B. LA DÉTERMINATION DES DÉPENSES DU SECTEUR SOCIAL ET MÉDICO-SOCIAL DOIT SE FAIRE DANS DES CONDITIONS NOUVELLES QUI RESTAURENT LA COHÉRENCE DE L'ACTION PUBLIQUE

L'hébergement en établissement social représente plus de la moitié (56 %) des dépenses d'aide sociale des départements, qu'il s'agisse de l'aide sociale à l'enfance, des maisons de retraite pour personnes âgées ou de l'hébergement et des soins pour les personnes handicapées.

L'ensemble des établissements sous compétence tarifaire de l'Etat représentent, quant à eux, une dépense de 60,01 milliards de francs en 1996.

C'est dire l'utilité qu'il y a à assurer une régulation optimale de l'évolution des dépenses dans ce secteur qui n'a pas fait l'objet de réforme en profondeur depuis la loi du 30 juin 1975.

1. Un mode de financement insatisfaisant qui aboutit à la " déresponsabilisation " des parties prenantes au dispositif social et médico-social

Actuellement le financement et la tarification des établissements et services sociaux et médico-sociaux est fixé par la loi n° 75-535 du 30 juin 1975.

Il repose sur la reconnaissance par l'autorité tarifaire des recettes et dépenses prévisionnelles " justifiées et non excessives " présentées par les organismes et structures concernés.

Cette reconnaissance acquise, l'organisme dispose en quelque sorte d'une garantie de financement que l'on pourrait qualifier de " droit de tirage " sur la collectivité qui assure ce financement. Celui-ci est alors assuré, soit sous forme de prix de journée, pour les établissements relevant du département, soit de dotations mensuelles forfaitisées pour les établissements relevant de l'Etat.

Cette procédure est placée sous le contrôle d'un juge administratif spécialisé - les commissions du contentieux de la tarification - dont la jurisprudence est fondée sur des textes relevant d'une conception plus étroitement budgétaire qu'économique.

Les structures financées par l'Etat ou l'assurance maladie font l'objet d'une tarification par le préfet de département, après allocation de ressources par le préfet de région et cadrage préalable soit par la loi de finances de l'Etat, soit par le taux directeur médico-social fixé dans la loi de financement de la sécurité sociale.

Ainsi, par exemple en 1997, la progression des dépenses médico-sociales a été fixée à 3 % pour les dépenses d'assurance maladie des établissements médico-sociaux relevant de la compétence de l'Etat.

Ont été fixées alors, en valeur absolue, deux sous-enveloppes " personnes âgées " et " personnes handicapées ". S'agissant des personnes âgées, le taux de reconduction des moyens était fixé à 1,06 %, le solde étant réservé pour la création de places. S'agissant des personnes handicapées, la reconduction des moyens correspondait à un taux de 1,25 % et une enveloppe était réservée pour les personnes atteintes d'un syndrome autistique et les personnes lourdement handicapées.

Le problème est qu'aujourd'hui les établissements peuvent poursuivre leurs dépenses, même si l'enveloppe des prévisions initiales a été dépassée, puisque la jurisprudence ne reconnaît pas de caractère opposable aux enveloppes ou au taux d'évolution .

Les budgets notifiés par les autorités tarifaires sont régulièrement contestés par les établissements qui obtiennent alors des crédits supplémentaires de la part des commissions de la tarification sanitaire et sociale qui ne considèrent pas que les normes d'évolution revêtent dans ce cas un caractère juridiquement opposable.

Une enveloppe de 99 millions de francs a dû être ainsi prévue dans la loi de finances pour 1997 pour faire face aux contentieux engagés par les CAT.

Il devient essentiel de recentrer le contrôle du juge des tarifs qui devrait prendre ses décisions en fonction du montant des crédits alloués par l'Etat ou par le Conseil général.

Les dépenses évoluent finalement sans contrainte d'aucune sorte dans un contexte de forte pression de la demande ; les prévisions budgétaires annuelles sont erronées et la mise en paiement des sommes reconnues acquises à l'établissement après une décision de justice s'effectue avec retard, entraînant parfois au demeurant des charges de trésorerie pour les établissements concernés.

Chacune des parties prenantes au dispositif est donc poussée à une sorte de " déresponsabilisation " :

- l'Etat et les départements financent les établissements médico-sociaux mais ils ne maîtrisent pas les dépenses qui sont engagées par les gestionnaires des établissements ;

- les autorités responsables des établissements, même si elles sont soucieuses d'une bonne gestion, savent que leur financement sera assuré a posteriori en particulier pour faire face à des dépenses, telles que les dépenses de personnel, qui dépendent de décisions qui échappent à leur sphère de contrôle.

Dans cette structure, chaque acteur se renvoie mutuellement la responsabilité des dérives de coût, au détriment du contribuable qui finit par solder les dépenses non maîtrisées.

C'est pourquoi il faut stopper ce processus en instituant un taux directeur opposable aux dépenses des établissements sociaux et médico-sociaux financés par l'Etat ou par l'aide sociale départementale.

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