III. L'ACCESSION SOCIALE À LA PROPRIÉTÉ ET L'INVESTISSEMENT LOCATIF SONT MENACÉS
A. LE DISPOSITIF DU PRÊT À TAUX ZÉRO EST FRAGILISÉ
1. Un dispositif d'accession à la propriété favorable aux Français de condition modeste
Des modifications significatives et coordonnées ont
été apportées au dispositif du prêt à taux
zéro qui limitent son champ d'application et le menacent dans son
existence. Ce dispositif a été institué en octobre 1995 en
remplacement des prêts aidés à l'accession à la
propriété (PAP) et aux mesures fiscales qui y étaient
attachées. Il permet de financer des opérations de construction
ou d'acquisition d'un logement neuf ou d'acquisition-amélioration d'un
logement existant de la part de personnes de condition modeste.
Le prêt à taux zéro est destiné aux personnes
physiques sous condition de ressources qui acquièrent un logement en vue
de l'occuper en tant que résidence principale. Les plafonds de
ressources varient en fonction du nombre de personnes composant le
ménage accédant à la propriété et de la zone
d'implantation du logement. A titre d'exemple, le plafond de ressources est de
207.100 francs pour un ménage composé de trois personnes
habitant en Ile-de-France ou de quatre personnes habitant en province. L'aide
est destinée à financer des acquisitions de logement de
catégorie moyenne et ne concerne qu'une partie de l'engagement.
Le prêt à taux zéro a remporté un vif succès
depuis son lancement ; il a activement participé à la reprise de
la demande de logements en accession, en particulier dans le secteur de la
maison individuelle dont les mises en chantier ont progressé de 3 %
en 1996 alors que le nombre total des mises en chantier diminuait de 5 %.
145.000 demandes avaient été recensées au
1er janvier 1997. On peut noter que 88 % des projets portent sur une
habitation individuelle pour un montant moyen proche de 600.000 francs.
78 % des acquéreurs ont un revenu mensuel au plus égal
à 15.000 francs. Ce dispositif est donc très important pour
permettre l'accession à la propriété de personnes de
condition modeste même si des risques liés au surendettement ne
peuvent être écartés. On comprend mal que le Gouvernement
remette en cause un dispositif simple et efficace qui a fait ses preuves. Il
est de plus inquiétant que des doutes apparaissent sur sa reconduction
à l'horizon 1999.
2. Des modifications lourdes de conséquences
Le dispositif n'est certes pas supprimé. Mais, à
l'évidence, il ne constitue pas une priorité pour le Gouvernement.
On constate que les autorisations de programme baissent de 700 millions de
francs (- 6 %) par rapport à 1997 pour un volume attendu
à 110.000 projets en baisse de 10.000 unités. Cette baisse
est la conséquence de la restriction apportée au champ des
bénéficiaires des prêts à taux zéro à
travers la limitation aux primo-accédants. Par ailleurs, la durée
des prêts devrait être réduite.
Le Gouvernement a donc choisi de contraindre l'accès au dispositif pour
limiter son impact budgétaire, les économies sur cette mesure
sont estimées à 1,2 milliard de francs. Cette
décision apparaît inopportune.
Bien que la non-éligibilité des demandeurs d'un prêt ayant
revendu un bien ait été supprimée dans les cas où
la vente remonte à plus de deux ans ou dans les cas d'obligation de
mobilité professionnelle, il apparaît que ces restrictions
constituent une nouvelle contrainte imposée aux jeunes ménages
qui ne peuvent accéder ni aux HLM, ni aux logements du secteur libre
dans les centres-villes dans de bonnes conditions.
La reconfiguration du prêt à taux zéro porte atteinte
à l'accession sociale à la propriété. Cette mesure
est d'autant plus regrettable qu'elle s'inscrit dans un contexte
défavorable à la politique familiale.
La commission des Affaires sociales considère que le Gouvernement va
à rebours des souhaits de la majorité des Français qui
préfèrent les logements individuels aux logements collectifs.
Elle souligne également que cette disposition, prise sans qu'aucune
concertation n'ait été menée avec les acteurs du logement,
fragilise la " chaîne du logement " dont la cohérence
avait été reconstituée depuis quelques années.
Le financement du prêt à 0 %
Deux sources de financement, à utiliser de façon
complémentaire, sont prévues pour alimenter le dispositif du
prêt à 0 % : le budget logement est un compte d'affectation
spéciale (CAS). Les crédits ainsi réservés au
financement des prêts à 0 % permettent de verser
mensuellement à la société de gestion du FGAS les sommes
nécessaires au paiement de l'aide attachée au prêt à
0 %. La société de gestion du FGAS assure, au nom de l'Etat,
la gestion des aides versées aux établissements de crédit
qui font partie du réseau de distribution des prêts à
0 %.
En loi de finances rectificative pour 1995 du 4 août 1995, les
700 millions de francs en AP et CP ouverts sur le budget logement pour le
financement du prêt à 0 % ont été inscrits sur
un nouveau chapitre 65.51/10. Ces crédits ont permis de financer
à hauteur de 76 millions de francs le coût budgétaire des
prêts à 0 % distribués au cours du dernier trimestre
1995. Le reliquat des crédits disponibles fin 1995 sur le chapitre
65.51/10, soit 624 millions de francs, a été reporté
en 1996 sur le chapitre 65.48/40 qui se substitue au chapitre 65.51/10
supprimé en 1996. Le chapitre 65.48/40 a été
créé en loi de finances initiale pour 1996.
Les crédits ouverts en loi de finances pour 1996 sur le chapitre
65.48/40 du budget logement pour le financement des prêts à
0 % se sont élevés à 6.900 millions de francs en AP
et 3.200 millions de francs en CP, ramenés à 5.900 millions de
francs et 2.200 millions de francs après l'annulation de 1.000 millions
de francs en AP et CP intervenue début 1996 pour financer sur le budget
des charges communes l'extension du prêt à 0 % aux
opérations dans l'ancien comportant entre 20 et 35 % de travaux.
Après une nouvelle annulation de crédits fin octobre, ceux-ci ont
été ramenés à 5.800 millions de francs en AP et
1.600 millions de francs en CP. Grâce au complément de
crédits (en CP) fourni par le reliquat 1995 du chapitre 65-51/10 et par
un mouvement interne entre articles du chapitre 65-48/40, 5.117 millions de
francs d'AP et de 2.596 millions de francs de CP ont pu être
consommés sur cette ligne budgétaire ; grâce au
complément fourni pour 1.946 millions de francs par le CAS N°
902-28 également créé en loi de finances rectificative du
4 août 1995, 104.200 prêts à 0 % ont pu
bénéficier de la subvention en 1996 dans le secteur
" neuf " (avec au minimum 35 % de travaux).
La subvention de l'Etat attachée au prêt à 0 % est en
effet versée aux établissements de crédit en deux
moitiés espacées de 12 mois. Ainsi, les CP versés en 1996
représentent la moitié de la subvention totale due sur les
prêts de la génération 1996. La seconde moitié est
versée chaque mois en 1997, à partir des AP engagées
à cet effet dès le mois correspondant de 1996. Les AP
engagées sur une année représentent ainsi le double des CP
nécessaires la même année.
En 1997, 7.000 millions de francs ont été prévus en loi de
finances initiale sur un nouveau compte d'affectation spéciale n°
902-30 : 7.000 millions de francs en AP dont 3.500 millions de francs
seront utilisés en CP pour les versements 1997 afférents à
des prêts émis en 1997.
Le chapitre 65-48/40 a été doté en loi de finances
initiale de 3.500 millions de francs de CP pour les versements 1997
afférents à des prêts émis en 1996.
La consommation des crédits en 1997 s'effectue normalement : sur le CAS
N° 902-30, début septembre, 5.441 millions de francs avaient
été encaissés, alors que les AP engagées sur les
huit premiers mois de l'année s'élevaient à 5.035,2
millions de francs et les CP versés à la SGFGAS par l'Etat
à 2.517,6 millions de francs.
En 1998, le chapitre budgétaire 65-48/40 n'est plus doté et
6.250 millions de francs en AP et 6.640 millions de francs en CP ont
été prévus sur le CAS n° 902-30.