N° 89

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME V

BUDGET ANNEXE DES PRESTATIONS SOCIALES AGRICOLES

Par M. Bernard SEILLIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean-Pierre Fourcade, président ; Jacques Bimbenet, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Claude Huriet, Bernard Seillier, Louis Souvet, vice-présidents ; Jean Chérioux, Charles Descours, Roland Huguet, Jacques Machet, secrétaires ; François Autain, Henri Belcour, Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Nicole Borvo, MM. Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Philippe Darniche, Mme Dinah Derycke, M. Jacques Dominati, Mme Joëlle Dusseau, MM. Alfred Foy, Serge Franchis, Alain Gournac, André Jourdain, Jean-Pierre Lafond, Pierre Lagourgue, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain , Simon Loueckhote, Jean Madelain, Michel Manet, René Marquès, Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Sosefo Makapé Papilio, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 230 , 305 à 310 et T.A. 24 .

Sénat : 84 et 85 (annexe n° 42 ) (1997-1998).

Lois de finances.

I. AUDITION DU MINISTRE

Le mardi 14 octobre 1997 , sous la présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président , la commission a procédé à l'audition de M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur le projet de budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) pour 1998 .

M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche, a présenté le projet de budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) pour 1998 en précisant les principaux problèmes qui se posent aujourd'hui en matière de protection sociale des agriculteurs.

Il a indiqué que le BAPSA s'élèvera, en 1998, hors restitution de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), à 87,7 milliards de francs, en progression de 0,6 % par rapport à celui de 1997.

S'agissant des dépenses, il a rappelé que les prestations de vieillesse en constituaient, avec un montant de 48,4 milliards, le principal poste et que les retraites proprement dites (retraites forfaitaires et proportionnelles, pensions de réversion) progresseront de 2,2 % par rapport à celles prévues au BAPSA de 1997, ceci malgré la légère diminution du nombre de retraités.

Il a expliqué que cette augmentation était notamment due à la deuxième étape du relèvement des pensions que la loi de finances pour 1997 a prévu en faveur des retraités les plus modestes. A cet égard, il a précisé que ces majorations bénéficieront à plus de 208.000 anciens chefs d'exploitation et à 280.000 autres retraités (conjoints ayant participé aux travaux, anciens aides familiaux...) et représenteront, en 1998, des dépenses supplémentaires de retraite de près de 300 millions par rapport à 1997.

Par ailleurs, il a souligné que la substitution de la cotisation sociale généralisée (CSG) aux cotisations maladie que prévoit la loi de financement de la sécurité sociale, entraînera, en 1998, la suppression pure et simple des cotisations maladie (sans contrepartie de CSG) pour les retraités agricoles dont les revenus sont compris entre le seuil de ressources pour l'attribution du fonds de solidarité vieillesse et le seuil d'imposition. Ainsi, il a précisé que 700.000 petits retraités agricoles, principalement d'anciens chefs d'exploitation, bénéficieront en 1998, grâce à la suppression de leur cotisation maladie de 2,8 % sur leurs pensions, d'un gain de pouvoir d'achat de plus de 500 millions de francs.

Concernant les dépenses d'assurance maladie, maternité et invalidité, il a annoncé qu'elles s'élèveront, pour 1998, à près de 34 milliards, soit un montant voisin de celui prévu au BAPSA de 1997 et que cette quasi-stabilité s'expliquait principalement par les mesures générales de régulation des dépenses de santé.

Quant aux dépenses de prestations familiales, évaluées à 4,1 milliards, il a indiqué qu'elles diminueront en raison de la baisse du nombre des bénéficiaires.

Enfin, il a souligné que des crédits de 110 millions de francs étaient prévus, comme en 1997, pour financer les étalements et les prises en charge partielles de cotisations pour les exploitants en difficulté.

Abordant les ressources du BAPSA, il a distingué les cotisations et la CSG : les cotisations des agriculteurs sont, depuis 1996, calculées intégralement sur leurs revenus professionnels et elles évoluent donc comme les revenus ; s'agissant des cotisations qui ne sont pas concernées par le transfert sur la CSG, c'est-à-dire des cotisations prestations familiales, vieillesse et des cotisations maladie qui subsistent, elles progressent d'environ 2 % par rapport à celles qui sont effectivement attendues en 1997 en raison de la bonne tenue des revenus agricoles en 1995 et 1996.

Il a précisé que la majoration, en 1998, de la CSG destinée au financement de l'assurance maladie aura des conséquences différentes pour les exploitants en activité et pour les retraités agricoles : pour les exploitants en activité, la CSG sera majorée, comme pour les actifs des autres catégories sociales, de 4,1 points en 1998 et, en contrepartie, le taux de leurs cotisations maladie sera diminué de 5,5 points ; le tiers des exploitants, c'est-à-dire ceux qui ont les plus faibles revenus (inférieurs à 30.000 francs par an), bénéficieront d'un gain de pouvoir d'achat de 5 % en moyenne; mais pour la plupart des autres agriculteurs, la substitution de la CSG aux cotisations sera sans effet ou légèrement positive pour le pouvoir d'achat.

En ce qui concerne les retraités agricoles, il a affirmé que ceux d'entre eux qui sont imposables acquitteront la CSG au taux de 2,8 % et que les actuelles cotisations d'assurance maladie sur les retraites seront supprimées : dès lors, les retraités agricoles les plus modestes, ceux qui ne sont pas imposables, verront leurs actuelles cotisations maladie supprimées sans devoir acquitter, par ailleurs, la CSG, d'où un gain de pouvoir d'achat, de plus de 500 millions qui bénéficiera à 700.000 petits retraités agricoles.

Il a rappelé que ce transfert CSG-cotisations ne modifiait pas l'équilibre d'ensemble du BAPSA puisqu'il bénéficiait sur le produit de la CSG d'une compensation égale à la part de recettes résultant de la diminution des cotisations maladie.

Sur les financements provenant de la solidarité interprofessionnelle et de la solidarité nationale qui s'élèveront au total à 71,4 milliards de francs, il a noté que les transferts de compensation démographique fournis par les autres régimes sociaux, principalement le régime général, sont évalués, en 1998, à 32,5 milliards, en progression d'environ 1 % par rapport à ceux prévus au BAPSA de 1997.

Il a souligné que les recettes de taxes, principalement celles de TVA, ont été évaluées, hors restitution, à 26,1 milliards compte tenu de la révision à la baisse des recettes attendues en 1997 par rapport aux évaluations initiales.

Concernant les remboursements des fonds de solidarité vieillesse et invalidité qui continuent de baisser pour se situer à environ 3,4 milliards, il a considéré que cette diminution était la conséquence de l'amélioration des retraites.

Enfin, il a annoncé que la subvention du budget de l'Etat s'élèvera à 7.306 millions contre 7.225 millions dans le BAPSA de 1997.

En conclusion, il a déclaré que ce budget avait été préparé avec la volonté de préserver le régime de protection sociale des agriculteurs et les prestations qui leur sont servies ainsi qu'aux retraités.

Par ailleurs, il a indiqué que le Gouvernement avait voulu manifester une attention particulière en direction des retraités les moins favorisés.

Aux questions de M. Bernard Seillier, rapporteur pour avis , M. Louis Le Pensec a apporté les réponses suivantes : pour les exploitants agricoles, la CSG sera, comme pour les autres catégories sociales, majorée de 4,1 % à compter de 1998 et en contrepartie, les exploitants agricoles les plus modestes, soit un tiers des exploitants, bénéficieront d'un allégement significatif des prélèvements maladie représentant un gain de pouvoir d'achat de 5 % en moyenne.

Il a estimé que, pour la plupart des autres exploitants, l'opération de substitution de la CSG aux cotisations maladie se traduira par un léger gain de pouvoir d'achat et qu'en ce qui concerne les retraités agricoles les plus modestes, ceux qui ne sont pas imposables, leurs cotisations maladie seront supprimées, sans qu'ils doivent par ailleurs acquitter la CSG. Cette mesure se traduit par un accroissement global de leurs pensions de 2,8 %.

Il a évalué le coût de cette mesure à 900 millions de francs.

Indépendamment des conséquences, favorables pour les agriculteurs, du transfert sur la CSG, il a précisé que les cotisations des exploitants augmenteront, en 1998, en réalité, non pas de 4,3 % (pourcentage par rapport à la prévision figurant en loi de finances 1997), mais de 2,2 % par rapport à celles qui sont effectivement attendues en 1997 et qui sont supérieures aux prévisions de la loi de finances.

Il a ajouté que la progression des recettes de cotisations, de 2,2 % en 1998 par rapport à 1997, s'expliquait essentiellement par la bonne tenue des revenus agricoles en 1995 et en 1996 (d'après les comptes de l'agriculture, le revenu brut agricole -revenu global- a progressé en 1995 de 6 % par rapport à 1994 et le revenu de 1996 a été du même niveau que celui de 1995).

Il a considéré que les chiffres qui étaient avancés sur la situation précaire de certaines catégories de retraités n'étaient pas contestables, la retraite la plus modeste se situant, en effet, aux alentours de 1.500 francs à 1.800 francs par mois.

Il a affirmé qu'un effort de revalorisation était nécessaire, mais que les conséquences budgétaires de chaque mesure de relèvement étaient importantes : un relèvement de 100 francs pour 2.100.000 retraités dépasserait les 2 milliards de francs ; quant à la garantie pour tous, d'une retraite minimale à 75 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), elle aboutirait à un doublement des dépenses de retraites du BAPSA, soit 45 milliards de francs.

Il a annoncé que le Gouvernement ferait donc connaître prochainement ses propositions pour répondre à cette attente légitime.

S'agissant des contrats de complément de retraite volontaire agricole (COREVA), il a déclaré que des dispositions législatives seront proposées à cet effet dans le projet de loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines adopté par l'Assemblée nationale le 24 septembre dernier et qui sera soumis à l'examen du Sénat le 15 octobre.

Il a indiqué que la mise sous condition de ressources des allocations familiales, telle qu'elle était prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (plafonnement à 25.000 francs de revenus nets mensuels pour les familles de deux enfants ; ce plafond étant augmenté de 7.000 francs pour les familles monoparentales ou celles où les deux parents travaillent, et de 5.000 francs, par enfant à partir du troisième) devrait concerner environ 11.000 familles d'exploitants agricoles et entraînera une diminution des dépenses d'environ 70 millions pour le BAPSA.

Il a révélé qu'un groupe de travail chargé de la préparation du projet de loi d'orientation agricole avait été mis en place le 2 octobre, que ses travaux se dérouleraient sur deux mois environ, en concertation avec les organisations représentant la profession agricole et qu'ils devraient aboutir à la mise au point d'un texte à la fin de cette année.

Il a précisé que les questions qui concernaient la situation des diverses catégories d'actifs participant aux exploitations seraient abordées lors de l'examen du statut des exploitations (thème prévu pour la réunion du groupe du 6 novembre) et que s'il apparaissait que des dispositions importantes, notamment des mesures permettant de faire évoluer la situation des conjointes d'agriculteurs, devaient figurer dans la loi d'orientation, elles y trouveraient leur place.

Il a rappelé qu'à la suite du rapport de la Cour des Comptes qui faisait apparaître de graves irrégularités dans la gestion de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole, avaient été prononcées, par arrêté ministériel du 7 juillet, la suspension du conseil d'administration et la nomination d'un administrateur provisoire (M. Christian Babusiaux, conseiller maître à la Cour des Comptes) et que les membres du conseil d'administration de la caisse centrale ayant fait part de leur intention de démissionner, un nouveau conseil d'administration serait élu par la prochaine assemblée générale de la mutualité sociale agricole (MSA).

Enfin, pour éviter le renouvellement d'irrégularités, telles que celles qui se sont produites, il a indiqué que des aménagements seraient apportés aux textes relatifs aux contrôles sur la caisse centrale et sur les organismes auxquels elle participe.

Puis, M. Alain Vasselle a interrogé le ministre sur la manière dont serait assurée la neutralité de la substitution de la CSG aux cotisations maladie, sur l'amélioration des retraites des veuves d'agriculteurs, et sur l'incidence des négociations communautaires actuelles à l'égard des revenus agricoles.

M. Guy Fischer a également appelé l'attention du ministre sur la question des retraites agricoles, la préservation des droits des souscripteurs de contrats COREVA et l'impact de la nouvelle substitution de CSG.

Enfin, M. Gérard Roujas a demandé si tous les agriculteurs seraient désormais assujettis à la CSG.

M. Louis Le Pensec , ministre de l'agriculture et de la pêche , a longuement évoqué les négociations communautaires sur le paquet " Santer ", négociations qui vont se dérouler sur dix-huit mois et qui visent à mettre en place des aides compensatoires à la réduction des productions agricoles.

Il a indiqué que la commission européenne n'excluait pas un plafonnement par exploitation des aides directes fournies par la Communauté économique européenne (CEE). Il a donc considéré que le débat budgétaire s'ouvrait dans le cadre d'un environnement communautaire très incertain.

S'agissant des veuves, il a précisé que leur nombre avoisinait 400.000 et que leur situation avait été améliorée depuis 1995 avec le relèvement du taux de la réversion à 54 % et la possibilité de cumuler leurs pensions avec des droits propres et qu'en 1997 ces mesures représenteraient 1,7 milliard de francs de dépenses à la charge du BAPSA.

Enfin, concernant la CSG, il a rappelé que 700.000 retraités seraient dispensés de son paiement en raison de leurs faibles revenus.

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