III. OBSERVATIONS
1. Avec une baisse des crédits de 6,6 % par rapport à la loi de finances de 1996, le budget du Plan contribue pleinement à l'effort de maîtrise des dépenses de l'Etat. Cette rationalisation budgétaire touche aussi bien le Commissariat général au Plan que les divers organismes qui lui sont rattachés (comme le CEPII ou le CSERC) et les organismes qu'il subventionne (OFCE, IRES, CREDOC et CEPREMAC).
Elle n'est pas récente puisqu'elle se traduit depuis plusieurs années pour les organismes rattachés et subventionnés par une simple reconduction des crédits sur la base de la loi de finances de l'année précédente, ce qui revient à une diminution des crédits en francs constants. De plus, les crédits de fonctionnement et les subventions font systématiquement l'objet d'une annulation annuelle de 10 à 15 %. Or, cette systématisation des annulations de crédits en cours d'année nuit à la transparence du budget du Plan. En outre, elle gêne considérablement des organismes comme le CEPII ou l'OFCE, dont l'essentiel des ressources proviennent des subventions accordées par l'Etat, car elle introduit de grandes incertitudes sur le montant réel des crédits à leur disposition.
L'exemple du CEPII est révélateur lorsqu'on compare son budget initial à son budget "réel", c'est-à-dire après annulation de crédits.
La loi de finances initiale apparaît ainsi gonflée artificiellement. Il serait donc souhaitable de réévaluer correctement les crédits à la disposition du Plan en tenant compte des annulations rendues prévisibles par l'effort de maîtrise des dépenses publiques.
2. La rigueur budgétaire touche aussi les contrats de plan Etat-régions puisque compte tenu des retards de paiement de l'Etat aux régions, leur durée d'exécution a été prolongée d'un an. Cette décision inquiète les régions et n'est pas sans provoquer des remous chez les professionnels du BTP. L'enjeu est en effet de taille puisque sur les 280 milliards de francs que mobilisent ces contrats, 75 milliards concernent les infrastructures routières.
Cette remise en cause des CEPR apparaît d'autant plus regrettable qu'en l'absence de plan national, les contrats Etat-régions sont les derniers garants de la pérennité de la planification à la française.
En revanche, l'évaluation des contrats Etat-régions semble en net progrès. Annoncée officiellement en 1994, cette évaluation n'avait en fait commencé qu'en 1995, parce que la mise en place des instances partenariales de l'évaluation a nécessité plusieurs mois. Ainsi, même pour l'année 1995, la consommation de crédits a été faible (3,4 millions de francs sur 12,5 budgétés). Mais les délégations de crédits arrêtées au 30 mai 1996 laissent apparaître une montée en puissance significative (4,3 millions de francs) qui devrait se poursuivre d'ici la fin de l'année, pour s'accentuer en 1997.
3. L'obligation de maîtrise des finances publiques devrait conduire à une connaissance approfondie des besoins réels de chaque administration. Or, l'analyse des crédits affectés au Fonds national de développement de l'évaluation révèle des largesses injustifiées.
Depuis sa création, le FNDE voit sa dotation initiale augmentée systématiquement de reports de crédits de l'année précédente s'élevant à plusieurs millions de francs. Cette non utilisation des crédits est liée à une montée en charge très progressive des évaluations. Mais elle est due aussi à une surestimation initiale des crédits nécessaires, encore aggravée par une réticence des services du premier ministre à lancer des travaux importants d'évaluation dans un climat d'incertitude politique. Une analyse des besoins réels du FNDE apparaît donc souhaitable ainsi qu'un réexamen de sa dotation budgétaire.
4. Lors de la récente célébration du cinquantenaire du Commissariat général au Plan, le chef de l'Etat a indiqué que l'évaluation des politiques publiques était un des axes de développement prioritaires de l'institution.
Conforté par cette orientation, le Commissariat général au Plan souhaite pouvoir définir une approche commune et travailler en étroite concertation avec le nouvel Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques. Il préconise aussi pour le Commissariat général au Plan une réforme de son statut qui renforce sa crédibilité dans les domaines de la concertation, de la perspective et de l'évaluation.
Pourtant, ce discours en faveur d'une véritable refondation du Plan tranche singulièrement avec l'effritement permanent des crédits affectés au Commissariat général au Plan et aux organismes qui lui sont rattachés ou qu'il subventionne. Ainsi, pour l'OFCE, la loi de finances initiale pour 1996, en baisse de 3 % en francs courants, est inférieure en valeur au niveau effectivement perçu il y a cinq ans. Quant à la subvention accordée à l'IRES, entre 1992 et 1996, elle a chuté de 13,2 % en francs courants.
Constatant ce décalage entre le discours officiel et la réalité, on est en droit de s'interroger sur l'idée même de planification et le rôle du Commissariat général au Plan.
- Au-delà des grandes tirades sur l'utilité de la planification à la française et son besoin de rénovation, la planification ne fait-elle pas définitivement partie d'une époque révolue de l'histoire économique de la France ?
- Même si le Commissariat général au Plan se transforme en un outil de prospective et d'évaluation, ne faut-il pas s'interroger sur la pertinence d'une telle orientation alors qu'il existe déjà de nombreux organismes d'évolution comme le Conseil économique et social, la Cour des Comptes et qu'un Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques vient juste d'être créé ?