CHAPITRE III
EVALUATION DU SYSTÈME ÉDUCATIF :
UNE AMÉLIORATION CONSTANTE DU NIVEAU DES
ÉLÈVES MAIS DES PERFORMANCES INTERNATIONALES MOYENNES
I. L'ÉVALUATION DES ÉLÈVES
A. L'AMÉLIORATION CONSTANTE DU NIVEAU DES ÉLÈVES
Le concept de réussite scolaire est sans doute
difficile à cerner. Chaque année, l'état de
l'école, publié par la direction de l'évaluation et de la
prospective du ministère de l'éducation nationale dresse un
portrait de l'état et de l'évolution du système
éducatif.
Dans le primaire, un indicateur permet de mesurer les acquis des
élèves en français et mathématiques à
l'entrée en sixième. D'autres indicateurs existent afin de
mesurer le niveau et les connaissances des élèves,
l'espérance de scolarisation, la part d'une génération
accédant au baccalauréat, le niveau de formation des jeunes
sortant de formation initiale et l'effet de la possession d'un diplôme
sur les chances de trouver un emploi.
1. Les connaissances et les acquis des élèves
Le niveau général des conscrits qui
résume, pour tous les jeunes hommes le résultat des tests de
raisonnement, de logique et d'intelligence qu'ils passent lors des
" trois
jours " a progressé de 17,6 % depuis 1981, soit 1,3 % en
moyenne annuelle contre 0,6 % seulement au cours de la décennie
précédente. Cette augmentation est liée, pour l'essentiel,
à l'élévation du niveau scolaire des conscrits. En effet,
à niveau scolaire donné, ceux-ci ont, en moyenne, des
résultats à peu près constants, ce qui contredit
l'idée parfois évoquée d'une baisse de niveau.
Néanmoins, l'écart s'accroît entre les meilleurs (qui
progressent légèrement) et les moins diplômés, dont
le niveau accuse une tendance à la baisse.
Votre rapporteur n'ayant pas eu l'édition 1997 de "l'état de
l'école" édité par la direction de l'évaluation et
de la prospective, il rappellera les résultats observés dans
l'édition 1996.
Les tests nationaux révèlent qu'à l'entrée en
sixième, un quart des enfants ne maîtrisent pas les
compétences de base en calcul et un tiers en géométrie.
13,5 % ne savent pas lire et 40 % ne maîtrisent que les
compétences de base en lecture.
Il est à noter que la proportion des élèves en grande
difficulté scolaire, c'est-à-dire ceux qui ne maîtrisent
les compétences de base ni en lecture, ni en calcul, s'accroît par
rapport à 1992 : ils sont 6 % des entrants en
6
ème
en 1995 contre 5 % en 1992. A l'inverse, 35 %
maîtrisent l'ensemble des compétences.
Enfin, les connaissances civiques des élèves à
l'entrée en sixième sont encore parcellaires. Elles sont peu
solides en ce qui concerne le fonctionnement du système politique
français. Les élèves ont du mal à distinguer les
différents pouvoirs et à désigner
précisément les acteurs qui les exercent. Certes, une
majorité d'entre eux (un peu plus de 6 élèves sur 10)
savent que dans un pays démocratique le pouvoir est exercé par
ceux que les " gens " ont choisis, mais 13 % estiment
qu'il est
exercé par les plus riches.
En général, les élèves qui ont eu les meilleurs
résultats à l'évaluation en français et en
mathématiques ont de meilleures connaissances civiques, sont plus
tolérants et un peu plus respectueux des règles que les autres.
2. L'espérance de scolarisation
L'espérance de scolarisation d'une année
donnée est obtenue en additionnant les taux de scolarisation
observés aux différents âges cette année là.
En douze ans, l'espérance de scolarisation que peut avoir un
élève entrant en maternelle s'est accrue de plus de deux
années : elle atteint 19 ans à la
rentrée 1995 contre 16,7 ans en 1982-1983. Durant cette
période, la durée des études s'est allongée de
manière régulière, selon un accroissement annuel d'environ
0,2 années de scolarisation.
Cet allongement des études intervient alors que la scolarisation avant
l'âge obligatoire de 6 ans, particulièrement
développée en France depuis longtemps, reste plutôt stable.
Les progrès réalisés depuis 1982 l'ont donc
été pour une large part au-delà de 16 ans, notamment
à 19 ans où le taux de scolarisation augmente de plus 40 points
en 12 ans, de 31 % à 71 %. Comme les redoublements ont plutôt
diminué, cette hausse traduit bien une élévation du niveau
atteint par les élèves. De nombreux jeunes, qui sortaient
autrefois au niveau du CAP ou avant se présentent maintenant au
baccalauréat, puis accèdent à l'enseignement
supérieur, les filles conservant un léger avantage sur les
garçons.
Bien que les comparaisons internationales dussent être faites avec
prudence, il apparaît que la France figure dans le groupe de tête
des pays de l'OCDE, puisque elle n'est dépassée que par la
Belgique, les Pays-Bas et l'Allemagne. Viennent ensuite le Danemark
ex-aequo
avec la France, l'Espagne, avec 16,1 ans , la Finlande avec
15,9, les Etats-Unis avec 15,6, le Royaume-Uni avec 15,1 et la Grèce
avec 13,9.
Par ailleurs, la France est avec la Belgique, le pays où la durée
moyenne de scolarisation avant cinq ans est la plus longue.
3. L'accès d'une génération au niveau du baccalauréat ou d'un diplôme professionnel
L'enseignement secondaire connaît depuis dix ans un
mouvement de forte ampleur amenant des proportions croissantes de jeunes aux
niveaux V de formation (CAP, BEP et seconde) et plus encore au niveau du
baccalauréat. Les dernières rentrées apportent cependant
quelques inflexions de tendances, que ce soit dans le rythme de progression ou
bien dans les équilibres entre filières générales
et professionnelles.
De fait,
durant les années 80, l'accès des jeunes
générations au niveau V s'est élevé d'environ
13 points
, passant de 80 % à plus de
93 %.
Cette hausse est
due à un afflux particulier des élèves en seconde
générale et technologique (de 40 à 57 %) et non
à l'évolution de l'accès aux formations professionnelles.
Dans les lycées professionnels relevant du ministère de
l'éducation nationale les préparations au BEP ont progressivement
pris la place de la filière menant en 3 ans au CAP, tandis qu'un peu
plus d'un jeune sur dix préparait ces diplômes par la voie de
l'apprentissage ou dans les établissements relevant du ministère
de l'Agriculture.
La progression d'ensemble de l'accès au niveau V
,
amplifiée par le recul simultané des redoublements au
collège qui accélère l'arrivée des
élèves en lycée,
s'interrompt toutefois depuis 1990
: les redoublements cessent de diminuer, les entrées en seconde
subissent un tassement sensible, tandis que les formations professionnelles
bénéficient d'un certain regain, notamment dans l'enseignement
agricole ou en apprentissage, qui accueillent à ce niveau un jeune sur
huit.
L'accès au niveau V tend donc à se stabiliser aux environs
de
92 %,
ce qui correspond au fait qu'environ 60.000 jeunes
quittent chaque année le système éducatif sans
qualification.
De 1980 à 1994,
le taux d'accès
au
niveau du
baccalauréat
(IV) a connu une poussée nettement plus intense,
passant de 34 % à 70 % (toutes voies de formation comprises), soit une
hausse de 31,5 points pour moitié imputable à l'enseignement
général. Après avoir enregistré des progressions
annuelles supérieures à 4 points, le mouvement s'est ralenti
à la fin des années 80, en passant à une progression de
seulement 2,5 points par an. L'accès d'une génération au
niveau du baccalauréat tend aujourd'hui à se stabiliser autour de
68 %.
De nouveaux équilibres se font jour : dans l'enseignement du second
degré, la désaffection relative dont pâtit le second cycle
général et technologique depuis 1991 se poursuit alors que le
développement de l'apprentissage reste soutenu ; dans
l'enseignement supérieur, l'orientation vers les filières
sélectives (classes préparatoires, BTS, DUT, en particulier vers
les deux dernières qui conduisent normalement à des formations
courtes) augmente au détriment de l'université qui continue
néanmoins à accueillir une bonne moitié des nouveaux
bacheliers.
Depuis 1996, le nombre de candidats au baccalauréat diminue,
principalement pour des raisons démographiques, mais aussi
consécutivement à une plus forte orientation vers les cursus
professionnels en fin de troisième. C'est le baccalauréat
général qui a enregistré la plus forte chute, le
baccalauréat professionnel continuant son développement.
Conséquence de la moindre orientation des filières
générales et technologiques en fin de troisième :
la proportion d'une génération titulaire du
baccalauréat tend à diminuer depuis deux ans
: la
proportion d'une classe d'âge titulaire du baccalauréat est
passée 62,7 % en 1995 à
61,2 %
en 1997.
Néanmoins, la proportion exceptionnellement élevée de 1995
était due en partie à l'afflux d'élèves en classe
de terminales à la rentrée 1994, suite à la
possibilité offerte alors aux familles de ne pas suivre les
décisions de redoublement de la classe de première.
4. Le niveau de formation des jeunes sortant de formation initiale
En 1995, 237.000 jeunes, soit près de 40 % des
sortants, ont quitté la formation initiale en étant titulaires
d'un diplôme de l'enseignement supérieur. La moitié d'entre
eux (138.000) avaient un diplôme de l'enseignement supérieur long
(bac + 3 ou plus). Dix-huit ans auparavant, ils n'étaient respectivement
que 123.000 et 53.000.
Néanmoins, les
sorties sans diplôme
représentaient
en 1995 14 % des sortants, c'est-à-dire
100.000 jeunes
. Sur
ces 100.000,
53.000 jeunes quittent encore la formation initiale sans
qualification
, c'est-à-dire sans avoir atteint au moins le niveau du
CAP ou du BEP. Ils représentent 7 % de la classe d'âge
concernée.
La persistance de ce phénomène est d'autant plus
préoccupante que du fait de l'élévation
générale du niveau des jeunes sortant de formation initiale,
l'échec scolaire est devenu le symptome d'un handicap social et permet
de plus en plus difficilement d'accéder à l'emploi, même
non qualifié : le taux de chômage des
non-diplômés moins de cinq ans après la sortie des
études dépasse 50 % depuis 1994.
5. L'effet de la possession d'un diplôme sur les chances de trouver un emploi
La montée globale du chômage depuis le milieu
des années soixante-dix a fortement affecté les jeunes et
touché massivement les moins formés d'entre eux. Les jeunes
diplômés de l'enseignement supérieur ont longtemps
été épargnés. En revanche, de 1991 à 1994,
ils ont été eux aussi touchés par la forte remontée
du chômage et n'ont pas profité plus que les autres de la
stabilisation momentanées de 1995.
Pour autant, les jeunes de moins de 25 ans titulaires de diplômes, quels
qu'ils soient, bénéficient d'une meilleure protection contre le
chômage que ceux qui n'ont aucun diplôme et le risque de ne pas
trouver d'emploi est d'autant plus faible qu'il a poursuivi une
scolarité longue.
Les études sur l'ancienneté sur le marché du travail
montrent en effet que les plus diplômés trouvent plus rapidement
du travail une fois sortis de formation initiale. Ainsi, durant les quatre
années qui suivent la sortie de formation initiale,
le taux de
chômage des " peu diplômés " s'élève
à 41,1 % et est supérieure de 21 points à celui des
diplômés (20,2%).
Durant ces quatre années, plus leur
diplôme est élevé, moins les jeunes risquent d'être
chômeurs : 14,4 % pour les diplômés du
supérieur, 23 % pour les diplômés des baccalauréats,
26,1 % pour les diplômés des certificats d'aptitude
professionnelle (CAP) et brevets d'études professionnelles (BEP), enfin
41,1 % pour les " peu diplômés ".
Il faut toutefois rappeler qu'en 1994, la majorité des jeunes de 15
à 24 ans sont encore scolarisés. Seuls 31 % de ces classes
d'âge se présentent sur le marché du travail (soit occupent
un emploi, soit sont au chômage). Ce taux d'activité est en baisse
continue du fait de l'allongement de la durée des études. Les
jeunes au chômage représentent donc en 1994, 8,5 % de l'ensemble
des moins de 15-24 ans (8,8 % des femmes et 8,1 % des hommes).