2. Bilan du plan triennal 1993-1996 de lutte contre la toxicomanie et du plan gouvernemental du 14 septembre 1995
L'action de lutte contre la toxicomanie a été
encadrée, depuis 1993, par un plan triennal 1993-1996 qui s'est
prolongé par le plan gouvernemental défini le 14 septembre 1995.
Ces deux plans se terminent en 1997, et il appartient au nouveau Gouvernement,
qui vient de proposer une augmentation significative des crédits de la
lutte contre la toxicomanie, d'en définir le cadre ultérieur. Les
deux plans mis en oeuvre depuis 1993 comportent trois volets : un volet
préventif, un volet sanitaire et un volet de traitement social et de
réinsertion.
a) Un volet préventif qui est désormais bien structuré
La politique de prévention mise en oeuvre depuis 1993 a
comporté des interventions directes auprès des publics
" à risque " ainsi que des actions de formation et
d'information.
·
La création de points " écoute
jeunes " et de points " écoute parents "
Afin d'intervenir au plus près de la population et tout
particulièrement auprès des jeunes en difficulté,
63
points dits
d'" écoute jeunes " ont été
progressivement créés. Il s'agit de permanences d'accueil et
d'accompagnement éducatif qui ont pour objectif de prévenir
l'inadaptation des jeunes, d'aider au rétablissement de leur
équilibre psychologique et social, de répondre à des
situations d'urgence liées à des détresses affectives,
familiales et sociales, et de permettre à des jeunes qui n'en n'ont pas
l'habitude, ni la possibilité, l'accès à un service social.
En outre, dans la mesure où de nombreuses familles se trouvent
désemparées face aux problèmes réels ou
supposés de consommation de toxiques par leurs enfants, " 14 points
écoute parents
"
ont été mis en place. Ils
leur proposent des entretiens visant à prévenir ou à
interrompre la détérioration de la relation avec les enfants, de
rétablir la communication avec eux et, éventuellement, de prendre
contact avec le système de soins dont ils constituent, en quelque sorte,
un point d'entrée.
·
Le financement d'actions de formations
Dans le cadre des crédits déconcentrés auprès des
DRASS, des programmes de formation ont été financés dans
20 régions. Ces formations, axées sur les thèmes de
l'information et de la prévention des toxicomanies, touchent un public
varié, qu'il s'agisse du secteur médico-social, de la justice, de
l'enseignement ou des entreprises.
b) Un volet sanitaire fondé sur une diversification des modes de prise en charge
Le volet sanitaire de la lutte contre la toxicomanie s'est
orienté autour de cinq objectifs :
·
La poursuite de l'augmentation des capacités de prise
en charge des toxicomanes avec hébergement
Le plan triennal 1993-1996 prévoyait le doublement des
capacités de prise en charge avec hébergement, le nombre de
places hors familles d'accueil devant être porté de 620 places
à 1.240.
Fin 1997, cet objectif sera atteint
avec une
diversification importante de cette partie du dispositif
spécialisé. En effet, pour répondre aux différentes
demandes des patients toxicomanes, ont été créés
des communautés thérapeutiques résidentielles, des
appartements thérapeutiques relais et de transition ainsi que de
l'hébergement d'urgence.
·
La diversification des modes de prise en charge notamment par
le recours aux traitements de substitution
Les traitements de substitution constituent une modalité de prise en
charge des personnes pharmacodépendantes majeures aux opiacés,
notamment à l'héroïne. Ces traitements contribuent à
l'amélioration de la situation du patient d'un point de vue social et
somatique et concourent à la réduction des risques infectieux.
Leur finalité, à terme, est le sevrage.
Les deux médicaments désormais disponibles pour la substitution
sont la méthadone et le Subutex.
La méthadone est le plus ancien des médicaments de
substitution : il ne peut être initialement prescrit que par des
médecins exerçant dans un centre spécialisé de
soins aux toxicomanes.
Le Subutex, disponible en officine depuis février 1996, s'adresse
à des patients qui sont pour la plupart déjà suivis en
médecine libérale. Il peut être prescrit par tout
médecin traitant, après un examen médical et dans le cadre
d'un travail en réseau permettant d'assurer un suivi sanitaire et social.
Le plan complémentaire du 14 septembre 1995 prévoyait que chaque
département dispose fin 1997 d'une possibilité de prise en charge
avec substitution.
Cet objectif est atteint en 1997
:
- 79 départements disposent aujourd'hui d'un centre
spécialisé de soins aux toxicomanes permettant la dispensation de
méthadone ;
- les départements qui ne disposent pas de centre
spécialisé sont souvent des département à forte
composante rurale qui organisent un mode de prise en charge fondé sur un
travail en réseau entre médecins généralistes,
travailleurs sociaux, hôpitaux et centres de soins des
départements limitrophes.
En juin 1997, près de 4.500 personnes bénéficiaient d'un
traitement par la méthadone et près de 38.000 personnes d'un
traitement par le Subutex.
·
Les réseaux toxicomanie/ville/hôpital
Les 50 réseaux toxicomanie/ville/hôpital qui ont
été mis en place visent à assurer la continuité des
soins entre les médecins généralistes, les centres
spécialisés de soins aux toxicomanes et les différents
services hospitaliers concernés par l'accueil des toxicomanes au sein
d'un même hôpital. Ils s'inscrivent aussi dans des
stratégies de sevrage et de prise en charge avec substitution.
·
L'ouverture du secteur hospitalier à la prise en charge
des toxicomanes
Cette ouverture hospitalière constitue une priorité qui a
été affirmée par de nombreuses directives visant à
réserver un certain nombre de lits pour le sevrage des toxicomanes et
par la création des réseaux toxicomanie/ville/hôpital. La
circulaire du 3 avril 1996 a poursuivi cette politique : elle affirme ainsi
que, " du fait de sa mission de service public, l'hôpital doit
offrir aux patients toxicomanes les soins médico-psycho-sociaux qu'ils
requièrent ".
·
La réduction des risques infectieux liés au VIH
et aux hépatites
Depuis 1993, dans le cadre de la prévention des risques infectieux,
ont été ouvertes pour les toxicomanes les plus
marginalisés 25 " boutiques " : ce sont des lieux refuges,
ouverts, qui offrent aussi des soins infirmiers de première urgence. Ils
dispensent aussi du matériel d'injection stérile et proposent, le
cas échéant, une orientation vers le dispositif sanitaire et
social.
Toujours dans ce cadre, une campagne de vaccination contre l'hépatite B
a été réalisée cette année. Les actions de
réduction des risques infectieux (échanges de seringues,
automates, préservatifs...) ont aussi été poursuivies en
partenariat avec les services de lutte contre le SIDA.
Enfin, en 1997, un programme de réduction des risques liés
à l'hépatite C a été engagé. Il
prévoit des programmes de recherche, des mesures d'information et de
réduction des risques et une stratégie d'information des
professionnels.
c) Des mesures de traitement social et de réinsertion
Longtemps, l'approche de la toxicomanie a été
réduite à la prise en charge sanitaire et à la
répression Or, le phénomène de la toxicomanie a
évolué, les problèmes sanitaires s'avérant
totalement imbriqués avec les difficultés sociales.
C'est pourquoi le plan triennal de lutte contre la toxicomanie, défini
en 1993, a mis aussi l'accent sur la dimension sociale de la prise en charge
des toxicomanes. Il s'est notamment traduit par la création de trois
" sleep-in ", qui sont des
centres d'hébergement de
nuit
en urgence pour toxicomanes en situation de grande
précarité. Ils offrent la possibilité d'une consultation
sanitaire et sociale spécialisée.
Cette prise en charge sociale s'est également traduite par des actions
de réinsertion des personnes toxicomanes, y compris celles qui sortent
de prison.
Vingt-cinq
ateliers d'aide à l'insertion
offrent ainsi une aide
à l'insertion pour les toxicomanes en proposant des remises à
niveau scolaires, des activités permettant de recouvrir un sentiment
d'estime de soi (chantier humanitaire par exemple) et l'acquisition de
compétences pré-professionnelles.
Enfin, en application du plan gouvernemental du 14 septembre 1995,
huit
quartiers intermédiaires sortants
(QIS) ont été
créés pour prévenir la récidive et la rechute dans
la toxicomanie des toxicomanes sortant de prison.