B. PLAN POUR L'EMPLOI DES JEUNES CONTRE CNRACL : UN MARCHÉ DE DUPES ?
Le " contrat moral " qui semble avoir
été signé pour la participation des collectivités
locales au plan pour l'emploi des jeunes repose sur l'engagement du
Gouvernement de ne pas relever le taux de la cotisation employeur à la
Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales en
1998.
Sans qu'il soit question de rechercher l'éventuelle existence d'un vice
du consentement au sein de ce " contrat ", il est à craindre
que celui-ci n'aboutisse,
in fine
, à un cumul de charges
nouvelles pour les collectivités locales.
1. Les emplois-jeunes : des emplois publics virtuels
Sans analyser en détail les dispositions d'un texte que
notre haute assemblée vient de rejeter en nouvelle lecture en adoptant
une question préalable, en raison du refus des députés
d'intégrer les apports du Sénat à ce texte, il est
nécessaire de mesurer la portée réelle du dispositif
retenu par le Gouvernement.
Si, à l'évidence, personne ne conteste l'objectif de lutter
contre le chômage des jeunes, il est en revanche du devoir de la
commission des finances d'appeler l'attention sur les conséquences des
modalités retenues par le Gouvernement pour la mise en oeuvre de ces
emplois-jeunes.
Les contrats de droit privé à durée
déterminée de cinq ans que les collectivités locales
pourront bientôt passer seront en effet au départ pris en charge
par l'Etat à hauteur de 80 % du Smic et des cotisations sociales
patronales correspondantes, soit une aide forfaitaire de 92.000 francs par an
et par poste pendant cinq ans.
Mais, au terme de cette période, la collectivité locale
employeuse se trouvera devant la
délicate alternative de devoir soit
poursuivre la relation de travail, sous une forme ou sous une autre et tout en
assumant la totalité du coût des emplois concernés, soit de
devoir constater passivement la fin cette relation de travail.
Il
paraît assez clair qu'à cette date il sera difficile pour les
employeurs locaux de résister à l'intégration d'une partie
de ces employés dans le cadre de la fonction publique territoriale. Les
emplois-jeunes appaissent donc, pour une grande part, comme des emplois publics
par destination.
2. L'absence de hausse des cotisations à la CNRACL : un gage à court terme
S'il convient de se féliciter du répit qui
résultera pour les collectivités locales de l'absence de
relèvement du taux de la cotisation employeur à la CNRACL pour
1998, il paraît néanmoins clair que ce
statu quo
ne peut
être que transitoire.
Il faut rappeler que pour 1997, l'équilibre de la CNRACL avait
été établi, sans recourir à une augmentation des
cotisations, grâce à la mobilisation des réserves
structurelles du fonds des allocations temporaires d'invalidité des
agents des collectivités locales (ATIACL), alimenté par les
cotisations patronales des seules collectivités locales et
géré par la Caisse des Dépôts et Consignations. La
loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a en effet
permis le transfert de 4,5 milliards de francs du régime des allocations
temporaires d'invalidité vers la CNRACL. Cette mesure, par
définition non reconductible, permet à la CNRACL d'afficher pour
1997 un excédent de 2,9 milliards de francs. Pour 1998, le
déficit technique prévisionnel s'élèverait
cependant à environ 2,5 milliards de francs.
Au regard des engagements pris par le Gouvernement d'agir en concertation avec
les élus locaux pour trouver des solutions à l'équilibre
de la CNRACL,
l'inscription inopinée
, à l'article 18 du
projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'une
faculté pour la CNRACL de recourir à des avances de
trésorerie pour un montant de 2,5 milliards de francs (soit le montant
du déficit technique prévisionnel pour 1998), semble mal augurer
de l'esprit de coopération que le Gouvernement prétend respecter
dans ce domaine.
Les collectivités locales devront donc faire preuve d'une grande
vigilance pour veiller à rester associées à la
définition des modalités de préservation de
l'équilibre de la CNRACL.
A cet égard, votre rapporteur ne peut que rappeler une nouvelle fois le
caractère excessif de la surcompensation qui représente
aujourd'hui plus de la moitié des dépenses de la Caisse et
constitue une opération de débudgétisation au
détriment des collectivités locales, tandis que dans le
même temps le rapport démographique de ce régime (rapport
entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités de ce
régime) se dégrade chaque année, passant de 3,7 en 1989
à 2,88 en 1996.