III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre commission a proposé de nombreuses solutions pour préparer l'opérateur postal aux mutations de son environnement et assurer une prise en charge plus équitable des charges qui, aujourd'hui, l'empêchent d'évoluer.
LES PROPOSITIONS DU RAPPORT D'INFORMATION DE VOTRE COMMISSION " SAUVER LA POSTE : DEVOIR POLITIQUE, IMPÉRATIF ÉCONOMIQUE "
1. Initiatives internationales relevant des pouvoirs publics
:
- lutter contre le repostage par une " amicale
pression " sur
les gouvernements des pays où agissent les reposteurs et,
éventuellement, par des mesures de rétorsion menées de
manière concertée, avec d'autres pays européens victimes
de cette pratique ;
- proposer la création d'un timbre à valeur unique pour le
courrier entre les Etats membres : l'euro-timbre, assis sur un fonds de
péréquation postale européenne.
2. Développer une stratégie internationale d'alliances en
préparant une alliance avec la poste allemande et en
réfléchissant, sur cette base, à un rapprochement
franco-allemand avec l'un des grands opérateurs mondiaux de la
messagerie.
3. Adopter, avant fin 1998, une loi d'orientation postale traduisant, dans
notre législation, non seulement les dispositions de la directive
européenne mais aussi un grand nombre des propositions avancées
ci-après.
4. Statut de La Poste :
- la
privatisation
est
exclue
;
- sa
sociétisation
, c'est-à-dire sa transformation en
entreprise nationalisée sous forme de société anonyme
détenue par l'Etat, n'apparaît
pas
indispensable
,
mais
le débat doit rester ouvert
, dans la perspective de la
réalisation d'alliances internationales.
5. Définir un service public ambitieux :
- utiliser les marges de flexibilité qu'offre la future directive
postale en définissant un
périmètre du monopole du
courrier aussi étendu que permis
et en créant
parallèlement un fonds de compensation destiné à
compléter, en tant que de besoin, le financement du service universel ;
- faire mieux respecter le monopole en créant un corps
d'inspecteurs assermentés de La Poste et en renforçant
vigoureusement les sanctions pénales prévues en cas d'atteinte
à ce monopole ;
- confier à La Poste l'habilitation publique de la certification
postale électronique restant à établir.
6. Le réseau de La Poste :
- il doit être modernisé et dynamisé, par des
idées innovantes, pour mieux revitaliser les territoires ;
- il doit sortir du moratoire rendu désormais inutile par la loi
" Pasqua " du 4 février 1995 ;
- le réseau immobilier doit être valorisé par une
démarche centrée sur l'intensification locale des besoins des
hommes et des territoires, par une transformation des guichets les moins
fréquentés en points d'appui de démarche commerciale
à domicile, par la recherche de nouveaux partenariats publics, par
l'examen de l'intérêt d'une polyactivité postale, par
l'augmentation des ventes ;
-
le réseau immobilier doit être reformaté et
renforcé par un service postal mobile
, à l'exemple de ce qui
est actuellement en oeuvre en Allemagne ;
- les partenariats entrepreneuriaux doivent être multipliés,
tant au niveau national que local, pour développer les canaux de contact
avec la clientèle et aider les petits commerces ruraux ;
- la loi d'orientation postale déjà préconisée
doit
définir des objectifs en termes de temps d'accès au
service postal,
d'une part, en fixant les distances maximales entre tous
points d'une catégorie de territoires donnée et une antenne
postale fixe et, d'autre part, en établissant des discriminations
positives en faveur des zones les moins favorisées ;
- les responsabilités postales des élus locaux doivent
être confortées au travers des schémas
départementaux des services publics, des agences postales communales et
par l'adaptation aux réalités locales des orientations de la
future loi postale ;
- le soutien financier de l'Etat doit être assuré en
maintenant les abattements fiscaux de La Poste, en versant une subvention
d'équilibre et en
affectant une partie du produit de la taxe
professionnelle de France Télécom à un Fonds
géré de manière paritaire par les élus et l'Etat,
permettant de mobiliser plus de 2,5 milliards de francs par an pour la
redynamisation des zones urbaines et rurales en difficultés, dont au
moins 500 millions de francs par an seront consacrés à la
modernisation et à la dynamisation du réseau de La Poste,
dans les départements dont plus de la moitié du territoire est
composé de zones rurales classées comme très
vulnérables ;
-
les élus locaux doivent être garantis qu'il n'y aura pas
de " marché de dupes "
en renforçant la
relocalisation de services de La Poste dans les zones rurales et en organisant
des " tables-rondes " Poste-élus permettant d'ouvrir le
dialogue et d'explorer ensemble les voies de l'avenir.
7. L'aide postale à la presse :
- dépasser les paradoxes qu'elle a engendrés : elle
coûte cher et satisfait peu de ceux auxquels elle est attribuée,
elle ne garantit pas nécessairement une délivrance optimale de
l'information à l'opinion, elle ne répond plus aux ambitions
politiques qui l'ont inspirée et n'obéit pas pour autant à
la rationalité économique ;
- établir la
vérité des coûts
(selon le
présent rapport le coût du transport postal de la presse se situe
vraisemblablement dans une fourchette de 6,5 à 6,75 milliards de
francs plutôt qu'autour de 7,5 milliards) ;
- poursuivre dans la voie du
ciblage
sur la presse d'opinion ;
- développer les relations commerciales avec les autres
éditeurs ;
- alléger les charges de La Poste en portant de 15 millions en
1997 à 90 millions en 1998,
l'aide au portage des journaux
à domicile
et ce en utilisant à due concurrence le produit de
l'impôt sur les recettes publicitaires des supports hors médias en
cours d'instauration au Parlement ;
- enfin, étudier la préservation de la
deuxième
tournée
postale dans la capitale pour la presse du soir, assurer un
suivi externe de la qualité et veiller à
garantir la
pérennité de la contribution de l'Etat
au financement du
transport de la presse.
8. Conforter les compétences financières de La Poste :
-
maintenir le cadre juridique actuel
en refusant la banque
postale, en développant une comptabilité analytique aux
résultats invulnérables à la critique en ayant bien
conscience que si cette exigence pouvait être satisfaite, il faudrait se
résoudre à une filialisation dans le cadre du statut public de La
Poste ;
- confirmer le périmètre actuel des services financiers en
appliquant la loi de 1990,
toute la loi de 1990
, rien que la loi de
1990, tout en veillant cependant à ne pas ébranler le
marché par des actions commerciales brutales ;
-
maintenir le duopole de la collecte du livret A
: en s'opposant
à sa banalisation et en affirmant clairement dans la loi la mission de
cohésion sociale accomplie par La Poste.
9.
Clarifier les relations financières entre l'Etat et La
Poste dans le cadre du prochain contrat de plan :
- réfléchir aux moyens permettant à La Poste de mieux
couvrir les coûts de la collecte des CCP ;
- réfléchir au mode rémunération des fonds de
la Caisse Nationale d'Epargne ;
- traiter de l'éventuel assujettissement de La Poste à la
TVA lors de la discussion de la loi d'orientation postale ;
- envisager la suppression du droit de timbre, impôt archaïque.
10. Les retraites de postiers :
-
traiter le problème pour 1998
sans sacrifier les postiers
au culte du 3 % de déficit public ;
-
trouver une solution définitive
en ajustant les charges de
retraites de La Poste sur le prélèvements sociaux de droit commun
;
-
gager la soulte
que La Poste acquitterait à l'Etat et
à la collectivité des contribuables
sur une meilleure
continuité du service public postal.
11. Assurer la continuité du service public postal
- respecter préalablement à toute grève, un
préavis d'une durée minimale, comme l'impose la loi ;
- mettre le délai de ce préavis à profit pour engager
des négociations ;
- en cas de blocage de ces négociations, recourir à un
médiateur ;
- maintenir le réseau B qui fiabilise les infrastructures ;
- mieux indemniser les entreprises clientes du préjudice subi du
fait d'une grève.
12. Mobiliser les personnels
- améliorer la communication interne à l'entreprise pour
faire, par un dialogue interactif, faire prendre conscience aux postiers de la
réalité des dangers, et leur donner la visibilité
indispensable à leur mobilisation au service de l'entreprise et du pays ;
- confirmer la priorité donnée à la formation aux
nouveaux métiers ;
- développer une politique ambitieuse de stages des cadres de La
Poste dans d'autres entreprises publiques mais aussi dans le secteur
privé ;
- embauche davantage de cadres issus d'entreprises privées ;
- développer des formules d'intéressement du personnel
à la bonne marche de l'entreprise.
13. Doter La Poste d'une stratégie résolument offensive :
- retrouver le chemin de la croissance en améliorant la performance
sur les marchés traditionnels, en conquérant de nouveaux
marchés, en développant les services à valeur
ajoutée et en appliquant trois maîtres mots à
l'égard des clients : partenariat, réactivité,
responsabilité ;
- maîtriser l'évolution des charges et améliorer la
productivité.
14. Toujours placer l'intérêt national au coeur des
réflexions
à mener et de l'élan à créer.
Votre commission souhaite que ces propositions soient prises en compte lors de
l'élaboration du texte de loi futur qui devra intervenir pour transposer
la directive européenne en cours d'adoption sur les services postaux,
texte dont votre commission désire qu'il soit une vraie loi
d'orientation postale, ambitieuse pour La Poste.
*
* *
Suivant les conclusions de son rapporteur, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés aux technologies de l'information et à La Poste dans le projet de loi de finances pour 1998.