce fait les
richesses naturelles d'un espace maritime d'une superficie de plus de cinq
millions de kilomètres carrés. La totalité du domaine
public maritime lui est transféré, à la seule exception
des emprises affectées à l'exercice des compétences de
l'État (sécurité maritime, police en mer). La
Polynésie française reste tenue par les engagements
internationaux de la France qui conserve ses responsabilités
d'État côtier au regard des conventions internationales. Enfin,
une loi devra fixer ultérieurement la date d'entrée en vigueur du
transfert au territoire des lagons de Mururoa et de Fangataufa.
- les dessertes maritimes et aériennes internationales pour lesquelles
la Polynésie française représente la seule escale sur le
territoire national deviennent une compétence exclusive du territoire.
Pour les dessertes reliant la Polynésie à un autre point du
territoire national, l'État, qui demeure compétent, doit
recueillir l'avis du conseil des ministres de la Polynésie
française. Il s'agit de favoriser le développement de l'industrie
touristique qui constitue un atout majeur de l'économie du territoire.
L'ambition de la réforme statutaire est de conférer aux
responsables polynésiens les compétences et les moyens de
s'engager sur la voie d'un véritable développement dans le cadre
d'un statut de large autonomie au sein de la République. A cet
égard, le nouveau dispositif institutionnel paraît fonctionner de
façon satisfaisante.
L'élargissement des compétences territoriales se traduit au
quotidien par de nombreuses initiatives des autorités locales. Ainsi, en
matière de transport aérien international, le président du
gouvernement de la Polynésie française a signé un accord
avec l'Australie le 21 février 1997 qui doit permettre de
développer les relations aériennes régionales. Dans un
autre domaine, l'assemblée de la Polynésie française a
adopté une délibération le 20 février 1997 sur
l'exploitation des ressources de la mer territoriale et de la zone
économique exclusive (Z.E.E.).
Enfin, l'article 91 de la loi organique du 12 avril 1996 portant statut
d'autonomie de la Polynésie française, introduit à
l'initiative du Sénat, a créé une
commission paritaire
de concertation
entre l'État, le territoire et les communes,
comprenant six représentants de l'État désignés par
le haut-commissaire, six représentants du territoire
désignés par l'assemblée de la Polynésie
française à la représentation proportionnelle des groupes
politiques la composant et six représentants des communes à
raison d'un pour chacun des archipels, élu par les maires de ces
archipels. Cette commission est présidée alternativement pour un
an par un représentant de chaque collège et se réunit au
moins une fois par an à l'initiative de son président. Elle a
pour mission d'assurer aux communes la possibilité de participer au
développement économique, social et culturel du territoire.
La constitution et l'installation de cette commission ont
nécessité plusieurs mois. La désignation de ses membres
est intervenue au printemps 1997. Concernant les représentants de
l'État, le haut-commissaire qui préside la commission, a
désigné : le secrétaire général de la
Polynésie française, les chefs de subdivision administrative des
îles du Vent, des îles Sous-le-Vent et des Marquises, le directeur
de la mission d'aide financière et de coopération du
haut-commissariat. La première réunion de la commission paritaire
de concertation a été reportée plusieurs fois : elle s'est
finalement tenue le 29 août 1997. Une deuxième réunion
s'est tenue le 14 novembre et une troisième est programée pour le
26 novembre. Plusieurs thèmes ont été
évoqués : l'éducation, l'adduction d'eau, le traitement
des déchets, l'assainissement, la circulation routière et le
développement des archipels.
b) Le paysage politique polynésien
Le renouvellement de l'assemblée de la
Polynésie française
, qui a eu lieu le 12 mai 1996, a
confirmé une certaine bipolarisation du paysage politique
polynésien.
Le Tahoeraa, parti de M. Gaston Flosse, président du gouvernement de la
Polynésie française, a obtenu la majorité absolue avec 22
sièges sur les 41 composant l'assemblée (contre 18
précédemment). Le Tavini, parti indépendantiste
présidé par M. Oscar Temaru, a plus que doublé le nombre
de ses élus territoriaux en emportant 10 sièges (contre 4
auparavant). Le nombre de membres de l'assemblée de la Polynésie
française favorables à l'indépendance
s'élève cependant à 11 du fait du ralliement du
représentant de la liste Alliance 2000. Les autres élus sont : 5
représentants du Aia Api, présidé par M. Émile
Vernaudon, et respectivement 1 représentant du Fetia Api (opposition
DVG), du Te Avei' a Mau (centriste) et du Te Henua Enata Kotoa (parti
marquisien). M. Justin Arapari (Tahoeraa) a été élu
président de l'assemblée de la Polynésie française
le 23 mai 1996 et M. Henri Flohr (Aia Api) préside la commission
permanente. Ils ont été reconduits le 10 avril 1997. M. Gaston
Flosse a été réélu président du gouvernement
de la Polynésie française le 28 mai 1996 et a
désigné le 29 mai son gouvernement, composé de quatorze
ministres.
Les élections législatives
du mois de mai dernier ont
conduit à la désignation de deux nouveaux députés
de la Polynésie française, les députés sortants,
MM. Gaston Flosse (RPR) et Jean Juventin (République et Liberté)
ne se représentant pas. En application des dispositions de l'article 25
de la loi du 4 janvier 1993, elles se sont déroulées sur ce
territoire une semaine avant le scrutin organisé dans le reste de la
France, soit le 18 mai 1997.
Dans la première circonscription, M. Michel Buillard (RPR), maire de
Papeete et ministre du gouvernement de la Polynésie française, a
été élu dès le premier tour avec 51,58 % des
suffrages exprimés. M. Oscar Temaru, chef de file des
indépendantistes, son principal adversaire, a cependant obtenu
41,62 % des voix. Concerné par les dispositions relatives au cumul
des mandats, M. Michel Buillard, conservant la mairie de Papeete, a
démissionné de ses fonctions de ministre et de membre de
l'assemblée territoriale. Dans la seconde circonscription, M.
Émile Vernaudon (DVD), membre de l'assemblée de la
Polynésie française et maire de Mahina, a été
élu, lui aussi, dès le premier tour, avec 58,91 % des suffrages
exprimés. Son principal adversaire, M. James Salmon
(indépendantiste), a obtenu 23,64 % des voix.
2. Vers une reconversion de l'économie polynésienne
a) Le démantèlement du Centre d'expérimentation du Pacifique (C.E.P.)
Le programme d'essais nucléaires dans le Pacifique a
constitué une source d'activités et de revenus très
importante pour la Polynésie française (versements au budget du
territoire correspondant aux taxes de nature douanière frappant les
matériels introduits en Polynésie ; commandes passées
à des entreprises locales ; emplois procurés à des
personnels locaux bénéficiant souvent, de ce fait, d'une
formation professionnelle ; retombées, pour l'économie locale,
des rémunérations versées aux personnels d'origine
métropolitaine résidant temporairement en Polynésie).
L'arrêt définitif des essais (le dernier date du 27 janvier 1996)
et la décision de fermer le C.E.P. ont mis un terme à ces
transferts. Aussi le principe d'une compensation financière devant
permettre à l'économie polynésienne d'organiser sa
reconversion a-t-il été décidé : en
conséquence, une convention pour le renforcement de l'autonomie
économique de la Polynésie française a été
signée le 25 juillet 1996 entre le Premier ministre et le
président du gouvernement de la Polynésie française. Elle
prévoit le versement annuel au territoire, pendant dix ans, d'une somme
de 990 millions de francs et distingue trois enveloppes :
- la première, d'un montant de 220 millions de francs par an, fait
l'objet d'un versement global de l'État, et compense la perte de
recettes douanières résultant de la fermeture du C.E.P. ;
- la deuxième tend à compenser la disparition de
l'activité de formation que le centre dispensait aux personnels
recrutés. Le service militaire adapté (SMA) doit être
maintenu avec pour objectif de former 300 personnes par an ;
- le solde a vocation à alimenter un fonds de reconversion d'aide
à la création et au développement d'activités
pourvoyeuses d'emplois, en particulier dans les domaines du tourisme, de
l'agriculture et du logement. Pendant une première période de
trois ans, 110 millions de francs doivent être consacrés à
la réalisation de programmes de logements sociaux utilisant la main
d'oeuvre locale. Un comité de gestion du fonds de reconversion,
co-présidé par le haut-commissaire et le président du
gouvernement de la Polynésie française, a été mis
en place le 15 juillet 1997. Un comité technique consultatif
complète ce dispositif en associant les communes et les organisations
socio-professionnelles à l'examen des projets : il s'est réuni
pour la première fois le 11 septembre 1997.
Le démantèlement des installations du C.E.P. constituant un
chantier important dont le coût total est estimé à plus de
130 millions de francs, les sommes versées au territoire au titre de la
compensation n'atteindront qu'en 1999 les montants précités. Les
opérations de démantèlement, commencées il y a plus
d'un an, devraient être achevées à l'été
1998. Actuellement, 60 % des installations ont été
démontées et les équipements scientifiques et techniques
du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), ainsi que ceux
considérés comme majeurs pour la défense ont
été réexpédiés en métropole. Certains
matériels doivent être transportés sur l'atoll de Hao pour
servir aux légionnaires du 5ème régiment étranger.
Un comité consultatif de répartition destiné à
assurer la transparence de ces cessions a été chargé de
veiller à une attribution équitable de ces matériels aux
cinq archipels.
L'ensemble des mesures, arrêtées d'un commun accord entre
l'État et le territoire, doivent permettre d'organiser la mutation
économique de la Polynésie française. Un programme
stratégique a ainsi été défini : il a reçu
au mois d'avril 1997, après consultation des différents
ministères concernés, l'approbation de l'État. Les
premières actions envisagées pour favoriser le
développement de archipels sont : la création de nouveaux
aérodromes aux Tuamotu et aux Australes, la construction d'un
aéroport international aux Marquises, l'installation aux Marquises
d'équipements portuaires pour favoriser le développement de la
pêche (quais, entrepôts frigorifiques), la mise en place de moyens
de traitement des eaux usées et des déchets pour prévenir
la pollution des lagons.
Un dispositif de suivi doit enfin être mis en place pour procéder
à une évaluation périodique des projets engagés. M.
Jean-Jack Queyranne, ministre de l'outre-mer, a en effet estimé, lors de
son déplacement en Polynésie française au mois
d'août dernier, que l'État devait assumer
toute sa part dans le
développement économique, social et culturel
du territoire,
mais que corrélativement, il avait aussi pour
obligation de
contrôler l'attribution des fonds publics et la transparence de leur
utilisation
.
b) Les concours financiers de l'État
La convention du 25 juillet 1996 pour le renforcement de
l'autonomie économique de la Polynésie française est venue
compléter un dispositif contractuel déjà en place
constitué par le contrat de développement du 2 mai 1994, conclu
entre l'État et le territoire pour cinq ans en application de l'article
8 de la loi du 5 février 1994 d'orientation pour le développement
économique, social et culturel de la Polynésie française,
et par le contrat de ville relatif à la zone urbaine de Papeete conclu
pour la même période le 30 août 1994 et inclu dans le
contrat de développement. La durée d'exécution de ces
contrats a été portée à six ans en vertu de la
décision d'étalement sur une année supplémentaire
prise l'an dernier.
Le contrat de développement
s'articule autour de trois programmes
d'intervention d'un coût total sur la période de 2.902 millions de
francs, dont 1.451 millions de francs à la charge de l'État :
- le développement économique, en particulier dans les domaines
du tourisme, de l'agriculture et de la formation professionnelle ;
- l'équipement du territoire et le désenclavement des archipels ;
- l'insertion sociale.
Le contrat de ville
prévoit une participation de l'État de
100 millions de francs, les communes et le territoire s'engageant
respectivement à hauteur de 23,4 et de 0,8 millions de francs. Les
actions qu'il finance concernent la prévention de la délinquance,
l'insertion des jeunes, le logement social et les aménagements urbains.
La signature relativement tardive de ces contrats n'a pas permis le lancement
d'opérations nombreuses dès 1994. Ce retard initial a
été en grande partie comblé en 1995 et la mise en oeuvre
des projets décidés s'est poursuivie à un rythme soutenu
en 1996. Aussi le taux d'engagement des crédits au 31 décembre
1996 s'élève-t-il à près de 50 %.
Hormis cette politique contractuelle tout à fait essentielle pour le
développement de l'économie polynésienne, il convient de
souligner l'importance pour ce territoire des
aides fiscales à
l'investissement
résultant de la loi du 11 juillet 1986, dite loi
Pons. Selon l'Institut d'émission de l'outre-mer, les aides
accordées en faveur de la Polynésie ont été, en
1996, les plus élevées de celles bénéficiant aux
collectivités d'outre-mer : 68 dossiers ont ainsi été
agréés pour un montant global de 165 millions de francs,
essentiellement dans les domaines de l'hôtellerie et des transports. Le
développement de ces domaines d'activité est crucial pour
l'économie polynésienne en phase de reconversion. Si des abus ont
pu être commis, justifiant une moralisation du dispositif, il convient de
veiller à ce que les modifications qui seraient introduites par la loi
de finances pour 1998 n'aient pas de répercussions négatives sur
le développement économique du territoire et préservent
les créations d'emplois.
C. WALLIS ET FUTUNA
1. Les évolutions institutionnelles et politiques
Ce territoire demeure régi par la loi n° 61-814 du
29 juillet 1961, modifiée successivement par les lois du 29
décembre 1971, du 26 juin 1973, du 18 octobre 1978 et par la loi
organique du 20 février 1995.
Le statut fait de l'administrateur supérieur à la fois le
représentant de l'État et l'exécutif du territoire,
chargé d'assurer l'exécution des délibérations de
l'assemblée territoriale. Une place importante est cependant
réservée aux institutions traditionnelles, le roi et les
ministres de chacun des trois royaumes étant chargés de veiller
au respect de la coutume.
Alors qu'au début des années 1980 avait été
évoquée la possibilité d'une révision de ce statut,
ces velléités sont restées sans lendemain. A la fin de la
session budgétaire de 1995, il est cependant apparu que les dispositions
du décret du 14 mars 1962 applicables à l'élection des
membres de la commission permanente de l'assemblée territoriale
conduisaient à des difficultés de fonctionnement. Aussi
l'État a-t-il pris l'initiative, par un décret
n° 96-1007 du 22 novembre 1996, de moderniser les conditions de
désignation des membres de cette commission en supprimant l'obligation
de résidence dans l'île de Wallis.
Lors de son déplacement à Paris au mois de juin 1996, le
président de l'assemblée territoriale avait indiqué
qu'après avoir consulté les autorités coutumières
et religieuses il avait proposé aux élus d'engager une
réflexion sur les réformes statutaires à envisager.
Néanmoins, la question statutaire n'a pas été
abordée lors de la visite à Paris, au mois de novembre suivant,
d'une délégation de l'assemblée territoriale, ni, plus
récemment, lors de la campagne électorale précédant
le renouvellement de cette assemblée du mois de mars 1997.
La volonté de faire évoluer les modalités de
fonctionnement des institutions territoriales s'est traduite par une demande
adressée au représentant de l'État tendant à ce que
les membres du conseil territorial soient plus complètement
informés des dossiers et des projets de délibération qui
leur sont obligatoirement soumis avant leur transmission à
l'assemblée territoriale ou à la commission permanente. En outre,
la réunion des conseils de circonscription en présence de
l'administrateur supérieur devrait être l'occasion
d'élaborer les projets, notamment de nature budgétaire, dans la
plus grande concertation avec les autorités coutumières.
Le 24 novembre 1996, une délégation d'élus et de chefs
coutumiers a été reçue par le Président de la
République. A cette occasion, le président de l'assemblée
territoriale qui conduisait la délégation a
réaffirmé la fidélité du territoire à la
France et souhaité la mise en place pour les dix prochaines
années des moyens nécessaires à l'engagement d'une
véritable politique de rattrapage et de développement
économique, social et culturel.
Le renouvellement de l'assemblée territoriale
a eu lieu
le 16
mars 1997
. Le scrutin a été marqué par une forte
participation (87,21 % de votants sur 7.645 inscrits), y compris à
Poï (83,80 % de participation), sur l'île de Futuna, en dépit
des dommages causés au réseau routier par le cyclone Gavin la
semaine précédente. 12 des 20 membres composant
l'assemblée ont été reconduits pour cinq ans. Le RPR a
emporté une majorité de 14 sièges, soit cinq de plus
qu'aux précédentes élections, les 6 autres revenant aux
candidats socialistes et divers gauche. M. Victor Brial (RPR), originaire de
Futuna, a été élu président de l'assemblée
territoriale.
Cependant, le conseil du contentieux administratif, juge de l'élection,
saisi de contestations des opérations électorales, a
annulé les élections dans quatre circonscriptions sur cinq. Le
Conseil d'État, saisi en appel, n'a pas encore statué.
Lors des
élections législatives des 25 et 1er juin 1997
,
M. Victor Brial a été élu au second tour avec 51,34 % des
suffrages exprimés, devançant le député sortant M.
Kamilo Gata (socialiste) de 169 voix. Un recours a été
formé devant le Conseil constitutionnel qui n'a pas encore rendu sa
décision.
2. La politique contractuelle de développement
Si dans les territoires d'outre-mer les infrastructures
relèvent généralement de la compétence locale, la
reconnaissance par l'État de besoins importants à
Wallis-et-Futuna en matière de désenclavement et
d'aménagement du territoire l'ont conduit à participer à
leur financement, pour l'essentiel dans un cadre contractuel.
Le contrat de plan
associant l'État et le territoire,
signé le
14 novembre 1994
et concrétisant le projet de
développement économique et social élaboré par
l'assemblée territoriale, s'articule autour de quatre objectifs
essentiels : l'éducation et le développement du sport, l'emploi
et la formation professionnelle, les infrastructures, l'environnement. Ce
contrat couvrant la période 1994-1998 doit contribuer au
développement du territoire à hauteur de 72,6 millions de francs,
dont 58,03 à la charge de l'État, soit près de 80 %.
Sur 58,03 millions de francs de crédits d'État
contractualisés, 28,05 ont été
délégués au 31 décembre 1996 et 15,378 ont
été engagés à cette même date, soit des taux
de délégation et d'engagement de 48,34 % et de 26,5 %.
La
convention de développement
, signée le
2 mars
1995
entre l'État et le territoire, prévoit un effort
complémentaire de l'État sur cinq ans (1995-2000) de 159,075
millions de francs. Cette nouvelle source de financement doit permettre
d'amplifier certaines opérations inscrites au contrat de plan telles que
la création d'équipements scolaires et l'amélioration des
infrastructures routières et des réseaux d'eau potable. Elle a
permis de contractualiser à hauteur de 30 millions de francs le
financement des chantiers de développement local. 25 millions de francs
sont en outre consacrés au logement et 26 sont affectés à
la réfection du quai de Leava à Futuna et des phares et balises
du chenal de Mata Utu. Enfin, une dotation de 16 millions de francs revient au
secteur sanitaire, dont 5 sont réservés à la modernisation
de l'hôpital.
Sur les 159,075 millions de francs de crédits d'État inscrits,
42,742, soit 26,87 %, ont été délégués, et
35,486, soit 22,31 %, ont été engagés au 31
décembre 1996. Bien que les taux d'engagement de crédits restent
faibles et révèlent d'importants retards dans la mise en oeuvre
des projets d'aménagement envisagés, un certain nombre
d'opérations ont progressé.
Ainsi, en matière de développement des infrastructures
aéroportuaires, la construction à Wallis d'une salle de transit a
été achevée, de même que la modernisation et
l'extension de l'aérogare, le remplacement de la centrale
électrique permettant le doublement de la puissance
énergétique de l'aéroport. Les balisages de la piste ont
été rénovés. A Futuna, l'aérogare a
été agrandi, la tour de contrôle aménagée et
les travaux de drainage de la piste effectués. La direction
générale de l'aviation civile a défini un projet
d'installation de balisage nocturne : les travaux de génie civil ont
été menés à bien au premier semestre 1997 et
l'installation du matériel de balisage est actuellement en cours. En
matière d'adduction d'eau, un programme d'amélioration du
réseau est en cours à Wallis afin de doubler les capacités
de production d'eau potable et de pouvoir alimenter dans de meilleures
conditions les points hauts de l'île. A Futuna, les stations de
chloration de l'eau ont été achevées sur les trois points
de captage existants et la réalisation d'un nouveau captage est en cours.
Hormis les dotations octroyées au territoire dans le cadre des
conventions précitées, l'État verse chaque année
à Wallis-et-Futuna une subvention d'équilibre qui,
destinée initialement à compenser le déficit
résultant des dessertes aériennes, finance désormais les
dépenses générales du budget territorial. Depuis 1995,
cette subvention est en constante diminution : elle s'élèvera
pour 1998 à 1,6 millions de francs, soit une régression de
près de 40 % par rapport à 1997. On peut regretter une baisse
d'une telle ampleur alors que le budget global de l'outre-mer pour 1998
connaît une forte progression (+ 7,3 %).
D. LES TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES (T.A.A.F.)
Par décret du Premier ministre en date du 16 mars 1996,
le siège de l'administration des T.A.A.F.
, jusque-là
situé dans le 17ème arrondissement de Paris, a été
transféré à Saint-Pierre de la Réunion
. Il
s'agit de réduire les délais et les distances entre les services
administratifs et le territoire et d'exercer un meilleur contrôle sur les
opérations de stockage et de conditionnement des équipements
embarqués sur le Marion Dufresne II.
Cette délocalisation nécessite la construction d'un
bâtiment destiné à abriter les 29 personnes qui constituent
l'effectif de cet administration placée sous l'autorité d'un
administrateur supérieur, actuellement M. Pierre Lise. Cette
opération nécessitant des délais, il a été
décidé, dans une phase transitoire, d'installer à compter
du 2 avril 1997, une équipe restreinte de huit personnes (5 agents du
ministère de l'outre-mer, dont le secrétaire
général des T.A.A.F., et 3 agents du ministère de la
défense). Le reste des effectifs rejoindra Saint-Pierre lorsque la
construction sera terminée, l'installation définitive
étant prévue pour la fin de l'année 1998.
Les TA.A.F. comprennent la Terre Adélie et les îles Kerguelen,
Crozet, Amsterdam et Saint-Paul. Le territoire est divisé en quatre
districts, l'un en Antarctique, la Terre Adélie où est
implantée la base scientifique de Dumont d'Urville, les trois autres
constituant les terres australes.
L'Antarctique jouit d'un statut particulier : les 14 millions de
kilomètres carrés du continent sont partagés entre des
secteurs qui, à l'exception d'une seule zone représentant moins
de 20 % de la superficie totale, font l'objet de revendications de
souveraineté de la part des États dits États
possessionnés.
Les parties au
Traité de l'Antarctique
signé à
Washington le 1er décembre 1959 étaient initialement au nombre de
douze. Aujourd'hui, on dénombre 43 États signataires. Le
traité organise, dans l'intérêt de la coopération
scientifique, la démilitarisation et la dénucléarisation
de la zone située au sud du 60ème parallèle et un
régime de gestion en commun ; il instaure un gel des revendications
territoriales. Un protocole au traité de l'Antarctique relatif à
la protection de l'environnement a été signé le
4 octobre 1991 à Madrid ; il qualifie l'Antarctique de
réserve naturelle, de paix et de science
. Sa ratification par la
France a été autorisée par la loi du 18 décembre
1992. La Russie et les États-Unis venant également de ratifier ce
protocole, son entrée en vigueur ne dépend plus désormais
que du Japon.
La
21ème conférence consultative du Traité de
l'Antarctique
s'est tenue à
Christchurch
(Nouvelle-Zélande)
du 19 au 30 mai 1997
. Les travaux ont
été consacrés à la définition des mesures de
protection de l'environnement dans la région et en particulier à
la responsabilité pour dommages causés à cet
environnement. Ils ont cependant été quelque peu occultés
par la question du pillage du légine, poisson antarctique à forte
valeur commerciale. Plusieurs pays, dont la France, l'Australie, la
Nouvelle-Zélande, l'Afrique du sud et les États-Unis ont tenu une
réunion séparée sur ce sujet et ont décidé
d'élaborer une position commune en vue de la prochaine réunion de
la commission pour la conservation des ressources marines vivantes de
l'Antarctique.
Les T.A.A.F. constituent un lieu privilégié de la
recherche
scientifique
. Les recherches entreprises sont effectuées grâce
au soutien logistique de l'Institut Français pour la Recherche et la
Technologie Polaires (I.F.R.T.P.), groupement d'intérêt public
créé en 1992 dont sont membres, en particulier, le
ministère de l'outre-mer, le territoire des T.A.A.F., le
ministère de la recherche et le CNRS. Les nombreux programmes mis en
oeuvre concernent essentiellement les sciences de l'univers (glaciologie,
physico-chimie de l'atmosphère, géologie, sismologie,
magnétisme ...) et les sciences de la vie (ornithologie, ichtyologie,
écophysiologie, enzymologie ...).
En 1993, un accord de coopération a été conclu entre les
deux instituts français et italien chargés des recherches
polaires pour construire sur le plateau antarctique, au lieu-dit Dôme C,
une base scientifique permanente,
la base Concordia
. Les recherches qui
doivent y être effectuées concerneront la géophysique
interne (mesure des variations du champ magnétique, tomographie du
manteau supérieur de la terre ...), la physique de l'atmosphère
(évolution du contenu en ozone de la stratosphère, mesure des gaz
à effet de serre) et l'astronomie. Par ailleurs, un
forage de la
calotte glaciaire
dont l'épaisseur à cet endroit est
d'environ 4.000 mètres, doit permettre d'obtenir des informations sur la
température et la composition de l'atmosphère au cours des quatre
ou cinq derniers cycles glaciaires. Le
programme EPICA
, soutenu par la
commission européenne, fait coopérer dix pays européens
à la réalisation de ce forage. La quasi-totalité des
matériels nécessaires aux expérimentations au Dôme C
transitent par la station française de Dumont d'Urville et rejoignent ce
site par des raids de surface. Lors de la campagne 1996/1997, cinq rotations du
navire l'Astrolabe entre Hobart et Dumont d'Urville et trois raids de surface
ont pu être organisés. Le camp de montage a été
quasiment achevé, la tour de forage a été
érigée et un trou de 130 mètres de profondeur a
été creusé et cuvelé.
Afin de mener une analyse d'ensemble des missions et des moyens du territoire,
un
groupe de réflexion
a été mis en place au mois
d'avril 1997. Ce groupe de réflexion est composé de quatre
personnalités indépendantes : un membre de l'Inspection
générale des finances, un membre de l'Inspection
générale de l'administration, un contrôleur
général des armées et un représentant du monde
scientifique. Parmi les thèmes de réflexion retenus figureront la
question du coût logistique et de la présence humaine sur les
bases scientifiques, de l'utilisation du navire océanographique Marion
Dufresne II, le problème des relations entre le ministère de la
défense et l'I.F.R.T.P.. La mission de réflexion a
commencé à auditionner les différentes parties
intéressées, a effectué au cours de l'été
une mission dans les T.A.A.F. et devrait prochainement rendre son rapport.
III. LA PRÉSERVATION DES INTÉRÊTS PROPRES DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER SUR LE PLAN NORMATIF
Votre commission des Lois procède traditionnellement
à un examen détaillé de l'application des lois les
concernant relevant de sa compétence au fond.
Elle estime en outre opportun de faire le point sur les réformes
législatives annoncées par le Gouvernement et sur les
évolutions du cadre juridique de l'association des pays et territoires
d'outre-mer (PTOM) à l'Union européenne.
A. L'APPLICATION DES LOIS RELATIVES AUX TERRITOIRES D'OUTRE-MER
En 1996
, trois réformes d'importance concernant
les territoires d'outre-mer ont été adoptées : deux lois
du 12 avril, l'une organique, l'autre simple complétant la
première, portant statut d'autonomie de la Polynésie
française ; la loi du 5 juillet portant diverses dispositions relatives
à l'outre-mer ; deux ordonnances du 2 janvier portant extension et
adaptation de la législation en matière pénale dans les
territoires d'outre-mer et à Mayotte.
Concernant
le nouveau statut d'autonomie de la Polynésie
française
, toutes les mesures réglementaires prévues
par la loi organique ont été publiées, soit au total trois
décrets :
- le décret n° 96-934 du 17 octobre 1996 pris pour l'application de
l'article 32 de la loi organique, relatif à l'organisation et au
fonctionnement du comité consultatif pour le contrôle de
l'entrée et du séjour des étrangers en Polynésie
française ;
- le décret n° 96-1094 du 10 décembre 1996 pris pour
l'application de l'article 34, relatif à l'organisation et au
fonctionnement du comité territorial consultatif du crédit ;
- le décret n° 97-30 du 13 janvier 1997 pris pour l'application des
articles 113 et 114, relatif aux modalités de traitement de certains
recours et demandes d'avis par le tribunal administratif de Papeete et
modifiant les articles 57-11 du décret du 30 juillet 1963 et R. 207 du
code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Concernant
les ordonnances
n° 96-267 relative à
l'entrée en vigueur du nouveau code pénal dans les territoires
d'outre-mer et à Mayotte et n° 96-268 portant actualisation
des dispositions de procédure pénale dans ces mêmes
collectivités, toutes deux en date
du 28 mars 1996
et
ratifiées par la loi n° 96-1240 du 30 décembre 1996 :
- le décret n° 97-544 du 28 mai 1997 portant extension et
adaptation de la deuxième partie du code pénal dans les
territoires d'outre-mer et à Mayotte a été publié
le 30 mai 1997 ;
- le projet de décret portant extension et adaptation de la
deuxième partie du code de procédure pénale est en cours
d'examen par le Conseil d'État et en cours d'élaboration en ce
qui concerne la troisième partie de ce même code ;
- les mesures réglementaires prévues respectivement par les
articles 18 et 24 de la loi du 30 décembre 1996, relatifs au
régime applicable à l'ouverture des casinos en Polynésie
française n'ont pas encore été publiés.
En ce qui concerne la
loi n° 96-609 du 5 juillet 1996
portant
diverses dispositions relatives à l'outre-mer, seuls quatre
décrets sur vingt-huit mesures d'application prévues ont
été pris, quatre autres étant en préparation pour
une publication avant la fin de l'anné :
- les décrets n° 96-963 et n° 96-964 du 4 novembre 1996, pris
en application de l'article 61 de la loi et étendant le
bénéfice de certaines prestations familiales dans les
départements d'outre-mer ;
- le décret n° 97-12 du 6 janvier 1997 portant application de
l'article 38 de la loi, ayant pour objet de préciser les règles
de procédures en vigueur devant la commission de conciliation en
matière foncière en Polynésie française et de fixer
les conditions de rémunération de ses membres ;
- le décret n° 97-1002 du 29 octobre 1997 portant application des
articles 45 et 46 de la loi, prévoyant la possibilité pour le
Garde des Sceaux d'autoriser au profit d'un ou plusieurs notaires une extension
de compétence au territoire des collectivités territoriales de
Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
En 1997
, un seul texte concernant les territoires d'outre-mer a
été adopté par le Parlement : il s'agit de la
loi
organique
adoptée définitivement par le Sénat le 21
octobre 1997
relative à la fiscalité applicable en
Polynésie française
. La proposition de loi organique avait
été adoptée par l'Assemblée nationale le 13 mars.
L'examen de sa conformité à la Constitution par le Conseil
constitutionnel est actuellement en cours.
Ce texte a pour objet essentiel de valider la délibération de
l'assemblée de la Polynésie française du 8 décembre
1994 instituant sur ce territoire une contribution de solidarité
territoriale, appelée CST 3, destinée à financer le
régime de protection sociale généralisée. Plusieurs
décisions d'imposition prises sur le fondement de cette
délibération ont en effet fait l'objet de recours devant le
tribunal administratif de Papeete, excipant de l'illégalité de
cette dernière. Plus de 300 millions de francs ayant déjà
été perçus au titre de la CST 3 au cours des exercices
1995 et 1996 et la pérennité du régime de protection
sociale représentant une composante essentielle de l'autonomie
territoriale consacrée par le statut du 12 avril 1996, il s'agit, par la
validation, de rendre incontestable le régime fiscal institué et
d'assurer la continuité du système. Le second volet du dispositif
tend à régulariser la situation fiscale d'un certain nombre de
communes polynésiennes et d'instaurer une base légale permettant
aux quarante-huit communes de la Polynésie française d'instituer
certaines taxes contribuant à alimenter leur budget de fonctionnement.
B. LES RÉFORMES ENVISAGÉES ET LES TRAVAUX DE CODIFICATION
L'aboutissement des négociations relatives à
l'avenir institutionnel de la
Nouvelle-Calédonie
devrait
s'accompagner d'une
réforme statutaire
dont les contours ne sont
pas encore définis.
Par ailleurs,
les communes polynésiennes
connaissent depuis
plusieurs années une situation financière tendue qui se traduit
par une multiplication des cas de gestion budgétaire déficitaire,
entraînant la mise en oeuvre des procédures de contrôle
renforcé par le représentant de l'État devant la
commission spéciale. Contrairement aux communes calédoniennes,
leurs actes restent soumis au contrôle de ce dernier.
Au mois d'octobre 1995, un rapport établi par l'Inspection
générale de l'administration sur la situation des communes en
Polynésie française a observé qu'elles traversaient une
crise de croissance
financière et juridique et a proposé
une certain nombre de propositions pour une
profonde modernisation de
l'institution communale
. Par ailleurs, le rapport d'information
établi par MM. Lucien Lanier et Guy Allouche au nom de votre
commission des Lois à la suite d'une mission effectuée en
Polynésie française du 14 au 28 janvier 1996 a souligné
que ces entités devaient jouer un rôle essentiel dans la
perspective d'un développement équilibré de ce territoire.
Afin de remédier à la situation actuelle, le Gouvernement,
interrogé par M. Guy Allouche à l'occasion de l'examen de la
proposition de loi organique relative à la fiscalité applicable
en Polynésie française, a annoncé le 21 octobre dernier
qu'une
véritable réforme de l'institution communale
serait
engagée ayant
pour objectif de rapprocher le statut de ces communes
de celui des communes métropolitaines
. Le ministre a
précisé que la réforme devait porter
sur l'alignement
de leur régime électoral sur le régime commun, notamment
pour les communes de 3.500 habitants et plus
, qu'elle devait abroger
le
régime de la tutelle administrative
, qu'elle devait
permettre une
clarification des compétences dans des secteurs importants pour la
population tels que l'adduction d'eau potable, l'assainissement ou encore les
ordures ménagères
et doter les communes
des moyens
nécessaires
par l'adoption d'un
statut du personnel communal
et un
réexamen de la fiscalité
applicable.
Concernant le calendrier, il a indiqué que
d'ici la fin de
l'année, se tiendraient des réunions interministérielles
d'élaboration du texte qui pourrait être " bleui " en
début d'année 1998
et qu'
après les
différentes consultations nécessaires, le projet pourrait
être présenté au conseil des ministres durant le
deuxième trimestre de l'année 1998 et déposé sur le
bureau du Parlement avant la fin du premier semestre
. Il a enfin
précisé que, pour renforcer le contrôle budgétaire,
le Gouvernement était
bien décidé à accompagner
la réforme communale (...) par la mise en place à Papeete d'une
chambre territoriale des comptes spécifique à la
Polynésie
.
Le Gouvernement projette également d'
étendre un ensemble de
dispositions législatives aux territoires d'outre-mer par voie
d'ordonnances
. Un projet de loi d'habilitation vient d'être
déposé à cet effet sur le bureau de l'Assemblée
nationale. De très nombreux domaines sont concernés : le droit du
travail, le droit commercial, le droit civil, des dispositions du code de la
construction et de l'habitation, la révision des accords de coordination
des régimes métropolitains et néo-calédoniens de
sécurité sociale, l'organisation juridictionnelle dans les
territoires d'outre-mer, la modernisation des activités
financières, le droit pénal et la procédure pénale,
le droit électoral, le régime de la pêche dans les
T.A.A.F., le régime applicable à l'enseignement supérieur
dans les territoires d'outre-mer et les règles relatives à la
procédure de recouvrement et à la procédure contentieuse
en matière fiscale en Polynésie française.
Quant aux travaux relatifs à
la codification
des textes
applicables dans les territoires d'outre-mer, ils progressent également
en dépit du caractère particulièrement complexe d'une
telle tâche. Les projets de code de la communication et du cinéma
et le code de l'éducation ont été déposés
sur le bureau du Parlement. Six autres codes sont en préparation : le
code électoral des territoires d'outre-mer et de la collectivité
territoriale de Mayotte, le code de l'environnement, le code de la santé
publique, le code du patrimoine, le code de la monnaie et du crédit, le
code de l'aide sociale et de la famille. Le ministère de l'outre-mer a
par ailleurs été associé à la modification du code
du service national et du code de justice militaire qui seront rendus
applicables dans les territoires d'outre-mer et prépare un projet de
livre relatif aux territoires d'outre-mer et à Mayotte dans le code
civil.
Un projet de modification du décret n° 89-647 du 12 septembre 1989
relatif à la composition et au fonctionnement de la commission
supérieure de codification est en préparation. Il s'agirait de
supprimer la commission adjointe pour l'outre-mer. Trois rapporteurs
spécialisés resteraient cependant chargés de ce secteur.
C. LA PRÉSERVATION DES INTÉRÊTS SPÉCIFIQUES DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER DANS LEURS LIENS AVEC L'UNION EUROPÉENNE
Comme le rappelle régulièrement notre excellent
collègue M. Daniel Millaud, les territoires d'outre-mer ne sont pas
partie intégrante de l'Union européenne mais jouissent, en
application de la quatrième partie du traité de Rome, d'un
régime spécifique défini par la décision
d'association du 25 juillet 1991, adoptée pour une durée de dix
ans, qui fait actuellement l'objet d'une révision à mi-parcours.
Les pays et territoires d'outre-mer (PTOM) français souhaitent une
modernisation de leur mode de relation avec l'Union européenne,
caractérisé par un trop grand parallélisme avec celui des
États ACP. Depuis le mois de mai 1994, une réflexion est
menée à ce sujet par le ministère de l'outre-mer.
A l'initiative de la France, les chefs d'État et de Gouvernement ont
adopté à Amsterdam, le 17 juin dernier, une déclaration
relative au régime d'association des PTOM à l'Union
européenne, qui doit être annexée au prochain
traité. Elle reconnaît l'inadaptation du régime en vigueur
aux enjeux de développement des PTOM et invite le Conseil de l'Union
à la réexaminer en profondeur d'ici 1999.
Le Gouvernement a par ailleurs déposé au début de
l'année 1997 auprès de la Commission européenne un
mémorandum développant ses propositions pour un nouveau
régime d'association. Il propose notamment l'élaboration d'un
programme de développement économique et social des PTOM par
État membre concerné ainsi que la création d'un fonds
particulier, différent du FED (Fonds européen de
développement).
*
Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission des Lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés aux territoires d'outre-mer dans le projet de budget du ministère de l'Outre-mer, aux montants proposés par la commission des Finances.