INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le projet de budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants est
paradoxal à trois égards. Alors que la conjoncture
économique s'améliore nettement et que des marges de manoeuvre
budgétaires semblent se dégager, il voit ses crédits
baisser fortement. Alors que la structure démographique du monde
combattant ouvre des possibilités de réaffectations de
crédits, le Gouvernement se limite à quelques mesures
symboliques. Alors que la nouvelle majorité s'était
engagée sur des dispositions précises, comme une véritable
retraite anticipée pour les combattants d'Afrique du Nord, l'examen du
budget à l'Assemblée nationale a mis en évidence un
constat de désaccord des différentes composantes de la
majorité, escamoté par des concessions de portée
limitée de dernière minute.
Pourtant, après ce constat, riche en désillusions pour les
associations représentant le monde combattant, il faut observer que le
secrétaire d'Etat, M. Jean-Pierre Masseret, a souhaité
prendre date à l'occasion de l'examen de ce premier budget en faisant
part de ses quarante engagements pour 1998
(voir annexe 3).
Certains de
ces engagements constituent de simples déclarations d'intention
notamment sur des points importants comme la retraite anticipée pour les
anciens combattants d'Afrique du Nord, mais cette liste constituera sans nul
doute un outil fort utile pour apprécier, à l'avenir, les
résultats de la politique en faveur des anciens combattants que
mène le Gouvernement.
Dans le projet de budget pour 1998, les dépenses du budget
général augmentent de 1,36 % par rapport à la loi de
finances initiale pour 1997, soit un rythme comparable à
l'évolution prévisionnelle des prix. Dans ce contexte,
les
crédits affectés au secrétariat d'Etat aux anciens
combattants qui s'élèvent à 25,952 milliards de francs,
enregistrent une baisse de 3,5 % par rapport au budget de 1997
.
Cette baisse signifie que les crédits rendus disponibles par une
réduction du nombre des pensionnés ne sont pas
réaffectés, même de manière partielle, au sein du
ministère. En effet, une baisse des effectifs pensionnés proche
des 3,5 % laisse penser que les moyens d'actions du ministère sont
globalement préservés.
La philosophie générale de ce budget est donc la suivante :
une absence de mesures nouvelles importantes qui doit être
appréciée au regard du maintien des droits et des structures.
Lorsque l'on analyse sommairement l'évolution du budget depuis dix ans,
on observe que la quasi stabilité du budget en francs courants masque
une forte croissance des dépenses qui ne sont pas liées
directement à la réparation de l'invalidité, en
particulier au nom de la solidarité et de la reconnaissance due aux
anciens combattants. C'est ainsi que les dépenses liées à
la réparation de l'invalidité qui s'élevaient à
81 % des crédits du ministère en 1989 représentent
75 % de ces mêmes crédits en 1998. Les dépenses de
fonctionnement quant à elles sont restées globalement stables sur
cette période puisqu'elles représenteront 5 % des
crédits en 1998 contre 4 % en 1989. Ce sont les dépenses
affectées à la mémoire, à la reconnaissance et
à la solidarité qui bénéficient de cette
évolution puisqu'elles représentent dorénavant 20 %
des crédits contre 15 % en 1989.
Lorsque l'on examine l'évolution des différentes dotations
budgétaires du ministère entre 1997 et 1998
(voir annexe
n° 1),
on constate que les dépenses de personnel sont en
hausse (+ 0,70 %) comme les investissements réalisés
par l'Etat. Il apparaît également que les crédits
affectés à l'ONAC sont en baisse (- 2,55 %), ainsi que
ceux affectés à l'INI (- 3,37 %). Les crédits de
la dette viagère sont en baisse (- 2,58 %) de même que
ceux du Fonds de solidarité pour les anciens combattants d'AFN
(- 0,75 %).
Les crédits affectés à la mémoire et à
l'action sociale sont également fragilisés dans ce projet de
budget. On constate, contrairement à un premier projet du Gouvernement,
qu'aucun crédit supplémentaire n'a été
accordé à ces deux actions prioritaires dans le cadre des
40 millions de francs de crédits supplémentaires
adoptés lors du débat à l'Assemblée nationale.
*
* *
Budget 1998 des anciens combattants et victimes de guerre
Avec près de 26 milliards de francs, le budget des anciens combattants est le 11 ème budget de l'Etat.
*
* *
Dans ces conditions, la commission des Affaires sociales a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs aux anciens combattants dans le projet de budget pour 1998 ainsi que sur les articles rattachés 62, 62 bis, 62 ter et 62 quater.
I. LE PROJET DE BUDGET POUR 1998 PRÉSERVE GLOBALEMENT LES MOYENS D'ACTION POUR ASSURER LE RESPECT DES DROITS ÉLÉMENTAIRES DES ANCIENS COMBATTANTS
A. LA DIMINUTION DES EFFECTIFS DE LA POPULATION COMBATTANTE DÉGAGE DES MARGES DE MANOEUVRE BUDGÉTAIRES
1. Les crédits affectés aux dépenses de réparation sont en baisse
Les crédits affectés au Secrétariat
d'Etat aux anciens combattants sont en diminution de 941 millions de
francs par rapport au budget voté en 1997, soit une baisse de
3,5 %. On observe que cette diminution s'explique de manière
importante par des économies mécaniques sur la dette
viagère et par une mesure de trésorerie.
La dette viagère, regroupant la retraite du combattant (chapitre 46-21)
et les pensions d'invalidité et allocations diverses (chapitre 46-22),
diminue de 525 millions de francs. Ce solde est lui-même la
résultante de la diminution des parties prenantes (- 745 millions
de francs), et de l'application du rapport constant (+ 220 millions
de francs) liée en particulier à la hausse de la valeur du point
Fonction publique en 1997. De même, la diminution des crédits des
soins médicaux gratuits (- 5 %), d'appareillage
(- 2 %), des remboursements SNCF (- 3 %) correspond
à des économies de constatation qui constituent autant
d'ajustements aux besoins prévisibles dans le cadre de la
réglementation existante.
On peut noter que l'application stricte du " rapport
constant " pour
calculer la revalorisation des pensions militaires d'invalidité en
fonction de l'évolution des traitements de la fonction publique,
constitue un minimum aux yeux des associations représentatives du monde
combattant. Celles-ci contestent son mode de calcul, elles le
considèrent complexe, peu transparent et incomplet.
Il n'est pas inutile de rappeler que le mode de calcul actuel a
été établi par l'article L. 8 bis du code des pensions,
issu de l'article 123 de la loi de finances pour 1990.
Cet article a prévu que le rapport constant évolue :
- en cours d'année, en fonction des mesures générales
applicables aux traitements bruts des fonctionnaires ;
- au 1er janvier de chaque année en fonction de l'évolution
de l'indice majeur annuel d'ensemble des traitements bruts calculés par
l'INSEE.
Les calculs qui ont été effectués tendent à montrer
que le nouveau système a été plus favorable aux
pensionnés que l'ancien de 1993 à 1997 comme l'illustre le
tableau ci-dessous.
Evolution en niveau du point PMI
(appréciée
au 1er janvier de chaque année)
Date d'effet |
Système actuel |
Ancien système |
Différence par rapport à l'ancien système |
1/01/90 |
67,59 (a) |
67,28
|
+ 0,31 |
1/01/91 |
68,77 |
68,96 |
- 0,19 |
1/01/92 |
70,49 (a) |
70,58
|
- 0,09 |
1/01/93 |
72,59 (a) |
72,46 |
+ 0,13 |
1/01/94 |
74,55 (a) |
74,44 |
+ 0,11 |
1/01/95 |
76,00 (a) |
75,41 |
+ 0,59 |
1/01/96 |
78,04 (a) |
77,39 |
+ 0,65 |
1/03/97 |
78,43 (c) |
77,77 |
+ 0,66 |
Le précédent ministre, M. Pierre Pasquini, avait initié un travail de réflexion sur le sujet en confiant le soin de proposer une simplification du mode de calcul à une commission spécifique. Il appartient maintenant à son successeur, M. Jean-Pierre Masseret, de faire aboutir ce travail comme il semble s'y être engagé pour 1998.
Les crédits de la dette viagère en 1996 et
1997
Crédits |
Différence |
||||
Chapitres budgétaires |
Budget 1996 voté
|
consommés
|
(I) - (II) |
Indice des crédits
consommés
|
Budget 1997 voté
|
46-21 |
2.366.826.000 |
2.294.423.000 |
+ 72.403.000 |
96,94 |
2.175.645.100 |
46-22 |
19.012.835.000 |
19.150.833.000 |
- 137.998.000 |
100,73 |
18.484.427.932 |
46-25 |
347.921.000 |
338.674.000 |
+ 9.247.000 |
97,34 |
344.750.996 |
46-26 |
164.728.000 |
131.789.000 |
+ 32.939.000 |
80,00 |
129.439.408 |
TOTAL |
21.892.310.000 |
21.915.719.000 |
- 23.409.000 |
100,11 |
21.189.457.387 |
Il convient d'ajouter qu'une mesure de trésorerie
réduit à zéro en 1998 le chapitre 47-22 relatif à
la retraite mutualiste. Les versements par l'Etat des sommes dues aux
organismes attribuant la rente mutualiste au titre de la majoration
spécifique anciens combattants seront décalés de quelques
mois, ils auront lieu au début de l'exercice suivant et non plus
à l'automne de l'exercice précédent.
L'économie générale du système de la majoration des
rentes mutualistes ne devrait pas en être trop affectée
malgré la trésorerie supplémentaire de quelques mois mise
à la charge des organismes correspondants.
Le budget 1999 devrait retrouver la dotation habituelle du chapitre
(360 millions de francs en 1997, majorés de 30 millions de
francs en prévision 1998).
2. La répartition des dépenses de réparation
La première mission de l'administration des anciens
combattants, fondatrice de son action, est d'assurer la réparation des
invalidités entraînées par les conflits ou le service dans
les forces armées. En 1998, cette action représente 75 % des
crédits totaux soit environ 19,5 milliards de francs. Aux pensions
militaires d'invalidité stricto sensu, il convient en effet d'ajouter
diverses allocations complémentaires, les soins médicaux gratuits
pour les affections pensionnées et les crédits consacrés
à l'appareillage des invalides.
Le caractère très protecteur de ce dispositif ressort du montant
important (environ 40 %) consacré aux ayants cause des invalides,
et en particulier aujourd'hui aux veuves nombreuses des pensionnés suite
à la deuxième guerre mondiale.
Depuis dix ans, une diminution globale des crédits moins rapide que
celle des effectifs pensionnés a permis d'assurer une augmentation
régulière du montant moyen des pensions jusqu'à
dépasser 33.000 francs par an.
Cet effort a bénéficié d'abord aux plus grands invalides
que le Code des pensions militaires a choisi d'indemniser plus largement, afin
de pouvoir en particulier garantir un véritable revenu de substitution
à ceux qui ne peuvent travailler.
Répartition estimée des dépenses en 1998
Les dépenses de répartition de l'invalidité sont consacrées pour près de 40 % aux ayants cause (veuves, ascendants et orphelins).
Les dépenses de pensions par conflit
Répartition estimée au 1
er
janvier 1997
Malgré une croissance régulière de la part relative des dernières générations du feu (" AFN et divers "), le poids de la seconde guerre mondiale reste prépondérant en particulier par suite du nombre important de veuves. Il reste que cette répartition est amenée à évoluer significativement dans les prochaines années, notamment du fait du départ à la retraite de nombreux travailleurs anciens combattants d'Afrique du Nord.