B. UNE INFLUENCE CERTAINE SUR LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
1. Les écarts de taux de prélèvements obligatoires entre pays se sont réduits
Les prélèvements obligatoires dans les pays industrialisés
La compétition fiscale internationale n'a pas eu pour conséquence une réduction des prélèvements obligatoires dans le PIB des pays industrialisés.
A l'exception du Royaume-Uni où des prélèvements obligatoires se sont repliés de 3,9 points de PIB, ils ont partout ailleurs, soit stagné, soit légèrement augmenté entre 1985 et 1994.
En moyenne, ils sont passés pour la CEE de 39,6 à 41,4 points du PIB entre 1985 et 1993 et pour l'ensemble des pays de l'OCDE de 36,9 à 38,7 % du PIB.
En 1985, la moyenne des prélèvements dans les pays de l'OCDE était de 36,9 % du PIB, la Suède avec + 13,1 points et le Japon avec - 9,3 points par rapport à cette moyenne étaient les deux pays qui connaissaient les taux de prélèvements les plus contrastés.
En 1993, cette même moyenne étant de 38,7 %, l'écart des deux pays à cette moyenne s'est globalement réduit (+ 11,2 points pour la Suède ; -9,6 points pour le Japon).
Pour la France, l'écart à la moyenne est passé de 7,6 à 5,2 points entre 1985 et 1993.
Un phénomène de convergence du niveau des prélèvements obligatoires doit donc être notée.
Mais des écarts substantiels demeurent. Cependant, la signification du poids des prélèvements obligatoires dans le PIB ne doit pas être exagérée.
a) Les prélèvements obligatoires sont un concept flou
Les comparaisons internationales sur le poids de la fiscalité reposent sur le calcul d'un taux de prélèvements obligatoires rapporté au PIB.
L'Organisation pour la coopération et le développement économique -OCDE- définit les impôts comme " l'ensemble des versements obligatoires effectués sans contrepartie au profit des administrations publiques".
Cette définition pose une série de problèmes :
•
Le départ entre les administrations
publiques et certains organismes est parfois ambigu :
ainsi en
va-t-il pour les organismes de sécurité sociale dont la nature
publique ou privée ne va pas toujours de soi.
Soit l'exemple des systèmes de pensions : certains pays (Royaume-Uni, Allemagne) ont institué un régime de versements obligatoires mais qui peuvent être libérés auprès d'un organisme privé ou public. Dans le premier cas le versement n'est pas comptabilisé comme prélèvement obligatoire tandis qu'il l'est dans l'autre hypothèse alors même que la charge provient d'une même obligation.
•
La frontière entre le "facultatif et
l'obligatoire n'est pas entièrement nette.
Par exemple, en
France, certains versements obligatoires attachés à la
consommation d'un bien sont considérés comme des
prélèvements obligatoires -la TVA- alors que d'autres ne le sont
pas -les redevances de navigation aérienne-.
De la même manière certains versements facultatifs sont en réalité obligatoires : ainsi en Allemagne ou aux Pays-Bas où, au-dessus d'un certain niveau de salaire, l'adhésion aux régimes publics de sécurité sociale est facultative mais, en pratique, presque toujours réalisée.
• Le taux de prélèvements obligatoires
n'est pas indifférent aux modalités institutionnelles de
l'intervention de l'Etat. Que celui-ci pratique la dépense fiscale, les
prélèvements obligatoires seront réduits du montant de
celle-ci. Qu'il choisisse plutôt d'intervenir par la dépense
publique, les prélèvements obligatoires et les dépenses
publiques seront relativement plus élevés.
Ces considérations sont loin d'être théoriques comme le montre d'abord un exemple tiré de deux estimations des prélèvements obligatoires en RFA en 1987 réalisées par l'OCDE. Dans l'une, ceux-ci étaient estimés à 37,6 % du PIB tandis que dans l'autre récapitulatif les recettes fiscales en RFA à partir des comptes nationaux étaient de 41,2 % du PIB.
b) La signification économique du concept n'est que relative
Au-delà de ces difficultés de délimitations statistiques, on doit souligner combien la notion de prélèvements obligatoires peut occulter les réalités économiques. Ainsi, la progression des dépenses de santé est un phénomène qui se rencontre dans les pays développés, même inégalement. Mais la socialisation des dépenses de santé diffère selon les pays si bien que l'impact de leur accroissement en termes de prélèvements obligatoires varie considérablement alors qu'exprimé en termes économiques et sociaux il est sinon identique du moins analogue.
La signification du taux de prélèvements obligatoires est donc souvent moins économique qu'institutionnelle.
En outre, et ceci est lié à cela, les prélèvements obligatoires ne sont pas des prélèvements sans contreparties.
A côté d'un raisonnement sur l'amputation des revenus que provoquent les prélèvements, il faut procéder à un raisonnement sur les revenus qu'ils financent.
L'appréciation de l'effet de la fiscalité sur la compétitivité économique ne peut donc être menée indépendamment de l'appréciation de l'effet sur la compétitivité économique des dépenses publiques.